N° RG 22/01195 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JBRZ
COUR D’APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 22 MARS 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-18-511
Tribunal d’instance de Dieppe du 10 décembre 2019
APPELANTES :
SAS SVH ENERGIE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Cécile HUNAULT-CHEDRU de la SELARL POINTEL & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen
INTIMES :
Monsieur [D] [W]
né le 10 juillet 1979 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Christophe SOLIN de la SELARL CABINET CHRISTOPHE SOLIN, avocat au barreau de Rouen
Madame [S] [L] épouse [W]
née le 2 avril 1984 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Christophe SOLIN de la SELARL CABINET CHRISTOPHE SOLIN, avocat au barreau de Rouen
SA FRANFINANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée et assistée par Me Rose-Marie CAPITAINE, avocat au barreau de Dieppe plaidant par Me CATTELET
SELARL ATHENA
prise en la personne de Me [B] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sasu SVHENERGIE
RCS de Bobigny 833 656 218
[Adresse 3]
[Adresse 3]
non constituée bien que régulièrement assignée par acte d’huissier de justice remis le 21 mars 2022 à personne habilitée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 18 janvier 2023 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre
M. Jean-François MELLET, conseiller,
Mme Magali DEGUETTE, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Catherine CHEVALIER,
DEBATS :
A l’audience publique du 18 janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 mars 2023
ARRET :
REPUTE CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 22 mars 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Suivant bon de commande accepté le 28 septembre 2017, M. [D] [W] a conclu avec la Sas Svh Energie un contrat de vente d’un pack Gse6 pour la somme de
26 290 euros TTC. Il incluait les prestations suivantes :
– la fourniture et l’installation d’une centrale aérovoltaïque, incluant six panneaux photovoltaïques, un pack Air’System, un ballon thermodynamique, une batterie et une autoconsommation,
– la réalisation de démarches administratives auprès de la mairie, de la Drire, de la Dideme, d’Erdf, du Conseil général ou régional, et d’Edf.
Le financement de la somme de 26 290 euros a été prévu par le biais d’un crédit affecté sollicité le même jour auprès de la Sa Franfinance par M. [D] [W] et Mme [S] [L], son épouse.
Les matériels ont été installés le 4 décembre 2017 par la Sas Svh Energie.
Par actes d’huissier de justice des 14 et 16 août 2018, M. et Mme [W] ont fait assigner la Sas Gse Intégration exerçant sous l’enseigne Solution Energie venant aux droits de la Sas Svh Energie et la Sa Franfinance devant le tribunal d’instance de Dieppe. Ils ont demandé la résolution ou l’annulation des contrats de vente et de crédit.
Suivant jugement du 10 décembre 2019, le tribunal a :
– mis hors de cause la société Gse Intégration,
– constaté l’intervention volontaire de la Sas Svh Energie venant aux droits de la société Gse Intégration,
– prononcé la nullité du contrat conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W] et la Sas Svh Energie,
– prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 28 septembre 2017 entre la Sa Franfinance d’une part, et M. [D] [W] et Mme [S] [W], d’autre part,
– ordonné à M. [D] [W] et Mme [S] [W] de mettre à disposition de la Sas Svh Energie l’ensemble des biens, objets du contrat conclu avec cette société,
– ordonné à la Sas Svh Energie de reprendre l’ensemble des matériels installés au domicile de M.[D] [W] et Mme [S] [W] et de remettre les toitures, murs et combles en état dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
– condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] la somme de
23 290 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
– condamné solidairement M. [D] [W] et Mme [S] [W] à verser à la Sa Franfinance la somme de 26 290 euros en restitution du capital prêté, dont à déduire la totalité des sommes versées au titre des échéances de remboursement du prêt,
– condamné la Sas Svh Energie à garantir M. [D] [W] et Mme [S] [W] du paiement des sommes dues à la Sa Franfinance, soit 26 290 euros,
– condamné la Sas Svh Energie aux dépens,
– condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] et Mme [S] [W] la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande de la Sa Franfinance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration du 21 janvier 2020, la Sas Svh Energie a formé un appel contre le jugement.
Celle-ci a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Angers du 23 juin 2021.
Par ordonnance du 22 septembre 2021, la présidente chargée de la mise en état a ordonné l’interruption de l’instance, invité les parties à mettre en cause les organes représentatifs de la liquidation judiciaire de la Sas Svh Energie pour l’audience de mise en état du 9 mars 2022, et dit qu’à défaut de régularisation de la procédure, l’affaire sera radiée.
Par ordonnance du 9 mars 2022, la radiation de cette affaire a été ordonnée en application des articles 376 et 801 du code de procédure civile.
Par acte d’huissier de justice du 21 mars 2022, les époux [W] ont fait assigner la Selarl Athena prise en la personne de Me [B] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Svh Energie aux fins de reprise d’instance et de dénonciation de conclusions.
L’affaire a été réenrôlée le 8 avril 2022.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 23 juillet 2020, la Sas Svh Energie avait demandé de voir en application des articles L.111-1 et suivants, L.221-5, du code de la consommation, 1103 et suivants, 1182, 1224 et suivants du code civil :
– réformer le jugement du tribunal d’instance de Dieppe du 10 décembre 2019 en ce qu’il a :
. prononcé la nullité du contrat conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W] et la Sas Svh Energie,
. prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 28 septembre 2017 entre la Sa Franfinance d’une part, et M. [D] [W] et Mme [S] [W], d’autre part,
. ordonné à M. [D] [W] et Mme [S] [W] de mettre à disposition de la Sas Svh Energie l’ensemble des biens, objets du contrat conclu avec cette société,
. ordonné à la Sas Svh Energie de reprendre l’ensemble des matériels installés au domicile de M. [D] [W] et Mme [S] [W] et de remettre les toitures, murs et combles en état dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
. condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] la somme de
23 290 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
. condamné solidairement M. [D] [W] et Mme [S] [W] à verser à la Sa Franfinance la somme de 26 290 euros en restitution du capital prêté, dont à déduire la totalité des sommes versées au titre des échéances de remboursement du prêt,
. condamné la Sas Svh Energie à garantir M. [D] [W] et Mme [S] [W] du paiement des sommes dues à la Sa Franfinance, soit 26 290 euros,
. condamné la Sas Svh Energie aux dépens,
. condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] et Mme [S] [W] la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau,
– constater la validité du contrat de vente conclu avec M. [D] [W] le 28 septembre 2017,
– dire et juger qu’en tout état de cause les époux [W] ont entendu confirmer leur engagement à son égard et que l’annulation et la résolution du contrat ne sont pas encourues telles que demandées par les époux [W],
– débouter ces derniers de l’ensemble de leurs demandes,
– débouter la Sa Franfinance de ses demandes à son égard,
– à titre subsidiaire, si par impossible la cour d’appel faisait droit aux demandes de mise à néant de l’opération, condamner les époux [W] à lui payer la somme de
3 000 euros au titre de la remise commerciale et à la restitution de l’ensemble du matériel,
– en tout état de cause, condamner les époux [W] au paiement d’une somme de
3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Elle précisait que c’était à tort que le tribunal avait prononcé la nullité du contrat pour irrégularités formelles ; que le bon de commande contenait les informations essentielles sur les biens vendus ; que la loi n’impose pas au professionnel d’y indiquer toutes les caractéristiques des biens et services proposés ; que M. et Mme [W] ne démontraient pas avoir été trompés sur celles-ci ; qu’elle avait parfaitement rempli son obligation d’information ; que l’article L.111-1 du code de la consommation n’imposait pas l’indication du prix unitaire de chaque matériel vendu ; que la mention du prix global de 26 290 euros permettait aux époux [W] de le comparer avec celui d’entreprises concurrentes ; que l’information sur le droit de recourir à un médiateur avait été donnée aux termes de l’article 13 des conditions générales de vente et, celle sur l’assurance de responsabilité professionnelle, aux termes de l’article 5 ; que M. et Mme [W] n’avaient à aucun moment sollicité la communication de l’information sur ladite assurance, ce qui laissait à penser qu’ils l’avaient reçue, qu’ils pouvaient d’ailleurs la trouver sur son site internet.
Elle ajoutait en tout état de cause que cette nullité relative avait été couverte par la volonté de M. et Mme [W] de confirmer le bon de commande ; qu’ils ne s’étaient pas rétractés, avaient laissé s’exécuter les prestations et autorisé sans réserve la Sa Franfinance à décaisser les fonds, n’avaient formulé aucune demande d’information complémentaire sur le matériel, ni aucune réclamation à la réception de leur facture, et utilisaient toujours l’installation ; que les dispositions du code de la consommation étaient spécifiées sur le bon de commande de sorte que M. et Mme [W] étaient parfaitement informés de la nullité résultant d’irrégularités au regard de ces textes.
Elle indiquait ensuite que le fait de solliciter à titre principal la résolution du contrat manifestait la confirmation par M. et Mme [W] de la validité de la vente ; que l’examen de leurs factures Edf montrait une baisse de leur consommation d’électricité ; que leurs habitudes de vie (naissance d’un enfant en décembre 2016) avaient nécessairement changé ; qu’ils ne démontraient pas un manquement de sa part, ni qu’il serait suffisamment grave, ce qui exclut la résolution du contrat.
Son liquidateur judiciaire, la Selarl Athena prise en la personne de Me [B] [N], assignée à personne habilitée, n’a pas constitué avocat.
Par dernières conclusions notifiées le 11 décembre 2022 et signifiées à la Selarl Athena prise en la personne de Me [N], ès qualités le 9 décembre 2022,
M. [D] [W] et Mme [S] [L], son épouse, sollicitent, en vertu des articles L.111-1 et suivants, L.121-17, L.312-48 et R.111-12 du code de la consommation, 1182, 1225, et suivants du code civil, de :
– voir réformer le jugement intervenu devant le tribunal d’instance de Dieppe,
statuant à nouveau,
à titre principal, de voir :
– prononcer la résolution des contrats de vente et de crédit,
– déclarer qu’ils ne sont pas tenus de rembourser la somme de 26 290 euros avec intérêts au profit de la Sa Franfinance faute pour la Sas Svh Energie d’avoir achevé ses devoirs ou livré une installation répondant à sa destination,
– condamner la Sa Franfinance à leur restituer l’intégralité des sommes prélevées sur leur compte bancaire (14 333,22 euros au 19 janvier 2022 ainsi que toute autre somme prélevée après cette date jusqu’au prononcé de l’arrêt),
à titre subsidiaire, de voir :
– confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat de vente et du contrat de crédit qui lui est accessoire,
– infirmer le surplus et le réformant, déclarer qu’ils ne sont pas tenus de rembourser la somme de 26 290 euros avec intérêts au profit de la Sa Franfinance,
– condamner la Sa Franfinance à leur restituer l’intégralité des sommes prélevées sur leur compte bancaire (14 333,22 euros au 19 janvier 2022 ainsi que toute autre somme prélevée après cette date jusqu’au prononcé de l’arrêt),
à titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour d’appel refuserait de les exonérer de rembourser le crédit à la Sa Franfinance,
– voir condamner à n’en restituer qu’une partie, soit la somme de 2 629 euros, laquelle viendra en déduction des échéances déjà versées et la Sa Franfinance devra alors leur rembourser les échéances trop perçues,
en tout état de cause, de voir
– déclarer qu’ils devront tenir à la disposition de la Selarl Athena prise en la personne de Me [B] [N], ès qualités les matériels vendus durant un délai de deux mois et que, passé ce délai, ils pourront les porter dans un centre de tri à leurs frais personnels,
– condamner la Sa Franfinance au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens à leur profit.
Ils font valoir que l’installation mise en oeuvre par la Sas Svh Energie ne permet aucune autoconsommation car depuis ils continuent de régler leur factures d’électricité sans changement dans leur consommation ; que la première pompe à chaleur installée a été changée en mai 2018, mais que la seconde a aussi dysfonctionné et totalement en décembre 2021 ; que le défaut de destination conforme des matériels est indiscutable ; que le contrat de vente conclu avec la Sas Svh Energie doit être résolu.
Ils indiquent à titre subsidiaire que le bon de commande établi lors du démarchage à domicile ne renseigne pas sur les caractéristiques essentielles des biens vendus et fournis (leur coût unitaire, le numéro de TVA de la venderesse, le droit de recourir au médiateur de la consommation, les coordonnées et le site internet de celui-ci, les coordonnées de l’assureur responsabilité professionnelle de la venderesse) ; que
M. [D] [W] n’a jamais eu connaissance des vices de forme affectant le contrat de vente puisqu’aucun des articles L.111-1 et suivants du code de la consommation n’y est reproduit ; que ces vices ne peuvent pas être purgés par le fait d’avoir laisser la vente s’exécuter ; que le contrat de vente sera annulé.
Ils ajoutent que la Sa Franfinance n’a pas vérifié la validité du contrat de vente avant de débloquer le crédit et y a procédé à l’appui d’une demande de financement totalement illisible ; que ces fautes leur causent nécessairement un préjudice dans la mesure où on ignore si la venderesse a souscrit une assurance décennale si bien qu’ils doivent déposer la pompe à chaleur à leurs frais à l’instar des autres matériels ; que ceux-ci ne répondent pas à leur destination ; que la faillite de la venderesse empêche tout recours contre elle ; qu’ils doivent remettre leur domicile en état à leurs frais et que la Sa Franfinance ne démontre pas avoir réglé la venderesse ; que la Sa Franfinance, qui n’a rien fait pour les protéger, doit être privée de sa créance de restitution et leur rendre l’intégralité des sommes prélevées.
Par dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2022, la Sa Franfinance demande de voir en application des articles L.312-55 et L.312-56 du code de la consommation, 1103 et suivants du code civil :
à titre principal,
– réformer le jugement du tribunal d’instance de Dieppe du 10 décembre 2019 en ce qu’il a :
. prononcé la nullité du contrat conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W] et la Sas Svh Energie,
. prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 28 septembre 2017 entre la Sa Franfinance d’une part, et M. [D] [W] et Mme [S] [W], d’autre part,
. ordonné à M. [D] [W] et Mme [S] [W] de mettre à disposition de la Sas Svh Energie l’ensemble des biens, objets du contrat conclu avec cette société,
. ordonné à la Sas Svh Energie de reprendre l’ensemble des matériels installés au domicile de M. [D] [W] et Mme [S] [W] et de remettre les toitures, murs et combles en état dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
. condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] la somme de
23 290 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
. condamné solidairement M. [D] [W] et Mme [S] [W] à verser à la Sa Franfinance la somme de 26 290 euros en restitution du capital prêté, dont à déduire la totalité des sommes versées au titre des échéances de remboursement du prêt,
. condamné la Sas Svh Energie à garantir M. [D] [W] et Mme [S] [W] du paiement des sommes dues à la Sa Franfinance, soit 26 290 euros,
. condamné la Sas Svh Energie aux dépens,
. condamné la Sas Svh Energie à verser à M. [D] [W] et Mme [S] [W] la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
. rejeté la demande de la Sa Franfinance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
statuant de nouveau,
. débouter M. et Mme [W] de toutes leurs demandes,
. condamner conjointement et solidairement ces derniers au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens d’appel,
– à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour d’appel confirmerait la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté :
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
. condamné solidairement M. [D] [W] et Mme [S] [W] à verser à la Sa Franfinance la somme de 26 290 euros en restitution du capital prêté, dont à déduire la totalité des sommes versées au titre des échéances de remboursement du prêt,
. condamné la Sas Svh Energie aux dépens,
– débouter M. et Mme [W] de toutes leurs demandes,
– condamner ces derniers à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel,
à titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour d’appel prononcerait la résolution du contrat principal et la nullité du contrat de crédit affecté :
– débouter M. et Mme [W] de leur demande tendant à ne pas être tenus de rembourser la somme de 26 290 euros à son profit faute pour la Sas Svh Energie d’avoir achevé ses devoirs ou livré une installation répondant à sa destination et de leur demande tendant à ce qu’elle soit condamnée à leur restituer l’intégralité des sommes prélevées sur leur compte,
– condamner solidairement M. et Mme [W] à lui verser la somme de 26 290 euros en restitution du capital prêté, dont à déduire la totalité des sommes versées au titre des échéances de remboursement du prêt,
– condamner ces derniers à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d’appel.
Elle précise que le bon de commande du 28 septembre 2017 contenait les caractéristiques essentielles des biens vendus, notamment le prix global des prestations qui était suffisant, que la Sas Svh Energie a parfaitement rempli son obligation d’information à l’égard des époux [W], qu’en tout état de cause, la nullité relative est couverte par l’exécution volontaire et non équivoque du contrat par
M. [D] [W] qui ne s’est pas rétracté, a signé sans réserve l’attestation de fin de travaux, a rempli une fiche de satisfaction, ainsi que deux fiches d’intervention postérieurement, a autorisé sans réserve le déblocage des fonds, a utilisé et continue d’utiliser l’installation.
Elle ajoute à titre subsidiaire que le bon de commande n’étant pas entaché d’irrégularités et M. [D] [W] ayant réceptionné sans restriction les biens financés et conformes au bon de commande le 5 décembre 2017, elle n’a commis aucune faute en procédant au déblocage des fonds que ce dernier avait autorisé aux termes d’une demande de financement qui n’est pas illisible, qu’aucune faute ne peut être retenue à son encontre ; qu’elle n’est pas responsable des difficultés ultérieures sur la pompe à chaleur lesquelles ont d’ailleurs été résolues, ni de la faillite de la venderesse ; que les époux [W] n’indiquent pas quel préjudice aurait été causé par sa prétendue faute ; que rien ne justifie la demande de dispense de remboursement du prêt.
Elle expose, concernant la demande de résolution du contrat de vente pour défaut de destination conforme des matériels, que la rentabilité économique n’est considérée comme caractéristique essentielle que si elle a été prévue dans le contrat, qu’un constat d’huissier de justice n’est pas suffisant pour prouver ledit défaut ; que la Sas Svh Energie avait communiqué son attestation d’assurance de garantie décennale auprès de la compagnie Qbe Insurance que les époux [W] n’ont pas appelée à la cause ; qu’elle n’a pas commis de faute dans l’exécution de son obligation de paiement de la Sas Svh Energie.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 28 décembre 2022.
MOTIFS
Sur la résolution du contrat conclu avec la Sas Svh Energie
L’article 1217 du code civil en vigueur au jour de la conclusion du contrat prévoit que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut provoquer la résolution du contrat
L’article 1224 du même code précise que la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
Une installation aérovoltaïque est nécessairement acquise dans l’objectif de produire de l’électricité. La plaquette commerciale de la Sas Svh Energie prévoit une réduction jusqu’à 40 % des besoins en chauffage, une autoconsommation et/ou une revente du surplus de la production électrique à Edf, et une réduction des besoins en eau chaude de 75 %. Le bon de commande vise expressément une autoconsommation dans la désignation du pack.
Or, M. et Mme [W] justifient, au moyen de leurs factures d’électricité entre 2014 et 2021, qu’ils n’ont que peu produit d’électricité entre 2018 et 2020, continuant à consommer de l’électricité distribuée par Edf, et plus du tout produit d’électricité à partir de 2021, année où la seconde pompe à chaleur installée en mai 2018 par la Sas Svh Energie a été arrêtée. Aux termes de son procès-verbal du 21 décembre 2021, Me [Z], huissier de justice, a constaté que la pompe à chaleur dysfonctionnait, qu’une fuite provenait du caisson de droite de celle-ci, et que dans le salon séjour existaient deux taches auréolées au niveau du plafond. Ces constatations ne sont pas remises en cause par la preuve contraire.
L’équipement aérovoltaïque, qui a été livré et installé le 4 décembre 2017, ne présente pas les qualités requises de fonctionnement attendues par les acquéreurs et annoncées par la Sas Svh Energie.
Ces manquements graves justifient de prononcer la résolution du contrat conclu le 28 septembre 2017. La décision du tribunal ayant prononcé la nullité de ce contrat et ayant ordonné à M. et Mme [W] de mettre les matériels, objets du contrat, à la disposition de la Sas Svh Energie sera infirmée. L’obligation de reprise des matériels pèsera sur le liquidateur judiciaire de celle-ci sans que les autres modalités fixées par le premier juge ne soient modifiées.
Sur la résolution du contrat conclu avec la Sa Franfinance
L’article L.312-55 du code de la consommation dispose que le contrat principal est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Le crédit affecté conclu le 28 septembre 2017 avec la Sa Franfinance était destiné à financer le contrat principal conclu avec la Sas Svh Energie. La résolution de ce dernier entraîne la résolution de plein droit du premier. Elle sera donc prononcée. La décision du premier juge ayant prononcé la nullité de ce contrat sera infirmée.
Pour s’opposer à la restitution du montant du crédit à la Sa Franfinance et solliciter le remboursement des sommes déjà versées, les époux [W] mettent en cause la responsabilité contractuelle de celle-ci.
– Sur le défaut de vérification de la régularité formelle du contrat principal
Le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d’informer l’emprunteur d’une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer. S’il a versé les fonds, le prêteur fautif peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
L’ancien article L.221-9 du code de la consommation dans sa version applicable au présent litige précise que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L.221-5.
Selon ce texte, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2.
L’ancien article L.111-1 du code précité dans sa version applicable au présent litige vise les informations suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
2° le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L.112-4,
4° les informations relatives à l’identité, aux coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et aux activités du professionnel, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles,
6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
L’article L.112-1 du code précité précise que tout vendeur de produit ou tout prestataire de services informe le consommateur, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, sur les prix et les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l’économie, après consultation du Conseil national de la consommation.
L’article L.616-1 du code précité prévoit que tout professionnel communique au consommateur, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat, les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève.
Selon l’article R.616-1 du code précité, en application de l’article L.616-1, le professionnel communique au consommateur les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation dont il relève, en inscrivant ces informations de manière visible et lisible sur son site internet, sur ses conditions générales de vente ou de service, sur ses bons de commande ou, en l’absence de tels supports, par tout autre moyen approprié. Il y mentionne également l’adresse du site internet du ou de ces médiateurs.
L’article R.111-2 du code précité dans sa version applicable au présent litige indique enfin que, pour l’application des dispositions de l’article L.111-2, le professionnel communique au consommateur ou met à sa disposition les informations suivantes :
5° s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
9° l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
En l’espèce, les époux [W] soulignent que le bon de commande du 28 septembre 2017 ne mentionne pas le coût unitaire de chaque matériel, mais uniquement le prix global sans détail de 26 290 euros, de sorte que M. [W] n’a pas pu être en mesure de connaître le prix réel des matériels et services rendus, ni de les comparer auprès de concurrents.
Cependant, aucun texte n’exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien offert ou du service proposé. Le premier juge, qui a qualifié son défaut d’irrégularité, a ajouté à l’article L.111-1 une condition qu’il ne comporte pas.
En revanche, le bon de commande n’indique pas la composition du pack Air’System, soit la marque, le modèle, la puissance et les dimensions de la pompe à chaleur.
M. [W] n’a donc pas été en mesure d’en connaître les caractéristiques essentielles.
Il ne mentionne pas davantage le numéro de TVA de la Sas Svh Energie.
En outre, les mentions figurant au paragraphe 13 des conditions générales de vente, relatif au règlement des litiges, n’indiquent pas les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont le professionnel relève.
Enfin, la Sas Svh Energie n’a pas renseigné M. [W] sur son assureur responsabilité professionnelle. Elle ne démontre pas lui avoir remis l’attestation d’assurance RC décennale de la société Qbe Insurance Europe Limited versée aux débats par la Sa Franfinance.
En définitive, la Sa Franfinance a omis de vérifier la régularité formelle du contrat principal.
Elle oppose à M. [W] le fait qu’il l’a exécuté volontairement, ce qui couvre les irrégularités relevées ci-dessus.
Toutefois, elle n’établit pas que ce dernier en avait connaissance et a eu l’intention de les réparer par son exécution du contrat. La seule reproduction de l’article L.111-1 dans le bon de commande n’est pas suffisante à en apporter la preuve.
Dès lors, la faute de la Sa Franfinance est caractérisée.
Mais, les époux [W] ne démontrent pas le lien de causalité entre cette faute et leur préjudice né des dysfonctionnements postérieurs des matériels fournis et installés, notamment de la pompe à chaleur, tels que décrits ci-dessus qui relèvent de la seule responsabilité contractuelle de la Sas Svh Energie. Il en est de même à l’égard de la procédure de liquidation judiciaire ouverte contre celle-ci le 23 juin 2021, dont la Sa Franfinance ne peut pas être tenue pour responsable.
Sur le défaut de vérification de l’exécution complète du contrat principal
L’article L.312-48 du code de la consommation prévoit que les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.
Le prêteur doit donc s’assurer de l’exécution complète du contrat principal et ne délivrer les fonds qu’après une telle exécution, sous peine de commettre une faute.
Dans le cas présent, la Sa Franfinance a décidé du déblocage des fonds au vu de l’attestation de livraison et de demande de financement dénuée de réserve, datée, signée, et complétée par la mention ‘Bon pour Accord’, par M. [W] le 5 décembre 2017. Celui-ci n’explicite pas l’illisibilité de ce document. La Sa Franfinance a également été destinataire d’un mandat de prélèvement Sepa valablement rempli et signé par M. [W] le même jour. Enfin, selon la fiche de satisfaction qu’il a complétée à l’issue de l’installation du 4 décembre 2017, il a donné des avis excellent ou satisfaisant sur les modalités de réalisation de la prestation de la Sas Svh Energie.
Ces éléments sont propres à caractériser l’exécution complète du contrat principal, de sorte que la Sa Franfinance a légitimement adressé le montant du crédit à la Sas Svh Energie. Les époux [W] n’ont d’ailleurs pas contesté postérieurement l’existence de ce contrat de crédit.
Ils seront donc condamnés solidairement à restituer à la Sa Franfinance la somme de 26 290 euros, de laquelle sera déduite la totalité des mensualités réglées à ce jour. Leur prétention tendant à voir limiter leur obligation à 10 % dont ils n’explicitent pas le fondement juridique sera rejetée. La décision du premier juge ayant statué en ce sens sera confirmée.
Sur la demande subsidiaire de la Sas Svh Energie
En condamnant la Sas Svh Energie à verser aux époux [W] la somme de
23 290 euros, et non pas celle de 26 290 euros, le premier juge a pris en compte par compensation la remise commerciale de 3 000 euros accordée par chèque à ces derniers par la Sas Svh Energie le 21 février 2018.
La demande de condamnation présentée par cette dernière ne peut être retenue puisqu’en raison de la procédure collective, elle n’a plus la possibilité de bénéficier à son profit de condamnations, le liquidateur judiciaire ne s’en étant pas emparée.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais de procédure seront confirmées.
Partie perdante, la Selarl Athena prise en la personne de Me [N], ès qualités sera condamnée aux dépens d’appel.
Il n’est pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais de procédure d’appel. Elles seront déboutées de leurs prétentions contraires.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe :
Dans les limites de l’appel formé,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a :
– prononcé la nullité du contrat conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W] et la Sas Svh Energie,
– prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 28 septembre 2017 entre la Sa Franfinance d’une part, et M. [D] [W] et Mme [S] [W], d’autre part,
– ordonné à M. [D] [W] et Mme [S] [W] de mettre à disposition de la Sas Svh Energie l’ensemble des biens, objets du contrat conclu avec cette société,
Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et y ajoutant,
Prononce la résolution du contrat conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W] et la Sas Svh Energie,
Prononce la résolution du contrat de crédit affecté conclu le 28 septembre 2017 entre M. [D] [W], Mme [S] [L] épouse [W], et la Sa Franfinance,
Ordonne à M. [D] [W] et à Mme [S] [L] épouse [W] de mettre à la disposition de la Selarl Athena prise en la personne de Me [B] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Svh Energie l’ensemble des biens, objets du contrat conclu avec cette société,
Déboute les parties du surplus des demandes,
Condamne la Selarl Athena prise en la personne de Me [B] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Svh Energie aux dépens d’appel.
Le greffier, La présidente de chambre,