Nullité de contrat : 21 mars 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 21/00115

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Nullité de contrat : 21 mars 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 21/00115

HP/SL

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile – Première section

Arrêt du Mardi 21 Mars 2023

N° RG 21/00115 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GTID

Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON LES BAINS en date du 08 Décembre 2020

Appelante

Mme [X] [S] épouse [G]

née le 27 Novembre 1970 à [Localité 3] ([Localité 3]), demeurant [Adresse 2]

Représentée par la SELARL AC AVOCATS, avocats au barreau de THONON-LES-BAINS

Intimée

SA GENERALI VIE, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par la SELARL BOLLONJEON, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SCP LEMONNIER- DELION- GAYMARD – RISPAL, avocats plaidants au barreau de PARIS

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Date de l’ordonnance de clôture : 12 Décembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 janvier 2023

Date de mise à disposition : 21 mars 2023

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Composition de la cour :

Audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, par Mme Hélène PIRAT, Présidente de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Madame Inès REAL DEL SARTE, Conseiller, avec l’assistance de Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

– Mme Hélène PIRAT, Présidente,

– Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

– Mme Myriam REAIDY, Conseillère

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Faits et Procédure

Mme [X] [S] épouse [G], gérante de la société Europe Affiche et Signalétique adhérait au contrat d’assurance Prévoyance Plan Gérant Majoritaire auprès de la société Générali Vie en date du 24 juillet 2015. Ce contrat couvrait les risques décès – perte totale et irréversible d’autonomie – incapacité de travail et d’invalidité. Préalablement, en date du 1er juillet 2015, Mme [X] [G] remplissait le questionnaire de santé intégré audit contrat, répondant à l’ensemble des questions par la négative.

À la suite d’un arrêt de travail survenu le 21 janvier 2017 en raison d’un accident de ski ayant entraîné notamment une fracture à l’avant-bras, Mme [X] [G] sollicitait auprès de la société Générali Vie la mise en oeuvre de sa garantie incapacité de travail. Celle-ci lui versait des indemnités journalières jusqu’au 31 août 2017, puis après expertise de contrôle confiée au Dr'[V] et investigations médicales, ayant appris l’existence d’un antécédent de santé, portant sur la glande thyroïde, ainsi que des épisodes de polyarthrite constatés le 25 septembre 2014 et le 29 juin 2015, la société Générali Vie cessait le versement des indemnités et sollicitait le remboursement des prestations déjà versées.

Par exploit d’huissier en date du 21 novembre 2018, Mme [X] [G] assignait la société Générali Vie devant le tribunal judiciaire de Thonon-les-bains aux fins de la voir notamment condamner au paiement de la somme de 11’424,96’euros au titre de la mise en oeuvre de la garantie incapacité et de la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice moral.

Par jugement rendu le 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Thonon-les-bains a :

– prononcé la nullité du contrat d’assurance souscrit par Mme [G] auprès de la société Générali Vie en date du 24 juillet 2015 ;

– en conséquence, débouté Mme [G] de l’ensemble de ses demandes ;

– condamné Mme [G] à verser à la société Générali Vie la somme de 17’916,79 euros indûment perçue au titre du sinistre du 21 janvier 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2018 ;

– condamné Mme [G] à verser à la société Générali Vie la somme de 1 000’euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné Mme [G] aux dépens.

Le tribunal a retenu notamment que :

– Mme [G] n’a pas répondu avec exactitude et sincérité aux questions posées dans le questionnaire de l’assureur, commettant une fausse déclaration qui ne pouvait qu’être intentionnelle dans la mesure où elle venait de présenter des symptômes de polyarthrite lorsqu’elle a rempli ledit document, il en est de même concernant la question relative aux antécédents d’affections endocriniennes, l’hyperthyroïdie étant également précisée dans le questionnaire médical entre parenthèses,

– ces fausses déclarations, par leur multiplicité et le caractère récent pour l’une des pathologies omises, ne pouvaient que changer l’objet du risque ou à tout le moins en diminuer l’opinion pour l’assureur.

Par déclaration au Greffe en date du 21 janvier 2021, Mme [X] [G] interjetait appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Prétentions des parties

Par dernières écritures en date du 3 novembre 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [X] [G] sollicitait l’infirmation du jugement déféré en toutes ses dispoistions et demandait à la cour, statuant à nouveau, de :

– condamner la société Générali Vie à payer à Mme [X] [G] la somme de 11’424,96’euros au titre de la mise en ‘uvre de la garantie incapacité pour la période du 1er septembre 2017 au 22 janvier 2018 ;

– condamner la société Générali Vie à payer à Mme [X] [G] la somme de 2 000’euros au titre de son préjudice moral ;

– débouter la société Générali Vie de toutes ses demandes plus amples ou contraires, tant principales que subsidiaires ;

– condamner la société Générali Vie à payer à Mme [X] [G] la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, tant de première instance, que d’appel.

Au soutien de ses prétentions, Mme [X] [G] faisait valoir notamment que :

– le questionnaire santé ne concernait pas les garanties santé mais était attaché au plan de prévoyance sur les garanties retraite

– sur le fond, elle avait répondu sincèrement aux questions, sa maladie de Basedow était guérie depuis 2002, elle n’avait pas de suivi par un spécialiste et sa polyarthrite n’avait pas encore été diagnostiquée en juillet 2015. Ses analyses sanguines étaient négatives. En outre, la question n°2 du questionnaire médical n’invitait pas à faire état de simples symptômes. Par ailleurs, ce questionnaire n’évoquait pas la question de la surveillance médicale ;

– la société Générali Vie ne démontrait pas sa mauvaise foi ni en quoi l’objet du risque aurait été modifié ;

– elle disait ne pas s’être opposée à la demande de levée du secret médical ;

– l’assureur ne pouvait pas solliciter l’exclusion de la garantie sur le fondement de l’article L113-9 du code des assurances.

Par dernières écritures en date du 16 juillet 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Générali Vie sollicitait de la cour de :

A titre principal,

– confirmer le jugement entrepris en l’intégralité de ses dispositions,

A titre subsidiaire,

Si par impossible la cour estimait que les fausses déclarations de Mme [G] n’auraient pas été commises de mauvaise foi, vu l’article L113-9 du code des assurances, constatant que, dûment informé, l’assureur aurait supprimé les garanties invalidité et incapacité, constatant, par conséquent, que si l’adhésion à l’assurance n’est pas nulle, aucune indemnisation ne peut être due pour ce sinistre,

– débouter Mme [G] de l’intégralité de ses demandes ;

– condamner à titre reconventionnel Mme [G] au remboursement de la somme de 17’916,79’euros indûment perçue au titre du sinistre du 21 janvier 2017, avec intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 3 avril 2018 ;

A titre très subsidiaire,

Si par impossible la cour de céans ne s’estimait pas suffisamment informé,

– ordonner une expertise médicale ;

En tout état de cause

– débouter Mme [G] de toutes autres demandes ;

– condamner Mme [X] [G] à verser à la société Générali Vie la somme de 3 000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens avec pour ceux d’appel application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Bollonjeon Arnaud Bollonjeon, avocats associés.

Au soutien de ses écritures, la société Générali Vie soutenait notamment que :

– tous les antécédents de santé étaient, par nature, des circonstances susceptibles d’intéresser l’assureur et l’assuré devait par conséquent les déclarer tous dans la limite du questionnaire ;

– en ayant répondu non à toutes les questions, Mme [X] [G] avait intentionnellement commis de fausses déclarations puisqu’elle avait été atteinte d’une affection endocrinienne et qu’elle souffrait d’une affection des articulations, peu important pour cette dernière que le diagnostic n’eût pas encore été posé, dès lors que Mme [X] [G] avait déjà souffert de deux épisodes de cette affection en 2014 et deux jours avant la souscription du contrat ;

– si ces affections avaient été portées à sa connaissance, elle aurait soumis Mme [X] [G] à un examen médical approfondi à la suite duquel elle aurait refusé le risque ou elle l’aurait accepté qu’avec des restrictions de garanties conséquentes ;

– le questionnaire santé rempli par Mme [X] [G] concernait bien la garantie prévoyance qui couvrait le risque incapacité de travail ;

– Mme [X] [G] n’avait pas accepté expressément la levée du secret médical ce qui ne lui permettait pas de verser aux débats les éléments transmis au médecin conseil et à l’expert qu’elle avait mandaté, le Dr [V], la cour de cassation ayant décidé que l’assureur était dispensé d’exécuter son engagement s’il était établi une opposition de l’assuré sans motif légitime ;

– en cas d’application de l’article L113-9, elle aurait supprimé les garanties invalidité et incapacité, de sorte qu’elle ne devait aucune prestation et que Mme [X] [G] devait lui restituer l’intégralité des prestations déjà servies.

Une ordonnance en date du 12 décembre 2022 clôturait l’instruction de la procédure et l’affaire était plaidée à l’audience du 10 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience ainsi qu’à la décision entreprise.

MOTIFS ET DÉCISION

Mme [X] [G] a souscrit le 1er juillet 2015 un contrat de prévoyance n°376185619 auprès de la société Générali Vie couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d’autonomie, incapacité de travail et d’invalidité. Au moment de cette souscription, elle a rempli un questionnaire de santé en répondant négativement à toutes les questions posées. Après son accident de ski survenu le 21 janvier 2017, la société Générali Vie lui a a réglé les indemnités journalières et pris en charge les cotisations d’assurance jusqu’au 31 août 2027, puis, ayant découvert qu’elle avait été atteinte quinze ans auparavant de la maladie de Basedow et qu’elle souffrait désormais de polyarthrite, a cessé tout règlement et a sollicité le remboursement des sommes versées.

I – Sur l’application du questionnaire santé à la mobilisation de garantie en cause

Les prestations d’indemnité journalière sollicitées par Mme [X] [G] le sont en vertu de son contrat Prévoyance n°76185619 garantie ‘incapacité de travail’ convention n°191523. Ce contrat, produit aux débats par la société Générali Vie, comporte à la page 4 la mention ‘je certifie avoir répondu à toutes les questions du questionnaire de santé portant la référence n°020190950588028…’. La convention n°191523 traite la prévoyance dont l’incapacité temporaire totale de travail (titre 4 article 18) tandis que les garanties santé sont concernées par la convention n°191524 non visée dans le contrat Prévoyance. Par ailleurs, dans la notice d’information que Mme [X] [G] a reconnu avoir reçu, il est spécifié dans le glossaire la définition des garanties prévoyance et celle de la garantie santé, laquelle comprend les frais médicaux, chirugicaux et de maternité.

En conséquence, la mention figurant dans le questionnaire santé rempli le 1er juillet 2015 n°020190950588028 selon laquelle ‘ce dernier (le questionnaire) ne sera pas utilisé pour les garanties santé éventuellement souscrites pour lesquelles aucun questionnaire médical n’est demandé’ concerne bien les garanties prévoyance et non les garanties santé qui ne sont pas mobilisées en l’espèce contrairement à ce que soutient Mme [X] [G].

II – Sur l’annulation du contrat

Selon l’article L 113-2 al 1 2°du code des assurances, ‘l’assuré est obligé :

2° De répondre exactement aux questions posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l’assureur l’interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les risques qu’il prend en charge ;’

Par ailleurs, l’article L113-8 du même code prévoit ‘Indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l’article L. 132-26, le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre.

Les primes payées demeurent alors acquises à l’assureur, qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts.

Les dispositions du second alinéa du présent article ne sont pas applicables aux assurances sur la vie.’

Enfin, l’article L113-9 du même code prévoit que ‘L’omission ou la déclaration inexacte de la part de l’assuré dont la mauvaise foi n’est pas établie n’entraîne pas la nullité de l’assurance.

Si elle est constatée avant tout sinistre, l’assureur a le droit soit de maintenir le contrat, moyennant une augmentation de prime acceptée par l’assuré, soit de résilier le contrat dix jours après notification adressée à l’assuré par lettre recommandée, en restituant la portion de la prime payée pour le temps où l’assurance ne court plus.

Dans le cas où la constatation n’a lieu qu’après un sinistre, l’indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés’.

Mme [X] [G] a rempli le questionnaire médical que lui a soumis la société Générali Vie lors de son adhésion en répondant par la négative à l’ensemble des questions y compris à la question suivante :’ Souffrez-vous ou avez-vous souffert d’une affection citée ci-dessous » et plus particulièrement aux items : affection des os, des muscles et des articulations (notamment arthrose, sciatique, lombalgies, polyarthrite, fibromalgie) et affections endocriniennes ou du métabolisme (notamment diabète, cholestérol, hypo ou hyperthyroïdie, goutte) et en déclarant : ‘je certifie que les réponses figurant sur le présent document sont sincères et complètes et j’affirme n’avoir rien dissimulé qui pourrait induire en erreur l’assureur sur le risque à assurer. J’ai pleinement conscience que dans le cas contraire, j’aurais commis des réticences et fausses déclarations pouvant entraîner la nullité de l’assurance (article L113-8 du code des assurances)’, clause au demeurant reprise dans le contrat d’adhésion page 4. Mme [X] [G] a daté et signé le questionnaire médical.

Il est établi et non contesté que Mme [X] [G] a été atteinte de la maladie de Basedow (thyroïde) en 2000 traitée pendant 18 mois et qu’elle a présenté des symptômes de polyarthrite le 25 septembre 2014 et le 29 juin 2015 ce qu’elle n’a donc pas mentionné sur le questionnaire de santé.

Seul le questionnaire de santé permettant à l’assureur d’apprécier le risque qu’il s’apprête à garantir, celui-ci doit être renseigné avec le plus grand soin et être le strict reflet de la réalité, ainsi que le rappellent son en-tête et les dispositions de l’article L113-2 du code des assurances.

Par ailleurs, l’absence de lien de cause à effet entre l’affection non déclarée et la pathologie pour laquelle la garantie est sollicitée, est inopérante dès lors qu’elle ne constitue pas un critère visé à l’article L113-8 précité, lequel précise au contraire que l’absence de lien n’a aucune incidence sur l’application de la sanction.

Cependant, conformément aux dispositions de l’article 2274 du code civil, la bonne foi est présumée et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi, de la prouver.

En l’espèce, s’agissant de la maladie de Basedow, Mme [X] [G], atteinte de cette affection le 21 août 2000, a été soignée pendant 18 mois et l’endocrinologue qui l’a suivie a indiqué, par certificat en date du 2 août 2021, qu’elle avait été guérie en 2002 et qu’il ne l’avait plus revue depuis septembre 2008, sachant que la doctoresse généraliste de Mme [X] [G], Mme [F], avait précisé que sa patiente avait un simple suivi annuel. Compte tenu de l’ancienneté de cette affection qui s’était déclarée 21 ans auparavant, alors que Mme [X] [G] était âgée de trente ans, et qu’elle avait été guérie dans un temps relativement court, avec un traitement médicamenteux classique, sans suivi particulier, il n’est pas établi qu’elle ait sciemment dissimulé cette affection lors de la réponse au questionnaire médical, d’autant que celui-ci demandait de préciser en cas de réponse positive ‘la date de début, le traitement, les séquelles ou rechutes éventuelles’ ce qui pouvait laisser supposer qu’une affection lointaine, guérie, qui n’avait pas entraîné de rechute ou de séquelles et dont le traitement n’était plus en cours n’avait pas à être signalée.

S’agissant de la polyarthrite, selon les renseignements médicaux donnés par la Dr [F], Mme [X] [G] a eu un premier symptôme le 25 septembre 2014 puis plus aucun avant le second le 29 juin 2015. Certes ce second épisode s’est produit 3 jours avant la souscription du contrat, mais il n’est pas démontré qu’un traitement et des investigations médicales aient été mis en place ce moment-là. D’ailleurs, la Dr [F] a précisé que Mme [X] [G] n’a consulté un spécialiste qu’un an plus tard ou presque soit le 26 mai 2016. Surtout, dans un certificat médical en date du 19 janvier 2018, cette même doctoresse précisait que la polyarthrite n’avait été ‘découverte’qu’en décembre 2015 et que jusqu’à cette période, Mme [X] [G] n’avait aucun ‘élément de soin’. En conséquence, il ne peut être reproché à Mme [X] [G] ne pas avoir indiqué sur le questionnaire médical souffrir de polyarthrite alors qu’elle n’a eu aucun traitement avant le diagnostic posé seulement en décembre 2015 soit 7 mois après qu’elle avait rempli le questionnaire litigieux. La société Générali Vie sous-entend qu’elle aurait à sa disposition d’autres éléments médicaux mais qu’elle ne pouvait pas les produire faute pour Mme [X] [G] d’avoir levé le secret médical. Toutefois, il convient de remarquer d’une part que Mme [X] [G] a autorisé sa médecin généraliste à répondre au médecin mandaté par la société Générali Vie, courrier qui a été versé aux débats et qu’elle s’est ensuite soumise à une expertise à la demande de la société Générali Vie, d’autre part, cette dernière ne produit aucun document qui attesterait qu’elle a sollicité son assurée pour la levée du secret médical concernant d’autres documents.

Ainsi, au regard de l’ensemble de ces éléments, la preuve d’une fausse déclaration, faite de mauvaise foi et avec l’intention de tromper la compagnie d’assurance, n’est pas établie de sorte que la société Générali Vie sera déboutée sa demande de nullité du contrat.

III – Sur le paiement des indemnités journalières

La société Générali Vie soutient qu’en l’absence d’annulation du contrat, les conditions contractuelles seront les suivantes : ‘surprime de 100 % des garanties invalidité absolue et définitive, et décès emportant revalorisation de la prime mensuelle à 47,54 euros et suppression des garanties invalidité et incapacité’, de sorte qu’elle ne doit selon elle aucune indemnité et que Mme [X] [G] doit lui restituer la somme de 17 916,79 euros déjà versée.

Cependant, l’article L113-9 précité et plus particulièrement son dernier alinéa prévoit que : ‘Dans le cas où la constatation n’a lieu qu’après un sinistre, l’indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés’.

En sollicitant la restitution des sommes versées à l’assurée au prétexte qu’elle n’aurait pas garanti cette dernière au titre de l’incapacité quelque soit la cause de l’incapacité, alors qu’habituellement, les compagnies d’assurance excluent seulement le risque spécifique de la garantie, sans même procéder à une augmentation de la cotisation, la société Générali Vie tente d’obtenir par ce biais le même résultat que l’annulation du contrat et il ne saurait être considéré qu’elle sollicite la réduction proportionnelle même à titre subsidiaire, étant ajouté que le juge n’est pas tenu d’y procéder d’office (cass1ère civ 16-10-1990 n°88-20.481).

Par ailleurs, la demande aux fins d’expertise médicale sera écartée dès lors que les mesures d’instruction n’ont pas vocation à suppléer la carence de preuve.

En conséquence, la demande subsidiaire de remboursement des indemnités journalières déjà versées à hauteur de 17 916,79 euros formée par la société Générali Vie sera rejetée et celle-ci sera condamnée à verser les indemnités journalières complémentaires dont le montant calculé à 11 424,96 euros soit 79.34 euros sur 144 jours (du 1er septembre 2017 au 22 janvier 2018) n’est pas contesté.

IV – Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral

Mme [X] [G] ne rapporte pas la preuve d’un préjudice moral particulier lié à la démarche de l’assureur qui avait le droit de procéder à des investigations médicales pour déterminer si elle avait été atteinte d’affections éventuellement non déclarées dans le questionnaire de santé, ce qui était le cas, même si l’intention de Mme [X] [G] n’était pas de tromper la société Générali Vie.

En conséquence, Mme [X] [G] sera déboutée de sa demande d’indemnisation au titre d’un préjudice moral.

V – Sur les demandes accessoires

Succombant, la société Générali Vie sera tenue des dépens de première instance et d’appel et déboutée de ses demandes d’indemnité procédurale de première instance et d’appel.

L’équité commande de faire droit à la demande d’indemnité procédurale de Mme [X] [G] à laquelle il sera alloué à ce titre la somme de 4 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris en toute ses dispositions,

Déboute la société Générali Vie de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat d’assurance Prévoyance Plan Gérant Majoritaire souscrit auprès d’elle par Mme [X] [G] le 24 juillet 2015,

Condamne la société Générali Vie à payer à Mme [X] [G] la somme de 11 424,96 euros au titre de la garantie Incapacité prévue dans le contrat d’assurance susvisé pour la période du 1er septembre 2017 au 22 janvier 2018,

Déboute la société Générali Vie de ses demandes principale et subsidiaire tendant à voir condamner Mme [X] [G] à lui rembourser la somme de 17 916.79 euros versée au titre des indemnités journalières prévues dans le contrat d’assurance susvisé pour le sinistre en date du 21 janvier 2017,

Déboute la société Générali Vie de sa demande subsidiaire de voir ordonner une expertise médicale de Mme [X] [G],

Déboute Mme [X] [G] de sa demande de dommages-intérêts au titre d’un préjudice moral,

Condamne la société Générali Vie aux dépens de première instance,

Déboute la société Générali Vie de sa demande d’indemnité procédurale en première instance,

Y ajoutant,

Condamne la société Générali Vie aux dépens d’appel,

Condamne la société Générali Vie à payer à Mme [X] [G] une indemnnité procédurale de 4 000 euros.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le 21 mars 2023

à

la SELARL AC AVOCATS

la SELARL BOLLONJEON

Copie exécutoire délivrée le 21 mars 2023

à

la SELARL AC AVOCATS

 


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