Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 9
ARRET DU 20 AVRIL 2023
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/17754 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEOX4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Septembre 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2019057327
APPELANT
Monsieur [C] [J]
né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 9] (TUNISIE)
[Adresse 8]
[Adresse 8]
assisté de Me Emmanuelle FARTHOUAT – FALEK, avocat au barreau de PARIS, toque: G097
INTIMES
Madame [R] [K] épouse [S]
née le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 11] (Maroc)
[Adresse 3]
[Localité 7]
Monsieur [D] [S]
né le [Date naissance 1] 1995 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentés par Me Géraud BOMMENEL de la SELARL JURIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0570
Madame [Y] [F]
Chez Monsieur [U], [Adresse 6]
[Localité 7]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sophie MOLLAT et Mme Déborah CORICON, Conseillère.
Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 495 du Code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Sophie MOLLAT, Conseillère
Mme Isabelle ROHART, Conseillère
Mme Déborah CORICON, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.
ARRÊT :
– rendu par défaut,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Mme Sophie MOLLAT, et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*********
M. [C] [J] était propriétaire de l’intégralité des parts sociales de la SARL Terra Pizza exploitant un fonds de commerce de restauration rapide situé [Adresse 5].
Le 18 mai 2015, M. [J] a cédé l’ensemble de ses parts sociales avec 50 parts pour Mme [S], 30 parts pour M. [S] et 20 parts pour Mme [F] pour un prix de cession de 45 000 euros payable par billets à ordre en 36 mensualités de 1250 euros s’étalant du 9 juillet 2015 au 9 juin 2018. Les billets à ordre ont été signés par Mme [S], les deux autres cessionnaires s’engageant solidairement au paiement du prix.
Le contrat prévoyait qu’en cas de non-paiement de deux échéances successives, il serait résolu et que M. [J] reprendrait alors la totalité du capital de la société.
Le 31 octobre 2015, à la suite du retour de 3 billets à ordre impayés, M. [J] a adressé à M. [S], gérant de Terra Pizza devenue entre-temps la société [D], une mise en demeure de régler les échéances impayées dans un délai de 15 jours faute de quoi il saisira la juridiction compétente pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et sa reprise des parts sociales cédées.
Les parties divergent ensuite sur la remise des clés du local, les consorts [S] indiquant avoir remis les clés du local à M. [J] le 18 novembre 2015, M. [J] contestant toute remise.
Le 6 avril 2016, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société [D].
Saisi en référé par M. [J] aux fins de constater l’exigibilité de sa créance envers les cessionnaires et les voir condamnés solidairement au paiement du prix de cession, le tribunal judiciaire de Paris s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris par jugement en date du 14 juin 2018. Par ordonnance de référé du 27 février 2019, le tribunal de commerce de Paris a dit n’y avoir lieu à référé.
M. [J] a alors saisi le tribunal de commerce de Paris au fond, par actes des 11 septembre et 1er octobre 2019 pour solliciter la condamnation solidaire des cessionnaires à lui payer 45 000 euros et 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 16 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a dit l’assignation régulière et recevable, a débouté M. [J] de sa demande de condamner Mme [S], M. [S] et Mme [F] à lui verser la somme de 45 000 euros, a débouté M. et Mme [S] de leur demande de dommages et intérêts, a dit n’y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile et a condamné M. [J] aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 11 octobre 2021, M. [J] a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Paris.
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Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 juin 2022, M. [C] [J] demande à la cour de’:
INFIRMER le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 16 septembre 2021 en ce qu’il l’a débouté de ses demandes.
Et statuant à nouveau’:
CONDAMNER solidairement Mme [S], M. [S] et Mme [F] à lui payer la somme de 45 000 euros en exécution du contrat de cession avec intérêts légaux à compter du 22 février 2016.
ORDONNER la capitalisation des intérêts.
Subsidiairement, pour le cas où la cour constaterait le jeu de la clause résolutoire à l’égard de M. [S],
CONDAMNER solidairement Mme [S] et Mme [F] à lui payer la somme de 45 000 euros en exécution du contrat de cession avec intérêts légaux à compter du 22 février 2016 correspondant au prix de cession qui avait été convenu et qui correspond exactement au préjudice subi par lui en raison de la résolution du contrat.
ORDONNER la capitalisation des intérêts.
DÉBOUTER Mme [S], M. [S] et Mme [F] de leurs demandes de condamnation à son encontre.
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Mme [S], M. [S] et Mme [F] à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
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Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 novembre 2022, Mme [R] [K] épouse [S] et M. [D] [S] demandent à la cour de’:
DEBOUTER M. [J] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 septembre 2021 en ce qu’il a’:
– Débouté M. [J] de sa demande tendant à obtenir la condamnation de Mme [K] épouse [S], M. [S] et Mme [F] à lui verser la somme de 45 000 euros.
– Condamné M. [J] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 116,74 euros dont 19,24 euros de TVA.
INFIRMER le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 septembre 2021 en ce qu’il a’:
– Débouté Mme [K] épouse [S] et M. [S] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
– Dit n’y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile.
– Rejeté les demandes des parties autres, plus amples ou contraires.
Statuant à nouveau,
CONDAMNER M. [J] à leur verser une somme de 6 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, pour abus du droit d’agir en justice.
CONDAMNER M. [J] à leur verser une somme de 10 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNER M. [J] aux entiers dépens d’appel.
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Mme [Y] [F], bien que régulièrement assignée, n’a pas constitué avocat.
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SUR CE,
Sur la nullité du contrat de cession
Les consorts [S] font valoir que le contrat de cession du 18 mai 2015 est nul car dénué de cause en ce qu’il n’y aurait aucune contrepartie convenue. Ils indiquent que Mme [S] ne se voit attribuer que 50 parts, soit la moitié du capital sociale, alors qu’elle doit supporter seule la totalité du prix de la transaction et du risque afférent. Il n’existe selon eux manifestement aucune contrepartie à supporter le paiement des 30 parts de M. [S] et des 20 parts de Mme [F] qu’elle ne connaît pas.
Ils ajoutent que la solidarité prévue entre les cessionnaires ne constitue pas une contrepartie au règlement par Mme [S], que l’acte de cession ne met aucun paiement à la charge de M. [D] [S], qui ne saurait être tenu par la clause de solidarité prévue par le contrat de cession ; que cette clause stipulant une solidarité entre les cessionnaires est rédigée de manière extrêmement vague et ne saurait entraîner une obligation concrète de paiement à l’égard d’une partie.
M. [J] fait valoir que l’obligation de payer trouve sa cause dans l’obligation de transférer la propriété des parts sociales objet du contrat. Il précise que l’engagement pris par Mme [S] de procéder au paiement de l’entier prix de cession est un accord concernant les modalités d’exécution de l’obligation de payer et non l’existence même de la cause de l’obligation de payer. Il ajoute que la créance objet de la présente procédure trouve aussi son fondement dans les billets à ordre signés et acceptés par Mme [S]. Il en déduit que les contestations relatives au contrat de cession ne sauraient exonérer les consorts [S] d’une obligation qui trouve son fondement dans un titre de créance distinct, à savoir les billets à ordre.
Il ajoute que la clause de solidarité prévue dans l’acte de cession est explicite et ne supporte aucune interprétation ; qu’elle stipule clairement que les cessionnaires s’engagent solidairement envers le cédant au paiement de l’échéance du prix à son terme. Il ajoute qu’en consentant au contrat de cession, M. [S] a également consenti à la clause de solidarité portant sur le paiement de 36 billets à ordre domiciliés au compte bancaire de Mme [S].
Aux termes de l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, applicable au contrat en litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Aux termes de l’article 1131 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, applicable au contrat en litige, l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
Aux termes de l’article 1200 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, applicable au contrat en litige, il y a solidarité de la part des débiteurs, lorsqu’ils sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, et que le paiement fait par un seul libère les autres envers le créancier.
Il ressort de l’article 2 de l’acte de cession du 18 mai 2015 que le prix du par les cessionnaires a été fixé à 45 000 euros soit 450 euros la part ; qu’en ‘représentation de ces règlements et en commun accord des cessionnaires, il est souscrit à l’ordre du cédant 36 billets à ordre domiciliés au compte bancaire de Mme [K] épouse [S] [R], de 1250 euros chacun, payables pour les montants et aux échéances ci-dessus convenues’ et que ‘les cessionnaires auront la faculté d’anticiper le paiement de ces billets sans préavis ni indemnité. Tout paiement anticipé s’imputera d’abord sur l’échéance la plus éloignée permise par la loi’.
L’article 3 stipule que ‘les cessionnaires s’engagent, au nom et pour le compte de la société, à rembourser selon les termes des échéanciers annexés aux présentes :
– le solde du contrat de crédit-bail (…)
– le solde du contrat de prêt professionnel (..)’.
L’article 6 stipule que ‘les cessionnaires s’engagent à remettre au séquestre 36 billets à ordre de 1250 euros chacun à l’ordre de M. [J] [C] et tirés sur le compte bancaire de Mme [K] épouse [S] [R]’.
L’article 8 stipule que ‘les cessionnaires s’engagent solidairement dans les termes de l’article 1200 du code civil envers le cédant qui pourra ainsi exiger de l’un quelconque d’entre eux le paiement de l’échéance arrivée à son terme. Les héritiers et ayants-droits seront tenus dans les mêmes conditions’.
L’article 9 prévoit une garantie de passif et d’actif au bénéfice des cessionnaires.
Il en résulte que le contrat en litige a clairement mis à la charge des trois cessionnaires le prix de cession, tout comme l’ensemble des droits et obligations reconnus par l’acte à la partie qui acquiert le fonds de commerce, et que la domiciliation des billets à ordre sur le compte bancaire de Mme [S] constitue simplement une modalité de paiement.
Par suite, il existe bien une cause au transfert des parts sociales à M. [S], Mme [S] et Mme [F], consistant en le paiement de la somme de 45 000 euros.
Il n’y a donc pas lieu de faire droit à cette demande de nullité.
Sur la résolution du contrat et son exécution forcée
M. [J] fait valoir qu’il a consenti à céder aux cessionnaires l’intégralité de ses parts sociales contre un prix de 45 000 euros payables en 36 billets à ordre d’un montant de 1250 euros, ces billets étaient domiciliés au compte bancaire de Mme [S], laquelle avait signé et accepté l’intégralité des titres de paiements ; qu’il a transféré l’intégralité des parts sociales le jour de la conclusion de l’acte alors que les billets à ordre présentés au paiement n’ont jamais été acceptés malgré plusieurs mises en demeure. Il en déduit que les cessionnaires n’ont pas exécuté leur obligation de payer.
Il indique qu’il résulte du contrat de cession que le prix devient exigible en cas de défaut de paiement de deux échéances et après mise en demeure adressée par le cédant demeurée infructueuse.
Il soutient ne pas avoir manifesté d’intention non équivoque de se prévaloir de la clause résolutoire ; que dans son courrier de mise en demeure en date du 31 octobre 2015, il indique mettre en demeure le débiteur de payer sans indiquer le montant dû et ne précise pas que la clause résolutoire sera acquise à l’issue du délai de 15 jours. Selon lui, sa volonté d’opter pour l’exécution forcée et non de faire jouer la clause résolutoire, est confirmée par une mise en demeure du 10 mai 2017 ne faisant état que de l’exécution forcée du contrat de cession.
Il critique également l’attestation sur laquelle s’est fondée le tribunal de commerce en ce que le témoin, M. [B], n’indique pas le restaurant dans lequel il aurait travaillé pour M. [L] [S]. Il indique que le RCS ne fait état d’aucun salarié travaillant dans la société Terra Pizza et que les consorts [S] n’ont jamais rapporté la preuve qu’ils employaient un salarié.
Les consorts [S] font valoir que le contrat a été résilié par M. [J] qui cherche aujourd’hui à le faire exécuter. Ils indiquent que dans un courrier recommandé du 31 octobre 2015, M. [J] a notifié à M. [D] [S], en qualité de gérant de la société Terra Pizza devenue [D], son intention de se prévaloir de la clause résolutoire. Ils en déduisent que l’acte de cession est résolu et doit être considéré comme caduc.
Ils ajoutent que M. [J] s’est vu remettre les clefs des locaux du fonds de commerce le 18 novembre 2015 ainsi qu’en atteste le cuisinier employé par M. [W] [S] ; que M. [J], s’il conteste cette attestation, n’a déposé aucune plainte pour faux.
Ils précisent que c’est M. [W] [S], père de M. [D] [S] qui exploitait uniquement ce restaurant alors que la cession des parts sociales avait été réalisée au bénéfice de M. [D] [S] et de Mme [S] selon les volontés de M. [J].
Ils affirment que le 10 mai 2017, postérieurement à la liquidation judiciaire de la société [D] et alors que la clause résolutoire était acquise et acceptée de part et d’autre, M. [J] a sollicité l’exécution forcée de la cession dans le seul but de tenter de justifier l’absence d’acquisition de la clause résolutoire.
Les consorts [S] notent en outre que le fait que M. [J] soit en possession de certains documents démontrent qu’il avait repris possession du local commercial de la société ; qu’il produit l’assignation en acquisition de la clause résolutoire du bail délivrée à la société au [Adresse 5], la signification de l’ordonnance de référé prononcée le 15 mars 2016 signifiée à la société dans son local commercial et le courrier adressé par le liquidateur à la société le 6 avril 2016 à son local commercial (ces pièces ne sont pas produites en cause d’appel).
Il ressort de l’article 14 de l’acte de cession en litige qu’en ‘cas d’inexécution de ses obligations par l’une des parties, le présent contrat sera, si bon semble au créancier de l’obligation inexécutée, résolu de plein droit 15 jours après une mise en demeure restée infructueuse, sans préjudice de tout dommage-intérêts qui pourraient être réclamés à a partie défaillante.
Le contrat est résolu de plein droit en cas de manquement des cessionnaires au règlement des deux échéances du prix selon l’échéancier convenu. Dans cette hypothèse, la présente cession sera considérée comme caduque et le cédant reprendra la propriété de ses parts sociales sans préjudice pour lui de demander des dommages-intérêts.
Etant précisé que dans une telle hypothèse, les versements effectués seront définitivement acquis au profit du cédant’.
Il en résulte que dans l’hypothèse où deux échéances de règlement du prix ne seraient pas honorées, l’alinéa 2 de l’article prévoit que le contrat est résolu de plein droit. M. [J] a, par courrier du 31 octobre 2015, fait savoir aux cessionnaires que les trois premiers billets à ordre étaient revenus impayés et qu’il entendait mettre en jeu la clause résolutoire prévue à l’article 14 de l’acte si les échéances dues n’étaient pas payées sous 15 jours.
La circonstance qu’il ait évoqué, dans ce courrier, un délai de 15 jours pour permettre aux cessionnaires de payer les échéances dues et une possible saisine de la ‘juridiction compétente’ pour faire constater le jeu de cette clause résolutoire est sans incidence sur l’application des dispositions contractuelles dont la clarté ne laisse pas de place à l’interprétation : la résolution du contrat s’effectue de plein droit à partir du moment où deux échéances sont revenues impayées.
Il y a donc lieu de constater que le contrat a déjà été résolu et que les parts sociales sont redevenues la propriété de M. [J] dès l’été 2015, ce que les parties semblent avoir mis en oeuvre en novembre 2015, comme en atteste M. [B].
M. [J] ne peut donc poursuivre aujourd’hui l’exécution forcée d’un contrat résolu.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les chefs de préjudices résultant selon M. [J] de l’inexécution du contrat.
Subsidiairement, sur la demande d’exécution du contrat à l’égard de Mme [S] et de Mme [F]
M. [J] prétend que si le jeu de la clause résolutoire doit être retenu, il ne produira effet qu’à l’égard de M. [S] puisqu’il a seul reçu le courrier du 31 octobre 2015. Par conséquent, Mmes [S] et [F] demeurent redevables du prix de cession et des intérêts légaux selon M. [J].
Les consorts [S] répondent que la résolution du contrat invoquée par M. [J] résulte du non-paiement par Mme [S] des billets à ordre qu’elle avait souscrits. Selon eux, M. [J] est donc mal fondé à invoquer une prétendue non-opposabilité à Mme [S] de la mise en ‘uvre de la clause résolutoire qu’il a lui même invoquée.
Il ressort du courrier du 31 octobre 2015 émanant de M. [J] que celui-ci a écrit à M. [S] en sa qualité de gérant de la société [D], et non pas en sa qualité de cessionnaire, et évoquant dans ledit courrier qu’il mettait en demeure les associés de régler les échéances impayées. Par suite, ce courrier valait à l’égard des trois associés et non pas seulement à l’égard de M. [S] qui n’en est destinataire qu’en sa qualité de gérant de la société [D].
Il n’y a donc pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire formée par M. [J].
A titre infiniment subsidiaire, sur la responsabilité contractuelle des consorts [S] et de Mme [F]
M. [J] fait valoir qu’en cas d’application de la clause résolutoire à l’égard de M. [S] et/ou Mme [S], il est fondé à demander des dommages et intérêts sur le fondement de la faute contractuelle caractérisée par le défaut de paiement du prix de la cession. Il rappelle qu’aucun élément ne démontre qu’il a récupéré les clefs de sa société avant qu’elle ne soit placée en procédure de liquidation judiciaire par jugement du 6 avril 2016.
Les consorts [S] répliquent que M. [J] ne justifie d’aucun préjudice puisqu’il a récupéré les parts sociales objet de la cession.
Il résulte de l’article 1147 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, applicable au contrat en litige, que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il ressort des pièces du dossier qu’aucune des échéances contractuellement prévues n’a été honorée, les impayés débutant dès le 9 juillet 2015, date de la première échéance prévue au contrat, démontrant ainsi la particulière mauvaise foi des acquéreurs. M. [J] a été dépossédé de son fonds de commerce pendant plusieurs mois sans jamais percevoir le moindre euro en contrepartie. Il y a donc lieu de lui accorder la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de cette inexécution contractuelle, somme qui sera dûe solidairement par M. [S], Mme [S] et Mme [F].
Sur l’abus du droit d’agir en justice de M. [J]
Les consorts [S] relèvent que M. [J] dit n’avoir eu aucun moyen de les joindre pendant près de deux ans en se bornant à envoyer des courriers à l’adresse du restaurant situé [Adresse 5] alors qu’ils avaient quitté les lieux en novembre 2015. Ils affirment que M. [J] avait connaissance de leur adresse actuelle, demeurée identique depuis la signature de l’acte de cession. Selon eux, il s’agit d’un stratagème de M. [J] qui nie la remise des clefs et le fait qu’il ait voulu mettre en ‘uvre la clause résolutoire, dans le but de demander la somme de 45 000 euros.
Ils indiquent être en mesure de produire une attestation qui démontre la reprise du fonds de commerce par M. [J] postérieurement à leur départ et soulignent que M. [J] a été débouté à trois reprises pour des demandes tendant aux mêmes fins avant la saisine de la cour de céans.
M. [J] réplique qu’il a adressé les courriers aux adresses mentionnées dans l’acte de cession. Il conteste avoir été débouté à 3 reprises de ses demandes devant d’autres juridictions mais indique que le tribunal de grande instance s’était déclaré incompétent et que le juge des référés avait relevé l’existence d’une contestation sérieuse.
Il y a lieu de souligner, comme les premier juges, que le présent litige est né de l’inexécution par les intimés de leurs obligations contractuelles et qu’ils sont donc mal venus à réclamer aujourd’hui des dommages et intérêts sur le fondement de l’abus du droit d’agir.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement attaqué sur ce point.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
M. [J] demande sur ce fondement la condamnation solidaire des consorts [S] à lui verser la somme de 6 000 euros.
Les intimés demandent la condamnation de M. [J] à leur verser la somme de 5 000 euros chacun.
Les circonstances de l’espèce commandent de ne pas faire application de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement attaqué,
Y ajoutant,
Déboute M. [C] [J] de sa demande de nullité du contrat de cession,
Déboute M. [C] [J] de sa demande d’exécution du contrat à l’égard de Mme [R] [K] épouse [S] et Mme [Y] [F],
Condamne solidairement Mme [R] [K] épouse [S], M. [D] [S] et Mme [Y] [F] à payer à M. [C] [J] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Laisse les dépens à la charge de chaque partie.
Le greffier La présidente