COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 MARS 2023
N° RG 21/02017 – N° Portalis DBV3-V-B7F-US7K
AFFAIRE :
[L] [I] épouse [A]
C/
S.A. POMONA
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Février 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Section : E
N° RG : 18/01051
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Cécile DALENÇON
Me William TROUVE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [L] [I] épouse [A]
née le 01 Mai 1985 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Cécile DALENÇON, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1587, substiué par Maître Claire CHEVANNE, avocat au barreau de VERSAILLES
APPELANTE
****************
S.A. POMONA
N° SIRET : 552 044 992
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me William TROUVE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0138
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Thierry CABALE, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thierry CABALE, Président,
Madame Régine CAPRA, Présidente,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Juliette DUPONT,
Greffier en pré-affectation lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,
Par contrat de travail à durée indéterminée du 28 septembre 2009, Madame [L] [I] épouse [A] a été embauchée par la société Pomona. Elle occupait en dernier lieu les fonctions de chef de projet catégorie cadre.
Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective du commerce de gros de fruits et de légumes.
Par courrier du 5 janvier 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec dispense d’activité le temps de la procédure, qui s’est tenu le 17 janvier 2018 puis elle a été licenciée pour faute par lettre du 25 janvier 2018.
Par requête reçue au greffe le 29 août 2018, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin de contester le bien-fondé de son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.
Par jugement du 25 février 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt a :
Dit que les éléments constitutifs du harcèlement moral n’étaient pas démontrés ;
Dit qu’il n’y avait pas nullité du licenciement ;
Dit que les éléments constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement étaient réunis ;
Dit fondé le licenciement de Madame [I], celui-ci étant jugé comme ayant une cause réelle et sérieuse et les conséquences qui s’y rattachent ;
Débouté Madame [I] de l’ensemble de ses demandes à ce titre ;
Reçu la société Pomona en sa demande reconventionnelle et l’en a déboutée ;
Mis, par souci d’équité, les frais irrépétibles exposés pour la présente instance à la charge de chacune des parties ;
Mis les éventuels dépens à la charge de la partie qui succombe.
Par déclaration au greffe du 24 juin 2021, la salariée a interjeté appel de ce jugement notifié le 31 mai 2021.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 17 juin 2022 auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la salariée demande à la cour de :
Il est demandé à la cour de réformer la décision du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt prononcée le 25 février 2021 ;
Et statuant de nouveau de :
Juger le licenciement prononcé le 25 janvier 2018 nul ;
A titre subsidiaire,
Juger le licenciement prononcé le 25 janvier 2018 dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En conséquence :
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] des dommages et intérêts au titre de la nullité du contrat de travail d’un montant de 55 000 euros nets de CSG/RDS sur le fondement des dispositions, de l’article L. 1235-3-1 du code du travail ;
A titre subsidiaire,
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] des dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 55 000 euros nets de CSG/RDS;
A titre infiniment subsidiaire,
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] des dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 37 046,96 euros nets de CSG/RDS ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 2062,04 euros au titre du reliquat de l’indemnité compensatrice de congés payés
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 340,79 euros au titre du reliquat de l’indemnité compensatrice repos forfait jour ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 186,09 euros à titre de rappel sur indemnité conventionnelle de licenciement ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 13 902,03 euros au titre de dommages et intérêts pour suspension vexatoire du contrat de travail ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 27.804,06 euros au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 4634,01 euros au titre de dommages et intérêts pour sanction liée au refus de subir des faits de harcèlement moral ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 560 euros en remboursement des frais de consultation d’un psychologue ;
Condamner la société Pomona à majorer les sommes mises à sa charge de l’intérêt légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes ;
Condamner la société Pomona à remettre à Madame [L] [I] les documents sociaux conformes à la décision (bulletin de salaire et attestation pôle emploi rectifiée) sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;
Débouter la société Pomona de toutes ses demandes ;
Condamner la société Pomona à verser à Madame [L] [I] la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du CPC pour les frais irrépétibles engagés devant le conseil de prud’hommes; et 3500 euros pour les frais irrépétibles engagés devant la cour ;
Débouter la société Pomona de toutes ses demandes ;
Condamner la société Pomona aux entiers dépens et frais d’exécution y compris ceux dus au titre d’une éventuelle exécution par voie légale en application des articles 10 et 11 des décrets du 12
décembre 1966 et 8 mars 2001 relatifs à la tarification des actes d’huissiers de justice.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 20 décembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la société Pomona demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 février 2021 par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 12 décembre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le harcèlement moral :
Selon l’article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »
Il résulte des dispositions de l’article L. 1154-1 du code du travail que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments de fait présentés par le salarié laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
A l’appui de sa demande au titre du harcèlement moral, la salariée invoque :
– s’agissant de son évaluation annuelle par son N+1 du 11 mai 2017,
* d’une part, des propos dégradants en ce que celui-ci indique qu’elle doit améliorer son travail en équipe, faire des efforts pour être en adéquation avec les principes d’action du Groupe et s’insérer dans un collectif, et en ce qu’il indique en guise de conclusion de l’une des parties du plan d’évaluation, celle dédiée à la mise en ‘uvre des principes d’action du Groupe, qu’ » un travail de remise en cause est nécessaire pour que [L] soit en adéquation avec les principes d’action du groupe « , et ce, en contradiction selon elle avec une phrase située au-dessus selon laquelle elle » respecte les règles internes de l’entreprise » ;
* d’autre part, des propos dégradants et discriminants qui la culpabilisent en raison d’une absence pour maladie en ce que, dans la partie consacrée aux difficultés rencontrées dans l’exercice de ses fonctions, après avoir indiqué que la salariée a » eu un certain nombre de jours d’absence (ces derniers ne sont pas de son fait) pendant ces 4 mois, la planification de ces projets et sa charge ont été adaptées afin de lui faciliter ces périodes de difficultés personnelles « , il écrit : » [L] est la seule chef de projet à n’avoir participé qu’à 2 projets importants cette année. Les autres
chefs de projet de l’équipe (ainsi que ceux de l’équipe de [Z] [G]) ont entre 3 et 4 projets majeurs à réaliser en parallèle ainsi que des missions ponctuelles. » ;
* de troisième part, un bilan de compétences dégradé quant à l’application des indicateurs « acquis », » en cours d’acquisition « , » à développer » ;
– un management » destructeur » en ce que dans ses messages envoyés au cours du mois de janvier 2018, une collègue lui écrit, à propos de son N + 1 : » [T] a juste voulu te détruire pour protéger sa peau. Toi au moins tu as la conscience tranquille » ; puis : » Aujourd’hui en formation on a parlé du profil de manipulateur et en particulier celui qui a de mauvaises intentions, c’était juste une description de [T]’ » ;
– des insultes de la part de son N + 1 en référence au contenu de la lettre de licenciement ;
– une entrave au bon exercice de la fonction : l’impossibilité d’avoir un interlocuteur direct au sein de la succursale concernée par le projet » Appro GDA » au cours de l’année 2017 ; l’absence d’accès au fichier de suivi du projet général compte tenu d’une mise à distance du projet par son N + 1 ayant conduit à ce que le chef de projet se charge de lui transmettre par mail du 5 décembre 2017 le code et les liens lui permettant de justifier du respect des plannings pour répondre aux allégations du même supérieur hiérarchique ; sa mise en difficulté par ce dernier jusqu’à la faire douter de ses compétences lors d’une réunion de service du 4 décembre 2017 au cours de laquelle, selon le témoignage produit aux débats de la même collègue lui ayant envoyé les messages précités, ce supérieur lui a annoncé un changement de périmètre concernant un projet et lui a répondu que » ce n’était pas la peine » de refaire son étude pour la réunion du lendemain tant qu’ils ne connaissaient pas le périmètre de façon certaine dans l’attente d’un point avec le comité de pilotage en fin de journée ;
– une proposition » fallacieuse » de changement de poste du 13 septembre 2017 à la suite d’une demande en ce sens remontant au mois d’avril 2017 en raison d’un harcèlement moral imputé à son supérieur hiérarchique, demande réitérée lors de son entretien d’évaluation de 2017, son employeur ayant dès lors cherché à la rétrograder sur un poste, sans garantie de recrutement, moins bien rémunéré et sans lien avec ses compétences et son expérience, de surcroît avec des horaires éventuels de nuit incompatibles avec le fait d’être mère d’une petite fille ;
– un dénigrement par son supérieur devant ses collègues selon le message d’une collègue qui évoque le succès d’un projet immobilier qu’elle a mené et qui ajoute : » Pour quelqu’un qui ne sait pas travailler en équipe et qui a besoin d’être coacher, tu t’en sors super bien !!!!!!@ »
– un comportement » destructeur » de la part du même supérieur.
En tenant compte du certificat établi le 21 février 2018 par son médecin traitant qui indique que sa patiente se plaint depuis un an » d’une asthénie, de difficulté à se concentrer, d’épisodes de
pleurs, d’insomnie ou de perturbation du sommeil, de douleurs diffuses à type de contractures, de céphalées, de poussées d’eczéma. » et qu’ » Au cours de ses consultations pendant l’année, elle a, à chaque fois, évoqué lors de l’interrogatoire, un stress professionnel, qui s’est transformé en sentiment de harcèlement, disait-elle, devant l’attitude méprisante de son supérieur, la charge de travail demandée sans reconnaissance de ses résultats. « , le praticien ajoutant que » Son état a conduit à lui proposer la prescription d’anxiolytiques « , les éléments de fait matériellement établis présentés par la salariée qui laissent supposer, considérés ensemble, l’existence d’un tel harcèlement, sont les suivants :
– l’aspect dégradé et culpabilisant d’appréciations rédigées par son supérieur hiérarchique lors de l’évaluation de 2017 ;
– l’inadéquation apparente de la réponse apportée par l’employeur à sa demande de changement de poste sollicitée lors de son évaluation du 11 mai 2017 pour le motif suivant » Satisfaite de mon poste actuel mais ne trouvant pas mon équilibre avec mon supérieur, je souhaite faire le point avec mon N+2 et connaître les possibilités de changement au sein du groupe à court terme. »
L’employeur démontre que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et proportionnées à l’objectif légitimement poursuivi.
– Sur les éléments de faits en lien avec l’évaluation de 2017, sauf la rédaction maladroite, potentiellement culpabilisante, d’une petite partie des commentaires consacrés aux difficultés de la salariée dans l’exercice de ses fonctions, dès lors que le supérieur hiérarchique y évoque une absence de quatre mois, que celui-ci s’est empressé de préciser avoir été involontaire, avant de comparer dans le paragraphe suivant le nombre de projets qui lui ont été confiés dans l’année à celui, plus important, dévolu aux autres chefs de projets, le tout s’insérant néanmoins dans un ensemble de commentaires visant à répondre aux difficultés soulevées par la salariée relativement à sa charge de travail que son supérieur considérait avoir été adaptée à sa situation personnelle, l’employeur démontre, d’une part, que les appréciations rédigées par l’évaluateur dans le cadre d’un entretien laissant toute sa place à la contradiction et aux commentaires, nombreux et consistants, de la salariée, sont exemptes de tout propos dégradant, d’autre part, que l’aspect très critique de certaines appréciations, notamment quant au travail en équipe et à son positionnement vis-à-vis de sa hiérarchie, sont précises et étayées, alors que les conclusions et le bilan de compétences, présentés essentiellement sous forme de points à améliorer s’agissant de ses aspect les plus négatifs, sont également en cohérence avec un ensemble d’appréciations, contrastées, dans le cadre d’une succession d’items ; plus particulièrement, les appréciations relatives aux exigences du poste en termes de capacité à conduire le changement et à accompagner les équipes dans la performance, ainsi qu’aux améliorations attendues afin de s’insérer dans un collectif s’agissant de la rubrique relative à » La confiance dans les hommes « , ne sont aucunement en contradiction avec l’appréciation positive relative au respect des règles internes de l’entreprise touchant essentiellement à la sécurité des biens et des personnes, des aliments, et concernant l’environnement ; et si l’évaluation globale est plus négative, sans pour autant être très dégradée,
que celle réalisée en 2015 par le précédent supérieur hiérarchique de la salariée, il était déjà relevé à cette date que cette dernière devait » tout mettre en ‘uvre pour travailler en équipe dans un souci de réelle efficacité « , qu’elle était » confrontée à la différence entre » travailler dans une équipe » vs » travailler en équipe « , qu’il fallait » accepter les différences et les avis divergents » et que si les valeurs du Groupe étaient partagées il fallait » progresser sur la capacité à travailler » en équipe » » ;
– plus généralement, les écrits du supérieur hiérarchique mis en cause ne révèlent aucun propos dégradant et sont dépourvus de tout caractère discriminatoire, ce qu’illustre parfaitement la teneur des mails que celui-ci a envoyés à la salariée au cours de l’année 2017 dès lors que ces mails ne laissent apparaître aucune réaction négative de sa part lorsqu’il était informé des absences de la salariée en lien avec sa situation personnelle ou familiale, se montrant à l’inverse particulièrement soucieux d’une amélioration de la santé de sa collaboratrice, laquelle s’exprimait également de manière courtoise et apaisée voire adressait des remerciements à son supérieur pour sa compréhension de la situation exposée ; pareillement, ces mails, comme ceux d’un collaborateur rattaché au service de la gestion des carrières à compter du mois de septembre 2017, participent de la démonstration d’une volonté manifeste de l’employeur de satisfaire le souhait d’un changement de poste dans le groupe évoqué par la salariée, celle-ci confirmant avoir été contactée dans ce cadre par le service des ressources humaines et avoir passé des tests de personnalité et de motivation sans contester ne pas avoir donné de suite à une proposition de poste dans le groupe, soit un poste de chef de projet logistique, et ce, en raison, non seulement d’une rémunération qu’elle estimait inférieure à la sienne alors que rien n’indique que celle-ci avait été définitivement arrêtée par l’employeur, mais, en outre, de sa situation personnelle et familiale, alors qu’à ce stade aucune rétrogradation n’était, même implicitement, arrêtée ou envisagée, la volonté de l’employeur de lui imposer un tel changement n’étant pas non plus avérée ; à cet égard, le témoignage circonstancié de son ancien supérieur que visent ses accusations et qui ne fait plus partie des effectifs de la société, non utilement remis en cause dans sa sincérité ou sa crédibilité, ni efficacement contredit dans sa teneur, permet de préciser le contexte dans lequel la salariée a été amenée à ne pas donner suite à la proposition, soit à l’issue d’une réunion au cours de laquelle il lui avait été indiqué par son N+2 qu’il ne s’agissait que d’une offre diffusée au sein du groupe, que le service de la gestion des carrières indiquera avoir suscité l’intérêt d’un profil externe de qualité qu’il risquait de perdre, cette offre devant être adaptée, notamment quant à la rémunération, dans l’hypothèse d’une réponse positive de la part de la salariée.
En conséquence, en l’absence de harcèlement moral, la salariée sera déboutée de toute demande formée à ce titre.
Sur la nullité du licenciement :
La salariée conclut à la nullité du licenciement, d’une part, en ce que celui-ci résulte d’un
harcèlement moral qui n’a donné lieu à aucune enquête après la dénonciation des faits, d’autre part, en raison de la dénonciation de faits de harcèlement moral à l’origine de la mise en ‘uvre de la procédure de licenciement selon l’employeur lui-même puisqu’il a déclaré, lors de l’entretien préalable : » Concernant, le harcèlement moral, dénoncé par [L] » ; » sur les accusations vis-à-vis de ton manager, on se positionne en faux » ; » le fait que [L] ait mis le comportement de [T] sur la place publique n’a pas facilité les relations et l’avancée du problème « .
Pour sa part, l’employeur fait valoir l’absence de harcèlement moral et de dénonciation d’un tel harcèlement avant la convocation de la salariée à l’entretien préalable, ainsi que la dénaturation des propos retranscrits par la personne qui a assisté la salariée lors de l’entretien préalable dès lors qu’il ne s’agissait pas pour le représentant de la société de relier la cause du licenciement à une dénonciation de harcèlement moral mais d’indiquer que cette dénonciation n’avait pas eu pour conséquence d’améliorer les relations entre la salariée et son N+1.
La nullité du licenciement ne peut résulter d’un harcèlement moral inexistant ni du non-respect allégué à l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur du fait de l’absence de réaction de celui-ci à la suite de la dénonciation par la salariée d’une situation de harcèlement moral, de surcroît postérieure a la convocation de celle-ci à l’entretien préalable à licenciement. En effet, à l’occasion de son évaluation du 11 mai 2017 qu’elle a refusé de signer, elle s’était bornée à relever des relations » instables, complexes et non positives » avec son manager impactant son équilibre professionnel et personnel, et à indiquer ne pas trouver son équilibre avec son supérieur, sollicitant la tenue d’un entretien avec son N+2 et déclarant vouloir connaître les possibilités de changement au sein du groupe à court terme, tous souhaits pris en compte par ce dernier dans un délai raisonnable, ce qui s’est traduit par le déclenchement du processus de mobilité interne mis en ‘uvre par les services des ressources humaines et de gestion des carrières à l’issue duquel une proposition a été soumise à la salariée qui n’était pas en elle-même dégradante et qui n’avait aucun caractère rétrogradant au stade où le projet lui a été présenté, lequel a fait l’objet de discussions sans pouvoir être finalisé en raison du positionnement de cette dernière.
De même, il ressort du compte rendu rédigé par la personne qui a assisté la salariée au cours de l’entretien préalable à licenciement que le représentant de l’employeur a indiqué : » Sur les accusations vis-à-vis de ton manager on se positionne en faux, on s’inscrit en faux « , celui-ci ayant ajouté que le fait que la salariée ait mis le comportement de son supérieur hiérarchique sur la place publique n’avait pas facilité les relations et l’avancée du problème, tous propos desquels il ne peut être déduit que la salariée a été licenciée pour avoir dénoncé des faits qualifiés par elle de harcèlement moral, alors par ailleurs qu’un tel lien ne résulte pas non plus du contenu de la lettre de licenciement.
En conséquence, toute demande relative à la nullité du licenciement doit être en voie de rejet, le jugement étant confirmé sur ce chef.
Sur le caractère bien-fondé ou non du licenciement disciplinaire :
Il résulte de l’article L.1235-1 du code du travail qu’en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et que si un doute subsiste, il profite au salarié.
L’article L 1235-2 du même code prévoit notamment que la lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs du licenciement. Les griefs doivent être suffisamment précis, objectifs et matériellement vérifiables.
Dans la lettre de licenciement, les motifs de celui-ci s’énoncent en ces termes :
» ‘ en votre qualité de chef de projet, votre mission consiste à contribuer sur un projet ou animer une équipe projet dont l’objectif est de faire évoluer les organisations et la performance de la fonction Supply Chain. Au-delà de l’aspect technique de la mission, vous devez donc avant tout travailler en équipe dans le but de mener à bien le projet confié. A ce titre, vous devez savoir répondre aux sollicitations dans un cadre hiérarchique et non hiérarchique, être force de proposition vis-à-vis d’autre acteur du projet pour avancer sur la mission tout en prenant en compte les retours qui vous sont faits. Pour cela, vous devez sortir de votre domaine de compétence pour faciliter l’émergence d’un consensus au sein de l’équipe projet.
Alors que les qualités d’écoute et de communication sont essentielles pour mener à bien cette mission, il apparaît que des difficultés relationnelles se sont multipliées et accumulées dans votre travail collaboratif d’abord, lors de projets gérés en collaboration avec l’équipe Supply Chain aval, ensuite lors de la gestion du projet AGORA chez Saveurs d’Antoine et enfin, lors de missions confiées par votre manager.
Lorsque vous étiez chef de projet Supply Chain Amont, avec vos collègues de la Direction Supply Chain Aval, vous avez rencontré des difficultés de fonctionnement en mode projet liées à la difficulté d’intégrer leurs remarques et propositions. Ceci a créé de grandes tensions au sein des équipes. La récurrence des difficultés relationnelles en résultant ont conduit [Z] [G], alors Directeur Supply Chain Aval, et homologue de [K] [F], votre responsable, à solliciter l’organisation de réunions régulières pour apaiser les tensions.
Dans le cadre du projet AGORA, c’est avec vos collègues de la Direction des Systèmes d’information que les relations se sont rapidement tendues. Vous avez critiqué à plusieurs reprises, de façon déplacée et véhémente, la qualité de leur travail les rendant responsables de l’ensemble des problèmes pouvant survenir dans le déroulé du projet y compris en leur reprochant
de mal s’organiser dans la gestion de leurs jours de congés.
[P] [B] excédé de votre attitude, vous a notamment adressé, à la suite d’une réunion, un mail déplorant votre attitude et vous demandant de rester professionnelle.
[V] [M], sa collègue, a terminé le déploiement de la solution informatique AGORA sur Passions Salaisons [Localité 5] très affectée dans la mesure où votre seul objectif semblait être de la rendre responsable des difficultés rencontrées et de vous dédouaner en l’accablant plutôt que de l’aider. Elle a dû trouver, sans votre soutien, une solution court terme permettant, finalement, le déploiement. Dans ces conditions, Monsieur [D] [E], son responsable, et Monsieur [D] [X] ont remonté à plusieurs reprises que leurs équipes ne voulaient plus travailler avec vous. D’ailleurs, ils n’étaient pas eux-mêmes à l’abri de vos critiques ; c’est ainsi que lors d’une réunion de travail, alors que les équipes de la succursale de Passion Salaisons étaient en ligne, vous avez haussé le ton contre vos collègues de la DSI en les accusant encore une fois de tous les maux. Stupéfait, Monsieur [X] a choisi d’interrompre la réunion.
C’est finalement [D] [W], Directeur des Systèmes d’Information, qui a appelé votre N+2 Monsieur [U] pour lui faire part de l’exaspération de ses équipes et lui demandant d’agir pour faire cesser de tels comportements. Ces comportements sont inadmissibles et symptomatiques de votre incapacité à vous remettre en cause et démontrent que vous n’étiez absolument pas dans un processus collaboratif.
Parallèlement, vous refusiez de reconnaître votre responsabilité dans les difficultés rencontrées pour travailler en équipe et remettiez de plus en plus souvent en cause des directives données par votre responsable hiérarchique. [T] [C], lors du premier entretien annuel qu’il devait réaliser en sa qualité de nouveau manager, a souligné les » nombreuses difficultés et conflits observés dans » votre » relation avec les acteurs du projet Saveurs d’Antoine (DSI notamment) ainsi qu’avec les directives données par votre » manager « . [T] [C] a notifié cet axe de progrès pour améliorer votre travail en équipe. Il parlait d’efforts nécessaires pour que vous soyez en adéquation avec les principes d’action du Groupe ou de la nécessité de progresser sur votre capacité à travailler en équipe et à s’insérer dans un collectif. Il insistait sur le fait qu’en votre qualité de chef de projet, il fallait privilégier » la réussite en équipe plutôt le travail individuel. » Ces remarques faisaient suite à celles de votre responsable hiérarchique précédent, Monsieur [K] [F], lors de l’entretien annuel de 2015 :
– » [L] est confrontée à la différence entre travailler dans une équipe vs travailler en équipe. Il fait accepter les différences et les avis divergents » ;
– » Il faut progresser sur la capacité à travailler en équipe « ,
Elles faisaient également suite aux remarques orales de Monsieur [U] avant que vous ne rejoigniez l’équipe de [T] [C] ; ce que vous avez reconnu lors de l’entretien préalable.
Vous avez très mal vécu cet entretien avec Monsieur [C] et vous avez demandé un entretien avec votre N+2 au motif que » ne trouvant pas mon équilibre avec mon supérieur, je souhaite faire le point avec mon N+2 et connaître les possibilités de changement au sein du Groupe à court terme. »
Monsieur [U] vous a bien évidemment reçu. Compte tenu des nombreuses difficultés relationnelles rencontrées à ce poste, il a effectivement demandé, conformément à votre souhait, aux ressources humaines et plus précisément à la gestion des carrières, de chercher une nouvelle opportunité dans le Groupe. Un poste vous a été proposé dans l’une de nos succursales parisiennes située à [Localité 6], géographiquement proche du siège ; les conditions salariales auraient été revues et mises en adéquation avec votre salaire actuel. Vous n’avez pas donné suite pour des raisons personnelles.
Si vous aviez d’ores et déjà des difficultés avec les directives données par votre manager, la situation s’est encore aggravée suite à cet entretien annuel, l’opposition et la contestation sont devenues de plus en plus fréquentes. A titre d’exemple, en décembre dernier, quand [T] [C] vous demandé de lui transmettre un travail que vous aviez réalisé, vous avez refusé de le faire car vous souhaitiez être dans une relation directe avec la succursale en travaillant seule sur la mission confiée. Face à cette situation, [T] [C] vous a adressé un mail le 5 décembre 2017 confirmant sa demande. En réponse, vous lui avez adressé un mail de 4 pages illustrant encore une fois l’impossibilité de travailler sereinement et normalement avec vos interlocuteurs.
Par ailleurs, Monsieur [T] [C] a, au cours de l’entretien, démenti avoir tenu les propos que vous lui prêtez dans la lettre reçue avant l’entretien. Pour exemple, s’agissant de sa s’ur, il vous a rappelé vous avoir uniquement dit qu’il l’adore et qu’elle possède énormément de qualités mais que son côté directif, notamment pendant les vacances qu’ils peuvent passer en famille, conduit les gens à hésiter ou à refuser de partir en vacances avec elle. Cette analogie à l’instar des conseils ou des tentatives d’apaisement que Monsieur [T] [C] a pu faire se sont soldés par des échecs cuisants.
Aujourd’hui, nous ne pouvons pas laisser perdurer une telle situation qui entrave le bon déroulement des projets dont vous avez la charge ainsi que le bon fonctionnement du service auquel vous appartenez. Nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour faute’ »
La salariée soulève la prescription de faits en application des dispositions de l’article L. 1332-4 du code du travail :
– s’agissant des manquements reprochés lors de lors de projets gérés en collaboration avec l’équipe Supply Chain aval au cours de l’année 2015, l’employeur ne justifie pas en avoir eu connaissance dans le délai de prescription de deux mois en amont de l’engagement de la procédure de licenciement ;
– la situation n’est pas différente s’agissant de comportements reprochés à la salariée dans le cadre du projet Agora dès lors que les faits invoqués, tels que ceux-ci résultent essentiellement de
l’attestation d’un ingénieur et d’un mail envoyé par un chef de projet le 27 janvier 2017 à la salariée avec copie notamment au supérieur hiérarchique de celle-ci, étaient connus dans leur consistance exacte et leur portée au plus tard à la fin du premier trimestre 2017, en tout état de cause en amont du délai de prescription de deux mois, constat auquel l’employeur n’oppose aucun argument pertinent ni aucun élément de preuve, la lettre de licenciement mentionnant d’ailleurs que le N+2 de la salariée a alors été sollicité afin de faire cesser les comportements concernés ;
– pareillement, la remise en cause du comportement de la salariée vis-à-vis de son N+1 objet d’appréciations de ce dernier lors de l’évaluation du 11 mai 2017 ou résultant de l’attitude qu’elle a adoptée au cours de ce même entretien, concerne des faits qui remontent à une période antérieure au délai de prescription de deux mois et dont l’employeur avait une connaissance exacte à cet instant, ce que ce dernier échoue à contredire.
Quant au grief, non-prescrit, relatif au mail de la salariée du 6 décembre 2017 en réponse au mail de son supérieur hiérarchique direct envoyé le 5 décembre 2017, il apparaît qu’à la demande légitime de ce dernier, exempte de tout propos excessif et ne débordant pas de son pouvoir hiérarchique en tant que responsable des ordres et des instructions qu’il donne, de leur diffusion auprès de sa subordonnée en vue de leur bonne application et du contrôle de leur mise en ‘uvre, de voir la salariée lui transmettre des travaux qu’elle avait réalisés dans un projet déterminé en vue d’une réunion recalée le 12 décembre 2017 et plus généralement de voir appliquer des consignes claires au regard de son implication dans l’ensemble des chantiers du projet concerné et de sa nécessaire validation des livrables associés, la salariée a répliqué :
» Très honnêtement je ne vois pas l’intérêt réel de ton mail car tout semblait clair et tu étais en accord avec les faits à chaque étape.
Au vu de ton mail, sauf erreur de ma part, je pense comprendre maintenant que tu voulais communiquer sur des chiffres qui n’avaient pas de sens et en avance sur le délai prévu.
J’espère que ce mail t’apportera une vision plus claire de l’impact du changement du projet GDA sur mon action.
Si cela ne l’était pas pour toi, n’hésite pas à venir me voir car tu sembles oublier des éléments importants.
Ainsi pour t’apporter de la hauteur, tu trouveras ci-dessous, pour rappel, les éléments factuels de la situation’ « ,
avant de détailler de manière chronologique les travaux qu’elle a réalisés et les événements survenus dans le cadre du projet concerné, tout en lui adressant des remarques sur son propre travail et sur son comportement, notamment en indiquant que le discours tenu par son supérieur hiérarchique en découvrant les chiffres lors du point réalisé le 1er décembre 2017 dans le bureau de celui-ci, en présence d’un autre référant de ce même projet » n’était pas du tout rassurant : disproportionné, irrationnel, accusateur et présentant selon [elle] un fort risque de ne pas mettre le site dans de bonnes dispositions « .
Ce mail, adressé en copie au N+2, traduit une attitude dédaigneuse, irrespectueuse, voire vexatoire à l’égard de son supérieur hiérarchique direct, et constitue une forme de contestation de son autorité, faisant échos aux points faibles soulignés par cette même hiérarchie lors de sa dernière évaluation mais également, s’agissant de sa capacité à travailler en équipe, par celle l’ayant précédée quant à la nécessité de devoir accepter des différences et des avis divergents. C’est dans ce sens que ce supérieur hiérarchique a pu attester du comportement opposant et autoritaire de sa subordonnée, alors que cette dernière ne livre aucune explication et n’apporte aucun élément convaincants de nature à justifier de tels comportements.
En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et déboute la salariée de ses demandes indemnitaires et de remboursement de frais en lien avec un licenciement nul ou dénué de cause réelle et sérieuse.
Sur le solde d’indemnité compensatrice de congés payés :
La salariée soutient que le treizième mois versé fait partie du mode de sa rémunération tenant compte du temps de travail effectif correspondant au forfait annuel de 215 jours, et qu’il est dès lors obligatoire et permanent, qu’il doit être inclus dans l’assiette de calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés, à l’instar de la prime contractuelle pouvant varier de 0 à 15% de la rémunération annuelle de base, et dont le montant est fonction de la réalisation des objectifs convenus avec son responsable hiérarchique, versée au prorata temporis en fin d’exercice. Elle en déduit un reliquat d’indemnité.
L’employeur réplique que la règle, plus favorable, du maintien du salaire, a été appliquée sur la base de 21,4 jours de congés payés non soldés sans inclure dans l’assiette de calcul le treizième mois et la prime de fin d’exercice qui sont des éléments qui couvrent l’ensemble de l’année.
Le contrat de travail prévoit que la rémunération est fixée de la manière suivante :
» – une rémunération annuelle brute de base de 31 200 € (trente et un mille deux cents Euros) versée en 13 mensualités de 2 400 € (deux mille quatre cents Euros) ;
– une prime pouvant varier de 0 à 15 % de la rémunération annuelle de base, et dont le montant sera fonction de la réalisation des objectifs convenus entre Mademoiselle [L] [I] et son responsable hiérarchique, versée prorata temporis en fin d’exercice.
Cette rémunération correspond à un forfait annuel de 215 jours de travail se décomposant comme suit : 214 jours en application des prescriptions de la Convention Collective Nationale des Commerces de Gros auxquels s’ajoute une journée au titre de la solidarité des personnes âgées et des personnes handicapées afin de financer les actions en faveur de leur autonomie. »
Selon l’article L. 3141-24 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés inclut les éléments de rémunération qui sont, au moins pour partie, versés en contrepartie directe ou indirecte du travail personnel du salarié et dont le montant est affecté par la prise des congés.
Nonobstant la formulation contenue dans le contrat de travail reproduite supra, il résulte des éléments d’appréciation que le treizième mois ne constitue pas la contrepartie du travail effectif du salarié puisqu’il est calculé pour l’année entière, périodes de travail et de congé confondues, en sorte que son montant n’est pas affecté par le départ de la salariée en congé.
De même, il ressort des éléments d’appréciation, dont les bulletins de salaire, que la prime sur objectifs n’est pas, même partiellement, assise sur des résultats produits par le travail personnel de la salariée, et n’est pas non plus affectée par la prise des congés.
En conséquence, ces deux primes sont exclues de l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés, ce dont il résulte que la demande d’un solde d’indemnité compensatrice de congés payés formée par la salariée, qui ne découle que de l’inclusion de ces primes dans l’assiette de calcul de cette indemnité, doit être en voie de rejet, les calculs de l’employeur ne souffrant par ailleurs d’aucune lacune.
Sur le solde d’indemnité compensatrice de repos forfait jours :
La salariée sollicite un solde d’indemnité à ce titre pour 4,20 jours selon des calculs que l’employeur conteste.
Il résulte de l’article 1.4 de l’avenant du 30 juin 2016 à l’accord du 14 décembre 2001 relatif au forfait annuel en jours, qu’en cas de rupture du contrat de travail en cours d’année civile, le nombre de jours de travail au titre de la convention de forfait annuel en jours est déterminé prorata temporis, dans les conditions fixées au paragraphe 1.1, compte tenu du nombre de jours courant du 1er janvier de l’année en cause à la date de rupture du contrat de travail.
Selon les calculs de la salariée conformes à ces dispositions, celle-ci justifie d’un reliquat d’indemnité compensatrice de repos forfait jours pour 4,20 jours d’un montant de 340,79 euros bruts quand l’employeur ne conteste pas utilement ces mêmes calculs et propose un contre-chiffrage sur la base d’un forfait mensuel sans le détailler ni même l’expliquer, se bornant à qualifier son calcul de » satisfactoire « .
Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce chef, la somme de 340,79 euros bruts étant allouée à la salariée.
Sur le solde d’indemnité conventionnelle de licenciement :
La salariée réclame un solde d’indemnité conventionnelle de licenciement en vertu de l’article 4 de la convention collective applicable, quand l’employeur conteste la moyenne de salaire retenue par la salariée et oppose ses propres calculs dont il déduit l’absence de solde restant à lui régler.
Pour le calcul de l’indemnité conventionnelle de licenciement égale à 3/10 de mois par année de présence dans la tranche de 0 à 9 ans inclus, le salaire à prendre en compte étant le 1/12ème de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou selon la formule la plus avantageuse, le tiers des 3 derniers mois, en retenant les primes au prorata temporis, la salariée retient à juste raison un salaire mensuel selon la formule la plus avantageuse d’un montant de 4630,87 euros alors que l’employeur ne justifie pas de ses calculs l’ayant conduit à lui verser une indemnité assise sur un montant mensuel moindre.
La salariée est dès lors fondée en sa demande de paiement d’un solde de 186,09 euros nets de ce chef, le jugement étant également infirmé sur ce point.
Sur les intérêts au taux légal :
Les intérêts au taux légal courront sur les sommes allouées à compter de la date de présentation de la lettre recommandée de convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et d’orientation, ou de la première demande en justice qui en a été faite.
Sur la remise de documents :
Compte tenu des développements qui précèdent, la demande de remise de documents rectifiés est justifiée. Le prononcé d’une astreinte n’apparaît pas nécessaire eu égard aux éléments de la cause.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
En équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les entiers dépens de première instance et d’appel seront supportés par l’employeur en l’état d’une succombance partielle. Le jugement est dès lors infirmé sur ce point.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire :
Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant :
Déboute Madame [L] [I] épouse [A] de ses demandes au titre d’un harcèlement moral et d’un licenciement nul.
Dit bien-fondé son licenciement disciplinaire.
La déboute en conséquence de l’ensemble de ses demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamne la société Pomona à payer à Madame [L] [I] épouse [A] les sommes suivantes :
– 340,79 euros bruts à titre de solde d’indemnité compensatrice de repos forfait jours,
– 186,09 euros nets à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement.
Dit que les intérêts au taux légal courront sur ces sommes à compter de la date de présentation de la lettre recommandée de convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et d’orientation, ou de la première demande en justice qui en a été faite.
Condamne la société Pomona à remettre à Madame [L] [I] épouse [A] un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation Pôle Emploi rectifiée conformes au présent arrêt.
Dit qu’il n’y a pas lieu de prononcer une astreinte.
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties pour le surplus.
Condamne la société Pomona aux entiers dépens de première instance et d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Thierry CABALE, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier en pré-affectation, Le président,