Nullité de contrat : 16 mars 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/03097

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Nullité de contrat : 16 mars 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/03097

N° RG 21/03097 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I3AU

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 16 MARS 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

20/02466

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’EVREUX du 6 juillet 2021

APPELANTE :

S.A.S.U. OLINN BUSINESS SOLUTIONS

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Stéphane SELEGNY de la SELARL AXLAW, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEES :

Madame [J] [L]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée et assistée de Me Vincent BEUX-PRERE, avocat au barreau de ROUEN

Société KOESIO ASSET MANAGEMENT anciennement dénommée Holding Lease France

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN et assistée de Me Marine DUPONCHEEL de l’AARPI Nerio Avocat.e.s, avocat au barreau de PARIS, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 04 Janvier 2023 sans opposition des avocats devant M. URBANO, Conseiller, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme FOUCHER-GROS, Présidente

M. URBANO, Conseiller

Mme MENARD-GOGIBU, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DEVELET, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 4 janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 16 mars 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Rendu publiquement le 16 mars 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme Foucher-Gros, Présidente et par Mme Riffault, Greffière.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 30 mai 2017, Mme [L], architecte, a conclu avec la société Holding Lease France, par l’intermédiaire d’une société Audit Finance Bureautique qui n’est pas à la cause, un contrat de location portant sur deux copieurs de marque Canon et un serveur Nas Synology.

Le 22 juillet 2017, Mme [L] a signé un procès-verbal de réception du matériel donné à bail.

Le 30 juin 2017, le contrat de location a été cédé par la société Holding Lease France, désormais dénommée Koesio Asset Management à la société Geolia Leasing Solutions désormais dénommée Olinn Business Solutions.

Durant les mois de juin 2017 à mars 2019, Mme [L] a réglé les loyers correspondants à la location des copieurs et du serveur à la société Olinn Business Solutions.

Mme [L] ayant été défaillante par la suite, la société Olinn Business Solutions l’a mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 juillet 2019.

Le 26 août 2019, la société Olinn Business Solutions s’est prévalue de la clause résolutoire qui aurait été, selon elle, insérée dans le contrat de location.

La défaillance ayant persistée, la société Olinn Business Solutions a fait assigner Mme [L] et la société Holding Lease France devant le tribunal judiciaire d’Evreux qui, par jugement réputé contradictoire (Mme [L] étant non comparante) du 6 juillet 2021, après avoir constaté que les conditions générales du contrat de location longue durée n’avaient pas été produites, a statué comme suit :

– Rejette la demande de la société Olinn Business Solutions en constatation de la résiliation de plein droit du contrat de location initialement conclu entre la société Holding Lease France et Mme [L] le 30 mai 2017 ;

– Rejette les demandes de la société Olinn Business Solutions relatives à la restitution du matériel, objet dudit contrat ;

– Condamne Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 6832,80 euros arrêtée au 1er juillet 2019 au titre du contrat de location longue durée du 30 mai 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 2019 ;

– Rejette les autres demandes indemnitaires de la société Olinn Business Solutions ;

– Dit n’y avoir lieu à capitalisation des intérêts ;

– Rejette l’appel en garantie de la société Olinn Business Solutions à l’encontre de la société Holding Lease France ;

– Condamne Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne la société Olinn Business Solutions à payer à la société Holding Lease France la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne Mme [L] aux entiers dépens de la procédure.

La société Olinn Business Solutions a interjeté appel de cette décision par déclaration du 27 juillet 2021.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 22 septembre 2022, la demande de sursis à statuer formée par Mme [L] dans l’attente d’une décision pénale devant intervenir suite à son dépôt de plainte a été rejetée.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 janvier 2023.

EXPOSE DES PRETENTIONS

Vu les conclusions du 8 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de la société Olinn Business Solutions qui demande à la cour de:

Débouter Madame [J] [L] et la Société Holding Lease France (HLF) de l’ensemble de leurs prétentions en tant que ces dernières font grief à la société Olinn Business Solutions.

Et dans le dernier état de la procédure,

Au visa notamment des dispositions des articles 1103 et 1217 et suivants du Code civil,

Recevant la société Olinn Business Solutions en son appel et l’en disant bien fondée :

Réformer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté la société Olinn Business Solutions de ses demandes tendant au constat de la résiliation de plein droit du contrat aux torts de Madame [J] [L] et de celles tendant à ce que lui soient restitués les matériels en faisant l’objet, outre que lui soit payée l’indemnité contractuelle de résiliation.

Statuant à nouveau de ces chefs :

Ordonner la résiliation de plein droit du contrat de location initialement conclu entre la société Holding Lease France (HLF) et Madame [J] [L] le 30 mai 2017 et dont la société Olinn Business Solutions est devenue cessionnaire, aux torts de Madame [J] [L].

Condamner Madame [J] [L] à restituer à la société Olinn Business Solutions les matériels objet du contrat rompu, savoir un copieur Canon IRC 5235i, n° de série JMC02519, un copieur Canon IRC 255i, n° de série WKL09270, un serveur Synology Nas, n° de série 15A0MPN409418 et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de huit jours à compter de la date de signification de l’arrêt à intervenir.

Condamner Madame [J] [L] à procéder à cette restitution à ses frais et au lieu du territoire français désigné par la société Olin Business Solutions dans le cadre de l’exécution de l’arrêt à intervenir,

En tant que de besoin, autoriser la société Olinn Business Solutions à appréhender son matériel partout où besoin sera, et ce avec le concours de la force publique s’il y a lieu.

Condamner Madame [J] [L] à payer à la société Olinn Business Solutions, à titre d’indemnité contractuelle de résiliation, la somme de 37.580,40 euros, et ce avec intérêts au taux conventionnel égal à trois fois le taux d’intérêts légal en vigueur, à compter du 26 août 2019, date de résiliation du contrat.

A titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la société Olinn Business Solutions serait déboutée des demandes qu’elle formule à l’encontre de Madame [J] [L] :

Condamner la société Holding Lease France (HLF) à payer à la société Olinn Business Solutions, à titre de dommages et intérêts, la somme de 39.858 euros au titre du manque à gagner que subirait la société Olinn Business Solutions en une telle circonstance.

En toute hypothèse :

Ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du Code civil.

Condamner Madame [J] [L] et la société Holding Lease France (HLF), ou celle des deux qui le mieux le devra, à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Les condamner mêmement aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 16 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de la société Koesio Asset Management qui demande à la cour de:

Vu l’article 1103 du Code civil (ancien 1134) ;

Vu les conditions générales de vente du contrat de location ;

Vu les pièces versées aux débats

– Dire et juger le contrat de location longue durée régulier et valable ;

– Statuer ce que de droit sur la demande d’Olinn Business Solutions tendant à voir prononcer la résiliation du contrat de location longue durée aux torts exclusifs de Madame [J] [L] ;

En tout état et d’une part :

– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Olinn Business Solutions de son appel en garantie dirigé contre Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) ;

Par conséquent :

– Débouter Olinn Business Solutions de son appel en garantie dirigé contre Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) en cause d’appel ;

D’autre part :

– Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Olinn Business Solutions à régler à Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile en première instance ;

– Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Madame [J] [L] à régler à Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) les entiers dépens ;

En tout état de cause :

– Débouter Madame [J] [L] de ses demandes contre Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) ;

– Débouter Olinn Business Solutions de ses demandes contre Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) ;

– Condamner toute partie succombante à verser à Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel ;

– Condamner toute partie succombante à régler à Koesio Asset Management (anciennement Holding Lease France) les entiers dépens de première instance et d’appel que la SELARL Gray Scolan, avocats associés, sera autorisée à recouvrer, pour ceux la concernant, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Vu les conclusions du 10 février 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de Mme [L] qui demande à la cour de:

Confirmer la décision du 6 juillet 2017 du tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’elle a rejeté la société Olinn Business Solutions :

1/ De sa demande de constatation de la résiliation de plein droit du contrat du 30 mai 2017,

2/ De sa demande de restitution avec astreinte du matériel,

3/ De sa demande de condamnation de la somme de 37 580, 40 € avec intérêts à titre d’indemnité contractuelle de résiliation et ses autres demandes indemnitaires, et qu’il n’y a pas lieu à capitalisation des intérêts.

Réformer la décision du tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’elle :

1/ L’a condamnée à payer à la société Olinn Business Solutions, la somme de

6 832,80 € arrêtée au 1er juillet 2019 au titre du contrat de location longue durée du 30 mai 2017 avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 2019,

2/ A rejeté l’appel en garantie de la société Olinn Business Solutions à l’encontre de la société Holding Lease France ;

3/ L’a condamnée à payer à la société Olinn Business Solutions à lui payer la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi que les dépens de la procédure.

Et statuant à nouveau, sur l’appel incident de Madame [J] [L] :

Prononcer l’annulation du contrat du 30 mai 2017, objet de la cession du 30 juin 2017 et en conséquence l’annulation de cette cession et ce, en application des articles 1128 et suivants du Code civil et 1216 et suivants du Code Civil.

Débouter la société Olinn Business Solutions de toutes ses demandes.

Subsidiairement :

En application des dispositions des articles, 1103, 1216 et suivants du Code Civil, déclarer inopposable la cession du contrat du 30 juin 2027 à Madame [J] [L] ainsi que les clauses générales du contrat du 30 juin 2017 invoquées par la société Olinn Business Solutions.

Dans la négative, en application de l’article 1231-5 du Code civil, réduire à l’euro symbolique les sommes réclamées au titre des indemnités de résiliation.

Plus généralement débouter la société Olinn Business Solutions de toutes ses demandes à l’encontre de Madame [J] [L] y compris celles fondées sur la restitution du matériel avec astreinte.

Condamner chacune des sociétés Olinn Business Solutions et Holding Lease à payer à Madame [L] la somme de 2 000 € en application de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la validité du contrat de bail, la demande de résiliation de plein droit de ce contrat et celle en restitution du matériel loué:

Exposé des moyens :

La société Olinn Business Solutions soutient que :

– les conditions générales du contrat de location prévoient en leur article 14.2 une résiliation de plein droit en cas de loyers impayés huit jours après une mise en demeure et la société Olinn Business Solutions a adressé une mise en demeure à Mme [L] le 10 juillet 2019 qui n’a pas été suivie d’effet ; Mme [L] a apposé sa signature sous la mention selon laquelle elle les a acceptées ; ces conditions lui sont opposables ;

– les demandes de Mme [L] tendant à ce que la société Olinn Business Solutions soit déboutée de ses demandes ne sont pas motivées et il n’appartient pas à la cour de pallier la carence de Mme [L] sur ces points ;

– si Mme [L] soutient avoir été trompée par la société Audit Finance Bureautique qui lui aurait fait signer en blanc un ou plusieurs contrats, il convient de constater que cette société n’est pas à la cause, que le contrat la liant à la société Olinn Business Solutions a été signé par Mme [L] et qu’elle a signé le procès-verbal de réception du matériel donné en location ;

– le moyen selon lequel, sur le foncement de l’article 1216 du code civil, la cession du contrat entre la société Koesio Asset Management et la société Olinn Business Solutions lui serait inopposable comme procédant d’un dol doit être rejeté dès lors que Mme [L] a accepté par anticipation la cession du contrat, que la société Koesio Asset Management lui a notifié cette cession et qu’elle a réglé les loyers correspondants à la société Olinn Business Solutions pendant près de deux ans ;

– le moyen selon lequel le contrat cédé à la société Olinn Business Solutions ne serait pas celui signé puisqu’il porte un numéro de référence différent doit être rejeté, le fait que le numéro de référence interne de la société Olinn Business Solutions soit distinct de celui de la société Koesio Asset Management ne modifiant en rien la teneur du contrat cédé.

La société Koesio Asset Management soutient que :

– la société Audit Finance Bureautique, la société Olinn Business Solutions et la société Koesio Asset Management sont liées par une convention tripartite par laquelle ces deux dernières sociétés ont agréé la société Audit Finance Bureautique en qualité de « fournisseur » ; celle-ci démarche ses clients pour leur proposer des matériels informatiques ; si le client souhaite louer le matériel, la société Audit Finance Bureautique dispose de formulaires de contrat de location à l’entête de la société Koesio Asset Management laquelle se charge uniquement du financement de l’opération en formant une demande auprès de la société Olinn Business Solutions ;

– le contrat a été signé par Mme [L] le 30 mai 2017 qui a également signé le procès-verbal de réception des matériels loués le 22 juin 2017 ; le contrat a été cédé par la société Koesio Asset Management à la société Olinn Business Solutions le 30 juin 2017 et la société Koesio Asset Management a avisé Mme [L] de cette cession ;

– s’agissant des conditions générales et de l’opposabilité de la cession du contrat à Mme [L] , la société Koesio Asset Management reprend l’argumentation de la société Olinn Business Solutions ;

– Mme [L] ne met pas en cause la société Koesio Asset Management lorsqu’elle affirme avoir été trompée par la société Audit Finance Bureautique ;

– elle a signé le contrat ainsi que le procès-verbal de réception du matériel loué ; à supposer qu’elle ait signé ces documents en blanc, elle a commis une faute qui lui interdit d’échapper à ses obligations contractuelles à l’égard de la société Olinn Business Solutions alors qu’elle est une professionnelle ; au surplus, elle a payé pendant près de deux ans les loyers d’un contrat de bail qu’elle conteste avoir conclu.

Mme [L] soutient que :

– elle a été abusée par des escrocs qui l’ont convaincue de s’adresser à plusieurs organismes financiers pour financer le coût d’un seul photocopieur et elle a signé en blanc trois contrats destinés à racheter un précédent contrat ;

– elle n’a jamais voulu être financièrement engagée pour la location de plusieurs photocopieurs ;

– elle a cru que le paiement de plusieurs loyers pour un même photocopieur était normal le temps de la régularisation du contrat final destiné à racheter un précédent contrat ;

– elle a été victime d’une escroquerie peu important sa qualité de professionnelle et elle a porté plainte pour ces faits;

– le contrat porte deux dates (30 mai et 30 juin 2017) ce qui accrédite le fait qu’ils aient été signés en blanc;

– si la procédure pénale en cours devait révéler la fraude commise à son égard, le contrat de bail serait nul et ne pourrait être opposé à Mme [L] ;

– les deux numéros de série ne sont pas renseignés sur le bail et « ceci pose problème afin de savoir si les copieurs livrés ont fait l’objet d’autres contrats pour lesquels Mme [L] est poursuivie » ;

– les conditions générales ne sont ni paraphées ni signées et elles sont inopposables à Mme [L] ;

– n’ayant pas valablement consenti au contrat de bail, sa cession n’a pu valablement opérer alors qu’elle n’a pas consenti à la cession ;

– le contrat cédé ne porte pas le même numéro que le contrat prétendument souscrit par Mme [L] ;

– elle ne possède pas les matériels dont la restitution est demandée.

Réponse de la cour :

Aux termes de l’article 1137 du code civil « Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des man’uvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie’ »

Il ressort des pièces versées aux débats la chronologie suivante :

– par acte du 13 mars 2017, les sociétés HLF et Geolia, se sont accordées afin de coopérer commercialement et elles ont agréé la société Audit Finance Bureautique en qualité de « fournisseur » par convention tripartite du 23 juin 2017 à charge pour cette dernière de démarcher la clientèle et de se charger du choix des matériels et de leur entretien en cours de contrat ;

– le 30 mai 2017 Mme [L] a signé avec la société HLF, par l’intermédiaire de la société Audit Finance Bureautique, un contrat de location longue durée d’un copieur Canon IRC 5235i, d’un copieur Canon IRC 255i et d’un serveur Nas Synology moyennant 21 loyers trimestriels de 2847 euros, les conditions générales du contrat prévoyant expressément la faculté pour la société HLF de céder le contrat a un organisme financier (article 10.2) ;

– par avenant du 22 juin 2017, Mme [L] a donné son accord par anticipation à la cession du contrat et a accepté que cette cession produise effet à son égard à la suite d’une simple notification ;

– le 22 juin 2017, Mme [L] a signé le procès-verbal de réception attestant de la livraison des trois matériels objet du contrat de bail,

– le même jour, la société Audit Finance Bureautique, a établi deux factures au nom de la société HLF portant sur les trois matériels considérés ;

– le 30 juin 2017, la société HLF a signé le contrat de location ;

– le même jour, la société HLF a cédé à la société Geolia Leasing Solutions sa créance à l’égard de Mme [L] et elle a établi une facture au nom de cette dernière au titre de l’équipement objet du bail initial ;

– par courrier du même jour, HLF a notifié la cession à Mme [L] ;

– les loyers ont été payés par Mme [L] jusqu’au 1er avril 2019, date de sa première défaillance ;

– le 10 juillet 2019, la société Geolia Leasing Solutions a adressé à Mme [L] une mise en demeure de paiement des loyers impayés du 1er avril au 1er juillet 2019 d’un montant de 6940,23 euros ;

– par courrier recommandé du 26 août 2019, la société Olinn Business Solutions a résilié le contrat de bail considéré.

Au préalable il convient de constater que Mme [L] n’a jamais attrait en la cause la société Audit Finance Bureautique alors qu’elle forme une demande en nullité du contrat principal au motif que cette dernière l’aurait sciemment trompée afin d’obtenir son consentement.

Se prévalant d’un dol, il appartient à Mme [L] de démontrer l’existence de man’uvres commises par la société HLF devenue depuis la société Koesio Asset Management et, à tout le moins, l’existence d’une collusion entre la société Audit Finance Bureautique et la société HLF, collusion sans laquelle les prétendues man’uvres imputées à la société Audit Finance Bureautique ne pourraient entrainer aucune conséquence à l’égard de la société Koesio Asset Management ni de la société Olinn Business Solutions.

Il ressort des éléments rapportés ci-dessus, que :

– Mme [L] ne rapporte pas la preuve d’avoir signé « en blanc » le contrat qui lui est opposé par les intimées, l’existence de deux dates de signature ne constituant pas un indice suffisant de ce fait ;

– elle ne démontre pas l’existence d’une quelconque man’uvre qui aurait pu être commise par la société Audit Finance Bureautique pas plus que l’existence d’une collusion avec la société HLF ou avec la société Geolia ;

– elle ne donne aucune explication sur le fait que sa signature a été apposée sur le procès-verbal de réception du 22 juin 2017 et la cour constate que Mme [L] n’a pas allégué qu’elle avait signé ce document « en blanc » ;

– les loyers dus jusqu’au 1er avril 2019, soit sur plus d’un an et demi, ont été payés par elle sans aucune contestation et la durée pendant laquelle Mme [L] a effectué ces paiements réguliers exclut totalement qu’elle ait pu se méprendre sur la teneur de ses engagements et croire qu’une prétendue régularisation, portant sur des loyers réglés au titre d’un contrat racheté qui n’avait plus d’existence, pouvait intervenir à l’issue d’une durée aussi longue.

Mme [L] sera déboutée de sa demande tendant à la nullité du contrat souscrit avec la société HLF devenue la société Koesio Asset Management.

La société Olinn Business Solutions produit l’acte de cession de la créance de la société HLF sur Mme [L] dont la simple lecture démontre que c’est effectivement le contrat signé par cette dernière (même date, même loyer) qui a été cédé à la société Geolia étant observé que la facture émise par la société HLF au nom de la société Geolia à cette occasion porte la référence F73870 qui figure sur le contrat initial du 30 mai 2017.

Aux termes de l’article 1216 du code civil : « Un contractant, le cédant, peut céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l’accord de son cocontractant, le cédé.

Cet accord peut être donné par avance, notamment dans le contrat conclu entre les futurs cédant et cédé, auquel cas la cession produit effet à l’égard du cédé lorsque le contrat conclu entre le cédant et le cessionnaire lui est notifié ou lorsqu’il en prend acte. »

Dans l’avenant signé par Mme [L] le 22 juin 2017, celle-ci a donné son accord par anticipation à la cession du contrat et a accepté que cette cession produise effet à son égard à la suite d’une simple notification étant observé que cette notification a été faite le 30 juin 2017 de sorte que la cession du contrat lui est bien opposable.

Le fait que les numéros de série des deux copieurs ne soient pas renseignés dans le bail n’entraîne aucune conséquence dès lors que la marque « Canon » y est indiquée ainsi que leur modèle IRC 5235i et IRC 255i et que ces mentions suffisent à les individualiser.

La société Olinn Business Solutions verse aux débats les conditions générales du contrat signé par Mme [L] et par la société HLF les 30 mai et 30 juin 2017.

Ces conditions générales sont opposables à Mme [L] qui, en signant le contrat de bail, a déclaré les accepter expressément, peut important qu’elle ne les ait ni signées ni paraphées.

L’article 14.2 de ces conditions prévoit une résiliation de plein droit en cas de loyers impayés huit jours après une mise en demeure adressée au preneur et la société Olinn Business Solutions justifie avoir adressé une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception à Mme [L] le 10 juillet 2019 qui n’a pas été suivie d’effet.

Il s’ensuit que la société Olinn Business Solutions peut se prévaloir de la résiliation de plein droit du bail (et non de son prononcé, la demande formée en ce sens par l’appelante étant une erreur de plume) du fait de la persistance de la défaillance de Mme [L] malgré le courrier de mise en demeure qui lui a été adressé et peut également obtenir la restitution du matériel donné à bail à Mme [L] et que celle-ci a expressément reconnu avoir reçu.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté la demande de la société Olinn Business Solutions en constatation de la résiliation de plein droit du contrat de location initialement conclu entre la société Holding Lease France et Mme [L] le 30 mai 2017 et rejeté les demandes de la société Olinn Business Solutions relatives à la restitution du matériel, objet dudit contrat et il sera fait droit à ces deux demandes, la restitution étant ordonnée sous astreinte telle que précisée au dispositif.

Sur les paiements réclamés:

Exposé des moyens :

Mme [L] soutient que si la cour considérait que son consentement avait été valablement donné au contrat de bail, la somme réclamée par la société Olinn Business Solutions doit être considérée comme une clause pénale et ramenée à un euro ;

La société Olinn Business Solutions soutient que si l’indemnité de résiliation est une clause pénale, son préjudice est au moins égal aux loyers à échoir impayés de sorte que ce poste ne peut être minoré et que seule la pénalité de 10% comprise dans cette indemnité pourrait faire l’objet d’une réduction mais à supposer qu’elle soit considérée comme manifestement excessive, ce qui n’est pas démontré.

La société Koesio Asset Management soutient que l’indemnité de résiliation n’est pas une clause pénale.

Réponse de la cour :

Aux termes de l’article 1231-5 du code civil: « Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure. ».

Le contrat du 30 mai 2017 en ses articles 3.3 et 14.3 prévoit qu’en cas de résiliation du contrat, le preneur devra payer outre les loyers échus impayés, les loyers à échoir jusqu’au terme du contrat outre 10%, le tout avec intérêts égaux à trois fois le taux légal à compter du jour de la résiliation et capitalisation des intérêts.

La clause qui porte sur le paiement des loyers à échoir et sur une pénalité de 10% constitue une sanction forfaitaire en cas d’inexécution d’une obligation et doit être qualifiée de clause pénale.

Mme [L] ne démontre pas que cette clause contractuellement adoptée par les parties présente un caractère manifestement excessif au regard du préjudice subi par le créancier. En outre, elle ne verse aux débats aucune pièce justifiant de sa situation financière ou personnelle.

La société Olinn Business Solutions a procédé au calcul de l’indemnité de résiliation qu’elle réclame à Mme [L] dans ses écritures. Au regard des loyers restant à échoir à compter du 1er octobre 2019 jusqu’au 1er juillet 2022 pour la somme de 34 164 euros (hors taxes) outre une pénalité de 10%, le total est de 37 580,40 euros (hors taxes). Cette somme est due par Mme [L] avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter du 26 août 2019, date de résiliation du contrat, et capitalisation des intérêts.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 6832,80 euros arrêtée au 1er juillet 2019 au titre du contrat de location longue durée du 30 mai 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 2019, rejeté les autres demandes indemnitaires de la société Olinn Business Solutions et dit n’y avoir lieu à capitalisation des intérêts et Mme [L] sera condamnée à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 37 580,40 euros avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter du 26 août 2019 et capitalisation des intérêts.

Le recours exercé par la société Olinn Business Solutions contre la société Koesio Asset Management n’étant formé qu’à titre subsidiaire en cas de rejet de ses demandes contre Mme [L], il est sans objet.

Me [L] qui a interjeté appel de la disposition du jugement qui rejette l’appel en garantie de la société Olinn Business Solutions à l’encontre de la société Holding Lease France ne présente aucune prétention sur ce point. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire;

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a :

– rejeté l’appel en garantie de la société Olinn Business Solutions à l’encontre de la société Holding Lease France ;

– condamné Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné Mme [L] aux dépens de première instance

Statuant à nouveau :

Constate la résiliation de plein droit du contrat de location initialement conclu entre la société Holding Lease France et Mme [L] le 30 mai 2017 et dont la société Olinn Business Solutions est devenue cessionnaire ;

Condamne Mme [L] à restituer à la société Olinn Business Solutions le copieur Canon IRC 5235i, n° de série JMC02519, le copieur Canon IRC 255i, n° de série WKL09270 et le serveur Synology Nas, n° de série 15A0MPN409418 et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de huit jours à compter de la signification du présent arrêt ;

Dit que l’astreinte sera due pendant une durée de soixante jours au-delà de laquelle il sera à nouveau fait droit ;

Condamne Mme [L] à procéder à cette restitution à ses frais et en tant que de besoin, autorise la société Olinn Business Solutions à appréhender son matériel partout où besoin sera, et ce avec le concours de la force publique s’il y a lieu ;

Condamne Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 37 580,40 euros avec intérêts au taux égal à trois fois le taux légal à compter du 26 août 2019 et capitalisation des intérêts ;

Y ajoutant ;

Déboute Mme [L] de sa demande tendant à la nullité du contrat souscrit avec la société HLF devenue la société Koesio Asset Management ;

Condamne Mme [L] aux dépens de la procédure d’appel avec droit de recouvrement direct accordé à la SELARL Gray Scolan ;

Condamne Mme [L] à payer à la société Olinn Business Solutions la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [L] à payer à la société Koesio Asset Management la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes présentées au titre des frais irrépétibles.

La greffière, La présidente,

 


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