PhD/ND
Numéro 23/1028
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRÊT DU 16/03/2023
Dossier : N° RG 21/02518 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H6EP
Nature affaire :
Prêt – Demande en remboursement du prêt
Affaire :
[O] [N], [Y] [E] [P] épouse [N]
C/
S.A. CREDIPAR LIERS
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 16 Mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 19 Janvier 2023, devant :
Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Nathalène DENIS, greffière présente à l’appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [O] [N]
né le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 8]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Nouhou DIALLO, avocat au barreau de BAYONNE
Madame [Y] [E] [P] épouse [N]
née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 7]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 5]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/4907 du 24/09/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PAU)
Représentée par Me Nouhou DIALLO, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
S.A. CREDIPAR
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Guillaume FRANCOIS de la SELARL AQUI’LEX, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
Assistée de Me Brigitte CHEMIN-DUFRANC (SCP AVOCAGIR), avocat au barreu de BORDEAUX
sur appel de la décision
en date du 13 JUILLET 2021
rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE BAYONNE
FAITS – PROCEDURE – PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Suivant offre préalable acceptée le 21 juillet 2015, la société Credipar (sa) a consenti à M. [O] [N], et à son épouse, Mme [Y] [P] (ci-après les époux [N]) un crédit affecté de 15.000 euros pour l’acquisition d’un véhicule automobile au prix de 30.700 euros, remboursable en 48 mensualités de 171,23 euros et une dernière mensualité de 10.745 euros, au taux annuel de 7,50 %.
La dernière échéance n’ayant pas été réglée, et après vaine mise en demeure, le prêteur s’est prévalu de la déchéance du terme suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 3 mars 2020.
Sur requête du prêteur, et par ordonnance du 29 octobre 2020, le juge des contentieux de la protection de Bayonne a enjoint aux époux [N] de payer solidairement la somme de 10.678,38 euros outre les intérêts au taux conventionnel.
Cette ordonnance a été signifiée le 26 novembre 2020.
Par déclaration enregistrée le 4 décembre 2020 au greffe du juge des contentieux de la protection de Bayonne, les époux [N] ont formé opposition contre ladite ordonnance.
Par jugement contradictoire du 13 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection a :
– déclaré recevable l’opposition
– condamné solidairement Mme [P], épouse [N] et M. [O] [N] à payer à la société Crédipar la somme de 11.642,10 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,50 % à compter du 3 mars 2020 sur la somme de 10.782,50 euros
– débouté les époux [N] de leurs demandes
-débouté la société Crédipar de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile
– condamné les époux [N] aux dépens
– ordonné l’exécution provisoire.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 27 juillet 2021, les époux [N] ont relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 14 décembre 2022.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 23 septembre 2021 par les époux [N] qui ont demandé à la cour, au visa des articles 6, 1130 et 1343-5 du code civil, d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau de :
A titre principal :
– annuler le crédit ballon signé le 21 juillet 2015
– débouter la société Crédipar de ses demandes.
A titre subsidiaire :
– leur accorder 24 mois de délais de paiement pour s’acquitter de la créance
– dire n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions notifiées le 22 novembre 2022 par la société Crédipar qui a demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner les appelants à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
sur la nullité du crédit affecté pour erreur
Les appelants reprennent devant la cour leur moyen tiré de la nullité du contrat de prêt pour « erreur », au visa de l’article 1130 du code civil, sur lequel n’a pas statué le premier juge, au motif, non plus qu’ils était illettrés et incapables de comprendre la portée de leur engagement mais que Mme [N], ne sachant ni lire ni écrire, n’avait pas compris qu’elle s’était obligée à rembourser le prêt en versant une dernière mensualité de 10.782,50 euros, selon des modalités inadaptées aux capacités financières du couple qui disposait, à la date du prêt, de revenus mensuels de 1.808 euros.
Mais, d’abord, le crédit affecté ayant été souscrit le 21 juillet 2015, les époux [N] ne peuvent fonder leur action en nullité du contrat sur les dispositions légales issues de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016.
En l’espèce, le moyen de nullité tiré de l’erreur doit être examiné sur le fondement des articles 1109 et 1110 anciens du code civil, ce dernier texte disposant que l’erreur est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance de la chose qui en est l’objet.
En l’espèce, il faut constater que le moyen de nullité, très laconiquement développé, ne pourrait, s’il était admis, entraîner la nullité du contrat qu’à l’égard de Mme [N], laissant intacte l’obligation contractée par son mari.
Par ailleurs, le moyen soutenant, au titre de l’erreur, que le prêt n’était pas adapté aux capacités de remboursement des emprunteurs est inopérant, puisqu’il stigmatise une faute de nature à mettre en jeu la responsabilité contractuelle du prêteur et non à anéantir le contrat.
Et, s’il est établi par les attestations versées aux débats que Mme [N] ne sait ni lire ni écrire, présentant également une pathologie oculaire, il ne peut être déduit de ces faits l’existence d’une erreur-obstacle qui aurait vicié son consentement.
En effet, d’une part, il n’est pas allégué que les facultés mentales de Mme [N] étaient altérées lors de la souscription du crédit.
D’autre part, l’opération, réalisée par l’intermédiaire du vendeur, s’est déroulée en la présence constante de son mari, le couple poursuivant un projet commun d’acquisition d’un véhicule neuf de 30.700 euros, avec reprise et apport partiel, pour les besoins de la vie commune, selon un financement qui leur permettait d’envisager, au terme des quatre premières années, de vendre, le cas échéant, leur véhicule à un prix compatible avec le montant de la dernière échéance de 10.745 euros.
Mme [N], en signant les documents contractuels avec l’assistance constante de son mari avec lequel elle poursuivait le projet d’acquisition, s’est donc engagée en toute connaissance de cause des conditions et modalités de remboursement du prêt, les emprunteurs ayant reçu, préalablement, les informations pré-contractuelles légales ainsi que l’étude de solvabilité faisant ressortir l’adéquation de leurs biens et revenus avec le financement sollicité.
Il s’ensuit qu’il a lieu de débouter les époux [N] de leur demande de nullité du contrat de crédit affecté fondée sur l’erreur.
Le jugement sera confirmé sur leur condamnation au paiement du solde du crédit affecté, aucune contestation n’ayant été élevée sur le montant de celle-ci.
Et, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de délais de paiement, les époux [N] ne justifiant pas mieux, à hauteur d’appel, de leur capacité à rembourser la dette sur 24 mois avec des revenus d’un montant annuel de 6.847 euros déclarés en 2020.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
Les époux [N] seront condamnés aux dépens d’appel et les parties déboutées de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
DEBOUTE les époux [N] de leur demande de nullité du contrat de crédit affecté souscrit le 21 juillet 2015,
CONFIRME le jugement entrepris,
y ajoutant,
CONDAMNE les époux [N] aux dépens d’appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente