Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 8
ARRÊT DU 15 FÉVRIER 2023
(n° 2023/ 32 , 20 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03087 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDEBL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Janvier 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BOBIGNY – RG n° 17/06955
APPELANTE
Madame [C] [D]
[Adresse 2]
[Localité 4]
née le 21 Janvier 1961 à [XXXXXXXX05]
De nationalité française
représentée par Me Max ARNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1992
INTIMÉES
Compagnie d’assurance ALLIANZ VIE anciennement AGF VIE
[Adresse 1]
[Localité 3]
Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 340 234 962
Compagnie d’assurance ALLIANZ IARD anciennement AGF IART
[Adresse 1]
[Localité 3]
Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 542 110 291
représentées par Me Jean Claude BENHAMOU, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB 196 et plaidant par Me Yves BILLET, substituant Me BENHAMOU, Cabinet BENHAMOU, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque BOB 196
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Julien SENEL, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre
Mme Laurence FAIVRE, Présidente de chambre
M Julien SENEL, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET
ARRÊT : Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par, Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Laure POUPET, greffière, présente lors de la mise à disposition.
****
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [C] [D], exerçant à son compte la profession de peintre en lettres dans le bâtiment, a été victime d’un accident le 18 mars 2013, en tombant avec sa caisse à outils, de sa hauteur, sur son épaule, alors qu’elle déchargeait son véhicule. Elle a subi une intervention chirurgicale pour remédier à la rupture du tendon du sus-épineux.
Mme [D] a déclaré cet accident au Régime Social des Indépendants (RSI) et elle a par ailleurs déclaré ce sinistre auprès de sa compagnie d’assurance, pour une prise en charge de son invalidité persistante, ayant été admise le 2 avril 2004 (avec effet au 4 mars 2004) au bénéfice des dispositions de la Convention d’Assurance n°1 75 181450 « AGF-Tonus-Prévoyance – Santé », puis ayant été admise par avenant en date du 31 octobre 2006 (à effet du 21 octobre 2006) au bénéfice des dispositions de la Convention d’assurance « AGF-Prévoyance Evolution », sous le même numéro de contrat, n°1 75 181450 (et pour la même date d’effet du contrat, à savoir le 4 mars 2004).
Le contrat AGF Prévoyance Evolution s’est vu attribuer, après la fusion ALLIANZ-AGF, le n° de police 8990282100.
Les assureurs ALLIANZ lui ont versé, au titre de la garantie mobilisée au vu de son arrêt de travail, 469 jours d’indemnités journalières, du 18 mars 2013 au 30 juin 2014, pour un montant de 39 986,68 euros.
Par courrier du 1er juillet 2014, les compagnies ALLIANZ ont fait savoir qu’elles acceptaient de donner suite à la demande de versement d’Indemnités Journalières pour la période du 25 au 30 juin 2014 ; qu’en revanche elles lui opposaient un refus de garantie pour la période du 1er juillet 2014 au 30 septembre 2014 au motif que les dispositions contractuelles limitaient au maximum à 365 jours, cumulés sur toute la durée de la vie du contrat, la période de prise en charge des arrêts de travail causés par certaines pathologies, et elles précisaient que cette limite avait été atteinte le 30 juin 2014, compte tenu des différents arrêts antérieurs déclarés.
Mme [D] ayant contesté ce refus de garantie, les compagnies ALLIANZ ont mandaté le docteur [X], médecin conseil aux fins d’expertise, lequel après examen médical de Mme [D] les 22 juillet et 18 novembre 2014, a fixé dans son rapport en date du 18 novembre 2014 son taux d’incapacité fonctionnelle à 10% et son taux d’incapacité professionnelle à 66%.
Le 24 novembre 2014, elle a transmis aux compagnies ALLIANZ l’avis de placement en Invalidité, à compter du 1er novembre 2014, au taux de 50% (sur la base d’un revenu annuel moyen de 14 634,71 euros), que le RSI lui a notifié le 25 septembre 2014.
Ne partageant pas l’analyse du docteur [X], qui ne lui permettait pas de bénéficier d’une rente d’invalidité permanente, d’après la commission médicale des compagnies ALLIANZ, Mme [D] a saisi par acte d’huissier du 17 mars 2015 le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny aux fins d’expertise, qui par ordonnance en date du 25 septembre 2015, a fait droit à sa demande et désigné pour ce faire le professeur [R], lequel a examiné Mme [D] le 30 novembre 2015 en présence du docteur [U], Rhumatologue (son Médecin conseil), de son ancien avocat, Me [Y] [S], et du docteur [B] (médecin conseil
mandaté par les compagnies ALLIANZ).
Après échanges de dires, l’expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 9 mai 2016, et a notamment conclu que l’arrêt de travail de Mme [D] était justifié jusqu’au 30 septembre 2014, que la date de consolidation devrait être fixée à 1 an de l’intervention chirurgicale qu’elle avait subie, soit au 30 septembre 2014, que compte tenu du bon résultat fonctionnel, l’Incapacité Permanente Partielle de Mme [D] devait être fixée à 15% selon le barème AGF et son taux d’incapacité professionnelle à 75%, compte tenu du type de profession exercé.
L’expert concluait plus précisément qu’il fallait retenir, par référence aux dispositions contractuelles, un Taux d’Incapacité Fonctionnelle de 15 % et un Taux d’Incapacité Professionnelle de 75 %.
Contestant son analyse qui ne lui permet pas de bénéficier d’une rente d’invalidité permanente, Mme [D] a, par exploit d’huissier en date du 21 juin 2017, fait assigner la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard devant le tribunal de grande instance de Bobigny.
Par jugement du 5 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– Déclaré Mme [D] recevable et partiellement bien-fondée en ses demandes,
– Déclaré la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard recevables et partiellement bien-fondées en leurs demandes reconventionnelles,
– Prononcé la caducité du contrat d’assurance n°175181450 ‘AGF Prévoyance Evolution’ à compter du 1er novembre 2014,
– Condamné in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard à payer à Mme [D] la somme de 14 533,10 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement,
– Condamné Mme [D] à rembourser à la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard la somme principale de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement,
– Ordonné la compensation entre les sommes que se doivent respectivement les parties au litige,
– Condamné in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard aux entiers dépens, dont distraction,
– Condamné in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard à payer à Mme [D] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté Mme [D] du surplus de ses prétentions, et notamment de sa demande de condamnation de la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard à lui verser une rente d’invalidité permanente sur la base d’un coefficient de 100% et de sa demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle mesure d’expertise,
– Débouté la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ Iard du surplus de leurs prétentions, et notamment de leurs demandes reconventionnelles en paiement de la somme de 39 986,68 euros et de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration électronique du 15 février 2021, enregistrée au greffe le 18 février 2021, Mme [D] a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a :
– Déclaré Mme [C] [D] recevable et partiellement bien fondée en ses demandes ;
– Déclaré la société Allianz Vie et la société Allianz Iard recevables et partiellement bien fondées en leurs demandes reconventionnelles,
– Prononcé la caducité du contrat d’assurance n°175181450 « AGF Prévoyance Evolution » à compter du 1er novembre 2014,
– Condamné Mme [C] [D] à rembourser à la société Allianz Vie et la société Allianz Iard la somme principale de 7 800 Euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du présent jugement,
– Ordonné la compensation entre les sommes que se doivent respectivement les parties au présent litige, en application des articles 1289 et suivants (anciens) du code civil,
-Débouté Mme [C] [D] du surplus de ses prétentions, et notamment de sa demande de condamnation de la société Allianz Vie et la société Allianz Iard à lui verser une rente d’invalidité permanente sur la base d’un coefficient de 100% et de sa demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle mesure d’expertise,
Par conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 5 novembre 2021, Mme [D] demande à la cour au visa des articles 1108, 1134, 1147 (anciens), 1353, 1382 (nouveaux) du code civil, L. 112-2 et R. 112-3 du code des assurances, L. 111-1 et L. 133-2 du code de la consommation et de la jurisprudence applicable (notamment relativement au devoir de conseil) d’infirmer le jugement dont appel, mais seulement en ce qu’il a :
– Condamné Mme [C] [D] à rembourser à la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD la somme principale de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement,
– Ordonné la compensation entre les sommes que se doivent respectivement les parties au présent litige, en application des articles 1289 et suivants (anciens) du code civil,
– Débouté Mme [C] [D] du surplus de ses prétentions, et notamment de sa demande de condamnation de la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à lui verser une rente d’invalidité permanente sur la base d’un coefficient de 100% et de sa demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle expertise.
Elle demande de confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, notamment en ce qu’il a prononcé la caducité du contrat d’assurance n° 175181450 à compter du 1er novembre 2014,condamné in solidum les sociétés ALLIANZ au paiement de la somme de 14 533,10 euros à titre de restitution du trop versé de primes et celle de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle demande à la cour, statuant à nouveau sur les chefs de jugement critiqués et ajoutant à ceux non critiqués, de :
– FIXER le taux d’incapacité professionnelle de Mme [D] à 100 % ;
– FIXER le taux d’invalidité fonctionnelle de Mme [D] à 25 % ;
– FIXER, en conséquence, la » taux d’invalidité » de Mme [D] à 40 % ;
– FIXER, en conséquence, le montant de la rente due in solidum par les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD au montant de 17 230,35 euros annuels au 30 septembre 2014, soit 20 188,09 euros au 30 septembre 2021 en tenant compte de l’augmentation contractuelle annuelle de 2 % ;
– FIXER la date de la consolidation au 30 septembre 2014 ;
– JUGER, en conséquence, que la rente annuelle est due par les assureurs ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD in solidum à compter du 30 septembre 2014 et jusqu’au 21 avril 2026 (65ème anniversaire de Mme [D]) ;
– CONDAMNER, en conséquence, in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [D] la somme de 129 980,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à venir, au titre de la rente non versée depuis le 30 septembre 2014 et jusqu’au 30 septembre 2021 ;
– CONDAMNER in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à verser à Mme [D] la rente due, soit la somme de 20 188,09 euros annuels, indexée selon contrat (2 %) et payée selon les modalités du contrat (par quart, chaque trimestre, à terme échu), et ce à compter du 16 avril 2021 jusqu’au 21 avril 2026 (date du 65ème anniversaire de Mme [D]).
A TITRE SUBSIDIAIRE, si les taux fixés et / ou validés par la cour ne permettaient pas l’octroi de la rente contractuelle, Mme [D] demande de CONDAMNER in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 160 816,60 euros à titre de dommages-intérêts et en réparation de son préjudice résultant de la perte de chance pour elle d’avoir pu souscrire un contrat d’assurance en adéquation avec sa situation personnelle et professionnelle.
En tout état de cause, elle demande de :
– CONDAMNER la société ALLIANZ Vie et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [D] la somme principale de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter de l’arrêt, en application de l’infirmation du chef de jugement à ce titre ;
– CONDAMNER, à titre principal, in solidum, la société ALLIANZ Vie et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [D] la somme de 54 292,74 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à venir, au titre des indemnités journalières complémentaires (en cas d’inopposabilité des limitations de garantie ;
OU : CONDAMNER, à titre subsidiaire et au minimum, in solidum, la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [D] la somme de 7 597,05 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à venir, au titre des indemnités journalières complémentaires (en cas d’opposabilité des limitations de garantie) ;
– CONDAMNER, à titre principal, in solidum, la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [C] [D] la somme de 4 612 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à venir, au titre du capital (en cas de taux d’invalidité fonctionnelle fixé à 25 %) ; OU :
CONDAMNER, à titre subsidiaire et au minimum, in solidum, la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [C] [D] la somme de 2 767,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à venir, au titre des indemnités journalières complémentaires (en cas d’opposabilité des limitations de garantie) ;
– DEBOUTER la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD de toutes ses demandes dirigées contre Mme [D] ;
– CONDAMNER in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à payer à Mme [D] la somme de 8 000 euros au titre de la présente procédure d’appel et en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 juillet 2021, les sociétés ALLIANZ VIE anciennement dénommée AGF VIE, et ALLIANZ IARD anciennement dénommée AGF IART demandent à la cour au visa des articles 1231 et suivant du code civil, des Conditions Générales et Spéciales du contrat « AGF PREVOYANCE EVOLUTION » n°175181450 et du rapport d’expertise déposé le 9 mai 2016 par le professeur [R] :
* statuant sur l’appel principal, de CONFIRMER le jugement déféré en ce qu’il a :
– Estimé valable et opposable à Mme [D] le rapport d’expertise du 9 mai 2016 du professeur [R] ;
– Jugé que Mme [D] ne justifiait pas de l’existence d’un degré d’Invalidité, supérieur ou égal à 33 %, lui permettant la mobilisation des garanties contractuelles du versement d’une rente ou d’un capital d’invalidité permanente.
– Condamné Mme [D] à leur rembourser en principal la somme de 7 800 euros, à titre de prestation d’indemnités journalières payées indûment.
EN CONSEQUENCE :
– DECLARER Mme [D] irrecevable, et en tout cas mal fondée, en son appel principal, en ce compris en ce qu’elle y ajoute des demandes et prétentions nouvelles (et prescrites);
– L’EN DEBOUTER à tout le moins, notamment quant au paiement d’une rente d’invalidité, de sa demande de réparation d’une perte de chance de l’obtenir, d’une prolongation de la période de paiement des indemnités journalières, de paiement d’un capital, et de sa demande de condamnation à indemnité de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
* statuant sur appel incident :
– DECLARER les intimées recevables et bien fondées en leur appel incident.
– INFIRMER le jugement déféré sur les points critiqués.
– EN CONSEQUENCE :
L’INFIRMER en ce qu’il a déclaré le contrat d’assurance caduc à partir de 2014,
L’INFIRMER en ce qu’il a condamné les intimées, au motif de caducité, à payer une somme
de 14 533,10 euros à Mme [D], et :
– DIRE ainsi qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation,
– DIRE ainsi qu’il n’y a pas lieu à compensation,
L’INFIRMER aussi en ce qu’il n’a pas assorti la condamnation de Mme [C] [D] à leur rembourser en principal la somme 7 800 euros des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2018, date de la demande de condamnation à reversement du trop-perçu,
L’INFIRMER en ce qu’il n’a pas accordé aux intimées l’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile sollicitée, et dès lors :
CONDAMNER Mme [D] à leur payer une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, et à ses dépens.
Y AJOUTANT, CONDAMNER Mme [D] à payer aux compagnies ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d’appel par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de cet appel, dont distraction.
Il convient de se reporter aux conclusions pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Mme [D] sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné les sociétés ALLIANZ à lui payer la somme de 14 533,10 euros en raison de la caducité du contrat d’assurance ‘AGF Prévoyance Évolution’ à compter du 1er novembre 2014, en faisant valoir notamment que :
* en dépit d’une « perte de profession » effective, risque au titre duquel elle entendait se couvrir le plus largement possible, elle a payé à son assureur l’équivalent de ce qu’elle a reçu de lui ;
* elle a cessé toute activité à compter du 18 mars 2013 de façon temporaire, puis de façon définitive avec classement en « incapacité totale au métier » à compter du 1er novembre 2014 et elle a été radiée du RSI à compter du 8 décembre 2014 ; à compter du 1er novembre 2014, elle était donc assurée pour un risque qui, pour l’assureur, n’existait plus ;
* ayant continué de payer des primes jusqu’en septembre 2018, après avoir résilié son contrat d’assurance sur les conseils d’un professionnel du droit, le 20 août 2018 (à effet du 1er novembre 2018), elle a versé sans cause (en l’absence de contrepartie en termes de couverture de risque par l’assureur) la somme totale de 14 533,10 suros (de novembre 2014 à septembre 2018).
Elle demande par ailleurs l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes d’indemnisation et fait valoir notamment que :
* pour ce qui concerne le versement d’une rente, la cour n’est pas liée par le taux d’incapacité professionnelle et celui ‘d’incapacité permanente partielle’ (invalidité fonctionnelle) fixés par l’expert judiciaire respectivement à 75 % et 15 % (selon le barème AGF), dès lors que:
– s’agissant du taux d’incapacité professionnelle : à la lecture des dispositions spéciales de l’avenant au contrat, le versement de la rente est soumis à des conditions extrêmement rigoureuses, dont il n’était pas fait état dans la brochure commerciale qui lui a été remise, qui pouvait laisser penser à l’assuré qu’il était couvert contre le risque de « perte de profession » ; il résulte des constatations de l’expert judiciaire qu’elle ‘ne peut exercer le membre supérieur droit au-dessus de l’horizontale des épaules, surtout en abduction et sans appui des mains et avec port de charge supérieure à 4 kg dans cette position » ; les propositions d’adaptation de l’expert (utilisation d’une nacelle, peinture coude au corps ou avec peu d’élévation antérieure, et soutien par intermittence de sa main droite avec sa main gauche) sont déconnectées de la réalité et des exigences de son métier mais aussi des exigences de ses clients ; il existe un grand nombre de présomptions graves, précises et concordantes, qui tendent à prouver que ce taux d’incapacité professionnelle, qui n’est qu’un fait juridique susceptible d’être prouvé par tout moyen, devrait être fixé non pas à
75 % mais à 100 % ;
– s’agissant du taux d’invalidité fonctionnelle, le barème AGF ne parle pas « d’incapacité permanente partielle (IPP) » mais « d’invalidité fonctionnelle » ; son « taux d’invalidité fonctionnelle » devrait être fixé au regard du barème [O] et des propres constatations de l’expert, au taux de 25 % minimum (en retenant le taux prévu pour le membre dominant, Mme [D] étant droitière, et l’épaule concernée étant celle de droite, outre les autres déficits constatés par l’expert et les souffrances endurées et le léger déficit au niveau de la main droite dont l’expert n’a pas tenu compte) et non à 15%, qui correspond en fait au taux minimum du barème spécifique stipulé dans les dispositions spéciales, pour les membres supérieurs, en cas de ‘limitation des mouvements de l’épaule (raideurs)’, étant rappelé que ce taux peut aller jusqu’à 100 % ;
– si un taux fixe est prévu pour un cas déterminé, le taux fixe s’applique (peu importe le barème [O], le ‘barème spécifique’ s’applique), si une fourchette est prévue, on ne peut s’affranchir de cette ‘fourchette’ (peu importe le barème [O], le ‘barème spécifique’ s’applique), mais dès lors qu’il n’est rien dit, dans le contrat, de la façon dont l’expert doit s’y prendre pour moduler l’évaluation du préjudice corporel en cas de ‘fourchette’, c’est bien le barème [O], cité par le contrat, et cité par l’expert judiciaire, qui doit être consulté, dans les limites de taux exprimées par le BAREME SPÉCIFIQUE ; faute de quoi l’évaluation se ferait sans critère et de façon arbitraire ; c’est à tout le moins en ce sens qu’il y aurait lieu d’interpréter la clause contractuelle, à la supposer peu claire ; le docteur [X], médecin-expert de la compagnie ALLIANZ, s’y est lui-même perdu, puisqu’il avait retenu pour le préjudice de Mme [D] une incapacité fonctionnelle de 10 %, alors que le minimum contractuel, selon le ‘barème spécifique’, était de 15 % ;
– si la cour fixe le taux d’incapacité professionnelle à 100 % et celui d’invalidité fonctionnelle à 25 %, Mme [D] pourra prétendre à se voir verser la rente parce que le tableau inclus dans les dispositions spéciales concernant la garantie rente d’invalidé formule A avec barème spécifique, inclues dans les dispositions particulières du contrat, prévoit, au croisement d’un taux d’invalidité fonctionnelle de ’25’ et d’un taux d’IP de ‘100’, un ‘taux d’invalidité’ ( selon terme contractuel) de 40 % ouvrant droit au versement de la rente d’ores et déjà due du 30 septembre 2014 (date d’invalidité permanente de Mme [D]), au jour de ses dernières conclusions , soit le 30 septembre 2021 outre la somme de 17 230,35 euros annuels à compter du 1er octobre 2021, jusqu’à son 65ème anniversaire (21 avril 2026), conformément aux dispositions contractuelles, c’est-à-dire avec une augmentation annuelle de ‘2 %’ et payables ‘par quart, chaque trimestre, à terme échu’, la cour pouvant moduler les calculs selon les taux souverainement retenus par elle ;
– subsidiairement, si les taux fixés et / ou validés par la cour ne permettent pas l’octroi de la rente contractuelle, elle demande réparation du préjudice résultant de la perte de chance pour elle d’avoir pu souscrire un contrat d’assurance en adéquation avec sa situation personnelle et professionnelle, causé par le manquement des assureurs à leur obligation d’information et de conseil, dès lors qu’elle a toujours souhaité la garantie la plus étendue possible, en arguant notamment que cette demande, certes nouvelle en cause d’appel, n’est pas pour autant irrecevable, et n’est pas prescrite.
Elle demande enfin l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer aux sociétés ALLIANZ la somme de 7 800 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement, en restitution du prétendu trop-versé au titre des indemnités journalières.
Et la condamnation de la société ALLIANZ VIE et de la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme principale de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter de l’arrêt, en application de l’infirmation du chef de jugement à ce titre.
Elle sollicite en outre le paiement d’un capital et des indemnités journalières complémentaires.
Les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD demandent quant à elle de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– estimé valable et opposable à Mme [D] le rapport d’expertise du professeur [R] ;
– jugé qu’elle ne justifiait pas de l’existence d’un degré d’invalidité, supérieur ou égal à
33 %, lui permettant la mobilisation des garanties contractuelles du versement d’une rente ou d’un capital d’invalidité permanente ;
– condamné Mme [D] à leur rembourser en principal la somme 7 800 euros, à titre de prestations d’indemnités journalières payées indûment.
Elles demandent en conséquence que Mme [D] soit être déclarée irrecevable, et en tout cas mal fondée, en son appel principal, en ce compris en ce qu’elle y ajoute des demandes et prétentions nouvelles (et prescrites) et qu’elle doit à tout le moins en être déboutée dès lors que :
– pour être mobilisable, cette garantie suppose que l’assuré justifie présenter un état médical relevant de l’incapacité temporaire totale de travail, et dans certain cas partielle, ‘TEMPORAIRE’ signifiant que l’état de santé de l’assuré ne doit pas être consolidé ;
– les conditions d’appréciation de l’état d’invalidité permanente et de détermination de son taux ou degré sont stipulées comme étant indépendantes de celles retenues par le régime obligatoire français d’assurance maladie, la maternité ou de tout autre organisme ;
– Mme [D] ne peut sérieusement contester qu’en application de ce tableau de combinaison croisée des taux d’incapacité fonctionnelle et professionnelle stipulé à la Convention « AGF PREVOYANCE EVOLUTION » tels que retenus par l’expert judiciaire, elle ne justifie pas d’un degré d’invalidité supérieur à 33% ;
– rien n’indique que sa pension d’invalidité RSI soit sa seule ressource, Mme [D] n’ayant plus sollicité ou obtenu le bénéfice de l’aide juridictionnelle comme c’était le cas en 2015 ;
– bien que le juge ne soit pas lié par les conclusions du rapport d’expertise judiciaire du professeur [R], il n’a pas la compétence pour déclarer que Mme [D] justifierait d’un taux d’incapacité professionnelle de 100 % ;
– la cour relèvera par ailleurs que contrairement à ce qui est soutenu, le professeur [R] a parfaitement pris en compte, et répondu, notamment dans sa réponse au dire de Me [S], quant aux souffrances endurées, qui ne justifiaient pas une majoration de l’incapacité permanente ou taux d’IPP ; ainsi seront retenues comme valables et opposables à Mme [D] les conclusions du rapport d’expertise du professeur [R] sur le taux d’invalidité fonctionnelle ;
-la demande subsidiaire de l’appelante en dommages-intérêts ‘pour perte de chance d’obtenir une rente’ est une demande nouvelle, irrecevable en ce que Mme [D] n’avait pas formulé cette demande en première instance, demande qui est au surplus, désormais prescrite et ainsi également irrecevable ;
– elle ne peut ajouter, en cause d’appel, et pour obtenir un cumul d’une rente et d’un capital, cette prétention nouvelle, qui sera rejetée.
Dans le cadre de leur appel incident, les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD demandent au surplus d’infirmer le jugement déféré sur les points critiqués et plus particulièrement en ce qu’il a :
– déclaré le contrat d’assurance caduc à partir du 1er novembre 2014, faute d’aléa à compter de cette date et donc de cause,
– les a condamnées en conséquence de cette caducité, à rembourser à Mme [D] les primes versées pour un total de 14 533,10 euros, alors que le versement de ces primes demeurait causé et que tous les éléments essentiels du contrat demeuraient,
– n’a pas assorti la condamnation de Mme [D] à leur rembourser en principal la somme de 7 800 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2018, date de la demande de condamnation à reversement du trop-perçu,
– ne leur a pas accordé l’indemnité sollicitée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD font valoir en substance sur ces points que :
– le refus de garantie qu’elles ont opposé ne constitue pas une cause de nullité du contrat d’assurance litigieux, valable et causé au moment de sa formation comme l’a exactement jugé le tribunal, mais seulement le cas échéant un cas d’éventuelle inexécution contractuelle susceptible d’entraîner une décision d’exécution forcée et l’octroi de dommages et intérêts ; contrairement à ce que le tribunal a jugé, le contrat est demeuré causé, et toujours aléatoire, jusqu’à sa résiliation, de sorte qu’aucune caducité n’est encourue, et par conséquent aucun remboursement des primes versées n’est dû ;
– la condamnation de Mme [D] à leur rembourser la somme de 7 800 euros en principal, correspondant au montant total des Indemnités Journalières de base qu’elles lui ont indûment versées au-delà de la période contractuelle de 365 jours, aurait dû être assortie des intérêts aux taux légal à compter de la date de signification des conclusions d’ALLIANZ formulant la demande de condamnation à reversement du trop-perçu, soit le 17 décembre 2018.
L’examen des prétentions formulées dans le cadre de l’appel partiel principal d’une part, et de l’appel incident d’autre part, conduit la cour à revoir l’entier litige, dans l’ordre retenu par le premier juge, pour davantage de clarté.
A titre liminaire, la cour rappelle, suivant en cela l’exacte appréciation faite par le premier juge des faits et règles applicables sur ce point, désormais acquise aux débats, qu’il convient d’appliquer au cas d’espèce le contrat n°175181450, soit les dispositions de l’avenant contractuel AGF Prévoyance Evolution entré en vigueur le 21 octobre 2006, stipulant que ‘la rente annuelle en cas d’invalidité permanente totale par suite d’un accident ou d’une maladie s’élève à 25 000 euros’, et que ‘la définition et les modalités de mise en jeu de la garantie rente invalidité sont décrites dans les dispositions spéciales référencées 0504RMAFAS’, dont il résulte que pour pouvoir bénéficier de la rente précitée, il faut justifier d’un taux d’invalidité tenant compte de l’invalidité fonctionnelle et de l’incapacité professionnelle de l’assuré, apprécié par le médecin conseil.
1) Sur les demandes de Mme [D] tendant à fixer son coefficient professionnel à 100%, à condamner ALLIANZ à l’indemniser et subsidiairement à ordonner une nouvelle expertise judiciaire
A – Concernant la rente
* la demande de condamnation formulée à titre principale
Comme l’a exactement relevé le tribunal, les évaluations du docteur [X], puis du professeur [R] ont permis de fixer les taux d’incapacité fonctionnelle et d’incapacité professionnelle de Mme [D] , d’abord à 10 % et 66 %, puis à 15 % et
75 %, taux qui ne lui permettent pas d’atteindre le coefficient professionnel lui permettant de percevoir la rente d’invalidité permanente qu’elle sollicite.
C’est également à juste titre, par des motifs que la cour adopte, que le tribunal a rappelé que Mme [D] , qui supporte la charge de la preuve, ne démontre pas qu’elle peut se prévaloir d’un degré d’invalidité permanente d’au moins 33%, nonobstant la reconnaissance par le RSI (dont elle justifie) et par la CNP Assurances (évoquée dans l’expertise judiciaire mais non produite) de son incapacité à poursuivre l’exercice de son métier, ceci alors même que l’expert judiciaire a eu connaissance de cette double reconnaissance.
Il en est de même de l’attestation de M. [T], se présentant comme ancien peintre en lettres, qui certifie en date du 28 février 2017 que : ‘il est impossible de peindre des lettres coudes au corps et encore moins de prendre appui sur l’autre main que doit maintenir le peintre sur travail à l’échafaudage, échelle, ou escabeau avec une élévation du bras au minimum de 90%’, une telle attestation, vague et émanant certes d’une personne se présentant comme exerçant la même activité professionnelle que l’intéressée, ne pouvant à elle seule remettre en cause les conclusions de deux experts médicaux, rendues aux termes d’investigations médicales précises, complètes et circonstanciées.
En l’absence de production aux débats de pièces nouvelles de nature à remettre en cause l’exacte appréciation faite par le tribunal sur ce point, en particulier les prescriptions d’antalgiques en date du 24 mars 2020 et l’attestation de Mme [L] [K], la fille de Mme [D] en date du 9 septembre 2021, certifiant aider financièrement sa mère tous les mois parce qu’elle ne parvient plus à travailler, étant insuffisantes pour cela, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré Mme [D] mal fondée dans sa demande tendant à fixer son taux d’incapacité professionnelle à 100% et à condamner les sociétés ALLIANZ à lui verser une rente d’invalidité permanente, et l’en a débouté.
C’est de même par adoption des motifs du jugement, qu’il convient de confirmer le rejet de la demande subsidiaire tendant à ordonner une nouvelle mesure d’expertise (dont il est demandé l’infirmation par l’appelante), le premier juge ayant exactement retenu que les certificats médicaux postérieurs à l’expertise judiciaire du 9 mai 2016, à savoir ceux du docteur [U] (7 février 2017) et du docteur [Z] (5 novembre 2016 et 14 février 2018) n’apportaient aucun élément nouveau par rapport à l’examen clinique complet pratiqué par l’expert judiciaire, qui a répondu en détail aux dires des avocats des parties, et en particulier aux griefs soulevés de nouveau par le conseil de Mme [D], concernant notamment la spécificité de sa profession et l’usage du barème [O], cette demande de nouvelle expertise intervenant alors même que Mme [D] a déjà été examinée par deux médecins successifs, le docteur [X] et le professeur [R], et que la consolidation de son état de santé remonte au 1er novembre 2014.
* la demande de condamnation au titre d’une perte de chance, formulée à titre subsidiaire
Pour la première fois en cause d’appel, Mme [D] soutient subsidiairement, au visa des articles L. 111-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 27 juillet 1993 au 14 mai 2009, L. 112-2 et R 112-3 du même code et de l’article 1147 (ancien) du code civil, qu’elle a subi une perte de chance d’avoir pu obtenir une rente effective, pour une ‘perte de profession’ effective, dont le préjudice s’élève à la somme de160 816,60 euros.
C’est cependant à juste titre que les assureurs répliquent que cette demande est irrecevable pour être nouvelle au sens des articles 564 et suivants du code de procédure civile dès lors qu’il ne s’agit pas d’une prétention tendant aux mêmes fins que celles soumises au premier juge.
En effet, aux termes de ses dernières conclusions devant le tribunal, Mme [D] a principalement demandé au premier juge de juger que la compagnie d’assurance devait lui verser une rente et ce, conformément aux conditions générales du contrat souscrit.
Non seulement, elle n’a pas formulé de demande subsidiaire, au titre de la perte de chance qu’elle invoque désormais, mais cette demande ne tend pas aux mêmes fins, le but poursuivi et le résultat recherché par l’auteur de la demande divergeant, dès lors que dans le premier cas, il s’agit d’obtenir l’exécution d’un contrat, tandis que dans le second, il s’agit de percevoir des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle aurait subi pour défaut de conseil de l’assureur, préjudice dont le montant sera par nature inférieur aux sommes réclamées en exécution du contrat, parce qu’il s’agit d’une perte de chance. Contrairement à ce qu’elle soutient, il ne s’agit pas de l’expression d’une autre forme de l’exercice d’un même droit, mais d’un droit différent.
La cour ne peut davantage suivre Mme [D] lorsqu’elle soutient que sa demande de dommages-intérêts, par son caractère subsidiaire, constitue, indifféremment, ‘l’accessoire, ou la conséquence, ou même le complément nécessaire’ (au sens de l’article 566 du code de procédure civile) d’une demande d’exécution du contrat, ‘dès lors que celle-ci a été rejetée en première instance’.
En effet, sauf à dénaturer l’esprit de la réforme introduite par le décret du 6 mai 2017, les dérogations à l’irrecevabilité des prétentions nouvelles édictées à l’article 566 du code de procédure civile, ne permettent pas à une partie de présenter en cause d’appel une demande subsidiaire au motif qu’une demande principale a été rejetée en première instance ; pour être recevable, la demande qui s’ajoute au prétentions soumises au premier juge doit en être ‘l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire’, ce qui n’est pas le cas d’une demande de dommages et intérêts formulée à titre subsidiaire, au regard de la demande initiale d’exécution du contrat, dont au surplus les montants sont différents.
Il convient en conséquence d’accueillir la fin de non recevoir soulevée par les assureurs au titre du caractère nouveau de la prétention subsidiaire de l’appelante, tendant au versement de la somme de 160 816,60 euros à titre de dommages et intérêts, en raison de la perte de chance d’avoir pu obtenir une rente effective, pour une ‘perte de profession’ effective.
L’examen de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette demande est dès lors sans objet.
B – Concernant le capital
Pour la première fois en cause d’appel, Mme [D] demande la condamnation des assureurs à lui payer un capital de 4 612 euros (outre les intérêts), au regard du taux d’invalidité fonctionnelle de 25% qu’elle demande à la cour de fixer ou, subsidiairement et au minimum, un capital de 2767,20 euros, avec intérêts, au regard du taux de 15% fixé par l’expert judiciaire (bien que dans le dispositif de ses dernières conclusions, elle indique que cette somme est sollicitée au titre « des indemnités journalières complémentaires’, les assureurs ayant compris au regard des moyens développés dans ses conclusions pour en justifier, qu’il s’agissait là d’une simple erreur de plume).
Les assureurs soulèvent de nouveau l’irrecevabilité de ces demandes, au motif de leur caractère nouveau et de leur prescription.
Il est constant que cette demande n’a pas été formulée devant le premier juge.
Pour autant, comme le fait valoir Mme [D], cette demande est recevable en ce qu’elle constitue l’accessoire de la demande formulée en première instance, dès lors que l’exécution du contrat d’assurance était également réclamée devant le premier juge, pour percevoir la rente prévue au contrat.
Cette première fin de non recevoir est ainsi rejetée.
S’agissant de la prescription biennale opposée par les assureurs, elle est invoquée au visa de l’article L. 114-1 du code des assurances, qui édicte une prescription spéciale, tandis que Mme [D] sollicite le bénéfice des dispositions particulières concernant le délai et le point de départ de la prescription de l’action en responsabilité née à raison d’un évènement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe des préjudices qui en résulte, dispositions prévues à l’article 2226 du code civil.
Il est par ailleurs constant que les dispositions ainsi invoquées, spécifiques au droit des assurances ou propres au droit commun, prévoient des causes différentes d’interruption de la prescription, qui sont sans incidence l’une sur l’autre.
En l’espèce, l’action de Mme [D] dérive d’un contrat d’assurance. Elle se prescrit donc par deux ans à compter de l’évènement y donnant naissance.
En matière d’assurance contre les accidents corporels, le sinistre, au sens de l’article L. 114-1 alinéa 2 du code des assurances, est constitué par la survenue de l’état d’incapacité ou d’invalidité de l’assuré, apprécié au jour de sa consolidation.
Mme [D] soutient que son action n’est pas prescrite.
Elle démontre qu’elle a sollicité par lettre recommandée du 7 juillet 2014 à l’assureur de lui verser une rente annuelle, un capital et des indemnités journalières pour une durée de 1095 jours.
Elle a ensuite, dans son assignation du 27 mars 2015 délivrée devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny à l’encontre d’ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD, aux fins d’expertise judiciaire et de provision, sollicité l’exécution provisoire de l’obligation d’indemnisation incombant à son assureur en vertu du contrat d’assurance, en ces termes : ‘la reprise du versement des indemnités journalières et le paiement des sommes qui n’ont pas été réglées à l’assurée depuis le 1er juillet 2014’, date de cessation du paiement des indemnités journalières par ALLIANZ.
Ce faisant, contrairement à ce qu’elle soutient, il n’était plus fait mention du capital qu’elle avait réclamé dans sa lettre recommandé ; le paiement, à titre provisionnel, fût-ce d’une partie seulement du capital n’était en effet pas réclamé dans le dispositif de son assignation en référé, la possibilité de versement d’un capital étant uniquement évoquée dans le rappel des faits et de la procédure, en cas d’invalidité permanente totale. L’ordonnance de référé, qui a fait droit à la demande d’expertise, a par ailleurs rejeté comme prématurée la demande de provision au titre des indemnités journalières, sollicitée à compter du 1er juillet 2014, au motif que le droit au paiement des indemnités journalières depuis cette date dépend de l’état fonctionnel de Mme [D], que la mesure d’expertise avait précisément pour objet d’apprécier.
Au demeurant, ce n’est qu’à compter de la consolidation de son état d’invalidité que le sinistre au sens de l’article L. 114-1 précité, s’est constitué, soit, d’après le rapport d’expertise du 9 mai 2016 qui a suspendu la prescription, le 30 septembre 2014.
Or, comme il l’a été examiné ci-dessus, la demande de versement d’un capital n’a pas été soumise au premier juge (elle ne figure ni dans l’assignation au fond, délivrée le 21 juin 2017, ni dans les dernières conclusions devant le tribunal, notifiées le 23 août 2019) ; elle n’a été formulée en cause d’appel que le 21 avril 2021, soit au-delà du délai de prescription.
Il s’en déduit que la fin de non recevoir tirée de la prescription est fondée, dès lors qu’elle n’a été formulée en cause d’appel que le 21 avril 2021, soit au-delà du délai de prescription de l’action dérivant du contrat d’assurance.
C- Concernant les indemnités journalières complémentaires
Pour la première fois en cause d’appel, Mme [D] sollicite, déduction faite de la somme de 39 986,68 euros déjà payée par les assureurs, le paiement d’indemnités journalières complémentaires, sur une période de 1 095 jours, soit du 18 mars 2013 au 18 mars 2016, la somme de 54 292,74 euros avec intérêts (en cas d’inopposabilité des limitations de garantie) et ‘à titre subsidiaire et au minimum’, pour une période allant du 18 mars 2013 au 30 septembre 2014, correspondant à 561 jours, la somme de 7 597,05 euros, avec intérêts (en cas d’opposabilité des limitations de garantie).
Les assureurs soulèvent dans le dispositif de leurs dernières écritures l’irrecevabilité de la demande de prolongation de la période de paiement des indemnités journalières, au motif de son caractère nouveau et de sa prescription, sans pour autant y consacrer un développement spécifique dans leurs écritures. La cour estime qu’elle en est néanmoins saisie, bien que confusément, en application de l’article 954 du code de procédure civile, indépendamment de la demande concernant le trop-perçu d’indemnités journalières examinée par le tribunal, pour la période courant du 18 mars 2013 au 30 juin 2014, s’agissant de deux demandes distinctes, tant dans leur fondement (indemnités complémentaires/répétition de l’indû) que dans leur quantum et assiettes de calcul, émanant de parties différentes.
Mme [D] ayant indiqué en page 28/48 de ses écritures, concernant l’argument de la nouveauté ‘des demandes et de la prescription applicable’ opposé par les assureurs, développé dans le cadre de la demande subsidiaire pour perte de chance, que ‘réponse sera faite à ces deux points par une argumentation qu’il conviendra d’étendre à tous ses chefs de demande’, la cour estime qu’elle réplique en des termes similaires aux fins de non recevoir soulevées sur ce point également, à savoir l’absence de caractère nouveau dès lors que la demande d’indemnité journalière ‘constitue l’accessoire ou le complément nécessaire de la demande formulée en première instance’, et l’absence de prescription dès lors que la demande d’indemnité journalière remonte au courrier recommandé de Mme [D] du 5 juillet 2014 et figure dans l’assignation en expertise du 27 mars 2015.
Il est constant que cette demande, certes partiellement invoquée devant le juge des référés dans le cadre de l’assignation délivrée le 27 mars 2015 (tendant à titre provisoire, à la ‘reprise du versement des indemnités journalières et le paiement des sommes qui n’ont pas été réglées à l’assurée depuis le 1er juillet 2014’), n’a pas été formulée au fond, devant le premier juge, saisi uniquement de la demande de paiement d’une rente.
Pour autant, pour les mêmes motifs que ceux retenus par la cour pour ce qui concerne le capital, cette première fin de non recevoir doit être rejetée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le moyen supplémentaire soutenu en ce sens par l’appelante en page 29 de ses écritures, tendant à dire que cette demande est recevable en ce qu’elle a pour objet d’opposer compensation ou de faire écarter les prétentions adverses à ce titre, les sociétés ALLIANZ réclamant paiement d’un prétendu trop versé.
La fin de non recevoir tirée de la prescription est quant à elle fondée au regard de la date, retenue par l’expert judiciaire, de consolidation de son état d’invalidité (1er novembre 2014), et de la date à laquelle la demande, certes évoquée dans l’assignation en référé (délivrée le 27 mars 2015), à titre provisionnel, a été reprise par la suite pour la première fois au fond, devant la cour, soit le 21 avril 2021.
Il n’y a ainsi pas lieu d’examiner les moyens relatifs à l’opposabilité ou non des limitations de garantie dans le cadre de cette demande.
2) Sur la demande concernant la caducité du contrat d’assurance n°175181450 AGF Prévoyance Evolution
Vu l’article 1186 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 1er octobre 2016 applicable au cas d’espèce ;
Estimant que la cessation de son activité par Mme [D] à compter du 1er novembre 2014 a fait disparaître l’aléa caractérisant le contrat d’assurance n°175181450 ‘AGF Prévoyance Évolution’, et qu’elle a subséquemment fait disparaître sa cause, mais que la nullité du contrat (initialement sollicitée devant le tribunal par Mme [D] ) ne pouvait être encourue dès lors que cette nullité sanctionne uniquement l’absence de cause au moment de la formation du contrat, alors que la disparition de la cause d’un engagement à exécution successive en cours d’exécution dudit contrat entraîne sa caducité, le premier juge a prononcé la caducité du contrat d’assurance n°175181450 ‘AGF Prévoyance Évolution’ à compter du 1er novembre 2014.
Mme [D] qui ne soutient plus la nullité du contrat, demande la confirmation de ce chef du jugement sur la caducité et ses effets, tandis que les assureurs en demandent l’infirmation.
Sur ce,
Certes, comme elle le fait valoir, les conditions particulières du contrat d’assurance contiennent une clause mentionnant que Mme [D] déclare exercer la profession de peintre en lettres et enseignes, seule activité professionnelle garantie.
Pour autant, les intimées produisent une lettre recommandée du 1er juillet 2014, en réponse à la demande d’indemnisation formulée par Mme [D] pour la période du 25 juin au 30 septembre 2014, par laquelle la société ALLIANZ a informé son assurée qu’elle procédait au règlement des indemnités journalières pour la période du 25 juin au 30 juin 2014 mais qu’elle ne donnait pas une suite favorable à la demande pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2014 dès lors que ‘les dispositions contractuelles prévoient un maximum d’indemnisation de 365 jours cumulés sur toute la durée de vie du contrat pour certaines pathologies’ et que ‘cette limite sera atteinte le 30 juin 2014, compte tenu de [ses] différents arrêts antérieurs’. ALLIANZ y ajoutait ne plus pouvoir ‘verser d’indemnités journalières pour ces pathologies, à compter de cette date. Pour toute autre cause d’arrêt de travail, et après étude de [son] dossier, les garanties de [son] contrat [lui] permettent de percevoir des indemnités journalières pendant 1095 jours’.
Il en résulte que, contrairement à ce que soutient Mme [D] , nonobstant son placement en incapacité professionnelle totale à compter du 1er novembre 2014 et sa radiation du RSI à compter du 8 décembre 2014, le contrat d’assurance couvrait toujours des risques à compter du 1er novembre 2014, conservant ainsi son objet et sa cause, et il n’encourait pas de caducité du fait de la disparition de l’un de ses éléments essentiels, Mme [D] continuant à pouvoir le cas échéant bénéficier en vertu de ce contrat de diverses couvertures, à savoir :
– des indemnités journalières pendant 1095 jours en cas d’incapacité temporaire totale de travail, ‘pour toute autre cause d’arrêt de travail’ ;
– une rente ou un capital en cas d’invalidité permanente justifiée suivant les conditions et modalités contractuelles.
Le jugement est ainsi infirmé sur ce point.
3) Sur la demande consécutive à la caducité du contrat, concernant la condamnation in solidum des sociétés ALLIANZ à payer à Mme [C] [D] la somme de 14 533,10 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement, et la demande concernant la compensation
Compte tenu de la caducité prononcée, le tribunal a condamné Mme [D] à rembourser la somme de 14 533,10 euros correspondant aux cotisations réglées de novembre 2014 à septembre 2018.
En l’absence d’effet rétroactif de la caducité, le tribunal a en outre débouté les sociétés ALLIANZ de leur demande reconventionnelle en paiement de la somme de 39 986,68 euros (représentant l’ensemble des sommes versées au titre des indemnités journalières en exécution du contrat).
Mme [D] demande la confirmation du chef du jugement concernant le remboursement par les assureurs des primes indûment versées, tandis que les assureurs en demandent l’infirmation.
Sur ce,
La cour infirmant pour les motifs exposés ci-dessus la caducité du contrat d’assurance prononcée par le tribunal, il convient :
– d’infirmer la condamnation subséquente, prononcée in solidum, des sociétés ALLIANZ à payer à Mme [C] [D] la somme de 14 533,10 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement ;
– d’infirmer la compensation ordonnée par le tribunal ;
– et de rejeter les demandes afférentes, de condamnation et de compensation.
La cour observe enfin que la demande formulée par les sociétés ALLIANZ à titre reconventionnel devant le tribunal, tendant à condamner Mme [D] à leur rembourser, en cas de nullité du contrat, la somme de 39 986,68 euros n’est pas reprise en cause d’appel, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, cette demande n’étant plus soutenue par Mme [D].
4) Sur la demande concernant la condamnation de Mme [D] à rembourser aux sociétés ALLIANZ la somme de 7 800 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement, au titre du trop-versé d’indemnités journalières sur la période du 18 mars 213 au 30 juin 2014
Le tribunal a condamné Mme [D] à rembourser aux sociétés ALLIANZ la somme de 7 800 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter du jugement, au titre du trop-perçu d’indemnités journalières perçues pour la période courant du 18 mars 213 au 30 juin 2014, au motif que ce versement n’aurait pas dû excéder 365 jours, en application des dispositions particulières du contrat AGF Prévoyance Evolution en vigueur de puis le 21 octobre 2006, compte tenu des conclusions de l’expert judiciaire.
Mme [D] demande l’infirmation du chef du jugement concernant le remboursement aux assureurs de la somme de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal, et demande leur condamnation à lui payer cette somme assortie des intérêts de retard calculés à compter de l’arrêt, aux motifs que non seulement aucune limitation de garantie résultant de l’avenant de 2006 ne lui est opposable, dès lors qu’elle ne l’a pas signé, et que la clause invoquée n’est de toute façon pas applicable à sa situation particulière, cette clause concernant exclusivement le risque ‘maladie’, alors qu’aucun de ses arrêts de travail n’est consécutif à une maladie. Elle estime que le tribunal, sur la base de la réponse de l’expert au dire du conseil des assureurs, a confondu son ‘état antérieur’ avec la cause, l’origine de ses blessures, l’empêchant de poursuivre son travail, c’est à dire l’accident du 18 mars 2013.
Les assureurs demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné Mme [C] [D] à leur rembourser en principal la somme de 7 800 euros, à titre de prestations d’indemnités journalières payées indûment, mais son infirmation en ce qu’il n’a pas assorti cette condamnation des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2018, date de la demande de condamnation à reversement du trop-perçu.
Ils affirment notamment que les limites différentes de garantie dans le temps que le contrat prévoit selon les cas (1095 jours ou 365 jours) établissent les diverses garanties, et ne sont ni des clauses d’exclusion, ni des clauses de limitation, contrat dont Mme [D] sollicite le bénéfice tout en se prévalant du fait qu’elle n’a pas signé les dispositions générales et spéciales lorsque cela l’arrange.
Enfin, les assureurs estiment que, si Mme [D] procède longuement à une critique médicale des constatations et conclusions médicales du professeur [R], le tribunal, par une motivation précise, a fait une juste lecture et analyse du contrat, prenant soin de souligner même les dispositions applicables, en concluant que la durée cumulée maximale d’indemnisation avait été atteinte au bout de 365 jours dans le cas précis.
Sur ce,
La cour observe qu’aucune fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en répétition de l’indû, au titre des indemnités journalières versées au 30 juin 2014, n’est soulevée.
Vu les articles L. 112-2, L. 112-3 et L. 112-4 et R. 112-3 du code des assurances ;
Il est constant que tout contrat d’assurance comporte des limitations de garantie. Les limitations de garantie peuvent concerner :
– les conditions de prise en charge par l’assureur (zone géographique etc’) ;
– le montant des remboursements (plafonds, franchises) ;
– le champ d’application de la garantie.
Une clause de limitation de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l’assuré au moment de son adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable.
Dès lors, c’est vainement que les assureurs reprochent à Mme [D] à la fois de se prévaloir des conditions particulières prévoyant une garantie indemnités journalières, et d’ignorer l’étendue de cette même garantie, notamment en ce qui concerne l’applicabilité des clauses limitant la garantie en question dans le temps.
Or, Mme [D], qui reconnaît uniquement avoir signé le contrat initial ‘AGF Tonus’, n’est pas utilement contredite par les assureurs, à qui incombe la charge de la preuve sur ce point, lorsqu’elle soutient qu’ils ne justifient pas lui avoir remis les dispositions générales du contrat ‘AGF Prévoyance Évolution’ et celles spéciales (de l’avenant) applicables au litige, au moment de l’adhésion ou avant la réalisation du risque, de sorte qu’aucune limitation de garantie contenue dans ces dispositions là, ne peut lui être opposée.
De ce seul fait, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’applicabilité ou non de la clause invoquée à la situation particulière de Mme [D]; la demande en répétition de l’indu formulée par les assureurs devant le tribunal, ne pouvait prospérer. Le jugement est infirmé sur ce point, et les assureurs déboutés de leur demande.
En conséquence de l’infirmation de la condamnation de Mme [D] au titre de la répétition de l’indu, et contrairement à ce que sollicite Mme [D] dans le dispositif de ses conclusions ‘en tout état de cause’, il n’y a pas lieu de condamner les assureurs à lui payer la somme de 7 800 euros, assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter de l’arrêt.
En effet, le remboursement par les assureurs de la somme versée par Mme [D] au titre du trop-perçu, et le calcul des intérêts sur ce point, ressort de l’exécution même de l’arrêt, dans le cadre duquel d’éventuelles compensations peuvent être opérées avec les sommes versées à la suite de l’exécution provisoire du jugement.
5) Sur les frais irrépétibles et les dépens
Compte tenu de la solution retenue par la cour, le jugement est confirmé en ses dispositions sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD seront par ailleurs condamnées in solidum aux dépens d’appel et à payer à Mme [D], en application de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 5 000 euros.
Les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD seront déboutées de leur demande formée de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant en dernier ressort, contradictoirement, publiquement et par mise à disposition de la décision au greffe,
CONFIRME le jugement en ce qu’il a :
– jugé Mme [C] [D] partiellement fondée en ses demandes ;
– condamné in solidum les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction;
– débouté Mme [C] [D] de sa demande de condamnation de la société ALLIANZ VIE et de la société ALLIANZ IARD à lui verser une rente d’invalidité permanente sur la base d’un coefficient professionnel de 100 % et de sa demande subsidiaire de voir ordonner une nouvelle mesure d’expertise ;
– débouté les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
L’INFIRME sur le surplus des dispositions soumises à la cour, statuant à nouveau de ces chefs et Y AJOUTANT :
DEBOUTE Mme [C] [D] de ses demandes tendant à fixer son taux d’invalidité fonctionnelle à 25 % et son taux d’invalidité à 40 %, et subséquemment, au paiement des rentes afférentes, réclamées pour la période du 30 septembre 2014 au 30 septembre 2021 et du 16 avril 2021 au 21 avril 2026 ;
DECLARE Mme [C] [D] irrecevable en :
. sa demande subsidiaire tendant à condamner in solidum la société ALLIANZ VIE et la société ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 160 816,60 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice résultant selon elle de la perte de chance pour elle d’avoir pu souscrire un contrat d’assurance en adéquation avec sa situation personnelle et professionnelle ;
. ses demandes, prescrites, tant principales que subsidiaires, formulées au titre du capital et des indemnités journalières complémentaires ;
DEBOUTE Mme [C] [D] de ses demandes de caducité et de condamnation subséquente des assureurs à lui payer la somme de 14 533,10 euros à titre de restitution du trop versé de primes pour la période courant de décembre 2014 à septembre 2018;
DEBOUTE les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD de leur demande en restitution de l’indu ;
DIT n’y avoir lieu à compensation ;
CONDAMNE in solidum les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD aux entiers dépens ;
CONDAMNE in solidum les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD à payer à Mme [C] [D] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les sociétés ALLIANZ VIE et ALLIANZ IARD de leur demande formée de ce chef.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE