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3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°334
N° RG 21/07379 – N° Portalis DBVL-V-B7F-SHVH
S.A.S. ELG [U]
C/
S.A.R.L. THEPOT
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me DEPASSE
Me GLOAGUEN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 07 JUIN 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, Rapporteur
Assesseur : Monsieur Jean-Denis BRUN, Conseiller, designé par ordonnance du premier president en remplacement de Monsieur Dominique GARET
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 26 Avril 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.S. ELG [U] immatriculée au RCS de BREST sous le N° 892 427 519, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège.
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Sylvain PRIGENT de la SELARL FLAMIA-PRIGENT, Plaidant, avocat au barreau de BREST
Représentée par Me Jean-Pierre DEPASSE de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY, Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
S.A.R.L. THEPOT, immatriculée au RCS de BREST sous le n° 777 502 360 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me René GLOAGUEN de la SCP GLOAGUEN & PHILY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST
La société AGENCE THEPOT ayant son siège social à [Adresse 1] exerce une activité de syndic depuis 1973.
Aux termes d’un contrat de travail à durée indéterminée ayant pris effet le 1er novembre 2006, la société THEPOT a embauché Madame [S] [U] en qualité de responsable syndic, qui après quelques années, gérait une centaine de copropriétés.
Madame [U] a le 15 octobre 2020 remis une lettre de démission à son employeur devant prendre effet le 15 janvier 2021. Elle sollicitait cependant à titre dérogatoire une prise d’effet anticipé au 31 octobre 2020.
La société THEPOT a refusé cette prise d’effet anticipé en raison de la nécessité d’assurer une transmission correcte des dossiers dont était en charge Madame [U] mais lui a proposé une prise d’effet au 15 décembre, soit un mois avant le délai légal de préavis, ce qui a été accepté par Madame [U].
Cependant, Madame [U] a été placée en arrêt de travail à compter du 9 novembre 2020 jusqu’au 26 novembre et a obtenu une prolongation de cet arrêt jusqu’au 15 décembre 2020.
Selon la société THEPOT, il serait apparu que Madame [U] menait parallèlement projet de créer une activité concurrente à celle de la société THEPOT, ayant constitué avec la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER (dite ELG) une société dénommée SAS ELG [U] ayant pour objet une activité de syndic.
La société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER (dite ELG) exerce également une activité de syndic sur le secteur de [Localité 4] depuis le 3 octobre 2018.
La société ELG [U] a été immatriculée le 29 décembre 2020 avec début d’activité à la même date et son siège social est situé à proximité de l’agence THEPOT.
Madame [U] occupe la fonction de Présidente de cette Société et la société ELG celle de Directeur Général.
La société THEPOT prétend que les sociétés ELG [U] et ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER auraient entrepris un démarchage systématique de la clientèle de la société THEPOT en dirigeant méthodiquement leur prospection vers sa clientèle.
Face à ces agissements, la société THEPOT est intervenue auprès des sociétés ELG [U] et ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER afin de tenter de régler amiablement le différend et a essuyé une fin de non-recevoir, les sociétés ELG [U] et ELG niant tout acte de concurrence déloyale.
La société THEPOT a déposé des requêtes aux fins de constat auprès des Présidents des Tribunaux de Commerce de BREST et QUIMPER.
Par ordonnance rendue par le Président du tribunal de commerce de BREST le 07 juin 2021, a désigné Maître [P] [I] huissier de justice assisté par Monsieur [H], expert en informatique, en leur confiant la mission de :
– Se rendre dans les locaux d’exploitation de la société ELG [U],
– De rechercher tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers
électroniques, fichiers informatiques tendant à détourner la clientèle de la société AGENCE THEPOT en faveur de la société ELG [U] et/ou de la
société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER et se faire remettre copie de ces documents,
– De rechercher tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers
électroniques, fichiers informatiques tendant à établir l’utilisation du fichier clientèle de la société AGENCE THEPOT en faveur de la société ELG [U] et/ou de la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER et se fait remettre copie de ces documents,
– De consulter le disque dur de tout ordinateur utilisé dans les locaux
d’exploitation de la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER afin
d’examiner toute suppression de fichiers informatiques, courriers électroniques ayant pour objet le détournement de la clientèle de la société
AGENCE THEPOT, de les restaurer et d’en conserver copie.
Parallèlement, le Président du Tribunal de Commerce de QUIMPER saisi après la levée des mesures de confinement prises par le gouvernement, a par ordonnance du 08 avril 2021, autorisé des mesures de constats similaires dans les locaux de la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER.
Par arrêt du 22 février 2022, la présente cour a rétracté cette ordonnance.
Les huissiers et experts se sont coordonnés pour agir simultanément le 24 juin 2021 dans les locaux d’exploitation des sociétés ELG [U] et ELG.
Par acte du 30 juin 2021, la société ELG [U] a assigné la société THEPOT en rétractation de l’ordonnance du 07 juin 2021 et en annulation du procès-verbal établi en exécution de l’ordonnance, avec toutes conséquences de droit.
Par ordonnance du 17 novembre 2021, le juge des référés du tribunal de commerce de Brest a :
– restreint la mesure prescrite par ordonnance du président du tribunal de commerce de Brest en date du 07 juin 2021 ainsi :
– rechercher sur la période du ler janvier 2020 au 24 juin 2021 tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers électroniques, fichiers informatiques relatifs et/ou destinés à la clientèle de la société THEPOT telle que décrite dans le tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et la liste des mots clefs consituée de noms de copropriétaires listés à la pièce numéro 59 et se faire remettre copie de ces documents,
– rechercher sur la période du 1er janvier 2020 au 24 juin 2021, tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers électroniques, fichiers informatiques tendant à établir l’utilisation du fichier clientèle de la société AGENCE THEPOT telle que décrite dans les tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et dans la liste des mots clefs constitués des noms des copropriétaires listés à la pièce numéro 59 et se faire remettre copie de ces documents,
– consulter le disque dur de tout ordinateur utilisé dans les locaux d’exploitation de la société ELG [U] afin d’examiner sur la période du 1er janvier 2020 au 24 janvier 2021 toute suppressions de fichiers informatiques, courriers électroniques ayant pour objet la clientèle de la société THEPOT telle que décrite dans le tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et dans la liste des mots clés listés à la pièce numéro 59, de les restaurer et d’en conserver copie,
– confirmé pour le solde l’ordonnance sur requête,
– ordonné aux parties de conserver leurs frais et dépens.
Appelante de cette ordonnance, la SAS ELG [U], par conclusions du 07 mars 2022, a demandé que la Cour :
– réforme en toutes ses dispositions, l’ordonnance du Président du Tribunal de commerce de BREST du 17 novembre 2021,
– rétracte l’ordonnance du Président du tribunal de commerce de BREST du 7 juin 2021,
– annule le procès-verbal de constat établi le 24 juin 2021 par la SELARL [P] [I], dans les locaux et sur les systèmes informatiques de la société ELG [U],
– annule les saisies de documents et de fichiers informatiques réalisés le 24 juin 2021 par la SELARL [P] [I], dans les locaux et sur les systèmes informatiques de la société ELG [U],
– fasse injonction à la SELARL [P] [I] de restituer à la société ELG [U] les documents qu’elle illégalement saisie le 24 juin 2021,
– fasse interdiction à la société THEPOT d’utiliser tous les documents et fichiers informatiques qu’elle a obtenus à la suite des opérations diligentées par la SELARL [P] [I] le 24 juin 2021, et ce sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée,
– réserve sa compétence pour liquider l’astreinte,
– condamne la société THEPOT à verser à la société ELG [U] la somme de 5 000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles,
– condamne la société THEPOT aux entiers dépens.
Par conclusions du 18 mars 2022, la société THEPOT a demandé que la Cour :
– confirme la décision entreprise du 17 novembre 2021 en toute ses dispositions sauf à amender la mission retenue selon la mission décrite aux motifs des présentes,
– déclare irrecevable et en tout état de cause mal fondée la demande de nullité du constat effectué par Maître [P] [I], huissier de justice à [Localité 3],
– déboute la société ELG [U] de l’ensemble de ses demandes fins moyens et prétentions,
– amende l’ordonnance du 7 juin 2021 de la manière suivante :
– rechercher sur la période du 1er janvier 2020 au 24 juin 2021, tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers électroniques, fichiers informatiques faisant apparaître les noms et/ou adresses des copropriétés et/ou faisant apparaître les noms des copropriétaires figurant dans les pièces numéros 13 à 29 jointes à la requête aux fins de constat déposée par la société THEPOT le 31 mai 2021 auprès de Monsieur le Président du tribunal de commerce de BREST ayant donné lieu à l’ordonnance rendue le 7 juin 2021,
– consulter le disque dur de tout ordinateur utilisé dans les locaux d’exploitation de la société ELG [U] afin d’examiner sur la période du 1er janvier 2020 au 24 juin 2021 toute suppression de fichiers informatiques, courriers électroniques, faisant apparaître les noms et/ou adresses des copropriétés et/ou faisant apparaître les noms des copropriétaires figurant dans les pièces numéros 13 à 29 jointes à la requête aux fins de constat déposée par la société THEPOT le 31 mai 2021 auprès de Monsieur le Président du tribunal de commerce de BREST ayant donné lieu à l’ordonnance rendue le 7 juin 2021,
– dise que l’huissier de justice pourra en cas de besoin solliciter le concours de la force publique pour les besoins de sa mission,
– confirme pour le surplus l’ordonnance du 7 juin 2021,
– condamne la société à ELG [U] en paiement de la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés devant la Cour,
– condamne la société ELG [U] aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
En vertu des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles.
La société THEPOT justifie que Mme [U] a été sa salariée durant quatorze années.
La gestion des copropriétés étant soumise à un grand formalisme, la sociéé THEPOT a pu, sans difficulté, démontrer que la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER et la société ELG [U] s’étaient livrés à compter du mois de novembre 2020 au démarchage de nombreuses copropriétés gérées auparavant par Mme [U] pour le compte de la société THEPOT.
En effet, pour changer de syndic, une copropriété doit demander au syndic en place, donc à la société THEPOT, de bien vouloir inscrire à l’ordre du jour le changement de syndic envisagé, en joignant les contrats proposés par les syndics concurrents.
Il en résulte que sans aucune mesure d’investigation, la société THEPOT a eu connaissance de toutes les copropriétés démarchées et des tarifs proposés, tant par la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER que par la société ELG [U].
D’autre part, après quatorze années passées au sein de la société THEPOT, Mme [U], qui n’était tenue par aucune clause de non concurrrence, n’avait besoin ni d’un fichier client ni d’une grille tarifaire pour connaître les copropriétés gérées par la société THEPOT et formuler des offres concurrentes.
La société THEPOT fait valoir toutefois que Mme THEPOT ne pouvait avoir en mémoire les coordonnées des représentants des conseils syndicaux et qu’il en résulte de fortes présomptions qu’elle ait utilisé son fichier client.
Elle démontre aussi que durant sa dernière année d’ exercice, Mme THEPOT a proposé à la signature des conseils syndicaux des mandats de syndic d’une durée d’une année alors qu’ils étaient de trois années auparavant, et conclut qu’il lui est nécessaire de rechercher dans quelle mesure le détournement de clientèle n’a pas été préparé alors même que Mme THEPOT était encore sa salariée.
Elle fait valoir que les copropriétés gérées par ses autres salariés n’ont pas demandé des contrats d’une année et ont renouvelé leurs contrats de trois années.
Enfin elle estime indispensable de pouvoir vérifier dans quelle mesure, dans ses contacts avec les conseils syndicaux, Mme THEPOT a pu émettre des propos dénigrants à son encontre, certaines pièces versées aux débats le laissant à penser.
Compte tenu de l’importance du nombre de copropriétés (une quarantaine) pour lesquelles a été demandée une mise en concurrence avec les agences ELG [U] et ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER, laquelle a été effectivement permise par l’arrivée à échéance de mandats d’une année, la société THEPOT dispose d’un motif légitime à demander l’organisation de mesures d’investigations non contradictoires.
S’agissant de la mission dévolue à l’huissier dans l’ordonnance sur requête, celle-ci était la suivante (souligné par la cour) :
– De rechercher tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers
électroniques, fichiers informatiques tendant à détourner la clientèle de la société AGENCE THEPOT en faveur de la société ELG [U] et/ou de la
société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER et se faire remettre copie de ces documents,
– De rechercher tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers
électroniques, fichiers informatiques tendant à établir l’utilisation du fichier clientèle de la société AGENCE THEPOT en faveur de la société ELG [U] et/ou de la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER et se fait remettre copie de ces documents,
– De consulter le disque dur de tout ordinateur utilisé dans les locaux
d’exploitation de la société ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER afin
d’examiner toute suppression de fichiers informatiques, courriers électroniques ayant pour objet le détournement de la clientèle de la société
AGENCE THEPOT, de les restaurer et d’en conserver copie.
En vertu des dispositions de l’article 249 du code de procédure civile, le juge peut charger la personne qu’il commet de procéder à des constatations, et le constatant ne doit porter aucun avis sur les conséquences de droit ou de fait qui peuvent en résulter.
La mission de l’huissier, telle que décrite dans la mission figurant sur l’ordonnance sur requête, lui permettait, dans un espace temporel non défini, de prendre connaissance de l’intégralité des documents se trouvant dans les locaux et/ou ordinateurs de la société ELG [U].
Ensuite, après avoir pris connaissance de tous ces documents, il appartenait à l’huissier de sélectionner lui-même ceux qui ‘tendaient à détourner la clientèle’, ou ‘tendaient à établir l’utilisation du fichier clientèle’ ou ‘avaient pour objet le détournement de la clientèle’, considérations qui ne relevaient pas d’une mesure de constat mais exigeaient de l’huissier qu’il porte un avis sur les conséquences de droit et de fait des mentions figurant dans les documents dont il prenait connaissance.
La mission dévolue à l’huissier était donc d’une part disproportionnée à l’objectif poursuivi en ce qu’elle permettait la saisie de documents de toute nature dans un espace de temps infini chez un concurrent direct de la société requérante, d’autre part n’était pas légalement admissible en ce qu’elle donnait à l’huissier une mission qu’il n’avait pas le droit d’accomplir.
Le juge des référés, dans l’ordonnance déférée, a utilisé les dispositions de l’article 149 du code de procédure civile pour restreindre la mission donnée à l’huissier qui est ainsi devenue :
– rechercher sur la période du ler janvier 2020 au 24 juin 2021 tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers électroniques, fichiers informatiques relatifs et/ou destinés à la clientèle de la société THEPOT telle que décrite dans le tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et la liste des mots clefs consituée de noms de copropriétaires listés à la pièce numéro 59 et se faire remettre copie de ces documents,
– rechercher sur la période du 1er janvier 2020 au 24 juin 2021, tous dossiers, documents, courriers postaux, courriers électroniques, fichiers informatiques tendant à établir l’utilisation du fichier clientèle de la société AGENCE THEPOT telle que décrite dans les tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et dans la liste des mots clefs constitués des noms des copropriétaires listés à la pièce numéro 59 et se faire remettre copie de ces documents,
– consulter le disque dur de tout ordinateur utilisé dans les locaux d’exploitation de la société ELG [U] afin d’examiner sur la période du 1er janvier 2020 au 24 janvier 2021 toute suppressions de fichiers informatiques, courriers électroniques ayant pour objet la clientèle de la société THEPOT telle que décrite dans le tableau des copropriétés listées à la pièce numéro 76 et dans la liste des mots clés listés à la pièce numéro 59, de les restaurer et d’en conserver copie,
Quoique l’huissier ait encore conservé des pouvoirs d’analyse des documents saisis, ceux-ci étaient donc restreints par la définition de la période temporelle et ses investigations délimitées par une liste de mots clefs résultant des pièces 76 et 59 produites par la société THEPOT devant le juge de la rétractation.
La pièce numéro 76 est la liste des copropriétés ‘ciblées’ par les sociétés ELG [U] et/ou ERNOUL LE BERRE GESTION IMMOBILIER.
La pièce numéro 59 est une liste de copropriétés ‘potentiellement contactées’ par les sociétés précitées.
L’examen de la requête initiale démontre toutefois que ces pièces 76 et 59 n’avaient pas été produites devant le premier juge.
S’il est possible de restreindre une mesure d’instruction après rétablissement du débat contradictoire si elle apparaît trop étendue, l’article 149 précité ne permet pas pour autant de la modifier sur le fondement de seuls mots clefs figurant dans des pièces nouvelles, non jointes à la requête initiale, et établies par la requérante postérieurement à la mesure de constat.
En effet, après rétablissement du principe du contradictoire, les pièces nouvelles fournies par le requérant à une mesure de constat peuvent venir appuyer ou confirmer des pièces fournies dans la requête initiale mais ne peuvent se substituer aux pièces omises et qui auraient permis de conserver un caractère proportionné aux mesures d’investigation ordonnées.
Afin d’éviter cet écueil, la société THEPOT propose à la Cour de réduire les recherches à la liste des clients et copropriétés évoqués dans les pièces remises à l’appui de sa requête initiale.
Cependant, les modifications permises par l’article 149 ne peuvent régulariser ex-post l’exécution d’une mesure d’instruction qui n’était pas légalement admissible compte tenu des pouvoirs excessifs dévolus à l’huissier.
Par conséquent, l’ordonnance déférée est infirmée et l’ordonnance sur requête litigieuse rétractée.
En conséquence de cette rétractation, il est fait droit aux prétentions de la société ELG [U] visant à voir déclarer nul le procès verbal de constat du 24 juin 2021 et les saisies opérées en exécution de l’ordonnance rétractée, avec toutes conséquences de droit quant à l’interdiction de se servir de toutes les pièces y figurant.
Aucune injonction ne peut être prononcée contre l’huissier de justice détenant les pièces, ce dernier n’étant pas partie à l’instance.
Il appartiendra à la société THEPOT de lui demander de restituer les pièces copiées à la société ELG [U].
Enfin, le prononcé d’une astreinte n’apparaît pas nécessaire.
La société THEPOT, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel.
Les demandes formées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sont rejetées.