Nullité de constat : 21 novembre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 12/00886

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Nullité de constat : 21 novembre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 12/00886
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRÊT DU 21 Novembre 2013 après prorogation

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 12/00886, 12/1226 et 12/1875

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Janvier 2012 par le Conseil de prud’hommes de PARIS – RG n° 08/15336

APPELANTE

SARL PARIS ETOILE

[Adresse 1]

représentée par Me Christophe SOLIN, avocat au barreau de ROUEN, toque : 98

INTIME ET APPELANT INCIDENT

Monsieur [X] [L]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Karine KANOVITCH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 113

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 19 Septembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les appels régulièrement interjetés par la société PARIS ETOILE à l’encontre de deux jugements prononcés les 16 janvier 2012 et 20 mars 2012 par le conseil de prud’hommes de Paris (formation de départage) ayant statué sur le litige qui l’oppose à M. [X] [L] sur les demandes de ce dernier relatives à l’exécution de son contrat de travail.

Vu l’appel régulièrement interjeté par M. [L] à l’encontre de ces mêmes jugements.

Vu les jugements déférés qui ont

‘ pour le jugement du 16 janvier 2012 :

– rejeté les demandes de sursis à statuer et de nullité du constat d’huissier dressé le 10 juin 2011,

– condamné la société PARIS ETOILE à payer à M. [L] la somme de 12 436,94 € à titre de rappel de salaire (soit 303,34 € par mois sur 41 mois à compter d’avril 2008), outre les congés payés afférents,

– ordonné la remise des bulletins de salaire rectifiés conformes, sans astreinte,

– rejeté la demande en paiement de la somme de 30 600 € (prime de vente),

– dit qu’au titre de la rémunération du temps supplémentaire, M. [L] était fondé à réclamer :

– 15 minutes par jour jusqu’à août 2008 pour les jours de travail où il était du matin,

– et 30 minutes par jour tous les jours de travail,

– ordonné la réouverture des débats sur la date à partir de laquelle la société PARIS ETOILE est tenue des obligations d’employeur envers la société PARIS ETOILE et sur le montant dû au titre des heures supplémentaires,

– rejeté la demande tendant à instaurer un délai pour communiquer les plannings ainsi que la demande en paiement de la somme de 20 000 €,

– ordonné l’exécution provisoire,

– réservé les dépens.

‘ pour le jugement du 20 mars 2012 :

– dit que la société PARIS ETOILE n’est pas tenue envers M. [L] de rémunérations avant le 20 juin 2007,

– dit qu’à compter de novembre 2011, le salaire de M. [L] est majoré de 303,34 € et constaté que cette majoration était déjà intégrée dans le salaire payé jusqu’à janvier 2012 inclus,

– condamné la société PARIS ETOILE à payer à M. [L] la somme de 7 192,30 € à titre de rappels d’heures supplémentaires du 20 juin 2007 au 31 janvier 2012, outre les congés payés afférents, le tout portant intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2012,

– ordonné l’exécution provisoire,

– rejeté la demande en paiement des sommes de 121,33 € et 5 000 €,

– rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamné la société PARIS ETOILE à payer à M. [L] la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– mis les dépens à la charge de la société PARIS ETOILE.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l’audience aux termes desquelles :

La société PARIS ETOILE, appelante, poursuivant l’infirmation des jugements déférés, si ce n’est en ce qu’ils ont débouté M. [L] de ses demandes au titre des rémunérations pour la période antérieure au 20 juin 2007, des primes de lavage, de l’organisation du planning, des dommages et intérêts complémentaires, demande à la cour

– de débouter M. [L] de l’ensemble de ses demandes,

– de le condamner à lui payer la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [X] [L], intimé, conclut à

– la remise des bulletins de salaire modifiés,

– la confirmation du jugement en ce qu’il lui a accordé un complément de salaire de 303 € par mois à compter d’avril 2008 et une partie des heures supplémentaires demandées,

– l’infirmation du jugement pour le surplus et, en conséquence, la condamnation de la société PARIS ETOILE à lui payer :

– 37 200 € au titre des primes de vente, outre les congés payés afférents,

– 607,55 € au titre de la rémunération correspondant à 25 minutes d’habillage/déshabillage du 20 juin 2007 à août 2008, outre les congés payés afférents

– 20 000 € à titre de dommages et intérêts,

– 7 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

Courant 1991, M. [L] a été engagé selon un contrat oral comme employé de station service pour exercer ses fonctions dans une station sise [Adresse 3]. La station service est située aux deux extrémités du parking FOCH et comporte deux entrées : l’une côté [Adresse 5], l’autre côté [Adresse 4].

A compter du 20 juin 2007, la location-gérance du fonds de commerce, précédemment exploité par la société PRESTIGE DES PRODUITS PETROLIERS, a été confiée à la société PARIS ETOILE par la société des PETROLES SHELL.

Le 24 décembre 2008, M. [L] a saisi le conseil de prud’hommes afin d’obtenir divers rappels de rémunération ainsi que des dommages et intérêts.

Depuis le 30 août 2012, la location-gérance est exercée par la société FOCH.

M. [L] n’est plus, à ce jour, employé de la station service.

SUR CE

Sur la jonction

Les dossiers enregistrés sous les numéros 12/00886, 12/01226 et 12/01875 sont étroitement connexes. Il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de les joindre et de statuer par une seule décision.

Sur les demandes relatives à la rémunération

Sur les demandes fondées sur le principe “à travail égal, salaire égal”

‘ le complément de salaire à compter d’avril 2008

La société PARIS ETOILE soutient que M. [D] a obtenu une augmentation de salaire, effective en mai 2008, compte tenu des fonctions particulières qu’il exerçait régulièrement au sein de la station (réception du carburant, commande et réception des marchandises de la boutique, établissement des rapports de fin de mois, enregistrements des nouvelles références de produits dans la caisse) et qui lui valaient de détenir les clés de la réserve ; que M. [L] n’exerçait pas ces attributions et responsabilités ; que l’attestation établie par M. [D] en faveur de M. [L] doit être appréciée au regard du fait que ce salarié, comme les autres salariés qui attestent en faveur de M. [L], a engagé une procédure prud’homale contre leur employeur et qu’il a été condamné pour abus de confiance commis à son préjudice et à celui de la société pétrolière AVIA ;

Que tous les pompistes, dont M. [L], ont été par ailleurs interpellés et placés en garde à vue en décembre 2012 à la suite d’une plainte d’une société de location occupant des locaux à proximité de la station service en raison de manoeuvres frauduleuses commises à son détriment ; qu’une instruction pénale est en cours ; que les pièces produites par M. [L] pour tenter de faire accroire qu’il effectuait des réceptions de marchandises ne sont pas probantes.

M. [L] fait valoir qu’à son arrivée en juin 2007, la société PARIS ETOILE a instauré de nouvelles règles de fonctionnement et octroyé des faveurs à certains salariés de façon à diviser les employés (plannings distribués tardivement, suppression de la possibilité de contrôler les encaissements auparavant attribuables à chaque salariés, primes de vente attribuées de façon opaque à certains laveurs, salaire inégal pour des tâches identiques) ; que M. [D] avait moins d’ancienneté que lui et exerçait les mêmes fonctions ; que lui-même n’a bénéficié d’aucune promotion ou augmentation ; qu’en avril 2008, une demande écrite et collective a été adressée à l’employeur pour obtenir que les installations de la station soient entretenues et que les salaires soient augmentés ; que seul M. [D] a obtenu une augmentation ainsi que la faveur de ne travailler que le matin et d’être libre le mercredi et le dimanche ; qu’il n’existe aucune différence de fonctions ou de responsabilité susceptible de justifier l’inégalité de salaire.

Tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

Sont considérés comme ayant une valeur égale par l’article L.3221-4 du code du travail, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

S’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe ‘à travail égal, salaire égal’ de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

M. [L] produit :

– l’attestation de M. [D] qui indique, le 4 janvier 2011, que l’augmentation de salaire qu’il est le seul à avoir obtenue n’est pas justifiée par une surcharge de travail, les tâches qu’il effectue étant également celles de tous ses collègues opérateurs ; qu’il ne travaille que le matin (de 7h à 14h) de sorte qu’il est amené à signer les bons de livraison de marchandises et de carburant côté [Adresse 5], les livraisons étant très rares l’après-midi ; que lors de ses congés ou absences, ce sont ses collègues qui signent et reçoivent les livraisons ;

– un bon de livraison de carburant en date du 21 décembre 2010 portant la mention ‘Réception camion carburant [X]’,

– un bon de livraison de bois en date du 21 décembre 2010 portant la signature de ‘[J]’ et les initiales [G].

De son côté, l’employeur verse :

– une trentaine de trente bons de livraison portant la signature de M. [D], signés au cours de la période avril 2008 à mars 2010,

– l’attestation de M. [U], commerçant, qui témoigne de ce que M. [D] commande les produits pour la boutique (désodorisants, accessoires auto…),

– 4 fiches informatiques ‘rapports de fin de mois’ d’une demi page établies par M. [D] en octobre et novembre 2009, janvier et avril 2010.

Aucun élément n’est produit justifiant que M. [D] disposait des clés de la réserve et entrait les nouvelles références dans la caisse.

S’il doit être admis que la valeur probante du témoignage de M. [D] est relative eu égard à la procédure engagée par ce dernier en 2011 contre l’employeur et au jugement du tribunal correctionnel de Paris du 15 février 2012 qui le condamne pour abus de confiance (détournement de carburant commis avec un autre salarié) au préjudice de l’employeur, il reste que les éléments fournis par la société PARIS ETOILE ne démontrent pas que M. [D] effectuait régulièrement des tâches supplémentaires ou plus complexes ou plus pénibles ou requérant des compétences plus importantes que celles réalisées par M. [L], étant observé que les bons de livraisons indiquent que les opérations de livraison ont lieu en matinée et que M. [D] a obtenu de ne travailler que le matin, ce qui constitue un avantage – par rapport à M. [L] qui est de service soit le matin soit l’après-midi – de nature à compenser l’éventuelle contrainte que pourrait représenter la prise en charge des livraisons.

Dans ces conditions, l’employeur n’établit pas que la différence de traitement entre les deux salariés était objectivement justifiée.

Il en découle que M. [L] est bien fondé à réclamer une somme de 12 436,94 € (soit 303,34 € sur 41 mois – avril 2008 à octobre 2011) à titre de rappel de salaire, majorée des congés payés afférents, les montants réclamés étant justifiés et non contestés dans leur quantum. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

‘ la prime de ‘vente’ ou de ‘lavage’

M. [L] réclame une prime de ‘vente’, faisant valoir que cette prime, instaurée par l’employeur en juin 2007, était accordée de façon discrétionnaire à certains salariés, les laveurs, alors que les opérateurs, comme lui, encaissaient des lavages ; que les critères de fixation et d’attribution de cette prime n’étaient ni objectifs ni mesurables.

La société PARIS ETOILE oppose que la prime litigieuse est une prime de ‘lavage’ et non de ‘vente’ venant rémunérer les opérations de préparation du lavage automatique des voitures (nettoyage des jantes, passage de la lance à haute pression pour enlever les traces de boue..) ; que M. [L], qui était employé libre service (pompiste), n’effectuait pas de lavages de véhicules même s’il lui arrivait d’encaisser des prestations de lavage ; que les pompistes bénéficiaient de primes en fonction des ventes faites en boutique.

L’employeur verse les attestations de MM. [C] et [B], laveurs machine, qui indiquent avoir négocié une prime pour les lavages effectués, qui est une prime de rendement (‘suivant le nombre de lavages’, ‘rien à voir avec les ventes’). Les bulletins de salaire de M. [L] révèlent qu’il percevait régulièrement une ‘prime de vente’.

L’employeur établit ainsi que la prime litigieuse était versée aux employés qui réalisaient effectivement des lavages de voitures, ce qui n’était pas le cas de M. [L], et que la différence de traitement entre les laveurs machine et les pompistes était par conséquent objectivement justifiée.

M. [L] sera débouté de sa demande et le jugement déféré confirmé de ce chef également.

Sur les heures supplémentaires et congés payés afférents

La société PARIS ETOILE soutient notamment qu’en application du 2° de l’article L. 1224-2 du code du travail, elle n’est pas tenue envers M. [L] de rémunérations qui seraient dues au titre de la période antérieure à son contrat de location gérance (20 juin 2007) ; que si c’est à juste raison que le conseil de prud’hommes a rejeté la demande d’heures supplémentaires au titre des temps d’habillage et de déshabillage, c’est à tort qu’il a considéré que les temps d’ouverture et de fermeture de la station, comme ceux de la pause d’une demi heure par jour, devaient donner lieu au paiement d’heures supplémentaires ;

Qu’en effet, l’horaire de service de M. [L] ne coïncidait pas avec celui de la station (7h/21h en semaine (puis, depuis août, 2008 7h15/20h45) et le dimanche 8h/20h (puis, depuis août, 2008 8h15/19h45) ; que M. [L] n’ouvrait jamais la station à 7h ; que l’ouverture et la fermeture de la station, comme l’habillage et le déshabillage, se déroulaient pendant le temps de travail ; que les temps d’ouverture et de fermeture sont moins importants que ceux prétendus ; que les attestations des autres pompistes engagés comme M. [L] dans un litige prud’homal avec l’employeur sont peu probantes, tout comme le constat d’huissier établi à la requête de M. [L] dans la mesure où c’est M. [L] qui ‘tient son rôle’ devant l’huissier ; que les temps de pause pendant lesquels les salariés ne sont pas à la disposition de l’employeur ne sont pas rémunérés ; que les salariés disposaient d’un temps de pause d’une 1/2 heure ; que la note de service du 1er juin 2008 ne visait qu’à éviter que les salariés n’abandonnent leur poste de manière anarchique et pas à maintenir le salarié à la disposition de l’employeur pendant sa pause ; que certains salariés renonçaient à prendre leur pause pour ne pas perdre de pourboires ; qu’en tout état de cause, le salarié n’était pas à la disposition de l’employeur pour une durée supérieure à 7h par jour ; que la majoration réclamée de 25 % n’est pas donc pas justifiée ; qu’aucune tenue n’était imposée aux salariés.

M. [L] demande un rappel d’heures supplémentaires depuis 2007 (30 minutes par jour pour la pause non prise + 40 minutes de temps de préparation pour chaque ouverture ou fermeture de la station, y compris temps d’habillage/déshabillage) faisant valoir que la société PARIS ETOILE s’abstient de produire le contrat de location gérance sur lequel sont précisées les obligations souscrites au titre notamment de la reprise des engagements pris par l’ancien employeur ; que la société PARIS ETOILE, comme le précédent employeur, méconnaissaient les règles relatives aux temps de pause et aux heures supplémentaires ; que le premier juge a fait droit à la demande relative à la pause journalière d’une 1/2 heure mais n’a accordé que 15 mn pour l’ouverture de la station sans tenir compte du temps de fermeture et en rejetant la demande relative au temps d’habillage/déshabillage alors que l’employeur fournissait une tenue aux couleurs du pétrolier ainsi que des chaussures.

M. [L] conteste le jugement déféré en ce qu’il a dit que l’employeur n’était pas tenu envers lui de rémunérations avant le 20 juin 2007, date du début de la location-gérance de la société PARIS ETOILE. Mais le jugement n’est en réalité pas contesté sur ce point dès lors que le salarié ne demande son infirmation, au titre des heures supplémentaires, qu’en ce qu’il n’a fait droit à sa demande qu’à hauteur de 45 mn (30 mn de pause + 15 mn d’ouverture), sans réclamer de sommes antérieures au 20 juin 2007 (cf. son décompte joint à ses écritures en appel).

‘ la pause journalière

La convention collective nationale du commerce des services de l’automobile (article 1.10) applicable prévoit que ‘les journées de travail d’une durée égale ou supérieure à 6 heures doivent être interrompues par une ou plusieurs pauses. La durée totale de la pause ou des pauses journalières, y compris celle pouvant être consacrée aux repas, ne peut être inférieure à une demi-heure sauf accord du salarié’.

Par note de service du 1er juin 2008, la direction a rappelé’les heures d’ouverture de la station soit : de 7h à 21h en semaine et de 8h à 20 h les week end et jours fériés’ et s’est plainte de ce que le non respect des heures ‘d’ouverture’ entraînait le mécontentement des clients ainsi qu’une perte importante ‘de litrages de carburant’ et encore de ce que certains employés ‘abandonnent leur poste’ pendant leurs heures de travail sans la permission de l’employeur, ‘laissant leur collègue seul avec une charge de travail importante aux heures de pointe et sans sécurité’. Comme le premier juge, la cour déduit des termes de cette note que les salariés ont été empêchés de prendre la pause conventionnelle d’une demi heure.

Cette analyse n’est pas remise en cause par les attestations, versées par l’employeur, de deux clients qui témoignent que ‘M. [P]’ et ses collègues étaient souvent en pause lors de leur passage à la station ou de celle de deux salarié, M. [T] et Mme [Q], qui certifie, pour l’un, que les pompistes avaient la possibilité de faire une pause quand ils le voulaient, pour l’autre, que les pompistes ne voulaient pas être remplacés pendant leur pause afin de ne pas perdre leurs pourboires.

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit que M. [L] pouvait prétendre au paiement d’une demi heure supplémentaire par jour travaillé au titre du temps de pause.

‘ le temps d’ouverture et de fermeture de la station service (comprenant le temps d’habillage/déshabillage)

Il n’est pas contesté que l’employeur a remis au salarié une tenue de travail, qui a été montrée à l’audience, ainsi que des chaussures. Le constat d’huissier versé par M. [L] indique que les personnes présentes portent toutes la tenue complète AVIA. Le règlement intérieur du 22 janvier 2010 (article 3) indique au titre de la prévention des accidents que les salariés sont tenus d’utiliser les moyens de protection mis à leur disposition et de respecter les consignes définies à cet effet ‘(port de casque, gants, chaussures de sécurité, tenue ignifugée…)’. Le temps d’habillage et de déshabillage devait par conséquent faire l’objet d’une contrepartie.

Au vu des éléments fournis de part et d’autre (notamment, constats d’huissier et attestations), la cour est en mesure d’estimer que le temps de travail nécessaire à l’ouverture et de la station service ainsi qu’à l’habillage et au déshabillage était au total de 15 minutes par jour.

Aucun élément probant n’est versé quant au temps nécessaire à la fermeture de la station.

Le jugement du 16 janvier 2012 qui a retenu un temps de 15 mn pour l’ouverture de la station sans prendre en compte le temps nécessaire à l’habillage et au déshabillage sera donc réformé en ce sens sans que les condamnations pécuniaires prononcées à ce titre par le jugement du 20 mars 2012 soient modifiées.

Sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice moral de M. [L]

M. [L] fait valoir que la société PARIS ETOILE communiquait les plannings mensuellement et avec une avance qui allait de quelques jours à un mois, alors qu’avec le précédent employeur, ils étaient établis une fois par an ; qu’il en a résulté des difficultés pour les salariés pour s’organiser ; qu’il a demandé, en vain, la transmission des plannings dans un délai préalable de 6 mois ; qu’il a été mis à pied à la suite d’une garde à vue résultant notamment des fautes de l’employeur, puis traité dans des conditions humiliantes ; qu’il a pris acte de la rupture de son contrat de travail en avril 2013 ; qu’il a fait l’objet d’arrêts maladie à caractère professionnel ; que toutes ces années de conflit avec la société PARIS ETOILE l’ont ‘brisé’.

Lorsque comme en l’espèce les horaires de travail sont variables, l’établissement des plannings relève du pouvoir propre de l’employeur, sauf abus qui n’est pas ici caractérisé. En effet, l’employeur affirme, sans être démenti, qu’il communiquait les plannings mensuels au plus tard le 20 de chaque mois pour le mois suivant entier et qu’il ne s’est jamais opposé à des changements d’horaires ou à des demandes de congé afin notamment de permettre à M. [L] d’être présent à l’occasion du suivi médical de son enfant.

Le préjudice lié aux conditions de la rupture de la relation de travail ne relève pas du contentieux dont est à ce jour saisie la cour.

La demande sera rejetée et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Restant débitrice du salarié, la société PARIS ETOILE sera condamnée aux dépens d’appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société PARIS ETOILE au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M. [L] peut être équitablement fixée à 1 000 €, cette somme complétant celle allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ordonne la jonction des dossiers enregistrés sous les numéros 12/00886, 12/01226 et 12/01875.

Infirme partiellement le jugement déféré du 16 janvier 2012,

Statuant à nouveau,

Dit qu’au titre de la rémunération des heures supplémentaires, M. [L] est fondé à réclamer 15 minutes par jour pour l’ouverture de la station et l’habillage et le déshabillage,

Confirme les jugements déférés pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne la société PARIS ETOILE aux dépens d’appel et au paiement à M. [L] de la somme de 1 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier,Le Président,

 


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