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N° RG 22/03137, 22/3142 et 22/3232 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LPXO
N° Minute :
C1
Copie exécutoire délivrée
le :
à
la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD
Me Alban VILLECROZE
SELARL CDMF AVOCATS
SCP GUIDETTI BOZZARELLI LE MAT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 09 MAI 2023
Appel d’une ordonnance (N° R.G. 22/00145) rendue par le Tribunal judiciaire de Vienne en date du 29 juillet 2022, suivant déclaration d’appel du 11 Août 2022
APPELANTE :
S.A.S. ACS SOLUTIONS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 12],
[Adresse 12],
[Localité 11]
représentée et plaidant par Me Marie-christine HARTEMANN-DE CICCO de la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIM ÉES :
Mme [W] [Y]
née le 02 Novembre 1991 à [Localité 14]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Alban VILLECROZE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par Me HORESNYI-PERREL, avocat au barreau de LYON
Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 3], pris en la personne de son représentant légal, représenté par son syndic la SARL REGIE DUPRONT, pris en son établissement secondaire situé
[Adresse 5]
[Localité 6]
non représenté
S.A. ABEILLE IARD & SANTE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 10]
représentée et plaidant par Me BOZZARELLI de la SCP GUIDETTI BOZZARELLI LE MAT, avocat au barreau de GRENOBLE
S.A. PACIFICA DOMMAGES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 8]
représentée par Me Denis DREYFUS de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substitué et plaidant par Me Romain JAY de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTERVENANTE VOLONTAIRE
LLOYD’S INSURANCE CY SA, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
dont le siège se situe [Adresse 13]
[Adresse 1]
Belgique
représentée et plaidant par Me Marie-christine HARTEMANN-DE CICCO de la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Emmanuèle Cardona, présidente,
M. Laurent Grava, conseiller,
Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère
DÉBATS :
A l’audience publique du 28 février 2023, Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, assisté de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seul les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile.
Il en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [W] [Y] exerce depuis 2016 une activité de masseur-kinésithérapeute au sein de son cabinet situé [Adresse 3] à [Localité 7]. Elle a souscrit un contrat d’assurance multirisque professionnelle auprès de la SA Pacifica.
Le 22 octobre 2021, elle a constaté un important dégât d’eaux usées affectant l’intégralité de ses locaux professionnels et a déclaré ce sinistre à son assureur.
Un procès-verbal de constat d’huissier a été établi le 2 novembre 2021.
L’agence régionale de santé a imposé à Mme [Y] de procéder à une analyse bactériologique des locaux et le cas échéant à une désinfection complète des surfaces souillées afin de prévenir tout risque pour sa patientèle.
La société chargée de cette analyse a relevé que la qualité microbiologique des surfaces prélevées n’était pas satisfaisante et présentait un risque infectieux.
Mme [Y] a été contrainte de suspendre son activité, de quitter les lieux et de chercher d’autres locaux provisoires tout en continuant de régler l’emprunt de ses locaux professionnels.
Une expertise amiable a été organisée parle cabinet POLYEXPERT, expert mandaté par la SAS ACS Solutions, assureur dommages-ouvrage.
Le rapport a mis en évidence que l’origine du sinistre était due à l’obstruction du réseau d’eaux usées par un débris de PVC, c’est-à-dire un sinistre causé par un vice de construction affectant un élément d’équipement commun.
Les opérations d’expertise amiable ont été étendues au syndicat des copropriétaires et à son assureur la SA Abeille Assurances.
Mme [Y] a sollicité l’intervention de son propre expert lequel a effectué un chiffrage provisoire de remise en état le 14 mai 2022 à hauteur de 86 365,51 euros concernant les biens immobiliers, 15 315,50 euros concernant les biens mobiliers, le chiffrage de la perte d’exploitation devant être fait plus tard.
S’agissant des biens immobiliers, la demanderesse a sollicité plusieurs devis pour la remise en état de son local professionnel évaluée à la somme totale de 82 383,49 euros.
Exposant n’avoir eu aucune réponse des assureurs, Mme [W] [Y] a obtenu l’autorisation d’assigner d’heure à heure le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 7], la SA Abeille IARD et Santé, la SA Pacifica et la SAS ACS Solutions devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Vienne aux fins de les voir condamner in solidum à lui payer la somme provisionnelle de 82 383,49 euros sur les travaux.
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 29 juillet 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Vienne a :
– condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 7], la SA d’assurances Abeille IARD et Santé, la SA Pacifica et la SAS ACS Solutions à payer à Mme [W] [Y] la somme de quatre-vingt-deux mille trois cent quatre-vingt-trois euros et quarante-neuf centimes (82 383,49 €), à titre de provision ;
– condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 7], la SA d’assurances Abeille IARD et Santé, la SA Pacifica et la SAS ACS Solutions à payer à Mme [W] [Y] la somme de mille cinq cents euros (1 500 €) par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 7], la SA d’assurances Abeille IARD et Santé, la SA Pacifica et la SAS ACS Solutions aux dépens.
Par déclaration en date du 11 août 2022, la SAS ACS Solutions a interjeté appel de la décision (RG 22/3137).
Par déclaration en date du 11 août 2022, la SA Abeille IARD et Santé a interjeté appel de la décision (RG 22/3142).
Par déclaration en date du 25 août 2022, la SA Pacifica a interjeté appel de la décision (RG 22/3232).
Par avis en date du 25 août 2022, les conseils ont été avisés de la fixation de l’affaire à l’audience du 28 février 2023, en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par conclusions récapitulatives n° 2 notifiées par voie électronique le 14 février 2023, la SAS ACS Solutions et la SA Lloyd’s Insurance Company (intervenant volontaire) demandent à la cour de :
– annuler l’ordonnance entreprise pour violation du principe du contradictoire et des droits de la défense ;
Sur le fond,
– constater que la société ACS Solutions n’est pas une société d’assurance mais qu’elle dispose d’un mandat limité à la gestion des sinistres du périmètre confié par la SA Lloyd’s Insurance Company au titre de la convention de prestations afférente ;
– dire et juger irrecevables et mal fondées les demandes présentées contre ACS Solutions ;
– débouter Mme [W] [Y] de ses demandes et prétentions formulées à l’encontre d’ACS Solutions ;
– donner acte à la SA Lloyd’s Insurance Company de son intervention volontaire ;
– constater que l’obligation de la SA Lloyd’s Insurance Company à l’égard de Mme [W] [Y] fait l’objet d’une contestation sérieuse ;
– débouter Mme [W] [Y] de ses demandes, fins et prétentions ;
– condamner Mme [W] [Y] ou qui mieux le devra à payer à la société ACS Solutions et à la SA Lloyd’s Insurance Company une somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elles exposent les éléments principaux suivants au soutien de leurs écritures :
– elles rappellent les faits, le contrat souscrit, le sinistre et la procédure ;
– la SA Lloyd’s Insurance Company est l’entité qui aurait dû être mise en cause ;
– la SA Lloyd’s Insurance Company, assureur DO, n’a pas été mise en demeure ce qui justifiera une position de non garantie ;
– ACS a délivré une assignation en référé devant le premier président de la cour d’appel de Grenoble à Mme [W] [Y], au SDC [Adresse 3], à la SA Abeille et à la SA Pacifica, aux fins d’obtenir la suspension de l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé du 29 juillet 2022 ;
– par ordonnance du 23 novembre 2022, le premier président a rejeté la demande de suspension de l’exécution provisoire ;
– Mme [Y] a fait exécuter la décision uniquement à l’encontre de son assureur Pacifica ;
– elle a confirmé dans ses écritures avoir reçu les fonds le 27 décembre 2022 par virement de la CARPA ;
– l’ordonnance entreprise est intervenue en violation totale du respect du contradictoire ;
– Mme [Y] a sollicité le 25 juillet 2022 une autorisation d’assigner d’heure à heure ;
– elle a obtenu le 26 juillet une autorisation d’assigner avant le 26 juillet 17 h pour l’audience du 27 juillet à 9 heures et l’ordonnance est intervenue le 29 juillet ;
– il était manifestement impossible pour la requérante de préparer sa défense et ce en méconnaissance totale du respect du contradictoire ;
– de plus, les circonstances évoquées dans l’assignation ne justifiaient pas une audience en moins de 24 h ;
– de plus, le dégât des eaux a été constaté dans les locaux professionnels de Mme [Y] le 22 octobre 2021, soit il y a presque un an ;
– Mme [Y] avait indiqué en outre être en congé maternité et avoir prévu une reprise de son activité professionnelle en décembre 2022 ;
– dès lors, l’affaire ne relevait pas des circonstances d’extrême urgence justifiant un délai aussi bref de moins de 24 h entre la délivrance de l’assignation et l’audience, la situation ne présentant pas de danger particulier et n’étant pas susceptible de créer un dommage irréparable ;
– l’affaire aurait très bien pu être traitée en procédure de référé classique, procédure qui relève déjà de l’urgence ;
– ACS Solutions ne peut valablement être mise en cause par les tiers qui ne peuvent s’adresser qu’aux sociétés d’assurance seules tenues aux obligations attachées aux contrats d’assurance ;
– en sa qualité d’assureur dommages-ouvrage, elle sollicite qu’il lui soit donné acte de son intervention volontaire à l’instance ;
– en l’espèce, la SA Lloyd’s, en sa qualité d’assureur dommages-ouvrage, conteste sa garantie ;
– une position de non garantie a été notifiée le 16 décembre 2021 ;
– la garantie dommages-ouvrage ne prend effet qu’après mise en demeure adressée à l’entreprise, d’exécuter ses obligations et restée infructueuse ;
– l’existence d’une mise en demeure adressée à la SAS ACS ou à la SA Lloyd’s et restée infructueuse n’est pas rapportée, de sorte que la garantie dommages-ouvrage obligatoire de la police ne peut intervenir ;
– en tout état de cause, pendant cette période, le contrat dommages-ouvrage ne joue pas pour les non-exécutions de travaux, mais uniquement pour les dommages de même nature que ceux engageant, après réception, la responsabilité décennale des constructeurs ;
– en l’état, il est impossible pour le juge des référés, juge de l’évidence, d’apprécier la responsabilité incombant le cas échéant à chacun des protagonistes.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 octobre 2022, la SA Pacifica demande à la cour de :
– juger nulle et de nul effet l’assignation délivrée à l’encontre de la société Pacifica ;
– réformer la décision déférée en ce qu’elle a condamné la société Pacifica in solidum à payer à Mme [Y] 82 383 euros à titre de provision outre 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– réformer en conséquence la décision déférée en ce qu’elle a condamné la SA Pacifica in solidum à payer à Mme [Y] 82 383 euros à titre de provision outre 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouter Mme [Y] de l’intégralité de ses demandes dirigées à l’encontre de la SA Pacifica ;
– condamner Mme [Y] à payer à la SA Pacifica la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :
– elle se joint aux demandes formulées par la SAS ACS Solutions sollicitant de voir juger nulle et de nul effet l’assignation délivrée et la réformer ;
– elle rappelle les faits et la procédure ;
– Mme [Y] a souscrit un contrat d’assurance multirisque auprès de Pacifica ;
– en l’espèce l’ensemble des défendeurs ont été dans l’impossibilité de constituer avocat et de comparaître à l’audience de première instance ;
– l’acte d’huissier ne comporte aucune mention de l’heure de la signification ;
– ainsi, il est impossible d’attester que l’assignation a été signifié avant 17 heures le 26 juillet 2022 et a donc respecter les délais imposés par l’ordonnance ;
– de surcroît, une telle mention est obligatoire et de nature à entraîner la nullité de la signification ;
– de plus, en l’espèce l’urgence de la situation n’était pas établie ;
– la responsabilité de la société Pacifica étant loin d’être caractérisée.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2022, la SA Abeille IARD et Santé demande à la cour de :
– donner acte à la concluante de ce qu’elle entend faire assomption de cause avec l’appelante et sollicite, elle aussi, la réformation de la décision déférée ;
– juger nulle et de nul effet l’assignation délivrée à l’encontre de la concluante et de toutes autres parties ;
– réformer en conséquence la décision déférée en ce qu’elle l’a condamnée in solidum à payer à Mme [Y] 82 383 euros à titre de provision outre 1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– juger en tout état de cause qu’il existe des contestations sérieuses quant à la possibilité de mobiliser les garanties de la SA Abeille IARD et Santé ;
– réformer en conséquence la décision déférée en ce qu’elle l’a condamnée in solidum à payer à Mme [Y] 82 383 euros à titre de provision outre 1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouter Mme [Y] ou tous autres concluants de l’intégralité de leurs demandes dirigées à l’encontre de la SA Abeille IARD et Santé ;
– condamner Mme [Y] à payer à Abeille IARD et Santé la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :
– elle rappelle les faits et la procédure ;
– le syndicat de copropriétaires est assuré auprès d’Aviva, devenue Abeille Assurances ;
– l’ordonnance entreprise est intervenue en violation totale du respect du contradictoire ;
– en effet, le référé d’heure à heure est une procédure d’exception qui suppose que l’on soit en
présence d’une situation d’extrême urgence ;
– en l’occurrence, Mme [Y] n’était pas privée de lieu d’exercice de sa profession puisqu’elle pouvait se servir d’un autre local mis à sa disposition par le maître d’ouvrage ;
– elle a obtenu le 26 juillet une autorisation d’assigner avant le 26 juillet 17 h pour l’audience du 27 juillet à 9 heures et l’ordonnance est intervenue le 29 juillet sans que la concluante ait pu être représentée ;
– l’assignation ne précise pas à quelle heure elle a été remise à Abeille ;
– l’existence d’une situation d’extrême urgence n’était pas présente au point de sacrifier le principe du respect du contradictoire ;
– il existe dans l’espèce, à tout le moins, une contestation sérieuse concernant la recevabilité des demandes présentées par Mme [Y] ainsi que s’agissant de la responsabilité de la copropriété et donc de la mobilisation des garanties de son assureur.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2023, Mme [W] [Y] demande à la cour de :
– prendre acte de l’intervention volontaire de la SA Lloyd’s Insurance Company, et de la demande de mise hors de cause d’ACS ;
– infirmer uniquement l’ordonnance rendue sur l’assureur la SA Lloyd’s Insurance Company qui doit être condamnée en lieu et place de son mandataire ACS ;
– pour le surplus, confirmer l’ordonnance rendue ;
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4], la SA Lloyd’s Insurance Company, la SA Abeille IARD et Santé et la SA Pacifica à verser à Mme [Y] la somme provisionnelle de 82 383,49 euros, à valoir sur l’indemnisation définitive du sinistre survenu le 22 octobre 2021 ;
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4], la SA Lloyd’s Insurance Company, la SA Abeille IARD et Santé et la SA Pacifica au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :
– elle rappelle les faits et la procédure ;
– une expertise amiable a été organisée par le cabinet POLYEXPERT, expert mandaté par le mandataire ACS, intervenant pour l’assureur DO, dont le rapport préliminaire a permis de mettre en évidence que l’origine du sinistre est dû à l’obstruction du réseau d’eaux usées par un débris de PVC, c’est-à-dire causé par un vice de construction affectant un élément d’équipement commun ;
– le 31 mai 2022 et face à l’inertie des assureurs dans le cadre de ce dossier, Mme [Y] a mis en demeure son assureur Pacifica, et l’assureur de la copropriété, Abeille Assurances (AVIVA) ;
– elle a fait exécuter la décision uniquement à l’encontre de son assureur Pacifica, à charge pour ce dernier de réaliser d’éventuels recours ;
– elle a reçu les fonds le 27 décembre 2022 par virement de la CARPA ;
– elle a fait chiffrer la perte de marge brute, qui devrait s’élever à au moins 45 000 euros ;
– les assureurs considèrent à tort qu’il n’existerait pas d’urgence parce que le sinistre se serait déroulé il y a un an, que Mme [Y] bénéficierait d’un local de remplacement, qu’elle serait en congés maternité, et que les opérations d’expertise seraient toujours en cours ;
– elle verse aux débats les différentes assignations, démontrant que les assignations ont bien été délivrées conformément aux instructions mentionnées sur l’autorisation à assigner, c’est-à-dire avant 17h :
* à 11h18 au syndicat des copropriétaires,
* à 13h28 à Pacifica,
* à 15h42 à ACS Solutions,
* à 15h57 à Abeille IARD & Santé ;
– les appelants sont des professionnels habitués à recevoir des actes, et notamment en procédure urgente ;
– les assureurs sont parfaitement organisés et disposent d’un réseau d’avocats partout en France ;
– il en est de même des syndics de copropriété ;
– à réception de l’assignation, ils auraient parfaitement pu constituer avocat, et solliciter un éventuel renvoi si ces derniers l’estimaient nécessaires ;
– compte tenu de la procédure d’urgence, et de la qualité des appelants, il n’y a pas eu de violation du principe du contradictoire ;
– la confirmation s’impose ;
– ACS avait en gestion ce sinistre et Mme [Y] a assigné à juste titre ACS en application du mandat apparent ;
– par ailleurs, il ne fait pas de doute que les désordres sont de nature décennale ;
– ACS et Lloyd’s soutiennent avoir adressé une position de non-garantie par courrier recommandé du 16 décembre 2021 à Mme [Y], sans toutefois verser l’accusé réception aux débats ni le justificatif de remise des conditions générales du contrat d’assurance sur lesquelles ils s’appuient pour justifier leur refus ;
– à défaut de transmission des justificatifs, la position de l’assureur DO ne sera pas considérée comme ayant été transmise à Mme [Y] ;
– la responsabilité du syndicat des copropriétaires est donc clairement engagée dans le cadre de ce sinistre, de sorte que l’obligation incombant au syndicat des copropriétaires et tenant à la prise en charge des frais de remise en état n’est pas sérieusement contestable ;
– Mme [Y] est également assurée au titre d’un contrat multirisque professionnelle n°10562311908 auprès de Pacifica, notamment en ce qui concerne la garantie optionnelle acquise « dégât des eaux, gel, refoulement d’égouts », sans mention de sous-limites ;
– les montants demandés sont précis.
La déclaration d’appel et les conclusions de la SA Abeille IARD et Santé ont été signifiées le 1er septembre 2022 au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4] à la personne de M. [R] [S], syndic.
La conclusions de Mme [W] [Y] ont été signifiées le 28 octobre 2022 au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4] par remise à Mme [B] [H], hôtesse d’accueil de la SARL Régie Dupront, syndic, qui a déclarée être habilitée à recevoir l’acte.
La conclusions de la SA Pacifica ont été signifiées le 17 octobre 2022 au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4] par remise à Mme [C] [F], assistante de copropriété à la SARL Régie Dupront, syndic, qui a déclarée être habilitée à recevoir l’acte.
La conclusions de la SAS ACS Solutions ont été signifiées le 16 février 2023 au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4] par remise à Mme [B] [H], hôtesse d’accueil de la SARL Régie Dupront, syndic, qui a déclarée être habilitée à recevoir l’acte.
Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 4] n’a pas constitué avocat.
La clôture de l’instruction est intervenue le 22 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
À titre liminaire :
Il convient de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.
Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux.
Par voie de conséquence, les expressions telles que « juger », « dire et juger », « déclarer », « dégager » ou « constater » ne constituent pas de véritables prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l’examen des griefs formulés contre la décision entreprise et dans la discussion des prétentions et moyens, mais pas dans le dispositif même des conclusions.
En conséquence, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
Sur la jonction :
Par déclaration en date du 11 août 2022, la SAS ACS Solutions a interjeté appel de la décision, sous le n° RG 22/3137.
Par déclaration en date du 11 août 2022, la SA Abeille IARD et Santé a interjeté appel de la décision sous le n° RG 22/3142.
Par déclaration en date du 25 août 2022, la SA Pacifica a interjeté appel de la décision sous le n° RG 22/3232.
Dans un soucis de bonne administration de la justice, ces 3 procédures doivent faire l’objet d’une jonction sous le numéro unique RG 22/3137.
Sur l’intervention volontaire :
Aux termes des statuts, la SAS ACS Solutions a pour objet notamment « la gestion portant sur tous les actes et opérations d’assurance ou de réassurance, ainsi que toutes prestations de services connexes, accessoires ou complémentaires de cette activité ».
En application de conventions de prestations de services, les sociétés d’assurance, seules habilitées à souscrire des contrats, confient à la SAS ACS Solutions la gestion des sinistres afférents, dans le cadre d’un mandat.
Dans ces conditions, la SAS ACS Solutions ne peut valablement être mise en cause par les tiers qui ne peuvent s’adresser qu’aux sociétés d’assurance seules tenues aux obligations attachées aux contrats d’assurance.
De plus, dans ses propres conclusions, Mme [Y] demande elle-même à la cour de condamner la SA Lloyd’s en lieu et place d’ACS, au paiement de la somme nécessaire à la réalisation des travaux, en vue de sa reprise d’activité.
En conséquence, il sera donné acte à la SA Lloyd’s Insurance Company de son intervention volontaire en lieu et place de la SAS ACS Solutions, laquelle sera mise hors de cause.
Sur la nullité de l’assignation :
1) Sur l’absence d’indication de l’heure de délivrance :
Mme [Y] produit aux débats les assignations comportant les heures de leur délivrance par l’huissier instrumentaire.
Ainsi, il apparaît les horaires de délivrance suivants :
* à 11h18 au syndicat des copropriétaires,
* à 13h28 à la SA Pacifica,
* à 15h42 à la SAS ACS Solutions,
* à 15h57 à la SA Abeille IARD & Santé.
Dès lors, les assignations ont bien été délivrées conformément aux instructions mentionnées sur l’autorisation à assigner, c’est-à-dire avant 17 heures.
Le grief tiré du non-respect de l’horaire maximum de délivrance ne peut prospérer.
2) Sur la violation du principe du contradictoire :
Il est prétendu que l’ordonnance entreprise serait intervenue en violation du principe du contradictoire, s’agissant de la présente procédure d’heure à heure.
Le référé d’heure à heure est une procédure d’exception qui suppose l’existence d’une situation d’extrême urgence.
L’instruction d’une affaire en référé est par principe contradictoire.
Selon les termes de l’article 16 du code de procédure civile, le juge des référés, comme tout juge, doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
L’article 15 du même code ajoute que le juge doit permettre aux parties de « se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense ».
L’article 14 du même code expose le principe essentielle de la procédure civile selon lequel « Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ».
En aucun cas, la procédure de saisine d’heure à heure ne peut déroger aux principes essentiels susvisés et il appartient alors au juge de veiller à ce que les droits de la défense ne soient pas écartés au seul profit de l’une des parties.
Selon l’article 486, « le juge s’assure qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre l’assignation et l’audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense ».
Le juge doit donc s’assurer que le délai écoulé entre l’assignation et l’audience est suffisant pour que les parties aient pu préparer leur défense.
Le juge des référés est donc tenu d’apprécier et de mettre en balance d’une part la durée entre la délivrance de l’assignation et l’audience et d’autre part le caractère d’extrême urgence de la demande.
Il doit vérifier que le défendeur ait pu, dans ce délai particulièrement court parfois, saisir un avocat de la défense de ses intérêts et que cet avocat ait pu présenter ses moyens de défense de forme et de fond.
De plus, le caractère d’extrême urgence se caractérise lorsque les circonstances justifiant la saisine du juge des référés sont dangereuses, susceptibles de créer un dommage irréparable et de menacer gravement l’ordre public.
En l’espèce, Mme [Y] a sollicité le 25 juillet 2022 une autorisation d’assigner d’heure à heure.
Le 26 juillet 2022, elle a obtenu une autorisation d’assigner avant le 26 juillet 2022 à 17 heures pour l’audience de référé du lendemain 27 juillet 2022 à 9 heures.
L’ordonnance de référé (réputée contradictoire) a ensuite été mise en délibéré et rendue deux jours plus tard le 29 juillet 2022, alors que l’ensemble des défendeurs était défaillant à l’audience.
Il convient de rappeler également que trois défendeurs (Pacifica, ACS Solutions et Abeille IARD & Santé) ont leur siège en région parisienne, seul le syndicat des copropriétaires étant en Isère.
Ainsi, force est de constater qu’il était manifestement impossible pour ces trois défendeurs au moins (Pacifica, ACS Solutions et Abeille IARD & Santé) de pouvoir préparer sereinement leur défense en raison des délais particulièrement contraints qui ont totalement méconnu le respect du principe du contradictoire.
De plus, les circonstances de fait évoquées dans l’assignation ne justifiaient pas une audience devant se tenir à moins de 24 heures.
En effet, la procédure concerne un dégât des eaux constaté le 22 octobre 2021, soit 9 mois avant la procédure d’heure à heure.
Mme [Y] avait mis en demeure le 31 mai 2022 son assureur (Pacifica) et l’assureur de la copropriété (Abeille) de prendre en charge ce sinistre et de verser une somme à titre provisionnel sur les travaux.
Le 26 juillet 2022, soit deux mois après la mise en demeure, elle a fait délivrer une assignation d’heure à heure.
Enfin, elle indiquait être en congé de maternité et avoir prévu une reprise de son activité professionnelle en décembre 2022.
De plus, la situation ne présentait pas de danger particulier et n’était pas susceptible de créer un dommage irréparable.
À l’évidence, l’affaire aurait pu être traitée en procédure de référé classique, étant rappelé qu’une telle procédure relève déjà de l’urgence.
En conséquence des éléments qui précèdent, l’ordonnance de référé entreprise sera déclarée nulle en raison de la violation manifeste du principe du contradictoire dans une affaire où l’urgence n’existait pas, une telle violation générant un non-respect patent des droits de la défense.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Mme [W] [Y], dont les demandes sont de facto rejetées en raison de l’annulation de l’ordonnance entreprise, supportera les dépens de première instance et d’appel.
Pour la même raison, il ne sera pas fait droit à sa demande au titre des frais irrépétibles.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Abeille IARD et Santé les frais engagés pour la défense de ses intérêts. Mme [W] [Y] sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAS ACS Solutions et de la SA Lloyd’s Insurance Company les frais engagés pour la défense de leurs intérêts. Mme [W] [Y] sera condamnée à leur payer la somme unique de 3 000 euros (trois mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Pacifica les frais engagés pour la défense de ses intérêts. Mme [W] [Y] sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Ordonne la jonction des procédures RG 22/3137, RG 22/3142 et RG 22/3232 sous le numéro unique RG 22/3137 ;
Donne acte à la SA Lloyd’s Insurance Company de son intervention volontaire en lieu et place de la SAS ACS Solutions ;
Met hors de cause la SAS ACS Solutions ;
Annule en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé entreprise ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [W] [Y] à payer à la SA Abeille IARD et Santé la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [W] [Y] à payer à la SAS ACS Solutions et à la SA Lloyd’s Insurance Company la somme unique de 3 000 euros (trois mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [W] [Y] à payer à la SA Pacifica la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [W] [Y] aux de première instance et d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Laurent Grava, conseiller de la deuxième chambre civile, pour le président empêché et par la greffière Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LE PRESIDENT,