Your cart is currently empty!
N° RG 22/02446 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LNNL
C2
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SARL DU PELOUX DE SAINT ROMAIN
la SELARL AUDEOUD
la SELARL DEJEAN-PRESTAIL
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 30 MAI 2023
Appel d’une décision (N° RG 22/00111)
rendue par le Tribunal judiciaire de Gap
en date du 18 mai 2022
suivant déclaration d’appel du 24 juin 2022
APPELANT :
M. [U], [L], [P] [D]
né le 08 janvier 1954 à Aix-En-Provence
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 12]
représenté par Me Charlotte DU PELOUX DE SAINT ROMAIN de la SARL DU PELOUX DE SAINT ROMAIN, avocat au barreau de GRENOBLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/005007 du 10/06/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMES :
M. [W] [A]
ès qualités de liquidateur judiciaire de M. [U] [D],
né le 17 novembre 1965 à LE RAINCY
de nationalité Française
[Adresse 5]
not
[Localité 2]
représenté par Me Nathalie AUDEOUD de la SELARL AUDEOUD, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
M. [N], [W], [J] [D] représenté par le CONSEIL DEPARTEMENTAL DES BOUCHES DU RHONE suivant ordonnance du 15 décembre 2020 du Juge des tutelles des mineurs du Tribunal judiciaire d’Aix-En-Provence
né le 19 mai 2005 à
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 2]
Non représenté
M. [M], [U], [E] [D]
né le 18 janvier 2004 à Aix-En-Provence
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 3]
Non représenté
LE CONSEIL DEPARTEMENTAL DES BOUCHES DU RHONE ès qualité d’administrateur ad hoc de Monsieur [N] [W] [J] [D], né le 19 mai 2005, suivant ordonnance du 15 décembre 2020 de juge des tutelles des mineurs du Tribunal judiciaire d’Aix-En-Provence
[Adresse 7]
[Localité 2]
Non représenté
INTERVENANTE VOLONTAIRE
S.A.R.L. EDIFICIO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Sophie PRESTAIL de la SELARL DEJEAN-PRESTAIL, avocat au barreau de GRENOBLE
L’ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU D’AIX- EN-PROVENCE ès qualité de contrôleur à la liquidation judiciaire de Monsieur [U] [D], en la personne de son bâtonnier en exercice
[Adresse 10]
[Localité 2]
Non représenté
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
Mme Véronique Lamoine, conseiller
DÉBATS :
A l’audience publique du 4 avril 2023, Mme Blatry, conseiller chargé du rapport, assistée de Mme Anne Burel, greffier, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
******
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
A la suite de la liquidation judiciaire prononcée le 4 février 2014 au bénéfice de M. [U] [D], avocat au barreau d’Aix en Provence, et sur demande du liquidateur judiciaire, Me [W] [A], les droits et biens immobiliers acquis en indivision entre M. [D] et son épouse, Mme [I] [Z], ont fait l’objet, suivant jugement du 6 février 2017, d’une vente sur licitation aux enchères.
En 2016, les époux [D]/ [Z] ont divorcé.
Mme [Z] est décédée le 25 avril 2020 laissant pour lui succéder les deux enfants mineurs, [M] et [N] [D].
Suivant ordonnance du 15 décembre 2020, la présidente du conseil départemental des Bouches du Rhône a été désignée en qualité d’administrateur ad hoc chargé de représenter les mineurs dans les démarches successorales liées au décès de leur mère.
Pour s’opposer à la licitation des biens, M. [D] se prévaut d’un document intitulé «’convention de prêt à usage’» daté du 19 janvier 2022 selon lequel [N] [D], mineur de 17 ans, et [M] [D], majeur depuis la veille, prêtent à leur père, à titre gratuit jusqu’au 31 décembre 2050, la parcelle bâtie cadastrée section BL n° [Cadastre 6] sur la commune de [Localité 13].
Selon assignation à jour fixe du 17 février 2022, Me [A] ès qualités a fait citer, devant le tribunal judiciaire de Gap, M. [U] [D], M. [M] [D], le conseil départemental des Bouches du Rhône ès qualités et l’ordre des avocats du barreau d’Aix en Provence en qualité de contrôleur de la liquidation judiciaire de M. [U] [D] en nullité de la convention du 19 janvier 2022.
Par jugement du 18 mai 2022, cette juridiction a prononcé la nullité de la convention de prêt à usage du 19 janvier 2022 et a condamné M. [U] [D] à payer à Me [A] une indemnité de procédure de 800€ et à supporter les dépens de l’instance.
Suivant déclaration du 24 juin 2022, M. [U] [D] a relevé appel de cette décision.
Au dernier état de ses écritures du 13 mars 2023, M. [U] [D] demande à la cour de :
1) à titre principal, annuler le jugement déféré pour non-respect du principe du contradictoire, excès de pouvoir et violation du droit à un procès équitable au regard du refus de renvoi,
2) subsidiairement, infirmer le jugement déféré,
3) en tout état de cause,
dire que l’assignation délivrée au conseil départemental des Bouches du Rhône est nulle et qu'[N] [D] est réputé ne jamais avoir été attrait devant le tribunal judiciaire de Gap,
dire le liquidateur irrecevable en son action,
en toutes hypothèses, le débouter de l’ensemble de ses prétentions,
dire la convention litigieuse parfaitement valide,
au regard de l’intervention volontaire de la SARL Edificio, dire que le prêt à usage lui est opposable,
condamner le liquidateur judiciaire à lui payer une indemnité de procédure de 3.500€.
Il expose que :
sur l’annulation du jugement déféré
la juridiction qui statue, alors qu’une des parties a déposé une demande d’aide juridictionnelle, viole le principe du contradictoire et le respect du droit à un procès équitable,
le tribunal a écarté, à tort, sa demande de renvoi et aucun abus de sa part ne pouvait être relevé,
sur la nullité de l’assignation signifiée au conseil départemental des Bouches du Rhône
depuis le décès de leur mère, il est le seul représentant de son fils mineur [N] et sa liquidation judiciaire n’a aucune conséquence sur cette représentation légale,
le liquidateur n’a aucun pouvoir pour exercer l’autorité parentale à l’égard d'[N],
ni l’octroi d’un prêt à usage ni la représentation en justice dans le cadre d’une action en nullité d’un tel acte ne constituent une démarche successorale,
ainsi, [N] [D] est réputé ne pas avoir été attrait à la cause et la décision ne saurait lui être opposable,
sur l’irrecevabilité de l’action du liquidateur
le liquidateur est démuni d’intérêt à agir car il ne démontre aucune carence d’enchères contrairement à ce qu’il a prétendu,
l’adjudication n’a abouti à aucun prix dérisoire, les enchères ayant été portées jusqu’à 555.000€,
le liquidateur est également dénué de qualité à agir car il ne détient aucun pouvoir pour s’opposer à l’acception par lui du prêt à usage qui lui a été consenti,
il existe des créances postérieures au 8 août 2015 et donc, par l’effet de circonstances nouvelles, les créances composant le passif de M. [U] [D] ne sont pas toutes antérieures à la date d’entrée de la loi du 6 août 2015 et le liquidateur est irrecevable à agir de ce chef,
il y a également irrecevabilité en raison du caractère disproportionné de l’atteinte aux droits de ses fils qui viennent tout juste de perdre leur mère et sont privés de son patrimoine,
l’action paulienne du liquidateur est enfin irrecevable, laquelle n’est ouverte qu’au créancier ayant subi un préjudice du fait de la fraude commise par son débiteur, ce qui n’est pas le cas,
étant le bénéficiaire du prêt, il ne s’est pas appauvri par l’effet du prêt à usage,
sur le mal fondé de la demande
il conteste être dépourvu de capacité à agir du fait de la procédure collective puisque les droits attachés à la personne du débiteur ne peuvent être exercées que par celui-ci,
la convention de prêt litigieuse, portant sur les droits indivis dont sont propriétaires pour partie [M] et [N] [D] sur le bien de [Localité 12], échappe à la règle de dessaisissement du débiteur à la procédure collective,
l’acte litigieux porte sur leurs droits patrimoniaux propres et non les siens au sein de l’indivision,
il dispose de l’autorité parentale et reste le représentant légal de son fils [N], de sorte qu’il ne contrevient nullement aux règles de représentation,
ainsi que la loi le prévoit, il s’est borné à autoriser son fils [N] à conclure le prêt à usage,
les droits patrimoniaux de ses fils ne sont nullement affectés par le prêt litigieux,
en tout état de cause, le prétendu défaut de pouvoir de représentation est sans conséquence sur le droit consenti par son fils majeur, [M],
il n’y a pas davantage de fraude,
ainsi que précédemment développé, le prêt à usage ne peut en aucun cas être la cause de l’appauvrissement du prêteur,
en outre, l’action paulienne n’a jamais emporté l’invalidation de l’acte attaqué mais seulement son inopposabilité,
aucune faute ne peut lui être reprochée en l’absence de tout appauvrissement de son fait,
le prêt à usage est parfaitement opposable à la société Edificio, adjudicataire intervenant volontaire,
cet adjudicataire avait une parfaite connaissance avant la vente de la convention de prêt à usage,
le bien était occupé par lui et mention était faite dans le cahier des charges de cet état de fait.
Par dernières conclusions du 14 décembre 2022, Me [A] ès qualités demande à la cour de rejeter l’ensemble des prétentions de M. [U] [D], confirmer le jugement déféré sauf à rectifier l’erreur matérielle l’affectant et, en conséquence :
juger inopposable aux parties et aux tiers la convention de prêt à usage,
prononcer de plus fort sa nullité,
condamner M. [U] [D] à lui payer une indemnité de procédure de 3.500€.
Il fait valoir que :
sur la validité du jugement déféré
il a été jugé, au regard du droit pouvant dégénérer en abus, qu’une juridiction à un pouvoir discrétionnaire en matière de renvoi et que celle-ci est fondée lorsque cette demande apparaissait dilatoire,
ainsi c’est sur la base du constat de circonstances particulières argumentées que le jugement déféré a rejeté la demande de renvoi,
sur la validité de l’assignation délivrée au conseil départemental des Bouches du Rhône ès qualités
l’intervention du juge des tutelles a été déclenchée par un courrier de son conseil indiquant qu’il allait poursuivre la réalisation des actifs du débiteur en ce compris les biens immobiliers détenus en commun avec Mme [Z],
c’est donc bien dans le cadre précis de la vente à venir des biens détenus en commun par M. [U] [D] et les ayants droit de Mme [Z] que le juge des tutelles a nommé un administrateur ad hoc pour représenter ces derniers dans le cadre des procédures de réalisation de l’actif de l’appelant,
cette désignation est intervenue au visa de l’article 383 du code civil lorsque les intérêts de l’administrateur légal unique ou selon les cas des deux administrateurs légaux sont en opposition avec ceux du mineur,
c’est donc en raison d’une opposition manifeste des intérêts de M. [U] [D] et ceux de ses enfants mineurs en leur qualité d’ayants droit de leur mère pré-décédée à l’occasion de la réalisation des biens de celle-ci qu’un administrateur ad hoc a été désigné,
ainsi, la présente action en nullité du prêt à usage litigieux fait bien partie des démarches successorales envisagées par le juge des tutelles,
sur la recevabilité de son action
sa qualité à agir, qui est de défendre l’intérêt collectif des créanciers, n’est pas appréciée en considération de celle qu’aurait eue ou non M. [U] [D], débiteur, pour conclure ou même accepter la convention de prêt à usage,
son intérêt à agir découle du fait que la convention de prêt à usage au long terme ne pouvait qu’avoir un impact négatif sur la vente, soit qu’elle risquait d’en diminuer le prix, soit qu’elle risquait d’entraîner une carence d’enchères,
il était manifeste que le bien risquait d’intéresser un moins grand nombre d’acquéreurs, ce qui risquait d’entraîner une atteinte à la valeur marchande du bien,
il avait d’autant plus intérêt à agir que M. [U] [D] était dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens conformément à l’article L .641-9 du code du commerce,
pour contourner l’autorité de la chose jugée résultant du jugement définitif du 6 février 2017 l’autorisant ès qualités à procéder au partage judiciaire de l’indivision, M. [U] [D] se prévaut à tort de l’article L 526-1 du code du commerce sur l’insaisissabilité de sa résidence principale qui n’est pas applicable aux procédure collectives ouvertes avant l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015,
la liquidation judiciaire de M. [U] [D] a été prononcée le 4 février 2014, soit avant l’entrée en vigueur de la loi susvisée,
sur le caractère disproportionné de l’atteinte portée aux droits moraux de [M] et d'[N] [D]
M. [U] [D] ne peut prétendre défendre les intérêts de ses fils, chacun étant dûment représenté l’un par le conseil départemental, l’autre par son avocat,
en outre la conclusion sur 28 ans d’un prêt de leur bien au profit d’un père absent de leur vie n’apparaît pas respectueux de leurs intérêts financiers et moral,
il est permis de douter du consentement éclairé de [M] [D] pour conclure une convention sous l’égide de son père, au seul profit de celui-ci et, en revanche, au détriment manifeste de l’intérêt de ses enfants,
sur la validité de la convention litigieuse
M. [U] [D] n’avait pas la capacité pour conclure une convention de prêt à usage à son profit portant sur un bien sur lequel il détient des droits indivis avec ses deux fils et dont la vente sur licitation a été autorisée et a été poursuivie par le liquidateur judiciaire ès qualités sur la base du jugement définitif du 6 février 2017,
M. [U] [D] ne démontre aucunement l’existence des droits personnels dont il essaye de se prévaloir,
la convention est également nulle pour violation des règles de l’indivision,
contrairement aux affirmations de M. [U] [D], la règle des deux tiers des articles 815-9 et 815-3 du code civil ne peut s’appliquer à la convention litigieuse qui ne relève pas d’une gestion normale du bien au regard de ce que les dits propriétaires se retrouvent orphelins de mère et sans liens suivis avec leur père pour un prêt de longue durée,
en tout état de cause, M. [U] [D] n’ayant aucune capacité de conclure, son accord n’est pas valable et la règle de l’unanimité n’est pas respectée,
la convention est en outre entachée de fraude,
par application de l’article 1341-2 du code civil, le créancier peut parfaitement contester l’acte établi par son débiteur qui a pour effet de diminuer la valeur de son patrimoine et ainsi diminuer les chances du créancier de recouvrer sa créance,
M. [U] [D] a poursuivi un but illicite en passant cette convention de prêt à usage pour contourner la vente par licitation des biens sur lesquels il détient des droits indivis et en contrariété avec les intérêts de ses enfants,
dès lors, cet acte doit être jugé frauduleux et être annulé,
sur l’inopposabilité du prêt à usage à l’adjudicataire
M. [U] [D] ne saurait rendre opposable à l’adjudicataire du bien la convention litigieuse alors que, par voie de conclusions n° 4 aux fins d’annexion de documents au cahier des charges, il avait été porté à sa connaissance que l’acte en question avait été annulé,
le jugement du 18 mai 2022 a été annexé au cahier des charges et est opposable à tous.
Par dernières conclusions du 16 décembre 2022, la SARL Edificio demande à la cour de :
déclarer recevable son intervention volontaire,
confirmer le jugement déféré,
débouter M. [U] [D] de l’ensemble de ses prétentions,
rectifier le jugement déféré en ajoutant dans le chapeau :
1) au titre de la mention de l’intervention du conseil département des Bouches du Rhône qu’elle est ès qualités d’administrateur ad hoc de M. [N] [D],
2) au titre de la mention de M. [N] [D] qu’il est représenté par le conseil départemental des Bouches du Rhône ensuite d’une ordonnance du juge des tutelles du tribunal judiciaire d’Aix en Provence du 15 décembre 2020,
juger inopposable à son égard la convention du 19 janvier 2022,
condamner M. [U] [D] à lui payer une indemnité de procédure de 3.000€.
Elle explique que :
si l’assistance d’un avocat est de droit, ce droit est susceptible de dégénérer en abus et doit être écarté à ce titre,
la convention litigieuse est nulle pour défaut de capacité de M. [U] [D], pour défaut de pouvoir de représentation de M. [U] [D] sur son fils [N], ainsi que pour violation des règles de l’indivision,
M. [U] [D] ne saurait rendre opposable à son égard la convention litigieuse puisqu’il avait été porté au cahier des charges que la dite convention avait été annulée par jugement du 18 mai 2022.
M. [M] [D], cité le 31 août 2022 , selon les dispositions de l’article 656 du code de procédure civile, n’a pas constitué avocat.
Le conseil départemental des Bouches du Rhône en qualité d’administrateur ad hoc de M. [N] [D], cité le 5 août 2022 à personne habilitée et l’Ordre des avocats du barreau d’Aix en Provence, cité le 25 août 2022 à personne habilitée, n’ont pas constitué avocat.
La décision sera prononcée par défaut.
La clôture de la procédure est intervenue le 28 mars 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de déclarer recevable l’intervention volontaire de la SARL Edificio, adjudicataire des biens licités.
En outre, il convient de compléter le chapeau du jugement déféré, au regard de l’erreur matérielle manifeste, s’agissant de la mention de l’intervention du conseil département des Bouches du Rhône ès qualités d’administrateur ad hoc de M. [N] [D] et de la mention de M. [N] [D] représenté par le conseil départemental des Bouches du Rhône.
1/ sur la demande en annulation du jugement déféré
M. [U] [D] reproche au tribunal le rejet de sa demande de renvoi alors qu’il était en l’attente de la désignation d’un conseil dans le cadre de l’octroi de l’aide juridictionnelle.
Au regard de la qualité d’avocat de M. [U] [D], la tardiveté de sa demande d’aide juridictionnelle, le dépôt de celle-ci devant le bureau d’Aix en Provence alors que la procédure était pendante devant le tribunal judiciaire de Gap, l’absence du moindre contact avec un avocat et l’impossibilité de justifier de sa situation financière permettent d’analyser la demande de renvoi comme une attitude dilatoire de sa part.
Dès lors, c’est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de renvoi formée par M. [U] [D] et il n’y a pas lieu de prononcer l’annulation du jugement déféré.
2/ sur la demande de nullité du prêt à usage du 19 janvier 2022
sur les moyens élevés par M. [U] [D]
Pour contester l’annulation de la convention du 19 janvier 2022, M. [U] [D] oppose divers moyens qui seront examinés successivement.
M. [U] [D] estime que le conseil départemental des Bouches du Rhône n’a aucune qualité pour représenter son fils [N] [D] dont il était le seul détenteur de l’autorité parentale durant sa minorité et, qu’en tout état de cause, le prêt à usage consenti ne rentre pas dans la mission de l’administrateur ad hoc.
Toutefois, c’est dans le cadre précis de la vente des biens détenus en commun par M. [U] [D] et les ayants droit de Mme [Z], à savoir [M] et [N] [D], et de la contrariété des intérêts des mineurs avec ceux de leur père au sens de l’article 383 du code civil que le juge des tutelles a nommé, le 15 décembre 2020, un administrateur ad hoc pour les représenter dans le cadre des procédures de réalisation de l’actif de l’appelant.
M. [U] [D] conteste la qualité et l’intérêt à agir de Me [A].
La qualité à agir du liquidateur judiciaire réside dans la défense de l’intérêt collectif des créanciers ce qui est le cas présent au regard de l’impact de la convention litigieuse du prêt à usage sur la possibilité de recouvrer leur créance.
L’intérêt à agir du liquidateur découle du fait que la convention de prêt à usage au long terme ne pouvait qu’avoir une influence négative sur la vente, soit qu’elle risquait d’en diminuer le prix, soit qu’elle risquait d’entraîner une carence d’enchères.
L’argumentation de M. [U] [D] sur le fait qu’il n’y a eu aucune atteinte au prix ni carence d’enchères est inopérante dans la mesure où le jugement déféré prononçant la nullité du prêt à usage en cause était annexé au cahier des charges et que cette convention n’a pas eu, de ce seul fait, les répercussions négatives légitimement redoutées.
M. [U] [D] se prévaut également des dispositions de l’article L. 526-1 du code du commerce sur l’insaisissabilité de sa résidence principale laquelle toutefois n’est pas applicable aux procédures collectives ouvertes avant l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, la liquidation judiciaire de M. [U] [D] ayant été prononcée le 4 février 2014, soit avant l’entrée en vigueur de la loi susvisée.
Enfin, c’est avec une certaine malice que M. [U] [D] soutient que l’annulation de la convention litigieuse constituerait une atteinte disproportionnée aux droits de ses enfants alors que la conclusion sur 28 ans d’un prêt de leur bien au seul profit d’un père dont il a été justifié qu’il a été absent de leur vie apparaît au détriment manifeste de l’intérêt de [M] et [N] [D].
sur le bien fondé de l’annulation du prêt à usage du 19 janvier 2022
Par application de l’article L.641-9 du code de commerce, M. [U] [D] n’avait pas la capacité pour conclure une convention de prêt à usage à son profit portant sur un bien sur lequel il détient des droits indivis avec ses deux fils, dont la vente sur licitation a été autorisée et poursuivie par le liquidateur judiciaire ès qualités sur la base du jugement définitif du 6 février 2017.
M. [U] [D] ne démontre aucunement l’existence des droits personnels qu’il défini sans base légale comme des «’considérations personnelles d’ordre moral ou familial’».
Ainsi, les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine étant exercés par le liquidateur durant toute la liquidation judiciaire, M. [U] [D] n’avait pas la capacité de passer un tel acte.
Il a été précédemment retenu que M. [U] [D] n’avait pas davantage la capacité de représenter son fils [N], ce qui constitue une autre cause de nullité du prêt à usage.
En outre, les règles sur l’indivision ne sont pas respectées puisque la règle des deux tiers des indivisaires permettant l’exercice d’actes d’administration ressortant des articles 815-9 et 815-3 du code civil ne peut s’appliquer à la convention litigieuse de prêt de longue durée qui ne relève pas d’une gestion normale du bien au regard de ce que les dits propriétaires se retrouvent orphelins de mère et sans liens suivis avec leur père.
Enfin, M. [U] [D] a poursuivi un but illicite en passant cette convention de prêt à usage pour contourner la vente par licitation des biens sur lesquels il détient des droits indivis et ce en contrariété avec les intérêts de ses enfants, de sorte que la dite convention est corrompue par la fraude.
Dès lors, c’est à bon droit que le tribunal a annulé le prêt à usage du 19 janvier 2022.
3/ sur l’inopposabilité du prêt à usage à la SARL Edificio
Il est établi que le jugement déféré prononçant la nullité de la convention du 19 janvier 2022 a été annexé au cahier des charges dans le cadre de la procédure en vente forcée.
Dès lors, le prêt à usage litigieux doit être déclaré inopposable à la SARL Edificio, adjudicataire de la parcelle cadastrée section BL n° [Cadastre 6] sur la commune de [Localité 13].
4/ sur les mesures accessoires
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice des intimés constitués.
Enfin, M. [U] [D] supportera les dépens de la procédure d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt prononcé par défaut,
Déclare recevable l’intervention volontaire de la SARL Edificio,
Rejette la demande d’annulation du jugement déféré de M. [U] [D],
Ordonne la rectification d’erreur matérielle affectant le chapeau du jugement déféré et dit que :
le conseil département des Bouches du Rhône intervient ès qualités d’administrateur ad hoc de M. [N] [D],
M. [N] [D] est représenté par le conseil départemental des Bouches du Rhône,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déclare inopposable à la SARL Edificio la convention du 19 janvier 2022,
Condamne M. [U] [D] à payer à Me [W] [A], ès qualités de liquidateur judiciaire, la somme de 3.000€ par application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [U] [D] aux dépens de la procédure d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT