Nullité d’Assignation : 23 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00098

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Nullité d’Assignation : 23 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00098
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MAI 2023

N° RG 22/00098

N° Portalis DBV3-V-B7G-U52G

AFFAIRE :

[S] [K]

C/

YAMAHA MOTOR EUROPE NV

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Décembre 2021 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2020F00172

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Pascale REGRETTIER

GERMAIN

Me [R] [E]

TC PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [S], [G] [K]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 – N° du dossier 2100373

Représentant : Me Romuald MOISSON de la SCP MOREL CHADEL MOISSON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0105

APPELANT

****************

Société YAMAHA MOTOR EUROPE NV

en son établissement français YAMAHA MOTOR EUROPE NV

SUCCURSALE FRANCE, [Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Philippe HOUILLON de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 100 – N° du dossier 2000285

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 07 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

M. [S], [G] [K] était le gérant associé de la société Moto relais qui exploitait depuis la fin de l’année 1986 un fonds de commerce ayant une activité de vente et de réparation de motocycles et scooters puis est devenue concessionnaire Yamaha à compter de 1995.

Par acte notarié du 9 mai 2017, M. [K] s’est constitué caution hypothécaire à l’égard de la société Yamaha motor Europe NV (la société Yamaha), de toutes les sommes pouvant être dues à celle-ci par la société Moto relais dans la limite de la somme de 400 000 euros ; il a affecté et hypothéqué l’appartement de trois pièces qui constitue son domicile.

La société Moto relais a été placée en liquidation judiciaire le 3 avril 2018 par jugement du tribunal de commerce de Nanterre, qui a fixé la date de cessation des paiements au 4 octobre 2016.

Par lettre recommandée datée du 16 mai 2018, la société Yamaha a déclaré une créance chirographaire de 397 192,32 euros au passif de cette dernière.

Par acte d’huissier du 14 décembre 2019, la société Yamaha a signifié à M. [K] un commandement de payer aux fins de saisie immobilière de son logement, en lui demandant de payer dans le délai d’un mois la somme de 397 192,32 euros.

Saisi par assignation de la société Yamaha, le juge de l’exécution de Nanterre, par jugement du 6 mai 2021confirmé par arrêt de la présente cour du 16 décembre 2021, a ordonné la mainlevée immédiate de la saisie immobilière et la radiation du commandement après avoir constaté l’absence de titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible.

Par jugement contradictoire assorti de l’exécution provisoire en date du 3 décembre 2021, le tribunal de commerce de Pontoise, saisi le 26 février 2020 à l’iniative de M. [K] en nullité de la caution consentie et subsidiairement en dommages et intérêts, a :

– débouté M. [K] de toutes ses demandes ;

– déclaré la société Yamaha bien fondée en sa demande reconventionnelle et condamné M. [K] à lui régler la somme de 397 192,32 euros avec intérêts de droit calculés au taux légal à compter du 26 février 2020, date de l’assignation et ce, dans la limite de sa caution de 400 000 euros ;

– débouté la société Yamaha de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

– condamné M. [K] à payer à la société Yamaha la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [K] aux dépens de l’instance.

Par déclaration du 6 janvier 2022, M. [K] a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 28 novembre 2022, il demande à la cour de :

– le recevoir en son appel et le déclarer bien fondé ;

Par conséquent,

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement ;

Statuant à nouveau,

A titre principal,

– déclarer nul le cautionnement hypothécaire qu’il a consenti le 9 mai 2017 ;

A défaut,

– déclarer irrecevable la demande reconventionnelle en paiement formulée par la société intimée ;

-débouter la société Yamaha de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

– condamner la société Yamaha à lui payer la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– ordonner la compensation entre cette somme et toute somme qui pourrait être allouée à la société intimée;

En tout état de cause,

– débouter la société intimée de son appel incident et de l’ensemble de ses demandes formées au titre de celui-ci ;

– condamner la société Yamaha à lui payer la somme de 7 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société intimée aux entiers dépens de la procédure conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

La société Yamaha, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 15 décembre 2022, demande à la cour de :

– débouter M. [K] de son appel et en conséquence rejeter toutes ses demandes ;

– confirmer purement et simplement le jugement à l’exception de sa disposition l’ayant déboutée de sa demande de dommages et intérêts et la recevoir en son appel incident de ce chef ;

– reformer le jugement dont appel de ce seul chef ;

Statuant à nouveau,

– condamner M. [K] à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée eu égard notamment à l’ancienneté de sa créance ;

– condamner M. [K] à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure d’appel ;

– condamner M. [K] aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucun moyen n’étant soulevé ou susceptible d’être relevé d’office, il convient de déclarer l’appel de M. [K] recevable.

Sur la demande d’annulation pour vices du consentement :

M. [K] sollicite la nullité de son cautionnement sur le fondement en premier lieu de l’article 1137 du code civil. Observant que pour fixer la date de cessation des paiements au 4 octobre 2016, le tribunal de commerce de Nanterre a notamment relevé l’antériorité des créances de la société Yamaha, il expose qu’au regard des échanges de correspondance entre les deux sociétés et du non respect du moratoire consenti le 5 septembre 2016 à la société concessionnaire, l’intimée qui était le fournisseur exclusif de cette dernière connaissait son état de cessation des paiements lorsqu’elle a sollicité sa caution hypothécaire pour être garantie de l’ensemble de sa créance et qu’à tout le moins elle savait que la société Moto relais ne réglait plus son passif exigible et qu’elle avait une dette Urssaf et un retard de TVA. Il soutient qu’en sollicitant ainsi pendant la période suspecte un tel cautionnement alors qu’elle savait que la société n’était plus en mesure de payer ses factures tout en lui faisant la promesse de poursuivre et fluidifier leurs relations contractuelles, elle a manifestement menti sur ses véritables intentions qui étaient uniquement d’obtenir une garantie hypothécaire pour s’assurer du paiement d’une créance échue malgré la cessation des paiements de la société débitrice ; que ce cautionnement était d’autant plus inacceptable qu’il était douze fois supérieur à celui antérieurement exigé annuellement dans le cadre de leurs relations commerciales, d’un montant bien supérieur à l’encours moyen de 280 000 euros de la société concessionnaire et que durant les deux années ayant précédé cette demande les sociétés avaient poursuivi leurs relations sans une telle garantie. M. [K] reproche également à l’intimée de lui avoir dissimulé intentionnellement une information déterminante sur les conséquences de son engagement et de ne pas avoir respecté ses engagements de ‘fluidification’ et de simplification du courant d’affaires entre les parties puisque malgré ce cautionnement, elle a conditionné la poursuite de ses livraisons à des paiements préalables et comptants, en bloquant à plusieurs reprises le compte de son concessionnaire, compromettant ainsi totalement la poursuite de l’activité de la société concessionnaire et créant les conditions d’une situation irrémédiablement compromise.

En second lieu, M. [K] invoque l’article 1140 du code civil en soulignant qu’au regard du contrat de concession sélective et exclusive liant les deux sociétés, la société qu’il dirigeait était sous la dépendance économique complète du concédant et que cette concession exclusive qu’il exerçait depuis plus de vingt-deux ans était son unique source de revenus de sorte qu’il ne pouvait que se plier aux exigences de la société concédante qui a abusé de la dépendance économique de la société concessionnaire pour lui imposer un cautionnement plus de douze fois supérieur aux cautionnements bancaires précédemment souscrits à hauteur de 30 000 euros pendant près d’une dizaine d’années. Il expose que dans le cadre du renouvellement du contrat de concession il lui avait été verbalement stipulé qu’à défaut de fournir une caution, d’abord réclamée à hauteur de 280 000 euros puis exigée à hauteur de 400 000 euros, sa société ne serait plus livrée à moins d’effectuer systématiquement des paiements préalables et comptants de sorte que ce cautionnement n’est nullement une démarche spontanée de sa part; que le fait qu’il ait contacté un notaire et que le cautionnement soit intervenu quelques semaines après le renouvellement annuel du contrat de concession n’est pas exclusif d’une contrainte exercée sur lui et sa société puisqu’il était manifeste qu’à défaut de satisfaire aux nouvelles exigences de la concédante, il ne pourrait plus poursuivre son activité.

Il ajoute enfin que l’article L.632-1 2° prohibe pendant la période suspecte tout déséquilibre entre les obligations des parties en relations commerciales.

La société Yamaha, après avoir rappelé la chronologie des relations contractuelles, les nombreux reports et l’application ‘extrêmement souple’ des conditions contractuelles à l’égard notamment de la société Moto relais outre l’acceptation le 5 septembre 2016 d’un moratoire consenti à cette société , conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté M. [K] de sa demande de nullité.

Elle fait valoir d’une part que ce dernier ne fait état d’aucune dissimulation déterminante et ne démontre ni manoeuvre ni mensonge.

Elle observe, pour l’essentiel, qu’à sa connaissance la situation de la société Moto relais n’était pas du tout irrémédiablement compromise, M. [K] s’engageant en permanence à restaurer sa trésorerie et ayant déclaré devant le notaire que ni lui ni sa société n’étaient en état de cessation des paiements ; elle remarque qu’au moment de la conclusion du moratoire en septembre 2016, avant la date retenue par le tribunal pour fixer la cessation des paiements de la société débitrice, M. [K] avait déjà expressément accepté de consentir une caution hypothécaire de 200 000 euros sur son appartement qu’il avait par ailleurs promis à plusieurs reprises de vendre. Elle souligne qu’il est ‘particulièrement audacieux’ de la part de l’appelant de prétendre qu’elle aurait vicié son consentement alors même qu’en sa qualité de dirigeant de la société Moto relais il était bien mieux placé qu’elle pour connaître la situation de la société qu’il dirigeait, ajoutant qu’il tente de faire l’amalgame entre certaines nullités de la période suspecte qui ne concernent que le débiteur en procédure collective et la nullité de son propre engagement. Elle observe que ce cautionnement, qui s’inscrit dans un long cursus relationnel, a été souscrit par M. [K] devant son propre notaire auquel il appartenait d’attirer son attention sur les conséquences de son engagement et hors la présence d’un de ses représentants. Elle relève enfin que M. [K] ne peut prétendre que le cautionnement était une condition du renouvellement du contrat de concession alors que celui-ci avait déjà été renouvelé lorsque l’acte litigieux a été passé, remarquant aussi que M. [K] ne rapporte ni la preuve de ses prétendus engagements ni du fait qu’elle ne les aurait pas respectés. Elle ajoute qu’en tout état de cause celui-ci ne pouvait continuer à utiliser les produits Yamaha sans les payer pour augmenter considérablement sa rémunération personnelle, ce qu’elle a découvert lors d’une réunion du 29 août 2017, et conserver un bien immobilier de grande valeur.

La société Yamaha conteste d’autre part toute nullité du cautionnement sur le fondement de l’article 1140 du code civil en exposant que M. [K] n’explique pas en quoi la société Yamaha qui était la cocontractante de la société Moto relais aurait exercé une contrainte lui inspirant la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable dès lors que le contrat de concession avait déjà été renouvelé. Contestant l’état de dépendance économique des distributeurs de motocycles à l’égard de leur concédant, elle soutient que le cautionnement ne constituait pas de nouvelles exigences puisque sa caution était déjà prévue lors du moratoire. L’intimée fait état de l’existence d’un déséquilibre à son préjudice dans la mesure où elle livrait des véhicules à la société concessionnaire qui se les faisait payer mais ne la réglait pas ensuite.

Selon l’article 1137 du code civil, le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manoeuvres ou des mensonges ; constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

L’article 1140 du code civil dispose qu’il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celle de ses proches à un mal considérable

Il appartient à celui qui invoque le vice de son consentement d’en apporter la démonstration.

Il ressort des éléments du dossier et des explications des parties que :

– les relations contractuelles entre les sociétés Yamaha et Moto relais que dirigeait M. [K] se sont poursuivies à compter de 1995 pendant plus de vingt ans, le dernier contrat de ‘distribution sélective’ ayant été conclu entre elles le 25 avril 2017, pour une durée d’un an à effet du 1er janvier 2017, renouvelable par tacite reconduction ; il y est notamment prévu dans les conditions générales relatives aux conditions de paiement (article 6.6) que le concessionnaire ‘devra régler à la société YMF toute commande de produits, pièces de rechange et accessoires selon le mode de règlement en vigueur et selon les délais convenus avec YMF’ et qu’il ‘fournira une caution bancaire (ou autre garantie acceptée par YMF), selon modèle fourni par YMF et renouvelable par tacite reconduction, incluant renonciation aux bénéfices de discussion et de division’ ; la société intimée s’y ‘ réserve le droit à tout moment et pour quelque raison que ce soit, d’imposer une limite de crédit au concessionnaire et, au-delà de cette dernière, de ne livrer le concessionnaire que contre paiement avant expédition ou sur production d’une garantie additionnelle qu’YMF pourra occasionnellement solliciter’ ;

– M. [K] avait précédemment souscrit, le 4 avril 2013 puis le 14 avril 2014, à la demande de la société Yamaha une caution bancaire de 30 000 euros, celles-ci étant consenties pour une durée d’un an et donc expirées en 2016 ;

– le 5 septembre 2016, alors que la société Moto relais devait à la société Yamaha une somme de 218 632,59 euros, cette dernière a accepté de mettre en place un moratoire pour permettre à la société concessionnaire de régler cette somme en cinq ans par mensualités de 4 125,87 euros à compter du 20 septembre 2016, étant convenu que pendant la durée du moratoire ‘toutes commandes de produits finis’ s’effectueraient ‘par traite à vue’, que ce moratoire serait assorti d’une caution hypothécaire de 200 000 euros sur l’appartement de M. [K] et que tout impayé entraînerait la déchéance et l’exigibilité immédiate de toutes les sommes restant dues ;

– M. [K] n’a pas consenti cette caution hypothécaire, celui-ci ayant simplement indiqué dans un mail du 16 novembre 2016, avoir mis son appartement en vente ; postérieurement à septembre 2016 des impayés, survenus sur des commandes postérieures, ont donné lieu à des échanges de mail, notamment en novembre puis décembre 2016 ; des délais ont été consentis le 3 janvier 2017 à la société Moto relais, en plus du moratoire, afin d’apurer notamment ses ‘impayés d’un montant de 56 595,63 euros sur les relevés de pièces’, délais acceptés par M. [K] le 6 janvier 2017 sous réserve de décaler de ‘quelques jours’ le premier règlement prévu le 10 janvier 2017, ce que la société Yamaha a accepté par mail du 9 janvier 2017, étant précisé alors par M. [K] que son appartement était toujours en vente;

– par courrier du 13 janvier 2017, la société Yamaha a informé la société Moto relais d’une ‘nouvelle méthode de calcul de la caution bancaire’ pour tenir compte notamment de l’encours moyen de la société concessionnaire qui était de 283 894 euros pour l’année 2016 de sorte qu’elle estimait à 280 000 euros le montant de la caution bancaire 2017 à lui faire parvenir pour ‘assurer une bonne fluidité des commandes’ effectuées par la société Moto relais ; par mail du 24 février 2017, M. [K] a indiqué qu’il prendrait rendez-vous la semaine suivante avec son notaire afin de ‘fournir une caution hypothécaire’, la société Yamaha évoquant que cette caution simplifierait ‘ grandement le flux’ de leur courant d’affaires ;

– de nouveaux impayés sont survenus en mars 2017, à hauteur de 22 711,61 euros, que M. [K], sous la réserve que la société Yamaha ne bloque pas ses commandes de motos, s’est engagé à régler selon des modalités proposées à la société concédante qui les a acceptées  en lui indiquant le 13 mars 2017 qu’elle attendrait ‘la réception des 3 536,49 euros avant de valider la prochaine commande Moto’ ; M. [K] a également indiqué avoir rendez-vous avec son notaire le 4 avril 2017, la société Yamaha lui précisant que l’encours total étant de 400 000 euros, la caution hypothécaire devrait couvrir au moins ce montant en lui précisant de ne pas hésiter à la contacter pour en discuter ;

– de nouveaux impayés sont survenus en avril 2017 ; par mail du 20 avril 2017 adressé suite à un entretien téléphonique du même jour, la société Yamaha a sollicité un virement de 15 455,18 euros pour régulariser l’impayé de 21 596,11 euros selon relevé de pièces du 10 avril 2017 en précisant que comme elle l’avait annoncé le compte de la société ‘fonctionne à partir de ce jour par virement préalable pour les pièces et accessoires’ ; par mail du 25 avril 2017, jour de la signature du contrat de distribution entre les sociétés concessionnaire et concédant, M. [K] a notamment fait état du règlement des pièces pour 15 455,88 euros et a précisé qu’il ferait ‘parvenir l’échéance impayée de 9 176,10 euros dès qu’il aurait reçu son virement, ‘demain ou après-demain maxi’, celui-ci sollicitant de débloquer les pièces et les commandes de deux références de motos ; selon mail du 2 mai 2017 de la société Yamaha, la société concessionnaire restait débitrice à cette date, sur les pièces d’avril, de 2 117,30 euros dont elle sollicitait le paiement en plus d’un virement séparé pour les pièces de mai ;

– M. [K] a signé l’acte de caution hypothécaire pour garantir un montant de 400 000 euros le 9 mai 2017;

– selon mail du 16 juin 2017, M. [K] qui a expliqué ‘ne pas pouvoir faire en totalité l’échéance du 16’ faute d’avoir reçu deux virements qu’il attendait et a refusé de payer ‘une partie de la traite pour un montant de 35976,12 euros’, a proposé de régler cette somme en trois virements de 11 992,04 euros dont deux seraient reportés en juillet, ce que la société Yamaha a accepté par mail du 20 juin suivant ;

– le 25 juillet 2017, M. [K], invoquant des ‘conditions actuelles qui ne sont pas en sa faveur’ a demandé à la société concédante, par mail du 25 juillet 2017, de reporter les échéances impayées, à hauteur de 54 130,37 euros, sur le mois de septembre, ce que celle-ci a accepté par mail du lendemain ; il demandait de lui débloquer également quatre commandes à soixante jours afin d’honorer les échéances d’août et signalait aussi être en négociation avec son banquier pour essayer d’obtenir un prêt pour en finir avec ses problèmes de trésorerie’, écrivant également qu’il faisait ‘ tout pour conserver son entreprise’;

– le 29 août 2017, une réunion a eu lieu entre M. [K] et la société Yamaha dont le responsable de la succursale de la société en France, à la suite notamment de la réception par l’intimée du compte de résultat de la société Moto relais, déficitaire comme celui de l’année précédente (déficit de 139 621 euros au 31 décembre 2016 contre 143 769 euros au 31 décembre 2015) et révélateur d’une diminution du chiffre d’affaires et d’une augmentation conséquente du poste des salaires à hauteur de 154 763 euros par rapport à celui de l’année précédente ;

– la société Yamaha, par lettre du 25 septembre 2017 rappelant les termes de l’entretien, a indiqué à la société Moto relais que sa dette à son égard s’élevait au 21 septembre 2017 à la somme de 398 370,33 euros dont 198 041,56 euros représentant la somme restant due sur le moratoire précédemment consenti et 200 328,77 euros au titre d’un nouvel encours constitué postérieurement et qu’il avait été demandé à la société concessionnaire, compte tenu de cette situation, de régler les véhicules avant leur livraison par la société Yamaha, ce qui a été accepté par M. [K], celui-ci écrivant dans un mail du 27 septembre 2017, qu’ils avaient ‘un accord sur les véhicules’, la société concédante devant les ‘débloquer un par un une fois réglés’ ;

– si dans ce mail M. [K] se plaint que la société Yamaha ne lui débloque pas ces commandes, son interlocuteur lui a répondu le jour même pour lui indiquer que ‘sauf erreur’ elle n’avait pas réceptionné ce paiement ou la preuve de ce paiement.

Il ressort de cette chronologie de la dernière année des relations contractuelles que la société Yamaha, certes en position de force économique en sa qualité de société concédante à l’égard de la société Moto relais, a accepté à plusieurs reprises de négocier avec le dirigeant de cette dernière et a accordé à celle-ci des délais de paiement, non seulement en 2016, lors de la signature d’un moratoire mais encore au cours de l’année 2017.

La société Yamaha connaissait les difficultés sérieuses de la société Moto relais dont le dirigeant s’est toutefois engagé à plusieurs reprises à prendre des mesures propres à remédier aux difficultés de trésorerie de la société et a procédé, même avec retard, à des règlements. Il n’est pas pour autant établi, alors qu’en sa qualité de dirigeant M. [K] n’ignorait rien des difficultés de la société concessionnaire, que la société Yamaha, en lui faisant souscrire un cautionnement à hauteur de l’encours dont était débitrice la société concessionnaire, ait eu, à son égard, une attitude dolosive ou fait preuve d’une contrainte, d’autant que la signature d’un cautionnement hypothécaire, d’un montant équivalent à l’encours de la société Moto relais, était sollicité depuis la conclusion d’un premier moratoire en septembre 2016, la société concédante ayant poursuivi ses relations avec sa concessionnaire pendant plusieurs mois sans exiger la signature d’un tel cautionnement ; l’augmentation de celui-ci, sollicitée par la société Yamaha, est la conséquence directe de l’aggravation de l’encours de la société concessionnaire.

En outre cet engagement a été souscrit devant le propre notaire de M. [K] qui a précisé avoir eu un rendez-vous avec ce professionnel le 4 avril 2017, ce qui lui a permis de prendre la mesure de la portée de son engagement sur les biens immobiliers affectés en garantie dont il a précisé, en page 4 de l’acte, qu’il les avait acquis au prix de 550 000 euros en septembre 2008, avec d’autres lots de copropriété.

N’est ainsi caractérisé aucun vice du consentement de M. [K] qui, pour sa part, a déclaré ne pas être en état de cessation des paiements lorsqu’il a signé l’acte notarié du 9 mai 2017, de sorte que sa demande d’annulation sera rejetée sans qu’il y ait lieu de répondre au moyen tenant à l’application des dispositions de l’article L.632-1 2° du code de commerce, lesquelles concernent les actes conclus par le débiteur en procédure collective.

Sur la demande principale en paiement de la société Yamaha :

M. [K], pour s’opposer à la demande en paiement de la société Yamaha, invoque :

– l’irrecevabilité, au visa de l’article 70 du code de procédure civile, de cette demande formulée en cours de procédure de première instance, laquelle était à la fois une demande reconventionnelle et une demande additionnelle par rapport à la demande de dommages et intérêts initialement présentée par cette dernière ; il soutient que celle-ci n’a pas de lien suffisant avec les prétentions originaires de la société Yamaha, estimant que la recevabilité, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, ne doit pas s’apprécier par rapport à la demande initiale dont il a lui-même saisi la juridiction ;

– l’irrégularité de la déclaration de créances de la société Yamaha au passif de la société Moto relais dès lors qu’elle a été réalisée par ‘sa succursale’ qui n’a pas la personnalité juridique et dont le représentant n’a pas la capacité d’agir en justice ou de représenter la société intimée à moins d’agir en vertu d’un mandat spécial ; soutenant que la Cour de cassation considère que l’irrégularité de la déclaration de créance entraîne l’extinction de la garantie dont le créancier bénéficiait, il s’estime fondé à exciper de cette irrégularité pour s’opposer à la demande en paiement ;

– l’absence de personnalité morale de la succursale, simple établissement, à laquelle la garantie a été consentie comme précisé en page 3 de l’acte de cautionnement hypothécaire de sorte qu’elle ne peut être ni créancière ni bénéficiaire d’une caution et que cet engagement ne peut produire aucun effet, peu important qu’il ait assigné la société Yamaha à l’adresse de sa succursale française conformément à l’article 43 alinéa 2 du code de procédure civile ;

– l’exception d’inexécution tirée du manquement au devoir de loyauté, en méconnaissance de l’article 1104 du code civil qui s’applique également au cautionnement ; rappelant que le cautionnement est par définition l’accessoire d’une obligation principale et citant un arrêt de la Cour de cassation du 23 juin 1998 (Com. 16-117), il soutient que le cautionnement consenti par un dirigeant au profit d’un créancier, qui a déjà connaissance de l’inexécution du débiteur et de sa situation irrémédiablement compromise, ne peut produire d’effet ; il expose que la société intimée a fait preuve d’une mauvaise foi et d’une déloyauté caractérisées tant en vue de l’obtention du cautionnement que postérieurement à celui-ci dès lors que celle-ci avait ‘manifestement connaissance’ de l’état de cessation des paiements de la société Moto relais depuis le mois d’octobre 2016 lorsqu’elle a sollicité un cautionnement hypothécaire important de son dirigeant et qu’elle savait en février 2017 que cette dernière n’était plus en mesure de régler ses factures depuis plusieurs mois ; l’appelant ajoute que la société Yamaha n’a non seulement pas respecté ses promesses de ‘fluidification de leurs relations commerciales’ mais également les dispositions contractuelles qui la liaient à la société Moto relais, s’agissant notamment des conditions de paiement prévues dans les conditions générales de vente prévues à l’annexe 5 du contrat de distribution ; elle observe que l’intimée a été jusqu’à refuser de débloquer les commandes de scooter passées par la société concessionnaire alors qu’elle les avait réglées et que lors d’une réunion du 22 décembre 2017 dont la société Yamaha ne conteste plus désormais la tenue, cette dernière a refusé une proposition de rachat du fonds de commerce de la société Moto relais qui aurait pu permettre son redressement ; il reproche à la société Yamaha d’avoir ainsi réduit à néant les chances de redressement de sa société pour en faire profiter un nouveau concessionnaire et d’avoir été totalement déloyale, contestant les allégations de l’intimée sur son train de vie et sur l’augmentation de la masse salariale de la société qu’il dirigeait.

Il fait enfin état des dispositions de l’article 2289 du code civil et de l’article L.632-2 du code de commerce.

La société Yamaha expose que :

– sa demande reconventionnelle en paiement de la somme due par la caution se rattache par un lien suffisant à la demande originaire de cette dernière et il s’agit ‘évidemment’ du même débat et de la même affaire ;

– les différentes ‘exceptions’ soulevées par M. [K], liées au prétendu défaut de personnalité morale de sa succursale France, du défaut de qualité de son dirigeant et partant de l’irrégularité de la déclaration de créance effectuée au passif de la société Moto relais, ont déjà été rejetées par le jugement du juge de l’exécution du 6 mai 2021, confirmé par un arrêt de la cour qui a autorité de la chose jugée dès lors que le litige opposait les mêmes parties et que M. [K] soulève les mêmes fins de non-recevoir et nullités ; elle ajoute que la circonstance qu’une personne morale se présente sous son nom commercial ne la prive pas de la capacité qui est attachée à sa personne quelle que soit sa désignation, cela ne constituant qu’une irrégularité de forme, et que la déclaration de créance, s’il y est indiqué son nom auquel a été ajoutée la mention ‘succursale France et représentation par M. [U]’, a été signée par son avocat et faite en son nom ; elle souligne que l’acte notarié est bien intervenu entre elle et M. [K];

– outre que l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt cité par M. [K] n’a strictement rien à voir avec la présente affaire, elle conteste tout manquement à la loyauté ; reprenant les moyens et arguments déjà exposés dans ses observations relatives à la demande d’annulation pour vice du consentement, elle souligne notamment que les quelques exemples isolés que M. [K] donne relativement au prétendu non respect de ses engagements ne sont pas pertinents, eu égard notamment à la période à laquelle ils se rapportent alors même qu’elle a été ‘particulièrement facilitatrice’ pour la société Moto relais ; elle observe que la signature du cautionnement ne pouvait constituer un permis d’augmenter encore l’encours de la société concessionnaire alors qu’il aurait dû être réduit ; elle conteste toute déloyauté à l’occasion de la réunion du 21 décembre 2017 au cours de laquelle M. [K] prétend, sans en rapporter la preuve, que la société Only Yam, qui a repris ensuite la concession, aurait proposé de racheter le fonds de commerce de la société Moto relais, soulignant que si une proposition ‘juridiquement acceptable’ avait été formulée, elle n’avait aucune raison de la refuser .

Sur la recevabilité de la demande en paiement de la société Yamaha :

Selon l’article 70 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ; celui-ci concerne les demandes dont la juridiction est saisie initialement et celles présentées à titre additionnel ou reconventionnelles.

En l’espèce, le tribunal a été saisi, à l’initiative de M. [K], à titre principal d’une demande d’annulation de son cautionnement et ‘à défaut’ d’une demande en paiement de la somme de 400 000 euros ‘à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des agissements de la société Yamaha’ ; celle-ci, dans ses dernières écritures, a sollicité reconventionnellement la condamnation de M. [K] au paiement de la somme de 397 192,32 euros au titre de l’engagement de caution souscrit par ce dernier en garantie des sommes dues par la société concessionnaire.

Cette demande reconventionnelle, quand bien même M. [K] explique qu’il s’agit d’une demande additionnelle par rapport à la demande indemnitaire initialement présentée par la société Yamaha, se rattache par un lien suffisant aux demandes de M.[K] de sorte qu’elle est recevable ; il est ajouté au jugement de ce chef.

Sur la demande de débouté en lien avec l’absence prétendue de personnalité morale de la ‘succursale’ de la société intimée :

Conformément à l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

La cour ne peut retenir l’autorité de la chose jugée du jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre du 6 mai 2021, confirmé en appel, comme s’en prévaut la société Yamaha, dans la mesure où si ces décisions ont été rendues entre les mêmes parties, la demande tranchée en cette occasion n’avait pas le même objet puisqu’il était opposé à la société Yamaha la nullité de l’assignation délivrée à l’initiative de cette dernière devant le juge de l’exécution.

La déclaration de créance de l’intimée au passif de la société Moto relais a été transmise au liquidateur judiciaire de la société Moto relais par une lettre adressée par l’avocat de la société ‘Yamaha motor Europe NV’, maître [R] [E], lequel représente toujours l’intimée ; la déclaration de créance ‘à titre chirographaire de la société Yamaha motor Europe NV au passif de la société Moto relais’ a été établie au nom de ‘ la société Yamaha motor Europe NV, société de droit étranger au capital de 347 787 000 euros dont le siège social est à [Adresse 5] (Pays Bas), agissant par sa succursale France-Yamaha motor Europe NV succursale France- inscrite au RCS Pontoise n° 808.002.158 dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [O] [U] (…)’ ; cette déclaration de créance est signée de maître [R] [E], ‘avocat représentant la société Yamaha motor Europe NV’.

Conformément à l’article L.123-1 I du code de commerce qui dispose en son 3° que sont immatriculées au registre du commerce et des sociétés les sociétés commerciales dont le siège est situé hors d’un département français et qui ont un établissement dans un de ces départements, la société intimée, comme en justifie l’extrait Kbis versé aux débats, est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Pontoise au titre de son établissement français, dont le responsable est M. [O] [U] et qui a pour nom commercial ‘Yamaha motor Europe N.V succursale France’.

ll se déduit des mentions précitées de la déclaration de créance que celle-ci a été établie au nom de la société intimée ‘Yamaha motor Europe N.V’ qui a la capacité d’ester en justice ; en outre s’il est mentionné qu’elle a agi par sa succursale représentée par M. [O] [U], il ressort des éléments annexés à l’acte notarié portant engagement de caution de M. [K] que d’après l’article 16 des statuts de la société intimée ‘la direction peut engager des responsables ayant un pouvoir de représentation général ou limité. Chacun d’eux représente la société en respectant les limites assorties à son pouvoir’ et qu’en octobre 2014 les représentants légaux de la société Yamaha motor Europe NV ont consenti une délégation de pouvoir à M. [U], qu’ils ont habilité à diriger la branche française en lui donnant notamment pouvoir pour effectuer les actes juridiques se rapportant à la conduite de la branche. Dans ce cadre, celui-ci a pu régulièrement représenter la société intimée de sorte que M. [K] n’est pas fondé à invoquer l’irrégularité de cette déclaration de créance dont rien ne démontre de surcroît qu’elle aurait été retenue dans le cadre de la procédure de vérification des créances, l’appelant écrivant dans ses conclusions que ‘ cette irrégularité aurait dû conduire au rejet de la déclaration de créances’.

S’agissant de la société bénéficiaire du cautionnement, si comme le relève M. [K], il est mentionné en page 3 de l’acte notarié que celui-ci se constitue ‘garant hypothécaire (…) en garantie de toutes les sommes pouvant être dues par la société Moto relais à la société Yamaha motor Europe NV succursale France’ et que c’est cette dernière qui est représentée à l’acte comme précisé en page 2, il ressort cependant des mentions des parties à l’acte notarié, figurant en première page, que celui-ci a été dressé à la requête de ‘la société Yamaha motor Europe NV, société de droit étranger, au capital de 347 787 000 euros dont le siège social est à [Adresse 5] (Pays Bas), ayant un établissement stable en France situé [Adresse 2] et immatriculé au RCS de Pontoise sous le n° 808 002 158, ci-après dénommé le créancier’ .

La société intimée qui dispose de la personnalité morale avait toute capacité pour bénéficier du cautionnement de M. [K].

S’il est exact que la société Yamaha était représentée à l’acte par un clerc de l’étude notariale aux termes d’une délégation de pouvoirs que lui avait donnée ‘le responsable de la société Yamaha motor Europe NV succursale France, établissement stable en France (…)’, M. [O] [U], celui-ci, au regard des éléments précédemment cités, disposait du pouvoir de représenter la société intimée de sorte que les moyens de ce chef de M. [K] sont également écartés.

Sur l’exception d’inexécution en lien avec le manquement au devoir de loyauté :

L’article 1219 du code civil dispose qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Le contrat de cautionnement est accessoire au contrat principal de distribution qui liait la société Moto relais à la société Yamaha.

M. [K] qui invoque l’exception d’inexécution, par manquement à l’obligation d’exécution loyale de la société Yamaha notamment du contrat de distribution, confirme que celle-ci a déclaré sa créance au passif de la société Moto relais ; il n’est justifié d’aucune contestation de la créance de sorte qu’il n’est pas fondé à invoquer une prétendue inexécution de contrat de distribution.

Au regard des éléments du dossier, il n’est par ailleurs pas démontré une inexécution des obligations de la société Yamaha au titre du contrat de cautionnement, la cour n’ayant pas à apprécier dans ce cadre les conditions dans lesquelles celui-ci a été conclu.

Enfin, M. [K] n’est pas fondé à invoquer les dispositions de l’article L.632-2 du code de commerce, lesquelles concernent, comme l’article L.631-1 2° précédemment cité par ce dernier, les paiements effectués au cours de la période suspecte par le débiteur en procédure collective.

Cette exception ne peut donc valablement être opposée à la demande en paiement de la société Yamaha de sorte que la cour confirme le jugement en ce qu’il a condamné M. [K] à payer à la société Yamaha la somme de 397 192,32 euros avec intérêts de droit à compter de l’assignation du 26 février 2020, dans la limite de la somme de 400 000 euros.

Sur la demande subsidiaire de M. [K] en responsabilité délictuelle :

M. [K], soutenant que la caution est en droit d’agir sur le terrain de la responsabilité délictuelle en réparation de son préjudice résultant de la mise en oeuvre de la garantie consentie dans des conditions irrégulières en citant un arrêt de la Cour de cassation (Com.9 décembre 2008 07-19708), expose qu’au regard des fautes commises par la société intimée telles qu’il les a précédemment détaillées, il est bien fondé, dès lors que sa caution a été mise en jeu, à faire juger que la société concédante a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard et d’autre part à solliciter sa condamnation à lui verser la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts. Il souligne avoir perdu son outil de travail qui a été le sien pendant plus de trente ans, qu’il ne peut faire valoir ses droits à la retraite à taux plein n’ayant pas acquis suffisamment de trimestres et qu’il perçoit le RSA. Il sollicite la compensation, sur le fondement de l’article 1347 du code civil, entre la condamnation prononcée à son encontre et les dommages et intérêts qui lui seront attribués sur le fondement de l’article 1240 du code civil.

La société Yamaha observe que M. [K] ne développe pas la consistance du prétendu préjudice dont il réclame le paiement et se contente de soutenir que si les fautes qu’il lui impute n’entraînent pas la nullité de l’action de caution, elles pourraient entraîner sa responsabilité délictuelle à due concurrence de son engagement.

Elle fait valoir qu’en tout état de cause elle n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle à l’encontre de l’appelant qui, au demeurant, l’a trompée en lui faisant croire à de multiples reprises qu’il allait régler ses problèmes de trésorerie et qu’il souhaitait tout mettre en oeuvre pour continuer son entreprise dans de bonnes conditions.

L’application de l’article 1240 suppose la démonstration d’une faute et d’un préjudice en lien direct.

M. [K], étant contractuellement lié à la société Yamaha par le cautionnement qu’il a consenti, n’est fondé à agir subsidiairement sur le plan délictuel à l’encontre de cette dernière que s’il invoque une faute de la société Yamaha dans les obligations dont celle-ci était tenue à l’égard de la société Moto relais et en lien direct avec le propre préjudice qu’il invoque ; la condamnation en paiement de l’appelant au titre du cautionnement résulte directement du non paiement de ses engagements par la société débitrice principale de la société Yamaha et de sa mise en liquidation judiciaire de sorte que le préjudice de ce dernier est lié à celle-ci.

M. [K] a invoqué dans le cadre de son moyen relatif à l’exception d’inexécution, le non respect de certaines dispositions des conditions générales de vente prévues au contrat de distribution liant les sociétés concédantes et concessionnaires ; outre qu’il ressort de l’article 6.6 édicté aux conditions générales du contrat de distribution, que la société Yamaha s’était réservée le droit d’imposer une limite de crédit au concessionnaire et au-delà de celle-ci, de ne le livrer que contre paiement avant expédition ou sur production d’une garantie additionnelle, il n’est en tout état de cause pas démontré qu’une faute de la concédante, à la supposer avérée, serait à l’origine de la liquidation judiciaire de la société Moto relais dont la cessation des paiements a été fixée au 4 octobre 2016 par le tribunal qui a ouvert la procédure collective, bien antérieurement aux fautes invoquées par l’appelant.

Sur les demandes en dommages et intérêts :

La société Yamaha, appelante incidente de ce chef, sollicite la condamnation de M. [K] à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en faisant valoir que ce dernier a engagé abusivement la procédure pour tenter de se soustraire à ses engagements et retarder le paiement d’une créance déjà ancienne.

M. [K] qui observe que le droit d’agir en justice est notamment consacré par les articles 30 et 31 du code de procédure civile et invoque un intérêt légitime à s’opposer aux demandes de la société Yamaha fondées sur l’acte de cautionnement, conteste toute faute et tout abus dans l’exercice de ses droits ; il conclut au rejet de l’appel incident de l’intimée qui, de surcroît, ne justifie d’aucun préjudice.

La faute faisant dégénérer en abus le droit d’agir en justice doit être caractérisée, étant rappelé que l’accès au juge est un principe fondamental, l’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’étant pas en soi constitutive d’une faute.

Il ressort des motifs du jugement que les premiers juges, s’ils ont justement écarté la demande d’annulation du cautionnement consenti par M.[K], n’ont que très brièvement motivé son débouté de ce chef. Au regard de l’importance de la condamnation encourue en vertu du cautionnement souscrit par M. [K], aucun abus n’est caractérisé dans l’exercice de son droit d’appel.

La situation respective des parties ne justifie pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Déclare l’appel de M. [S] [G] [K] recevable ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déclare recevable la demande reconventionnelle en paiement de la société Yamaha motor Europe NV ;

Rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [S] [G] [K] aux dépens de la procédure d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller faisant fonction de Président,

 


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