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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70C
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 16 MAI 2023
N° RG 22/01680 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VCIQ
AFFAIRE :
M. [B] [G]
C/
M. [H] [W]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Janvier 2022 par le Tribunal de proximité de GONESSE
N° RG : 11-21-1634
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 16/05/23
à :
Me Sefik TOSUN
Me Hervé KEROUREDAN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [B] [G]
[Adresse 1]
[Localité 6] / GUADELOUPE
Représentant : Maître Sefik TOSUN, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 190
APPELANT
****************
Monsieur [H] [W]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Maître Hervé KEROUREDAN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 40
Représentant : Maître Yves DUPUIS, Plaidant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 103 –
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé du 31 décembre 2018, M. [W] a donné à bail à M. [B] [G], pour une durée d’un an tacitement reconductible, une parcelle d’une surface de 1223 m2 incluant une serre de 54 m2 pour culture maraîchère, située [Adresse 4] à [Localité 5] et moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 160 euros révisable annuellement.
Par acte de commissaire de justice en date du 28 octobre 2019, M. [W] a fait délivrer à M. [G] un congé aux fins de vente avec effet au 31 décembre 2019.
Par acte de commissaire de justice délivré le 21 octobre 2021, M. [W] a assigné M. [G] à comparaître devant le tribunal de proximité de Gonesse aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– la validation du congé délivré le 28 octobre 2019 à M. [G],
– la constatation de son occupation sans droit ni titre,
– son expulsion des lieux ainsi que celle de tout occupant de son chef avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier le cas échéant,
– sa condamnation au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la parfaite libération des lieux, par référence au dernier loyer applicable, le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
– sa condamnation à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.
Par jugement réputé contradictoire du 24 janvier 2022, le tribunal de proximité de Gonesse a :
– constaté la validité du congé délivré le 28 octobre 2019 par M. [W],
– dit que M. [G] était déchu de tout titre d’occupation des locaux loués et occupait sans droit ni titre le terrain situé [Adresse 4] à [Localité 5] (95) depuis le 31 décembre 2019,
– ordonné l’expulsion des lieux loués de M. [G] et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, après signification d’un commandement d’avoir à quitter les lieux, conformément aux dispositions des articles L411-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
– fixé l’indemnité mensuelle d’occupation due à compter du 1er janvier 2020 et jusqu’à la libération effective des lieux, au montant du dernier loyer applicable, soit à la somme de 160 euros par mois et condamné M. [G] à son paiement au bénéfice de M. [W],
– condamné M. [G] à payer à M. [W] la somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [G] aux dépens de l’instance, à l’exclusion du coût de l’acte de congé,
– dit n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit.
Par déclaration reçue au greffe le 21 mars 2022, M. [G] a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 25 octobre 2022, il demande à la cour :
– d’infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Gonesse le 24 janvier 2022 en ce qu’il:
* a constaté la validité du congé délivré le 28 octobre 2019 par M. [W] alors qu’il n’est pas valide,
* a dit qu’il était déchu de tout titre d’occupation des locaux loués et occupant sans droit ni titre le terrain situé [Adresse 4] à [Localité 5] (95) depuis le 31 décembre 2019 alors qu’il bénéficie d’un titre d’occupation,
* a ordonné son expulsion des lieux loués de M. [G] et celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, après signification d’un commandement d’avoir à quitter les lieux, conformément aux dispositions des articles L411-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
* a fixé l’indemnité mensuelle d’occupation due à compter du 1er janvier 2020 et jusqu’à la libération effective des lieux, au montant du dernier loyer applicable, soit à la somme de 160 euros par mois et l’a condamné à son paiement au bénéfice de M. [W],
* l’a condamné à payer à M. [W] la somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens sauf le coût de l’acte de congé,
statuant à nouveau, in limine litis,
– à titre principal, prononcer la nullité de l’assignation délivrée par M. [W] le 21 octobre 2021,
– à défaut et à titre subsidiaire, prononcer la nullité du commandement de payer délivrée le 28 octobre 2019 par M. [W],
– à défaut, et à titre infiniment subsidiaire, déclarer M. [W] irrecevable tant en son action qu’en ses demandes en ce qu’il n’a pas qualité à agir,
sur le fond,
– à titre principal, débouter M. [W] de l’intégralité de ses demandes,
– à titre subsidiaire, lui octroyer les plus larges délais pour s’acquitter de toutes sommes que la cour estimerait dues à M. [W],
sur les prétentions de M. [W],
– le débouter de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
sur les frais irrépétibles et les dépens,
– infirmer le jugement rendu le 24 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamné à payer à M. [W] une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
– débouter M. [W] de toutes demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [W] à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [W] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 12 août 2022, M. [W] demande à la cour de :
– confirmer le jugement du tribunal de proximité de Gonesse rendu le 24 janvier 2022,
– rejeter les demandes incidentes et au fond de M. [G],
– condamner M. [G] au paiement de la somme de 2 000 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [G] aux entiers dépens d’appel.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 3 novembre 2022.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION.
Sur les exceptions de procédure soulevées par M. [G].
– Sur la nullité de l’acte introductif d’instance.
M. [G] invoque à titre liminaire la nullité de l’acte d’introductif d’instance qui lui a été délivré le 21 octobre 2021 dans les conditions de l’article 659 du code de procédure civile. Il fait essentiellement valoir que le commissaire de justice n’a absolument pas procédé aux démarches suffisantes pour parvenir à trouver son adresse afin de lui signifier l’assignation à sa personne.
M. [W] conclut au rejet de l’exception de nullité soulevée par M. [G], soulignant qu’il ne connaissait pas l’adresse de celui-ci avant le courrier qu’il lui a adressé le 18 mars 2019 à l’entête duquel le locataire a mentionné son adresse.
Sur ce,
Il résulte de l’article 659 du code de procédure civile que le commissaire de justice doit procéder aux diligences les plus complètes pour trouver le destinataire de l’acte, qu’il ne peut dresser un procès-verbal selon les dispositions de l’article susvisé, à peine de nullité de la signification, sans avoir sollicité, au préalable, auprès du requérant des informations que lui ou son mandant seraient susceptibles de connaître, ni tenté de signifier aux adresses qu’il détenait et qui pouvaient lui permettre de toucher le destinataire de l’acte.
M. [B] [G], appelant, a été assigné devant le premier juge selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile.
Le commissaire instrumentaire a signifié l’acte introductif d’instance destiné à M. [B] [G] à l’adresse indiqué dans le bail conclu le 24 février 2021 (portant sur la parcelle située [Adresse 4] à [Localité 5]), soit l’adresse sise à [Adresse 7], en mentionnant sur le procès-verbal de signification :
– avoir effectué des recherches sur Internet, site www;Pages blanches.fr, sites généralistes qui se sont avérées infructueuses. aux nom et adresse du destinataire, quant à une éventuelle adresse.
– les services de la mairie, de la poste n’ont pu me renseigner.
– le voisinage n’a pu me renseigner.
– nous avons tenté de joindre le destinataire téléphonique au n° de portable indiqué dans le bail, mais en vain.
– destinataire sans nouvelle adresse déjà connue de l’étude.
Cependant, le commissaire de justice a, antérieurement à l’assignation, signifié le congé pour vendre destiné à M. [B] [G], chez son père, ce dont il s’infère qu’il savait que M. [B] [G] pouvait être joint chez ce dernier et ce d’autant, qu’il ressort du courrier adressé par M. [B] [G] au propriétaire le 18 mars 2019, soit antérieurement à la date de délivrance de l’assignation, que l’adresse qui y est indiquée n’est autre que celle de son père, [Adresse 3] à [Localité 5], et d’autre part que le jugement a été également signifié chez son père, M. [U] [G].
Dès lors, en ne signifiant pas l’acte introductif d’instance à l’adresse du père ou à tout le moins en n’interrogeant pas celui-ci sur l’adresse précise de son fils, l’auxiliaire de justice n’a pas satisfait aux prescriptions de l’article 659 du code de procédure civile.
Aux termes de l’article 693 alinéa 1er du code de procédure civile, ce qui est notamment prescrit par les articles 654 à 659, est observé à peine de nullité, de sorte que l’absence ou le manque de diligences du commissaire de justice, en méconnaissance des dispositions de l’article 659 du même code, entraîne la nullité de l’acte de signification, sans qu’il soit nécessaire de faire état d’un grief. Il y a lieu de souligner à cet égard qu’en tout état de cause, aux termes de l’article 114 du code de procédure civile, la nullité d’un acte de procédure pour vice de forme doit être prononcée dès lors que l’irrégularité cause un grief à celui qui l’invoque, ce qui est le cas en l’espèce dans la mesure où M. [B] [G] qui n’a pas eu connaissance de l’acte introductif d’instance, n’a pas pu se présenter devant le tribunal de proximité juge pour faire valoir ses droits, de sorte qu’il a été privé du double degré de juridiction.
La cour ne peut donc que prononcer la nullité de l’acte introductif d’instance et partant celle de l’acte, en ce que sa signification ne satisfait pas aux exigences de l’article 659 du code de procédure civile.
Lorsque l’appelant, qu’il ait ou non comparu en première instance, a conclu au principal à l’annulation du jugement en raison de l’irrégularité de l’acte introductif d’instance et, subsidiairement, sur le fond, la cour d’appel qui retient cette irrégularité, ne peut pas statuer sur le fond, en raison de l’absence d’effet dévolutif de l’appel.
Cependant, le principe d’absence d’effet dévolutif connaît une dérogation, lorsque l’appelant a, comme c’est le cas en l’espèce, conclu sur le fond de manière non subsidiaire (Cass.2ème civ.8 janvier 2015, n°13-14.781), l’appelant pouvant souhaiter, que nonobstant la nullité de l’acte introductif d’instance,
la cour se prononce sur le fond et cette volonté expresse de la partie appelante ayant pour effet de purger le vice originel entachant l’assignation.
Il y a donc lieu, au cas d’espèce, et dès lors qu’aux termes du dispositif de ses écritures, la partie appelante conclut au fond à titre principal, de statuer le litige au fond par l’effet dévolutif de l’appel, malgré l’annulation de l’assignation.
Dans la mesure où il a été fait droit à la demande principale tendant à l’annulation de l’acte introductif d’instance, il n’y a pas d’examiner la demande subsidiaire tendant à voir prononcer la nullité du congé pour vendre délivré le 28 octobre 2019 par M. [W], et la demande plus subsidiaire tendant à voir déclarer M. [W] irrecevable tant en son action qu’en ses demandes pour défaut de qualité à agir.
Sur le fond du litige.
M. [G] conclut principalement au débouté des demandes formées par M. [W] et sollicite subsidiairement des délais pour libérer les lieux.
– Sur le débouté des demandes formées par M. [W].
M. [B] [G] fait valoir qu’il n’est pas le signataire du bail dont M. [W] se prévaut, ce qui n’est pas véritablement contesté par M. [W] qui indique que le contrat a été signé hors sa présence.
Il s’ensuit que M [B] [G], dès lors qu’il n’est pas signataire du bail, est occupant sans droit ni titre, en sorte que le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant validé le congé pour vendre qui n’a pas été délivré au locataire.
Sur les mesures accessoires.
M. [B] [G] doit être condamné aux dépens de la procédure d’appel.
Il y a lieu de faire droit à la demande de M. [W] au titre des frais de procédure par lui exposés en cause d’appel en condamnant M. [B] [G] à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS.
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Dit que la signification de l’acte introductif d’instance ne satisfait pas aux exigences de l’article 659 du code de procédure civile,
Prononce en conséquence la nullité de l’acte introductif d’instance délivré le 21 octobre 2021,
Dit n’y avoir lieu de se prononcer sur les demandes subsidiaires et plus subsidiaires,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant validé le congé,
Statuant à nouveau,
Déclare nul et de nul effet le congé pour vente délivré par acte d’huissier de justice en date du 28 octobre 2019, par M. [W] à M. [G],
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. [B] [G] à payer à M. [W] une indemnité de 1 500 euros,
Condamne M. [B] [G] aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,