Nullité d’Assignation : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/18134

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Nullité d’Assignation : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/18134
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2023

N° 2023/ 156

Rôle N° RG 21/18134 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BISWL

[U] [N]

C/

Association ASSOCIATION POUR L’ACCES AUX GARANTIES LOCATIVES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Peggy LIBERAS

Me Karine DABOT RAMBOURG

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d’Instance de BRIGNOLES en date du 20 Mars 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 1114000794.

APPELANT

Monsieur [U] [N]

né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 7] (83), demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Peggy LIBERAS de la SELARL C.L. JURIS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

ASSOCIATION POUR L’ACCES AUX GARANTIES LOCATIVES, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Karine DABOT RAMBOURG de la SELARL MATHIEU DABOT & ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Quentin MATHIEU, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 09 septembre 2009 à effet au 10 septembre 2009, Madame [E] a donné à bail d’habitation à Monsieur [U] [N] et Madame [R] [G] un appartement situé à [Localité 6], moyennant un loyer mensuel de 900 euros.

L’état des lieux de sortie a été effectué le premier décembre 2010.

Se prévalant d’une quittance subrogative, l’association pour l’accès aux garanties locatives (L’APAGL) a fait assigner Monsieur [N] par acte d’huissier du 07 novembre 2014, aux fins principalement de le voir condamner au versement de la somme de 12086, 32 euros, déduction faite du dépôt de garantie de 356, 80 euros, au versement de sommes pour les débours et les frais de procédure, ainsi qu’au versement de dommages et intérêts pour résistance abusive et à une indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 20 mars 2015, le tribunal d’instance de Brignoles a :

– condamné Monsieur [N] à verser à l’APAGL la somme de 11.965 euros avec intérêts au taux légal à compter du 07 novembre 2014

– rejeter le surplus des demandes de l’APAGL

– ordonné l’exécution provisoire

– condamné Monsieur [N] aux dépens et au versement de la somme de 150 euros au titre des frais irrépétibles.

Il a estimé recevable et bien fondée la demande de l’APAGL. Il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée au titre d’une résistance abusive.

Le 22 décembre 2021, Monsieur [N] a relevé appel de cette décision. Dans une annexe (dont l’existence est visée dans la déclaration d’appel), Monsieur [N] demande l’annulation du jugement déféré.

l’APAGL a constitué avocat.

Par conclusions notifiées le 21 février 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Monsieur [N] demande à la cour :

– de déclarer son appel recevable

– de rejeter les demandes de l’APAGL

* in limine litis

– de juger que les voies et délais de recours consécutifs à la signification irrégulière du jugement du 20 mars 2015 n’ont pas couru

– de juger que l’assignation du 07 novembre 2014 et le jugement du 20 mars 2015 ne lui ont pas été signifiés régulièrement

– de dire nulle l’assignation du 07 novembre 2014

– de dire nul le jugement du 20 mars 2015

– de dire que la saisine irrégulière du premier juge entraîne une absence d’effet dévolutif

– de renvoyer les parties à mieux se pourvoir

– d’infirmer le jugement déféré

*en tout état de cause :

– de débouter ‘toute demande, conclusions et fins contraires’

– de condamner tout succombant à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens distraits au profit de Maître LIBERAS.

Il fait état de la recevabilité de son appel en soulevant la nullité de l’acte introduction d’instance et de la signification du jugement déféré.

Il relève la nullité de l’acte introduction d’instance qui entraîne la nullité du jugement. Il note que l’adresse de l’assignation ne correspond ni à son adresse réelle ni à la dernière adresse connue ni à son lieu de travail. Il fait état d’une adresse correspondant à un restaurant tenu par son frère.

Il ajoute que la signification du jugement est également nulle, ce qui entraîne la nullité du jugement. Il explique que l’huissier de justice ne démontre pas avoir fait des diligences suffisantes pour signifier le jugement à sa personne. Il note que l’adresse à laquelle le jugement lui a été signifié n’est pas la sienne.

Par conclusions notifiées le 27 février 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se reporter, l’association APAGL demande à la cour :

*in limine litis

– de constater la validité de l’acte introductif d’instance et la validité de la signification du jugement déféré

– de dire irrecevable l’appel formé par Monsieur [N]

– de rejeter les demandes de Monsieur [N]

*en tout état de cause :

– de condamner Monsieur [N] au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d’appel.

Elle soutient que l’acte introductif d’instance a été valablement signifié tout comme la signification du jugement déféré. Elle conclut en conséquence à l’irrecevabilité de l’appel en raison de sa tardiveté.

Elle estime que le jugement déféré doit être confirmé.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel

Selon l’article 914 du code de procédure civile, les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu’à la clôture de l’instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant à (…) déclarer l’appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l’appel ; les moyens tendant à l’irrecevabilité de l’appel doivent être invoqués simultanément à peine d’irrecevabilité de ceux qui ne l’auraient pas été (…). Les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d’appel la caducité ou l’irrecevabilité après la clôture de l’instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement. Néanmoins, sans préjudice du dernier alinéa du présent article, la cour d’appel peut, d’office, relever la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel ou la caducité de celui-ci (…).

L’APAGL n’est plus recevable devant la cour à soulever l’irrecevabilité de l’appel, puisque la tardiveté alléguée de ce recours ne résulte pas d’une cause qui se serait révélée postérieurement.

Sur la nullité de l’assignation du 07 novembre 2014 et sur la nullité du jugement déféré

Selon l’article 114 du code de procédure civile, la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

L’article 654 du code de procédure civile dispose que la signification doit être faite à personne.

Selon l’article 655 du code de procédure civile, si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L’huissier de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu’à condition que la personne présente l’accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité.

L’huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l’avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l’acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise.

Aux termes de l’article 656 du même code, si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par l’huissier de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l’huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l’article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l’acte doit être retirée dans le plus bref délai à l’étude de l’huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l’intéressé ou par toute personne spécialement mandatée (…)

Les démarches mentionnées par l’huissier dans l’assignation introductive d’instance du 07 novembre 2014 faite au [Adresse 5] sont les suivantes : ‘nom du requis figure sur la boîte aux lettres. Confirmation par les services municipaux’.

Or, la mention «nom sur la boîte aux lettres» et ‘confirmation par les services municipaux’, sans qu’il soit mentionné que le prénom du requis était porté sur la boîte aux lettres et était confirmé par les services municipaux, ne constitue pas à elle seule une vérification suffisante de ce que le destinataire de l’acte demeure bien à l’adresse de signification, alors que Monsieur [U] [N] conteste avoir vécu à l’adresse de signification, qu’une autre adresse ‘[Adresse 2]’ est évoquée par l’huissier de justice sans que ce dernier ne s’y rende et que cette dernière adresse correspond à l’adresse mentionnée par la direction générale des finances publiques dans l’avis d’imposition 2015 pour les revenus de l’année 2014 de Monsieur [U] [N].

Monsieur [U] [N] démontre (sa pièce 10) que l’adresse du [Adresse 5] correspond au siège social de la SARL la Cantine des Soleiades, dont le gérant est son frère, Monsieur [J] [N], SARL radiée du registre du commerce et des sociétés le 09 janvier 2012 après cession du fonds de commerce à la société ELOLOULE le 18 mars 2011. Le gérant de cette société atteste (pièce 13 de Monsieur [U] [N]) y avoir exercé son métier de restaurateur depuis le 04 mars 2011 jusqu’au premier janvier 2017 et note que l’établissement est un local à usage commercial.

Il est ainsi démontré que l’huissier de justice n’a pas procédé, lors de l’assignation introductive d’instance, à une vérification suffisante de ce que le destinataire de l’acte demeurait bien à l’adresse de signification.

Monsieur [U] [N], qui n’était ni comparant ni représenté en première instance, n’a pu bénéficier d’un double degré de juridiction, ce qui est constitutif d’un grief.

Il convient en conséquence de prononcer la nullité de l’acte introductif d’instance du 07 novembre 2014.

L’appel est dépourvu d’effet dévolutif sur le fond lorsque le jugement est déclaré nul en raison d’une irrégularité qui affecte l’acte introductif d’instance, que le défendeur n’a pas comparu et que l’appelant ne conclut pas au fond à titre principal.

Il n’y a donc pas lieu de statuer; le jugement étant nul, la cour ne peut ni l’infirmer ni le confirmer.

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

L’APAGL est essentiellement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de la présente instance.

Pour des raisons tirées de l’équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable la demande formée par l’APAGL tendant à voir déclarer l’appel de Monsieur [U] [N] irrecevable,

PRONONCE la nullité de l’assignation du 07 novembre 2014,

PRONONCE la nullité du jugement du 20 mars 2015,

DIT que l’effet dévolutif n’a pas joué,

REJETTE les demandes des parties au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la présente procédure,

CONDAMNE l’APAGL aux dépens de la présente procédure.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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