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COUR D’APPEL DE CAEN
2ème Chambre civile
O R D O N N A N C E
N° RG 21/02108
S.A. GENERALI IARD
S.C.A. ISIGNY SAINTE MERE
Représentées par Me Olivier LEHOUX, avocat au barreau de CAEN – N° du dossier 20191036
Assistées de Me François-genêt KIENER, avocat au barreau de PARIS
C/
S.A.S.U. NEXTENERGIES
XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE
Représentées par Me Bertrand DERUDDER, avocat au barreau de CAEN
Assistées de Me Stéphanie BOYER-CAVOIZY, avocat au barreau de PARIS
Le MERCREDI ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
Nous, B. GOUARIN, Conseiller, chargé de la mise en état, assistée de Mme LE GALL, greffier,
Avons rendu l’ordonnance suivante après débats tenus le Mercredi 14 Décembre 2022, les parties ayant été préalablement avisées de la date de délibéré,
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FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
La société coopérative agricole Isigny-Sainte-Mère est spécialisée dans la fabrication de produits laitiers.
En 2007, elle a commandé à la société Nextenergies d’une chaudière biomasse génératrice de vapeur, moyennant un prix de 2.130.000 euros (facture du 13 mars 2007) et 538.000 euros (facture du 1er juin 2007), laquelle a été installée en juin 2008. Le financement de cet investissement a été réalisé par un crédit-bail consenti par Oseo, devenu la BPI.
En mars 2015, la société AIT est intervenue pour une opération de maintenance, de décalaminage et de détartrage de la chaudière.
Un problème de circulation d’eau a été détecté. Il a été constaté la déformation de la plaque arrière du ballon vapeur et l’écrasement de nombreux tubes.
Le 10 juillet 2015, la coopérative Isigny-Sainte-Mère a commandé à la société Nextenergies la réparation de la chaudière, qui a révélé la présence d’une pièce métallique au-dessus de la vanne de purge et obstruant partiellement cette dernière, la présence de silice étant constatée.
Après réparation, la chaudière a été remise en service le 28 août 2015.
La société Generali IARD, assureur de la coopérative Isigny-Sainte-Mère, a évalué le préjudice de cette dernière à la somme globale de 426.234 euros HT et l’a indemnisée à hauteur de la somme de 236.272 euros en juillet 2017 déduction faite de la franchise applicable, la somme de 110.798 euros étant versée à la société BPI en sa qualité de crédit-bailleur.
Une quittance subrogative a été établie le 21 juillet 2017 au profit de la société Generali IARD.
Le 13 mars 2018, la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère ont mis en demeure la société Nextenergies de leur régler respectivement les sommes de 236.272 euros et de 198.962 euros, cette dernière correspondant au découvert d’assurance de la coopérative.
La société Nextenergies est assurée auprès de la société Axa Corporate Solutions, aux droits de laquelle vient la société de droit irlandais XL Insurance Company SE.
Par jugement du 16 juin 2021, le tribunal de commerce de Caen, sur l’assignation délivrée les 16 et 26 janvier 2019 par la coopérative Isigny-Sainte-Mère et la société Generali IARD ainsi que l’assignation en garantie délivrée le 4 août 2020 par la société Axa Corporate Solutions à l’égard de la société Yves Madeline venant aux droits de la société AIT, a :
– débouté la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère de l’intégralité de leurs demandes,
– débouté les sociétés Nextenergies et XL Insurance Company SE de toutes leurs demandes formées à l’encontre de la société Yves Madeline,
– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère aux entiers dépens comprenant au titre des frais de greffe la somme de 129,29 euros dont 21,55 de TVA.
Par déclaration du 15 juillet 2021, la coopérative Isigny-Sainte-Mère et la société Generali IARD ont interjeté appel de cette décision.
Par conclusions d’incident du 17 octobre 2022, les sociétés Nextenergies et XL Insurance Company SE ont demandé au conseiller de la mise en état de dire la société Generali IARD irrecevable en son action engagée à l’encontre de la société XL Insurance Company SE, de dire prescrite et éteinte cette action, de l’en débouter et de condamner la société Generali IARD à lui payer la somme de 5.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident.
Selon dernières conclusions du 12 décembre 2022, auxquelles il est référé pour l’exposé de ses moyens, les sociétés Nextenergies et XL Insurance Company SE demandent au conseiller de la mise en état à titre principal de prononcer la nullité de l’assignation délivrée le 21 janvier 2019 par la société Generali IARD notamment à la société XL Insurance Company SE venant aux droits de la société Axa Corporate Solutions, de dire et juger prescrite l’action de la société Generali IARD à l’encontre de la société XL Insurance Company SE aux droits de la société Axa Corporate Solutions et en conséquence de la débouter de ses entières demandes.
Subsidiairement, ces sociétés demandent au conseiller de la mise en état de dire la société Generali IARD irrecevable en son action engagée à l’encontre de la société XL Insurance Company SE et de l’en débouter.
En tout état de cause, elles sollicitent la condamnation de la société Generali IARD à leur payer la somme de 5.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident.
Par dernières conclusions du 8 décembre 2022, auxquelles il est référé pour l’exposé de ses moyens, la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère demandent au conseiller de la mise en état à titre principal de se déclarer incompétent pour statuer sur la ou les fins de non-recevoir soulevées par la société XL Insurance Company SE, de juger que celle-ci devra mieux se pourvoir en soulevant, le cas échéant, toute fin de non-recevoir sans lien avec la procédure d’appel devant la cour d’appel dans sa formation collégiale.
Subsidiairement, ces sociétés demandent au conseiller de la mise en état de juger la société Generali IARD recevable en son action engagée à l’encontre de la société XL Insurance Company SE et de rejeter les fins de non-recevoir soulevées par cette dernière.
En tout état de cause, elles sollicitent la condamnation de la société XL Insurance Company SE à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour avoir tardivement soulevée une fin de non-recevoir, celle de 2.500 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.
MOTIVATION
Selon l’article 914 du code de procédure civile, les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu’à la clôture de l’instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant à :
– prononcer la caducité de l’appel ;
– déclarer l’appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l’appel ; les moyens tendant à l’irrecevabilité de l’appel doivent être invoqués simultanément à peine d’irrecevabilité de ceux qui ne l’auraient pas été ;
– déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910 ;
– déclarer les actes de procédure irrecevables en application de l’article 930-1.
Les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d’appel la caducité ou l’irrecevabilité après la clôture de l’instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement. Néanmoins, sans préjudice du dernier alinéa du présent article, la cour d’appel peut, d’office, relever la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel ou la caducité de celui-ci.
Il résulte de ces dispositions, d’une part, que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n’ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge, d’autre part, que la cour d’appel est compétente pour statuer sur des fins de non-recevoir relevant de l’appel, celles touchant à la procédure d’appel étant de la compétence du conseiller de la mise en état.
Au visa des articles 54, 56 ancien, 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil, la société XL Insurance Company SE soutient que l’assignation délivrée à son encontre le 21 janvier 2019 par la société Generali IARD est nulle en ce qu’elle ne précise pas les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, alors qu’il n’a pas été recouru à la procédure d’escalade impérativement prévue par la convention de règlement des litiges (la convention Coral) à laquelle la société Generali IARD est adhérente.
La société XL Insurance Company SE en déduit que l’action engagée à son encontre par la société Generali IARD est irrecevable comme prescrite.
Cependant, la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action engagée par la société Generali IARD à l’encontre de la société XL Insurance Company SE constitue une fin de non-recevoir relevant de l’appel en ce que, bien que n’ayant pas été tranchée en première instance, elle aurait pour conséquence, si elle était accueillie, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge, de sorte que le conseiller de la mise en état n’est pas compétence pour en connaître.
Le droit d’exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s’il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l’appréciation de ses droits qui ne saurait résulter du seul rejet de ses prétentions. Faute pour la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère d’établir un tel abus, leur demande de dommages-intérêts formée de ce chef sera rejetée.
Succombant, les sociétés XL Insurance Company SE et Nextenergies seront condamnées aux entiers dépens de l’incident.
Il n’y a pas lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le conseiller de la mise en état, statuant publiquement et par ordonnance mise à disposition au greffe, susceptible de déféré,
Se déclare incompétent pour connaître de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action engagée par la société Generali IARD à l’encontre de la société XL Insurance Company SE ;
Déboute la société Generali IARD et la coopérative Isigny-Sainte-Mère de leur demande de dommages-intérêts ;
Condamne les sociétés Nextenergies et XL Insurance Company SE aux entiers dépens de l’incident ;
Dit n’y avoir lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE CONSEILLER
DE LA MISE EN ETAT
N. LE GALL B. GOUARIN