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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 10 JANVIER 2023
N° 2023/ 20
Rôle N° RG 22/01440 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BIY5H
[F] [W]
C/
S.A. LEROY MERLIN FRANCE
S.A.S. COLISWEB
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Jean laurent ABBOU
Me Martine GUERINI
Me Agnès ERMENEUX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de la mise en état de Marseille en date du 05 Février 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/08364.
APPELANT
Monsieur [F] [W]
né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 6] ([Localité 6])
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
plaidant par Me Jean laurent ABBOU de la SELARL NEMESIS, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Chloé AUBERT, avocat au barreau de Marseille
INTIMEES
S.A. LEROY MERLIN FRANCE, dont le siège social est [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
représentée par Me Martine GUERINI, avocat au barreau de MARSEILLE
S.A.S. COLISWEB, dont le siège social es sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal en exercice.
représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat postulant du barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 21 Novembre 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Danielle DEMONT, conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Mme Danielle DEMONT, Conseiller
Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Colette SONNERY.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2023.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2023,
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
M. [W] est propriétaire d’une villa à [Localité 4].
Il a commandé des éléments de cuisine pour un montant de 6 200 € auprès de la société Leroy Merlin-France.
Les façades des meubles de cuisine présentant des vices de fabrication, la société Leroy-Merlin a pris en charge le remplacement intégral des façades.
La livraison des éléments de cuisine a été confiée à un transporteur sous-traitant, la société Colisweb, qui l’a elle-même sous-traitée à la société Transports Celtic.
Au moment de la livraison, le préposé de cette société, utilisant un chariot transpalette métallique a détérioré le nez d’une marche de la terrasse principale de la maison, ce qui a été mentionné sur la facture de livraison le 23 juin 2018.
Le type de carrelage n’étant plus commercialisé, les consorts ont sollicité le remplacement de la superficie totale, soit 250 m².
La société d’assurance a fait réaliser une expertise amiable au contradictoire de la société Leroy Merlin, de la société transports Celtic et de la société Colisweb qui a conclu au versement d’une indemnité d’un montant de 8 024 € pour la démolition et le remplacement du carrelage sur une surface de 32 m².
La société Leroy-Merlin refusant de prendre en charge le dommage, a été assignée en responsabilité par les consorts [P], par exploit du 10 juillet 2019 au visa des articles 1103, 1104 et 1242 al. 1er du code civil (RG 19/8364).
Par assignations du 18 février 2020 et du 24 février 2020, la SA Leroy-Merlin a appelé en garantie son sous-traitant, la société Colisweb, et le sous-traitant de son sous-traitant, la société Transports Celtic (RG 20/2787).
Par exploit du 11 mars 2020 (RG 20/3710), la société Coliweb a appelé en garantie la société Transports Celtic.
Par ordonnance du 5 juin 2020 les 3 procédures ont été jointes.
La société Leroy-Merlin a déposé des conclusions d’incident devant le juge de la mise en état.
Par ordonnance en date du 5 février 2021 (l’ordonnance déférée), le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille, statuant sur incidents élevés par la société Colisweb, la société Leroy-Merlin, et la société Transports celtic, a :
‘ déclaré le le juge de la mise en état compétent pour statuer sur les exceptions de nullité soulevées par la société Transports Celtic et sur les fins de non recevoir invoquées par la société Colisweb et transports Celtic ;
‘ déclaré incompétent le juge de la mise en état pour statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Leroy Merlin- France au visa de l’article 133-6 alinéa 1er du code de commerce contre les demandes principales formées par Mme [X] [S] et M. [F] [W] ;
‘ rejeté les exceptions de nullité de l’assignation en intervention forcée aux fins de garantie signifiée par exploits d’huissier du 18 février 2018 et du 24 février 2018 [en réalité 2020] soulevées par la société Transports Celtic ;
‘ déclaré irrecevables pour défaut de droit d’agir les demandes formées par Mme [X] [S] et M. [F] [W] en responsabilité et en réparation des préjudices matériel et moral dont ils déclarent avoir été victimes le 23 juin 2018 ;
‘ déclaré irrecevables les actions en garantie exercées par la société Leroy Merlin France contre la société Colisweb et la société Transports Celtic ;
‘ déclaré recevable l’action en garantie exercée par la société Colisweb contre la société Transports Celtic enrôlée sous numéro 20/37 10 ;
‘ ordonné la disjonction des instances enrôlées sous les numéros 20/3710 d’une part et des instances enrôlées sous le numéro 19/8364 et numéros 20/2787 suivies sous le numéro 19/ 8364 d’autre part ;
‘ débouté les parties de toutes autres demandes ;
‘ condamné les consorts [P] aux dépens des instances éteintes ;
‘ et renvoyé l’examen de l’affaire enrôlée sous le numéro 20/3710 à l’audience de mise en état du 26 mars 2021.
*
Par deux déclarations d’appel enregistrées sous les numéros RG 21/2405 et 21/240,7 en date du 16 février 2021, M. [F] [W] a relevé appel de cette décision en intimant les sociétés Leroy-Merlin, Colisweb et Transports Celtic , appel limité aux dispositions ayant déclaré irrecevables ses demandes pour défaut d’intérêt à agir et ayant ordonné la disjonction.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 18 février 2021 sous le second numéro.
Par conclusions d’incident, la société Transports Celtic a sollicité du président de la présente chambre de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qu’il constate que la déclaration d’appel ne lui a pas été signifiée dans le délai de 10 jours et la caducité de l’appel formé contre elle.
Par arrêt rendu sur déféré le 11 janvier 2022, la cour de ce siège a :
‘ infirmé l’ordonnance du 16 juin 2021 ;
‘ dit que le litige est divisible ;
‘ prononcé la caducité partielle de la déclaration d’appel contre la SAS Transports Celtic ;
‘ dit, en conséquence que la procédure d’appel se poursuit entre M. [W] et les autres parties intimées la procédure ;
‘ rejeté les demandes des sociétés Leroy Merlin, transports Celtic et Colisweb ;
‘ et dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et réservé les dépens de l’incident et du déféré pour être joints au fond.
La cour retient :
En droit, qu’en cas de pluralité de parties intimées devant la cour, la caducité de l’appel ne concerne que l’intimé auquel la déclaration d’appel n’a pas été signifiée, sauf en cas d’indivisibilité.
En l’espèce, la demande initiale de M. [W] concerne donc la dégradation occasionnée à sa terrasse lors de la livraison des éléments de cuisine qu’il avait commandés et achetés à la société Leroy Mer1in, avec laquelle il a conclu un contrat de vente et qui lors des faits s’exécutait de sa garantie de conformité en lui délivrant de nouvelles façades pour ses meubles, les premières ayant présenté un vice de fabrication, alors que la dégradation est le fait matériel de la société Transports Celtic au moment de sa livraison.
Il s’ensuit:
– que l’ action s’ analyse comme une action en responsabilité à raison d’un dommage qui ne concerne pas la chose vendue, ladite action ayant été initialement diligentée par M. [W] contre la seule société Leroy Merlin, laquelle a pris l’initiative d’ assigner la société Colisweb et la société Transports Celtic pour être relevée et garantie ;
– que la responsabilité individuelle, recherchée à l’ occasion de cette action, exige l’appréciation du fait ou de la faute de chacun des intervenants, étant sur ce point observé que même en admettant l’existence d’un contrat de transport unique pour toutes les parties, les textes spécifiques à ce contrat prévoient des régimes de responsabilité propres à chacun ; qu’ainsi, le texte des articles L 132 -4 et suivants du code du commerce prévoit pour le commissionnaire une garantie qui est distincte, par son objet et ses effets, de celle du voiturier, laquelle est prévue à l’ article L 133 -1 qui stipule que le voiturier est garant des avaries autres que celles qui proviennent du vice propre de la chose ou de la force majeure, toute clause contraire étant nulle ;
– que par ailleurs, il n’ a pas d’impossibilité d’exécuter séparément les dispositions du jugement concernant chacune des parties;
– que dans ces conditions, le litige ne saurait être considéré comme indivisible.
La notion de bonne administration de la justice est indépendante de celle d’indivisibilité et le moyen tiré de la limitation de l’indemnité légale pour perte ou avarie de la marchandise transportée est, enfin inopérant sur le présent débat.
L’ordonnance sera donc réformée et la caducité limitée aux seuls rapport de M.[W] avec la société Transports Celtic, la procédure d’appel se poursuivant entre M.[W] et les autres parties intimées à la procédure.
*
Suite à cet arrêt sur déféré infirmant l’ordonnance du caducité du 16 juin 2021, la procédure d’appel enrôlée sous le numéro 21/2405 a été réenrôlée sous le nouveau numéro RG 22/1440 qui a été jointe au numéro 22/1465 sous le numéro 22/1440 par une ordonnance du 22 février 2022.
*
Par dernières conclusions en date du 13 octobre 2022, M. [F] [W] demande à la cour :
‘ de juger qu’il justifie de sa qualité de propriétaire de l’immeuble situé [Adresse 1] ;
‘ de réformer l’ordonnance entreprise ;
‘ de déclarer recevables ses demandes en responsabilité et en réparation du préjudice matériel et moral dont il a été victime le 23 juin 2018 ;
‘ de renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille (ex RG 19/8364 – nouvellement RG 22/1440) ;
‘ et de condamner solidairement les intimées à lui verser la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, ceux de la procédure d’incident et de la procédure de déféré.
Par conclusions du 1er septembre 2022, (prises dans la procédure enregistrée sous le numéro RG 21/2405 joint avec le RG 21/2407), la SA Leroy Merlin France demande à la cour :
‘ d’infirmer l’ordonnance entreprise seulement en ce qu’elle a :
– déclaré incompétent le juge de la mise en état pour statuer sur la fin de non recevoir soulevée par la société Leroy Merlin France au visa de l’article L 133-6 al. 1er du code de commerce contre les demandes formées par les consorts [P],
– et en ce qu’elle a déclaré irrecevables les actions en garantie exercées par la société Leroy Merlin France contre la société Colisweb et la société Transports Celtic ;
‘ d’écarter les conclusions de M. [W] du 14 juin 2022 en application de l’article 905-2 al3 du code de procédure civile ;
statuant à nouveau
‘ de dire que M. [W] ne justifie pas de sa qualité de proprétaire et de le déclarer irrecevable en ses demandes ;
‘ de déclarer l’action indemnitaire de M. [W] prescrite en application de l’article L133-6 du code de commerce ;
en toute hypothèse
‘ de déclarer l’action récursoire de la société Leroy Merlin à l’égard de la société Colisweb fondée, et non régie par les articles L 133-6 du code de commerce ;
‘ de dire que la prescription annale des dispositions de l’article L 133-6 du code de commerce n’est pas acquise à l’égard de Colisweb ;
‘ de condamner M. [W] à lui payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais ;
‘ débouter les sociétés Colisweb de toutes ses demandes contre la société Leroy Merlin au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mais également au titre des dépens de l’instance d’appel ;
‘ de condamner M. [W] à garantir la société Leroy Merlin de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle au bénéfice de la société Colisweb ;
Si la cour ne faisait pas droit à l’exception de prescription en retenant le fondement délictuel de l’action,
‘ de renvoyer les parties à la mise en état devant le tribunal judiciaire de Marseille pour conclure sur le fond.
Par conclusions du 28 avril 2022, la société Colisweb demande à la cour :
‘ de statuer ce que de droit sur l’ordonnance du juge de la mise en état en ce qu’elle a déclaré les demandes de M. [W] irrecevables faute de droit d’agir ;
‘ d’infirmer l’ordonnance du juge de la mise en état, en ce qu’il s’est déclaré incompétent pour statuer sur la fin de non recevoir soulevée par la société Leroy Merlin au visa de l’article L 133-6 al. 1er du code de commerce à l’encontre des demandes de M. [W] ;
‘ de se déclarer compétent pour statuer sur cette fin de non recevoir ;
‘ de débouter M. [W] de ses demandes irrecevables pour cause de prescription annale conformément à l’article L133-6 alinéa premier du code de commerce ;
‘ de constater que l’action de la société Leroy Merlin contre la société Colisweb n’a plus d’objet et de l’en débouter ;
‘ à titre subsidiaire, de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a déclaré irrecevables les demandes de la société Leroy Merlin contre Colisweb pour cause de prescription de l’action récursoire conformément à l’article L 133-6 al. 4 du code de commerce ;
‘ de confirmer la recevabilité de l’action en garantie exercée par Colisweb contre Tansports Celtic;
‘ et de condamner la société Leroy Merlin à lui payer la somme de 5000 €, au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l’exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
Motifs
Il convient de relever en premier lieu que la demande d’écarter les conclusions de M. [W] du 14 juin 2022, en application de l’article 905-2 al.3 du code de procédure civile ressortit de la compétenc exclusive de la juridiction du président de la chambre 1.1 de la cour qui devait être saisi d’un incident de la procédure d’appel en ce sens, et qu’à défaut cette prétention excède la compétence de la cour de céans, d’où il suit l’irrecevabilité de cette demande présentée à la cour en sa formation collégiale.
Par l’ordonnance déférée en date du 5 février 2021, le juge de la mise en état a exactement retenu, s’agissant de sa compétence pour statuer sur les fins de non-recevoir :
‘ qu’il résulte de l’article 789 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 1er décembre 2019 que :
« Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(. . .)
6° Statuer sur les fins de non-recevoir.
Lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, le juge de la mise en état statue sur celte question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Toutefois, dans les affaires qui ne relèvent pas du juge unique ou qui ne lui sont pas attribuées, une partie peut s’y opposer. Dans ce cas, et par exception aux dispositions du premier alinéa, le juge de la mise en état renvoie l’affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l’instruction, pour qu’elle statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Il peut également ordonner ce renvoi s’il l’estime nécessaire. La décision de renvoi est une mesure d’administration judiciaire, Le juge de la mise n état ou la formation de jugement statuent sur la question de fond et sur la fin de non-recevoir par des dispositions distinctes dans le dispositif de l’ordonnance ou du jugement. La formation de jugement statue sur la fin de non-recevoir même si elle n’estime pas nécessaire de statuer au préalable sur la question de fond. Le cas échéant.
elle renvoie l’affaire devant le juge de la mise en état.
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu’elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état ».
‘ que selon l’article 55 du décret du 11 décembre 2019 précité, les dispositions de l’article 789 qui résultent de ce décret entrent en vigueur le 1er janvier 2020 et sont applicables aux instances en cours à cette date, mais par dérogation, les dispositions des 3° et 6° de cet article qui résultent du décret précité ne sont applicables qu’aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020;
‘ qu’en l’espèce, les assignations en intervention forcée aux fins de garantie, qui sont autonomes de l’action principale, ont été introduites après le 1er janvier 2020 ; que le juge de la mise en état est donc bien compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir opposables en tout état de cause invoquées par la société Colisweb et par la société Transports Celtic, suite aux assignations en intervention forcée aux fins de garantie qui leur ont été signifiées par exploits d’huissier de justice des 18 février 2020, 24 février 2020 et 11 mars.2020 ;
‘ et qu’en revanche, le juge de la mise en état n’est donc pas compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Leroy Merlin France à l’encontre des demandes principales formées contre elle par Mme [S] et M. [W].
Compte tenu de ce qui précède, le juge de la mise en état a statué sur les fins de non-recevoir opposées par la société Colisweb tirées du défaut de qualité et de la prescription prévue à l’alinéa 1 er de l’article L.133-6 du code de commerce, et visant à déclarer irrecevables les demandes formées par les consorts [P].
En cause d’appel, M. [W] justifie de sa qualité de propriétaire, par la production de son titre de propriété, l’acte de vente immobilière à son profit. L’ordonnance déférée sera par conséquent infirmée, en ce qu’elle a déclaré irrecevables ses demandes en responsabilité et en indemnisation de ses préjudices matériel et moral, faute de qualité à agir.
La société Colisweb (et la société Transports Celtic) ne sont pas parties au contrat de vente conclu en 2010 entre, d’une part, la société Leroy Merlin et, d’autre part, les consorts [P], dont l’échange de mobilier de cuisine convenu le 22 juin 2018 n’est qu’une modalité d’exécution de l’obligation de délivrance du vendeur.
Le juge de la mise en état retient à bon droit que la société Leroy Merlin France, la société Colisweb et la société Transports Celtic sont convenues de ce qu’elles étaient unies par un contrat qu’elles qualifiaient tantôt de contrat de transport, tantôt de contrat de commission de transport ; et que dès lors, la société Leroy Merlin France bénéficie d’un droit à réparation du préjudice qu’elle a subi lors de l’exécution de la prestation de transport contre le transporteur ou le sous-traitant de celui-ci.
Le délai qui encadre l’exercice de son droit issu du contrat de transport est prévu à l’article L.133-6 du code de commerce qui prévoit que :
« Les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d’un an, sans préjudice des cas de fraude ou d’infidélité.
Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou Le commissionnaire que contre l’expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celle qui naissent des dispositions de l’article l269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d’un an.
Le délai de ces prescriptions est compté, dans le cas de perte totale, du jour où la remise de la marchandise aurait dû être effectuée, et, dans tous les autres cas, du jour où la marchandise aura été remise ou offerte au destinataire.
Le délai pour intenter chaque action récursoire est d’un mois. Cette prescription ne court que du jour de l’exercice de l’action contre le garanti.
Dans le cas de transports faits pour le compte de l’Etat, la prescription ne commence à courir que du jour de la notification de la décision ministérielle emportant liquidation ou ordonnancement définitif».
En l’espèce, l’action fondée sur le contrat de vente engagée par les consorts [P] contre la société Leroy Merlin France, a été introduite par exploit d’huissier en date du 10 juillet 2019.
Suite à cette assignation, la société Leroy Merlin, en sa qualité de donneur d’ordre, recherche la responsabilité de la société Colisweb, dans le cadre du contrat de transport ou de commission de transport qui les lie et qui, elle, est soumise à prescription annale conformément à l’article L 133-6 du code de commerce, étant observé que la preuve d’un lien direct entre les consorts et le transporteur ne résulte d’aucun élément et que dès lors, la société Leroy-Merlin n’oppose pas utilement aux demandes de M. [W], le délai de prescription de l’article L 133-6 du code de commerce.
La société Leroy Merlin France exerçant cette action en garantie autonome, fondée non sur le contrat de vente et ses modalités d’exécution, mais sur son contrat de transport la liant à Colisweb, devait donc l’engager dans le délai d’un an, lequel court à compter du 10 juillet 2019, date à laquelle la société Leroy-Merlin a pu agir, ayant connu les demandes formées contre elle, en application de l’article 2224 du code civil, et non à compter de la livraison intervenue le 23 juin 2018, de sorte que le délai de prescription de son recours en garantie n’a pas expiré le 23 juin 2019, pendant qu’elle était dans l’impossibilité d’agir contre son transporteur, mais le 10 juillet 2020.
Elle a assigné le 18 février 2020, dans le délai requis et son recours en garantie n’est donc pas prescrit.
Il convient, en conséquence, faisant droit aux demandes que la société Leroy-Merlin adresse à la cour, de déclarer recevable son action aux fins d’être relevée et garantie qu’elle a engagée contre la société Colisweb.
L’ordonnance déférée sera donc réformée sur ce point, laquelle avait par ailleurs dit recevable, l’action en garantie engagée par la société Colisweb contre la société Transports Celtic, suivant exploit d’huissier de justice en date du 11 mars 2020, formée moins d’un mois à compter de l’action exercée contre la société Colisweb.
Il n’y a pas lieu de disjoindre l’instance enrôlée sous le numéro 20/3710 et l’ordonnance sera réformée également sur ce point.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Dit que la demande de la société Leroy-Merlin d’écarter les conclusions de M. [W] du 14 juin 2022 en application de l’article 905-2 al3 du code de procédure civile excède la compétence de la cour,
Infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a dit que M. [F] [W] n’avait pas qualité et intérêt à l’action engagée contre la société Leroy Merlin-France, en ce qu’elle a déclaré irrecevable l’action en garantie exercée par la société Leroy Merlin contre la société Colisweb,
en ce qu’elle a ordonné disjonction de l’affaire enrôlée 20/3710, et condamné M. [W] aux dépens de l’instance éteinte,
Confirme pour le surplus l’ordonnance déférée,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d’intérêt à agir de M. [F] [W], et de la prescription de l’action engagée par M. [F] [W],
Déclare l’action de M. [W] dirigée contre la société Leroy-Merlin recevable,
Déclare recevable et non prescrit l’appel en garantie dirigé par la société Leroy Merlin contre la société Colisweb,
Dit n’y avoir lieu à disjonction des instances enrôlées sous les numéros 20/3710 d’une part et des instances enrôlées sous le numéro 19/8364 et numéros 20/2787 suivis sous le numéro 19/ 8364 d’autre part,
Renvoie la cause des parties devant le le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille,
Dit que chacune des parties supportera la charge de ses dépens d’incident et d’appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu de faire application de ce texte.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT