Nuisances sonores : décision du 9 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/10153

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Nuisances sonores : décision du 9 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/10153
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 3

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/10153 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYQV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2020 -Juge des contentieux de la protection de BOBIGNY – RG n° 1120000051

APPELANTE

Madame [Y] [H]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Alice ANTOINE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0441

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/017725 du 03/05/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DE [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l’AARPI Dominique OLIVIER – Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

INTERVENANT FORCE

Monsieur [W] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Assignation aux fins d’appel provoqué en date du 28 octobre 2021 remis à étude

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

François LEPLAT, président

Anne-Laure MEANO, président

Aurore DOCQUINCOURT, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

– rendu par défaut

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Anne-Laure MEANO au lieu et place de François LEPLAT, Président de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 1er août 2014, l’Office public de l’habitat de [Localité 3] a consenti un bail d’habitation à Mme [Y] [H] et M. [W] [K] portant sur des locaux à usage d’habitation situés [Adresse 1], à [Localité 3], moyennant un loyer mensuel de 293.28 euros.

Par acte d’huissier de justice du 19 décembre 2019, l’Office public de l’habitat de [Localité 3], a saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de résiliation judiciaire du contrat de bail pour violation de l’obligation contractuelle de jouissance paisible des locaux loués, expulsion sans délai, condamnation au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation.

À l’audience, l’Office public de l’habitat de [Localité 3] s’est désisté de ses demandes concernant M. [W] [K], qui a quitté les locaux loués.

Bien que régulièrement assigné à étude d’huissier, et M. [W] [K] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.

Par jugement réputé contradictoire entrepris du 15 décembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny a ainsi statué :

Constate le désistement de l’Office public de l’habitat de [Localité 3] concernant les demandes formulées à l’encontre de M. [W] [K] ;

Prononce la résiliation judiciaire du bail conclu le 1er août 2014, entre l’Office public de l’habitat de [Localité 3] et Mme [Y] [H] et M. [W] [K], ainsi que son avenant du 8 octobre 2019, concernant les locaux à usage d’habitation situés [Adresse 1], à [Localité 3] ;

Dit que Mme [Y] [H] est occupante sans droit ni titre à compter de la présente décision;

Ordonne à Mme [Y] [H] de libérer de sa personne, de ses biens, ainsi que de tous occupants de son chef, les locaux à usage d’habitation situés [Adresse 1], à [Localité 3] ;

Dit qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier ;

Rappelle que l’expulsion ne peut avoir lieu qu’hors période hivernale et à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux conformément aux dispositions des articles L. 412-1 et suivants, R. 411-1 et suivants, R. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

Dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;

Condamne Mme [Y] [H] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au loyer et aux charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail ;

Dit que cette indemnité d’occupation, qui se substitue au loyer dès la présente décision, est payable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, jusqu’à libération effective des lieux et remise des clés à la bailleresse ou à son mandataire,

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne Mme [Y] [H] aux dépens ;

Condamne Mme [Y] [H] à payer à l’Office public de l’habitat de [Localité 3] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l’appel interjeté le 31 mai 2021 par Mme [Y] [H]

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 30 juillet 2021 par lesquelles Mme [Y] [H] demande à la cour de :

Vu les articles L412-2 du code des procédures civiles d’exécution,

Dire Mme [Y] [H] recevable et bien fondée en son appel.

Infirmer le jugement rendu le 15/12/2020 par le Juge des Contentieux de la protection en ce qu’il a

– ” prononcé la résiliation du bail conclu le 01/08/2014 (…) ainsi que son avenant du 08/10/2019 (…)

– dit que Mme [H] est occupante sans droit ni titre (…)

– ordonne à Mme [H] de libérer de sa personne de ses biens(…) les locaux

– dit qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion (…)

– dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et suivants du CPCE

– condamne Mme au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges (…) jusqu’à libération des lieux et remises des clés

– rejette le surplus des demandes

– condamne Mme aux dépens et à 500 euros au titre de l’article 700 du CPC

– ordonne l’exécution provisoire ”

Statuant à nouveau :

AU PRINCIPAL

Rejeter l’Office public de l’habitat de [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes de résiliation du bail, d’expulsion, de condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation et d’article 700 du code de procédure civile.

A TITRE SUBSIDIAIRE

Accorder à Mme [H] les plus larges délais pour quitter les lieux et par exemple trois ans à compter de la décision à intervenir,

Confirmer le jugement déféré pour le surplus,

Débouter l’Office public de l’habitat de [Localité 3] de ses éventuelles demandes, fins et conclusions contraires.

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 25 octobre 2021 au terme desquelles l’Office public de l’habitat de [Localité 3] demande à la cour de :

Dire et juger Mme [H] mal fondée en son appel ;

l’en débouter

Confirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions

– Prononcer la résiliation judiciaire du bail en date du 1er août 2014 relatif à un appartement situé [Adresse 1] aux torts exclusifs de M. [W] [K] et Mme [Y] [H]

– Ordonner l’expulsion immédiate de M. [W] [K] et Mme [Y] [H] et tous occupants de leur chefs , et ce, avec l’assistance du commissaire de police et de la force publique et d’un serrurier, s’il y a lieu.

– Supprimer le bénéfice, au profit de M. [W] [K] et Mme [Y] [H] du délai de deux mois prévu à l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution.

– Ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde meubles qu’il désignera ou tel autre lieu au choix du bailleur et ce en garantie de toutes sommes qui pourront être dues, aux frais, risques et périls de M. [W] [K] et Mme [Y] [H] .

– Condamner M. [W] [K] et Mme [Y] [H] à payer à la SA d’HLM Office public de l’habitat de [Localité 3] une indemnité d’occupation mensuelle de 657euros augmentée des charges et ce, jusqu’à parfaite libération des locaux par remise des clés, un procès-verbal d’expulsion ou de reprise.

– Condamner M. [W] [K] et Mme [Y] [H] à payer à la SA d’HLM Office public de l’habitat de [Localité 3] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance outre la somme de 800 euros en cause d’appel en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens en ce compris le coût de la sommation du 18 février 2019.

Par acte d’huissier, l’Office public de l’habitat de la ville de [Localité 3] a assigné M. [W] [K] en intervention forcée le 28 octobre 2021 à l’étude.

Il n’a pas constitué avocat.

L’appel provoqué et les conclusions de Mme [H] et de l’Office public de l’habitat de [Localité 3] lui ont été signifiés à l’étude le 28 octobre 2021.

L’acte de signification de la déclaration d’appel faisait mention de la formule selon laquelle l’intimé était tenu de constituer avocat faute de quoi, en application des articles 902 et 909 du code de procédure civile, un arrêt pourrait être rendu sur les seuls éléments fournis par l’adversaire et ses écritures pourraient être déclarées irrecevables.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions remises au greffe et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résiliation du bail

Mme [H] demande l’infirmation du jugement en faisant valoir , comme devant le premier juge, que les incidents relevés par le bailleur ont eu lieu dans un contexte de violences conjugales qui ont cessé depuis plusieurs mois, que l’immeuble est particulièrement mal isolé, que la taille de son logement est inadaptée à sa composition familiale et qu’ayant des enfants elle occasionne nécessairement plus de bruit que ses voisins.

Elle ne produit aucune pièce à l’appui de son argumentation, qui n’est étayée d’aucun moyen de droit.

La société d’HLM Office public de l’habitat de [Localité 3] demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Aux termes de l’article 1184 du code civil dans sa version applicable au contrat litigieux (avant 2016) :

” La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.”

L’obligation de jouissance paisible du lieu par le locataire est prévue par les articles 1728 du code civil et 7 b) de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs; le locataire ne doit pas causer de troubles ou nuisances aux autres locataires de l’immeuble ou au voisinage immédiat, et il ne doit pas altérer par des dégradations ou des pertes le bien loué, ni le transformer. De manière générale, le preneur est tenu d’user de la chose louée « en bon père de famille” et “raisonnablement”; il doit s’abstenir de tout comportement pouvant nuire au logement donné à bail et à la tranquillité des lieux dans lesquels s’exécute le contrat de bail.

Il s’ensuit que le juge peut prononcer la résiliation d’un bail dès lors qu’il est établi qu’un locataire a gravement manqué à ses obligations contractuelles; sa bonne foi dans l’exécution du contrat peut être prise en compte.

La cour d’appel qui statue sur le prononcé de la résiliation d’un bail à usage d’habitation doit apprécier la situation au jour de sa décision; les manquements établis devant être suffisamment graves pour justifier la résiliation, il convient , le cas échéant, de tenir compte de toutes les circonstances de la cause intervenues jusqu’au jour de la décision.

C’est par des motifs exacts et pertinents, auxquels il convient de se référer, qui ne sont pas utilement contredits par l’appelante laquelle ne produit en cause d’appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l’appréciation faite par le tribunal, et que la cour adopte, que le premier juge a retenu que :

-plusieurs salariés du bailleur ont porté plainte le 4 juin 2018 pour avoir été insultés et menacés par la locataire ;

-de très nombreuses plaintes et mains courantes ont été déposées par des voisins, qui en ont alerté le bailleur, entre mars et octobre 2019, pour dénoncer des nuisances sonores importantes et régulières, des incivilités (crachats, jet de cigarette allumée sur les passants), des insultes et des menaces de mort de sa part ;

-un rapport d’enquête diligentée en juin 2019 par les services de la ville de [Localité 3] a également conclu que ces nuisances étaient avérées et que toutes les tentatives de conciliation pour assurer un usage paisible des lieux ont été vaines ;

-de nouvelles pétitions des voisins, plaintes et mains courantes ont à nouveau fait état de nuisances sonores, de jets d’objets sur les passants, de violences verbales et de menaces de mort courant 2020 et ce alors que le bailleur avait rappelé aux locataires leurs obligations contractuelles et que Mme [H] avait signé une charte de bon comportement avec le directeur général de l’office public de l’habitat de [Localité 3] en mai 2019,

Et en a déduit que ces troubles de voisinage répétés depuis plusieurs années, impliquant des comportements violents à l’encontre des autres occupants de l’immeuble constituent un manquement grave de la locataire à son obligation contractuelle de jouir paisiblement des lieux qui s’étend tant à l’appartement loué qu’aux parties communes dont il dépend.

La cour ajoute qu’il résulte d’un courriel adressé par un voisin au bailleur le 4 janvier 2022 que les troubles causés par la locataire se sont poursuivis.

Il résulte en outre des pièces produites par le bailleur que l’expulsion de Mme [H] a eu lieu le 6 mai 2022.

Au vu de l’ensemble de ces éléments et étant observé que Mme [H], qui n’a pas établi de conclusions récapitulatives actualisées, ne demande pas la réintégration dans les lieux, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions sauf à constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur l’expulsion et les mesures subséquentes, pas plus que sur la demande de délai d’expulsion formulée à titre subsidiaire par Mme [H] (étant observé qu’elle ne produisait pas davantage de pièces à l’appui de cette demande).

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Le sens de la présente décision ne justifie pas d’infirmer le jugement en ce qui concerne les dépens et frais de procédure de première instance.

S’agissant de l’instance d’appel, il est équitable d’allouer à l’Office public de l’habitat de [Localité 3] une indemnité de procédure de 800 euros.

La demande d’inclure dans les dépens d’appel, auquel Mme [H] sera condamnée, “la sommation du 18 février 2019” sera rejetée aucune pièce visée dans les bordereaux de communication ne correspondant à un tel acte.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut,

Confirme, en ses dispositions frappées d’appel, le jugement entrepris, sauf à constater que l’expulsion a déjà eu lieu;

Et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à statuer sur l’expulsion et les mesures subséquentes, les locaux ayant déjà été libérés ;

Condamne Mme [Y] [H] à payer à l’Office public de l’habitat de [Localité 3] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [Y] [H] aux dépens d’appel,

Rejette toutes autres demandes.

La Greffière Pour le Président empêché

 


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