Nuisances sonores : décision du 9 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lyon RG n° 23/01706

·

·

Nuisances sonores : décision du 9 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lyon RG n° 23/01706
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

MINUTE N° :
ORDONNANCE DU :09 Janvier 2024
DOSSIER N° :N° RG 23/01706 – N° Portalis DB2H-W-B7H-YMHO
AFFAIRE :SELARL AJ PARTENAIRES C/ S.A.R.L. CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN ET ASSOCIES, S.A.R.L. CLEMATIS, S.A. REY, S.A.R.L. ECHO ACOUSTIQUE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

PRÉSIDENT :Monsieur Victor BOULVERT, Juge

GREFFIER :Madame Catherine COMBY

PARTIES :

DEMANDERESSE

SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Stéphane BONNET de la SELAS LEGA-CITE, avocats au barreau de LYON

DEFENDERESSES

S.A.R.L. CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN ET ASSOCIES,
dont le siège social est sis [Adresse 8]
représentée par Maître Frédérique BARRE de la SELARL BARRE – LE GLEUT, avocats au barreau de LYON

S.A.R.L. CLEMATIS,
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Maître Frédérique BARRE de la SELARL BARRE – LE GLEUT, avocats au barreau de LYON

S.A. REY,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Frédéric PIRAS de la SELARL PVBF, avocats au barreau de LYON

S.A.R.L. ECHO ACOUSTIQUE,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Sylvie BERTHIAUD de la SELARL BERTHIAUD ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Débats tenus à l’audience du 14 Novembre 2023
Délibéré prorogé au 9 janvier 2024

Notification le
à :
Maître Frédérique BARRE – 42, Expédition
Maître Sylvie BERTHIAUD – 711, Expédition et grosse
Maître Stéphane BONNET – 502, Expédition et grosse
Maître Frédéric PIRAS – 704, Expédition
+ service suivi des expertises, régie et expert, Expédition

EXPOSE DU LITIGE

Par acte en date du 27 octobre 2017, la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 a acquis de locaux d’activité désaffectés sis [Adresse 6]) et a engagé une opération de réhabilitation et construction les concernant, selon permis de construire délivré par arrêté daté du 07 mars 2018, modifié le 22 juillet 2020.

Dans le cadre de ces travaux, elle a notamment fait appel à :
la SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES, en qualité de maître d’œuvre ;
la SARL CLEMATIS, en qualité de bureau d’études fluides et thermiques ;
la SA REY, qui s’est vu confier le lot de travaux n° 20 « Chauffage / Rafraichissement / Ventilation ».

Quatre unités extérieures réversibles de chauffage et climatisation, initialement destinées à être implantées en toiture, ont été installées contre le mur séparatif situé entre le fonds de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 et la parcelle cadastrée section BC, n° [Cadastre 5].

Par acte en date du 1er mars 2019, la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 a consenti à POLE EMPLOI AUVERGNE RHONE ALPES un bail commercial en l’état futur d’achèvement à effet au 30 septembre 2019 portant sur les locaux en cours de réhabilitation.

Par acte authentique en date du 17 juin 2019, la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 a vendu en l’état futur d’achèvement, à la SCI ROUTE DE VIENNE 74, les locaux en cours de réhabilitation.

Au mois de juillet 2019, Monsieur [H] [U] et Madame [D] [M], son épouse (les époux [U]) ont acquis la maison d’habitation sise [Adresse 4]), parcelle cadastrée section BC, n° [Cadastre 5], contiguë du fonds accueillant les locaux à usage professionnel en cours de réhabilitation.

Les travaux de réhabilitation ont été réceptionnés le 30 septembre 2019 et les biens ont été livrés à la SCI ROUTE DE VIENNE 74 le même jour.

Après la mise en fonctionnement des groupes extérieurs, les époux [U] se sont plaints de nuisances sonores et une expertise amiable a été réalisée à la demande de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 par la SARL ECHO ACOUSTIQUE. Cette dernièrement a établi un rapport en date du 24 septembre 2021, confirmant l’existence de nuisances acoustiques diurnes et nocturnes dépassant les seuils réglementaires et leur imputabilité aux groupe extérieurs.

La SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 a été dissoute de manière anticipée par décision du 31 aout 2022 et radiée du RCS le 24 avril 2023.

Par ordonnance en date du 12 juillet 2023, le Président du Tribunal de commerce de LYON a désigné la SELARL AJ PARTENAIRES en qualité de mandataire ad hoc pour la représenter dans le cadre du litige l’opposant aux époux [U].

Par ordonnance en date du 23 octobre 2023 (RG 23/00519), le juge des référés près le Tribunal judiciaire de LYON a ordonné, à la demande des époux [U], une expertise judiciaire au contradictoire de
la SELARL AJ PARTENAIRES en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 ;
la SCI ROUTE DE VIENNE 74 ;
POLE EMPLOI AUVERGNE RHONE ALPES ;
s’agissant des nuisances acoustiques dénoncées, et en a confié la réalisation à Monsieur [X] [Z], expert.

Par actes de commissaire de justice en date du 21 septembre 2023, la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 a fait assigner en référé
la SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES ;
la SARL CLEMATIS ;
la SA REY ;
la SARL ECHO ACOUSTIQUE ;
aux fins de leur rendre communes et opposables les opérations d’expertise diligentées par Monsieur [X] [Z].

A l’audience du 14 novembre 2023, la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2, représentée par son avocat, a demandé de :
déclarer commune et opposable aux parties assignées l’expertise judiciaire actuellement en cours sous l’égide de Monsieur [X] [Z] ;
débouter la SARL ECHO ACOUSTIQUE de sa demande de mise hors de cause ;
débouter la SARL ECHO ACOUSTIQUE de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
réserver les dépens.

Au soutien de sa demande, elle expose que s’il est vrai que la SARL ECHO ACOUSTIQUE n’est pas intervenue lors des travaux de construction, sa participation aux opérations d’expertise s’imposerait au vu de ses rapports des 24 septembre 2021, 05 novembre 2021 et 1er avril 2022, afin qu’elle puisse éclairer l’expert et les parties sur les mesures réalisées et les solutions proposées.

La SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES, représentée par son avocat, a formulé des protestations et réserves.

La SARL CLEMATIS, représentée par son avocat, a formulé des protestations et réserves.

La SA REY, représentée par son avocat, a formulé des protestations et réserves.

La SARL ECHO ACOUSTIQUE, représentée par son avocat, a demandé au juge de :
à titre principal, rejeter la demande de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 ;
à titre subsidiaire, lui donner acte de ses protestations et réserves ;
en tout état de cause, condamner la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 à lui payer la somme de 1 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Elle avance avoir établi un rapport d’étude acoustique puis une étude d’impact acoustique portant sur les deux solutions de remédiation envisagées par le maitre d’œuvre, mais qu’aucune reprise n’a été exécutée. Elle souligne ne pas être intervenue lors des travaux de construction et n’avoir aucune part dans la survenance des troubles du voisinage. Elle en conclut qu’il n’existe aucun motif légitime de lui rendre commune l’expertise en cours, alors que sa responsabilité ne serait pas susceptible d’être engagée et qu’aucun litige ne serait en germe à son égard.

A l’issue de l’audience, les parties ont été informées de la mise en délibéré de la décision à la date du 19 décembre 2023, par mise à disposition au greffe. Le délibéré a été prorogé au 9 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en intervention forcée aux opérations d’expertise

Aux termes de l’article 145 du Code de procédure civile : « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Pour ordonner une mesure d’instruction sur le fondement de l’art. 145, le juge des référés doit établir l’existence d’un litige potentiel susceptible d’opposer les parties (Civ. 2, 16 novembre 2017, 16-24.368).

Par ailleurs, l’appréciation de l’existence d’un motif légitime d’ordonner une mesure d’instruction relève du pouvoir souverain du juge, qui peut retenir, pour rejeter la demande, que la mesure serait inutile (Civ. 2, 20 mars 2014, 13-14.985). Tel est notamment le cas lorsque l’action au fond est manifestement irrecevable ou vouée à l’échec (Com., 18 janvier 2023, 22-19.539 ; Civ. 2, 5 octobre 2023, 23-13.104).

L’article 66 du Code de procédure civile prévoit par ailleurs : « Constitue une intervention la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires. »

Il est complété par l’article 331 du Code de procédure civile : « Un tiers peut être mis en cause […] par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement.
Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense. »

En l’espèce, la Demanderesse verse aux débats le contrat conclu avec la SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES, la lettre de la SARL CLEMATIS en date du 20 juin 2017 et le marché de travaux de la SA REY en date du 04 janvier 2019, démontrant leur intervention au cours des travaux ayant conduit à l’installation des blocs extérieurs à proximité du mur séparatif.

Il est par ailleurs constant que la SARL ECHO ACOUSTIQUE a établi :
un rapport d’étude acoustique en date du 24 septembre 2021 ;
un rapport d’étude acoustique en date du 05 novembre 2021 ;
une étude d’impact acoustique en date du 1er avril 2022 ;
mais n’est pas intervenue à l’occasion des travaux susceptibles d’être à l’origine du trouble acoustique anormal du voisinage.

Dès lors, toute action tendant à engager sa responsabilité au titre des nuisances acoustiques subies par les époux [U] serait manifestement vouée à l’échec puisqu’elles ne sauraient lui être imputées.
Or, l’expertise en cours ne porte que sur ces nuisances.

Il s’ensuit qu’il est inutile que la SARL ECHO ACOUSTIQUE soit partie à l’expertise puisque la mesure d’instruction n’est pas de nature à établir ou conserver la preuve d’un fait dont pourrait dépendre un litige à son encontre.

En outre, l’argument de la Demanderesse selon lequel il serait opportun qu’elle explique les résultats de ses études à l’expert ne saurait constituer un motif légitime de lui déclarer l’expertise commune, dans la mesure où Monsieur [X] [Z] peut, sans qu’elles ne soient parties à l’expertise, recueillir des informations orales ou écrites de toutes personnes, par application des dispositions de l’article 243 du code de procédure civile.

Au vu des éléments susvisés et notamment de l’implication éventuelle de la SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES, la SARL CLEMATIS et la SA REY dans les nuisances sonores faisant l’objet de l’expertise en cours, il existe un motif légitime de leur étendre les opérations d’expertise, afin d’établir ou de conserver, à leur contradictoire, la preuve des faits tenant à la réalité, la nature, l’étendue et aux causes des dits désordres et de permettre aux autres parties d’apprécier, avant d’intenter un procès, son opportunité au regard des moyens de droit et de fait qui pourraient être invoqués.

A contrario, la Demanderesse ne démontre pas l’existence d’un motif légitime de rendre l’expertise commune à la SARL ECHO ACOUSTIQUE.

Par conséquent, il conviendra de mettre la SARL ECHO ACOUSTIQUE hors de cause et de déclarer les opérations d’expertises diligentées par Monsieur [X] [Z] communes et opposables aux autres Défenderesses.

Sur les autres dispositions de la décision

Sur les dépens

Aux termes de l’article 696, alinéa 1, du code de procédure civile : « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. »

En l’espèce, il est rappelé que le défendeur à la demande d’expertise fondée sur l’article 145 du Code de procédure civile ne peut être qualifié de perdant au sens des articles 696 et 700 même code (Civ. 2, 10 février 2011, 10-11.774).

Par conséquent, la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 sera provisoirement condamnée aux entiers dépens.

Sur les frais irrépétibles

En vertu de l’article 700 du code de procédure civile: « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. […] Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. »
En l’espèce, la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2, condamnée aux dépens et déboutée de sa demande tendant à rendre l’expertise commune à la SARL ECHO ACOUSTIQUE, sera condamnée à lui verser une somme qu’il est équitable de fixer à 720,00 euros.

Sur l’exécution provisoire

Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile : « Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance provisoire rendue en premier ressort, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

METTONS hors de cause la SARL ECHO ACOUSTIQUE ;

DECLARONS communes et opposables à
la SARL CABINET D’ARCHITECTES P. TASSIN et ASSOCIES ;
la SARL CLEMATIS ;
la SA REY ;
les opérations d’expertise diligentées par Monsieur [X] [Z] en exécution de l’ordonnance du 23 octobre 2023, enregistrée sous le numéro RG 23/00519 ;

DISONS que la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 leur communiquera sans délai l’ensemble des pièces déjà produites par les parties ainsi que les notes rédigées par l’expert, afin de les mettre en mesure de présenter leurs observations sur les opérations auxquelles il a déjà été procédé ;

DISONS que Monsieur [X] [Z] devra convoquer les parties défenderesses auxquelles l’expertise est rendue commune et opposable dans le cadre des opérations à venir ;

FIXONS à 2 000,00 euros le complément de provision à valoir sur la rémunération de l’expert que la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 devra consigner à la Régie d’avances et de recettes du Tribunal judiciaire de LYON, avant le 29 février 2024 ;

DISONS qu’à défaut de versement complet de la consignation dans le délai requis, l’extension de la mission sera caduque et il pourra être tiré toute conséquence de l’abstention ou du refus de consigner dans le délai imparti ;

DISONS que dans l’hypothèse où la présente décision serait portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ces dispositions seront caduques ;

CONDAMNONS provisoirement la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2 aux dépens de la présente instance, étant rappelé que le juge qui statue sur un litige peut condamner les parties aux dépens d’une autre instance, s’il s’agit de frais relatifs à une instance ayant préparé celle dont il est saisi ;

CONDAMNONS la SELARL AJ PARTENAIRES, en qualité de mandataire ad hoc de la SNC LA COMPAGNIE DE [Localité 9] 2,à payer à la SARL ECHO ACOUSTIQUE la somme de 720,00 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELONS que la présente décision est, de droit, exécutoire à titre provisoire.

Fait à LYON, le 9 janvier 2024.

Le Greffier Le Président

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x