Nuisances sonores : décision du 7 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/13458

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Nuisances sonores : décision du 7 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/13458
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 07 DÉCEMBRE 2023

N° 2023/ 398

Rôle N° RG 22/13458 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKEPC

[U] [F]

C/

S.A. UNICIL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Anna ROSSO ROIG

Me Brice TIXIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Président du TJ de MARSEILLE en date du 01 Juillet 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/04468.

APPELANTE

Madame [U] [F]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022-7980 du 14/10/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le 04 Février 1975 à [Localité 3]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Anna ROSSO ROIG, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMEE

S.A. UNICIL, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Brice TIXIER, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 11 Octobre 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Décembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Décembre 2023,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 03 avril 2017 à effet à la même date, la SA PHOCEENNE D’HABITATIONS, aux droits de laquelle vient la SA UNICIL, a donné à bail à Madame [U] [F] un appartement n° 54 situé [Adresse 4] à [Localité 3], moyennant un loyer mensuel de 625,13 euros, majoré d’une provision sur charges de 105,56 euros.

Par acte sous seing privé du 03 mai 2017, le même bailleur a donné à bail à la même locataire un garage accessoire au logement, situé dans la même résidence marseillaise, moyennant un loyer mensuel de 51,55 euros, majoré de 2, 35 euros de provisions sur charges.

Par acte du 11 août 2021, la société UNICIL a fait assigner Madame [F] aux fins principalement de voir prononcer la résiliation du bail, de l’expulser et de la condamner à une indemnité d’occupation, au motif de manquements répétés de cette dernière à ses obligations contractuelles.

Par jugement contradictoire du premier juillet 2022, le juge des contentieux de la protection de Marseille a :

– déclaré 1’action recevable,

– prononcé la résiliation du bail conclu entre la SA HLM UNICIL et Madame [U] [F]

– ordonné à Madame [U] [F] de libérer les locaux de sa personne et de ses biens et de tous occupants de son fait ;

– dit qu’à défaut de départ volontaire des lieux deux mois après notification du commandement d’avoir à quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion et celle de tous occupants de son fait avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, si besoin est et au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais de l’expulsée dans tel garde-meuble désigné par elle ou à défaut par l’huissier en charge des opérations

– condamné Madame [U] [F] à payer à la SA HLM UNICIL une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l’absence de résiliation du bail, jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux, et payable à compter du 3 juin 2022 ;

– fixé cette indemnité d’occupation à la somme de 759,60 euros ;

– rappelé que cette indemnité n’est pas révisable ;

– condamné Madame [U] [F] à payer à la SA UNlClL la somme de 831,41€ arrêtée au 2 juin 2022, loyer de mai 2022 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2021, date de l’assignation.

– condamné Madame [U] [F] à payer à la SA HLM UNICIL la somme de 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamné Madame [U] [F] aux dépens de l’instance ;

– rappelé que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit ;

– dit qu’il n’y a pas lieu de l’écarter ;

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le premier juge a prononcé la résiliation judiciaire du bail en évoquant notamment les manquements graves et répétés de Madame [F] à son obligation d’usage paisible des lieux loués. Il a également condamné Madame [F] à un arriéré locatif.

Le 11 octobre 2022, Madame [F] a relevé appel de cette décision en ce qu’elle prononce la résiliation du bail, ordonne son expulsion et la condamne à une indemnité d’occupation et une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La SA UNICIL a constitué avocat.

Par conclusions notifiées le 27 septembre 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [F] demande à la cour :

– d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle prononce la résiliation du bail, ordonne son expulsion et la condamne à une indemnité d’occupation et à une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens et en ce qu’elle rappelle que l’exécution provisoire est de droit

– de rejeter la demande de résiliation

– de rejeter la demande tendant à la voir expulser et à la voir condamner à une indemnité d’occupation

– de condamner la SA UNICIL à verser la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Elle conteste tout trouble anormal du voisinage et relève que son bailleur ne démontre pas qu’elle serait à l’origine des nuisances qui lui sont reprochés. Elle ajoute que pour certaines d’entre elles, à supposer qu’il soit démontré qu’elle ou sa fille en soit l’auteur, n’est pas rapportée la preuve du caractère habituel ou excessif ou anormal du trouble dénoncé.

Elle estime que la dette de charges n’est pas justifiée. Elle ajoute avoir versé la somme de

831,41 euros et être en attente de l’aide du fonds social au logement. Elle indique que sa dette locative ne justifie pas une demande de résiliation de bail et relève que les charges sollicitées ne sont pas démontrées.

Par conclusions notifiées le 07 mars 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, la SA UNICIL demande à la cour :

– de confirmer le jugement déféré,

– de condamner Madame [F] à lui verser la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

– de condamner Madame [F] aux dépens.

Elle soutient que Madame [F] viole régulièrement et en dépit de mises en demeure son obligation d’usage paisible des lieux loués. Elle fait état d’un comportement irresponsable et incompatible avec la vie en communauté de la locataire depuis plusieurs années.

Elle évoque ainsi des dépôts de détritus et d’encombrants dans les parties communes et des nuisances sonores.

Elle ajoute que Madame [F] manque également à son obligation de paiement du loyer et des charges.

MOTIVATION

Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. Dès lors, la cour n’a pas à statuer sur la demande d’irrecevabilité de la demande de l’intimée évoquée par l’appelante qui n’a pas repris cette prétention dans son dispositif.

Selon l’article 7 de la loi du 06 juillet 1989, le locataire est obligé d’user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location. L’article 1728 du code civil dispose que le locataire est tenu d’user de la chose louée raisonnablement.

Il est également obligé, selon les mêmes articles, de payer ses loyers et charges aux termes convenus.

Selon l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du bail, la SA UNICIL produit aux débats :

– des lettres qu’elle a envoyées à Madame [F] aux termes desquelles elle lui indique avoir été informée de nuisances qui ‘émaneraient, semble-t-il’ de son logement (lettres des 31 mai 2018 et 29 janvier 2019) et avoir appris que sa fille occupait des garages dont elle n’était pas locataire avec des déchets laissés au sol (lettre du 11 février 2020)

– des lettres qu’elle a envoyées à Madame [F] faisant état des doléances du syndic de copropriété (lettres des 07 août 2019, 05 février 2020, 06 janvier 2021, 08 avril 2021, 10 mai 2021)

– la convocation à une assemblée générale des copropropriétaires pour habiliter le syndic à agir en justice à l’encontre de la SA UNICIL pour trouble de jouissance commis par la locataire de l’appartement 54.

Ces pièces ne rapportent la preuve, ni de la réalité, ni de l’étendue des nuisances dont se serait rendue responsable Madame [F]. En effet, il n’est produit au dossier aucune attestation, aucun témoignage direct et circonstancié, aucune enquête permettant de démontrer les difficultés rencontrées avec cette locataire.

Le bailleur ne peut démontrer la violation de sa locataire à son obligation d’usage paisible des locaux loués par des lettres dont il est seul le rédacteur, sans autre pièce probante.

La seule photographie du premier mars 2019 établissant la présence d’encombrants sur une partie du parking loué par Madame [F], annexée à une lettre du premier mars 2019 mettant en demeure cette dernière de retirer les encombrants et effets personnels sur sa place de parking, ne permet pas de justifier d’un manquement suffisamment grave pour prononcer la résiliation du bail.

Le bailleur verse au débat un décompte qui fait état d’un solde débiteur de 831,41 euros au premier mai 2022. Il ressort de ce décompte qu’un quittancement d’un montant de 1093,52 euros a été effectué en janvier 2022, sans explication ni justificatif du bailleur, alors que la locataire soutient que les charges ne sont pas démontrées. Ce quittancement ne correspond pas aux loyers et aux provisions sur charges du logement et du stationnement. Ce seul décompte n’est ainsi pas suffisant à démontrer que Madame [F] violerait son obligation de paiement de ses loyers et charges de façon récurrente et grave, ce qui permettrait de prononcer la résiliation judiciaire du bail.

Le jugement déféré qui prononce la résiliation judiciaire du bail sera infirmé.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

La SA UNICIL est essentiellement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile. Elle sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Pour des raisons tirées de l’équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré qui a condamné Madame [F] aux dépens et à verser la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sera infirmé.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

INFIRME le jugement déféré,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

REJETTE la demande de la SA UNICIL tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du bail la liant à Madame [U] [F],

REJETTE les demandes des parties au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel

CONDAMNE la SA UNICIL aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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