Nuisances sonores : décision du 26 octobre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 23/00639

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Nuisances sonores : décision du 26 octobre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 23/00639
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délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 26 OCTOBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 23/00639 – N° Portalis DBVK-V-B7H-PWTZ

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du 01 FEVRIER 2023

PRESIDENT DU TJ DE PERPIGNAN

N° RG 22/00360

APPELANTE :

La SCI CREJO 1, société civile immobilière dont le siège social est sis [Adresse 1] ¿ [Localité 5], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jérémy DUBOIS, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et Me BECQUEVORT, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant substituant Me SABOUNJI

INTIMEE :

La Société LE BAR DES HALLES, SARL, immatriculée au RCS de PERPIGNAN sous le n° 832 013 155 dont le siège social est M. [W] [D] [Adresse 2] [Localité 4] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE – GIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me VIGOUROUX, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 11 Septembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 SEPTEMBRE 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

Madame Nelly CARLIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

La SCI CREJO 1 a donné à bail à la SAS Le Bar des Halles un local commercial situé à [Localité 6] [Adresse 3] , à usage de bar, cave à vin, et petite restauration.

Estimant que la SAS Le Bar des Halles était défaillante dans le respect de ses obligations contractuelles de jouissance en bon père de famille et d’interdiction de causer des nuisances à la tranquillité du voisinage, un commandement d’avoir à respecter lesdites obligations et visant la clause résolutoire lui était délivré par la bailleresse le 25 février 2022.

Par acte d’huissier en date du 9 mai 2022, la SCI CREJO 1 a fait assigner la SAS Le Bar des Halles en référé au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, devant le président du tribunal judiciaire de Perpignan.

Selon une ordonnance rendue contradictoirement en date du 1er février 2023, le juge des référés a :

– rejeté l’exception d’incompétence ;

– dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de la SCI CREJO 1 en l’état des contestations sérieuses développées dans le cadre de l’opposition formée contre le commandement du 25 février 2022 ;

– condamné la SCI CREJO 1 aux dépens ;

– condamné la SCI CREJO 1 à payer à la SAS Le Bar des Halles la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté tous les autres chefs de demande.

Le 6 février 2023, la SCI CREJO 1 a interjeté appel de cette ordonnance.

Vu les conclusions notifiées le 15 mars 2023 par la partie appelante ;

Vu les conclusions notifiées le 12 avril 2023 par la partie intimée ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 11 septembre 2023 ;

PRETENTIONS DES PARTIES

La SCI CREJO 1 conclut à l’infirmation de l’ordonnance et demande, au visa des articles 834 et 835 du Code de procédure civile, à la Cour statuant à nouveau de :

– constater l’acquisition de la clause résolutoire ;

– ordonner l’expulsion de la SARL LE BAR DES HALLES ainsi que de tout occupant de son chef sans terme ni délai, au besoin avec le concours de la force publique et l’assistance d’un serrurier ;

– débouter la SARL LE BAR DES HALLES de toutes demandes, fins et conclusions ;

– condamner la SARL LE BAR DES HALLES à payer à la SCI CREJO 1 une somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens.

L’appelante soutient que les nuisances sonores reprochées à la locataire sont constatées par expert dans son rapport du 18 juillet 2022 , par une étude acoustique qui conclut dans le même sens, et par un constat d’huissier du 26 février 2022, qui fait état de nuisances mesurées entre 85 et 90 décibels. La matérialité des manquements reprochés à la société Bar les Halles est en conséquence incontestable.

Elle soutient qu’à partir de 23 h, le bar devient une véritable boîte de nuit avec ‘DJ’ et ne respecte pas la destination des lieux loués. Or le commandement du 25 février 2022, qui a été émis dans le respect de la procédure en vigueur, listait les manquements auxquels la société devait remédier, ce qu’elle n’a pas fait, entraînant le jeu de la clause résolutoire.

L’appelante indique que la procédure introduite par son adversaire en opposition à commandement ne saurait faire obstacle à la présente procédure.

La S.A.R.L. Bar les Halles conclut à la confirmation de l’ordonnance et à la condamnation de la partie appelante à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle expose qu’elle a formé opposition au commandement visant la clause résolutoire, devant le juge du fond, par assignation du 24 mars 2022, contestant la régularité de cet acte.

Cette action vise à faire déclarer nul et infondé le commandement visant la clause résolutoire.

La SAS Le Bar des Halles développe dans ce cadre :

– Un argumentaire relatif à l’existence d’une transaction du 12 juin 2020, portant notamment sur le même sujet avec désistement d’action du bailleur ;

– le positionnement ambivalent du bailleur qui soutient dans certaines circonstances que les nuisances sonores n’existaient plus plusieurs mois avant la délivrance du commandement,

– l’absence d’avis technique contradictoire sur les émissions sonores évoquées relativement à « la mise en place d’une installation de musique amplifiée qui ne respecte pas la réglementation en vigueur et occasionne d’importants troubles de voisinage »,

– la problématique de la fréquentation de l’ensemble de la galerie commerciale,

– l’imprécision des termes du commandement qui ne fait référence à aucun manquement contractuel précis.

DISCUSSION

Selon les dispositions de l’article 834 du Code de procédure civile, tous les cas d’urgence, le juge des référés peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

L’article 835 du même code précise que le juge peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Le commandement visant la clause résolutoire daté du 25 février 2022 rappelle les obligations du locataire, tenu ‘de jouir des lieux en bon père de famille’ et ‘de faire son affaire personnelle en cas d’utilisation d’appareils ou d’instrument sur son corner pouvant provoquer du bruit ou des parasites de nature à perturber l’exploitation globale du site’. Il est fait commandement à la société locataire de jouir des lieux en bon père de famille, de ne pas diffuser de la musique amplifiée ne respectant pas la réglementation, d’avoir à faire cesser les plaintes et de se conformer aux prescriptions des règlements et ordonnances en vigueur.

Or un débat s’instaure entre les parties sur le fait de savoir si la diffusion de musique par la société Bar les Halles est conforme à la réglementation en vigueur et si l’utilisation des lieux correspond à une jouissance en bon père de famille.

La SCI CREJO 1, pour établir les nuisances sonores produit quatre constats d’huissier en date des 26 février 2022, 6 et 9 mai 2022, 5 et 23 mai 2022 et 23 mai 2022. Ces constats mettent en évidence une intensité sonore importante aux abords de l’établissement le Bar les Halles et des mesures qui excéderaient les décibels admis par la réglementation. Deux études acoustiques des 11 avril 2022 et du 11 juillet 2022 vont dans le même sens, de même que le rapport d’expertise judiciaire déposé le 18 juillet 2022.

Ce même rapport soumet cependant à l’appréciation souveraine du tribunal la question de l’imputabilité des troubles sonores, la société BAR DES HALLES soutenant que la fréquentation de l’ensemble de la galerie commerciale, et non uniquement celle de son établissement, serait à l’origine de nuisances. L’expert conclut également que le protocole d’accord signé entre les parties le 12 juin 2020 autorise la poursuite de l’activité jusqu’à 2 heures du matin, ce qui a favorisé l’extension des nuisances.

C’est en conséquence à bon droit que le premier juge a relevé que le juge du fond est saisi par l’opposition à commandement et a dit n’y avoir lieu à référé en présence d’une difficulté sérieuse concernant les obligations de la société preneuse dans ses rapports avec la bailleresse, et tenant l’imprécision des termes du commandement visant la clause résolutoire.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SCI CREJO 1 qui succombe sera condamnée aux dépens d’appel et à payer la société LE BAR DES HALLES une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme l’ordonnance en toutes ses dispositions,

Condamne la SCI CREJO 1 aux entiers dépens d’appel et à payer à la société LE BAR DES HALLES la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le greffier La présidente

 


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