Nuisances sonores : décision du 25 janvier 2024 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/06133

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Nuisances sonores : décision du 25 janvier 2024 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/06133
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 25 JANVIER 2024

ph

N° 2024/ 23

Rôle N° RG 21/06133 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK6I

[K] [D]

[W] [J]

S.C.I. S.C.I SOGARO

C/

[Z] [VE]

[S] [H] [VE]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP DENIS ASTRUC

SCP JF JOURDAN – PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS

SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire en date du 23 Mars 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 15/01049.

APPELANTS ET INTIMÉS

Monsieur [K] [D]

demeurant [Adresse 17]

représenté par Me Denis ASTRUC de la SCP DENIS ASTRUC, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Alexandra GOLOVANOW, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Madame [W] [J], prise en sa qualité de propriétaire indivise des parcelles cadastrées Section AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13]

demeurant [Adresse 15]

représentée par la SCP JF JOURDAN – PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Francois Marie POSTIC, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

S.C.I. SOGARO dont le siège social est [Adresse 15], représentée par son gérant, en sa qualité de propriétaire indivise des parcelles cadastrées Section AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13], domicilié en cette qualité audit siège social

représentée par la SCP JF JOURDAN – PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Francois Marie POSTIC, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

INTIMES

Monsieur [Z] [VE]

demeurant [Adresse 14]

représenté par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Christophe FIORENTINO de la SELARL FIORENTINO, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

Monsieur [S] [H] [VE]

demeurant [Adresse 18]

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Christophe FIORENTINO de la SELARL FIORENTINO, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 28 Novembre 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller , a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Janvier 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Janvier 2024,

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

M. [E] [VE] et M. [S] [VE] sont propriétaires en vertu d’un acte notarié du 25 octobre 2010, des parcelles cadastrées section AR numéro [Cadastre 21] (maison élevée sur rez-de-chaussée d’un étage et terrain attenant) et de la moitié indivise de la parcelle AR numéro [Cadastre 23] (parcelle de terre à usage d’accès non carrossable), sises [Adresse 31] de [Localité 33] à [Localité 32].

S’étant plaints d’un état d’enclave, M. [E] [VE] et M. [S] [VE] ont obtenu par ordonnance de référé du 11 mars 2013, une mesure d’expertise au contradictoire de Mme [G] [D] veuve [J] et de M. [K] [D], portant sur les parcelles sises à [Adresse 31] de [Localité 33] à [Localité 32], cadastrées section AR numéros [Cadastre 21], [Cadastre 25], [Cadastre 12] et [Cadastre 13].

L’expert judiciaire [M] [EU], a déposé son rapport le 22 juin 2014.

Par exploit d’huissier du 6 février 2015, M. [E] [VE] et M. [S] [VE] ont assigné Mme [G] [D] veuve [J] et M. [K] [D] devant le tribunal de grande instance de Grasse.

Par exploit d’huissier du 7 avril 2017, ils ont assigné la SCI Sogaro et Mme [W] [J] en dénonciation de cette première procédure. Les deux instances ont été jointes.

Enfin, Mme [W] [J] a été attraite en qualité d’héritière unique de sa mère, Mme [G] [D] veuve [J], décédée le 6 janvier 2018.

Par jugement du 23 mars 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a statué ainsi :

« – prononce le rabat de l’ordonnance de clôture du 31 décembre 2020,

– prononce la clôture au 19 janvier 2021, jour de l’audience de plaidoiries,

– rejette la demande de mise hors de cause de la SCI Sogaro et de Mme [W] [J],

– rejette la demande de sursis à statuer et d’expertise complémentaire,

– déboute MM. [E] [VE] et [S] [VE] de leur demande en revendication de propriété concernant la parcelle AR [Cadastre 26],

– déboute MM. [E] [VE] et [S] [VE] de leur demande visant à reconnaitre l’existence d’un chemin vicinal n°45, cadastré section AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 8] qui desservirait leur propriété,

– constate l’état d’enclavement du fonds situé à [Localité 32] cadastré section AR numéro [Cadastre 21],

– juge que l’accès au fonds situé à [Localité 32] cadastré section AR numéro [Cadastre 21] se fera par le tracé figurant an plan annexe 12 (solution n° 2) du rapport de [M] [EU] en date du 22 juin 2014, sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

– condamne MM. [E] [VE] et [S] [VE] à payer à M. [K] [D] une indemnité de 4 730 euros en réparation du dommage causé à son fonds par la création dc cette servitude,

– condamne MM. [E] [VE] ct [S] [VE] à payer aux propriétaires indivis des parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13], au prorata de leurs droits, la somme de 1 320 euros,

– juge que le présent jugement sera publié au service de la publicité foncière par la partie la plus diligente,

– juge que l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

– juge qu’en considération de la solution adoptée, chacune des parties conservera à sa charge les dépens par elle exposés,

– juge n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire. »

Le tribunal a retenu :

– que la mesure d’expertise n’a pas été réalisée au contradictoire de la SCI Sogaro propriétaire indivise des parcelles AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13] depuis le 1er avril 2011 et de Mme [W] [J] propriétaire indivise des mêmes parcelles depuis le 31 janvier 2012, mais elle a été versée aux débats, et elles ont eu le loisir d’en débattre, qu’il s’agit d’une expertise judiciaire, qu’elle est corroborée par d’autres pièces, qu’elle est donc opposable à la SCI Sogaro et à Mme [W] [J],

– sur la revendication d’une partie de la parcelle AR [Cadastre 19], que MM. [VE] ne démontrent pas l’avoir acquise par prescription trentenaire, par une possession publique, non équivoque et à titre de propriétaire,

– que la parcelle cadastrée section AR numéro [Cadastre 21] ne peut être desservie par des véhicules, le sentier existant à partir des parcelles n° AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13] ne permettant pas un tel aménagement, que l’expert a proposé deux solutions,

– que la solution n° 1 concerne les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 25], [Cadastre 13], [Cadastre 12] et [Cadastre 11] appartenant respectivement à M. [K] [D] (AR [Cadastre 11] et [Cadastre 12]) et en indivision à la SCI Sogaro et Mme [W] [J] (AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13]), qui a la préférence de M. [K] [D],

– que la solution n° 2 concernent les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19] et nécessite le déplacement d’un olivier, qui a la préférence de la SCI Sogaro et de Mme [W] [J],

– que la solution n° 2 est la moins dommageable,

– qu’il y a lieu de retenir les évaluations de l’expert pour déterminer l’indemnité.

Par déclaration du 25 avril 2021, M. [K] [D] a relevé appel de ce jugement.

Par déclaration du 5 mai 2021, la SCI Sogaro et Mme [W] [J] ont relevé appel du même jugement.

Par ordonnance du 10 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.

Par arrêt avant dire droit du 4 mai 2023 la cour d’appel d’Aix-en-Provence a :

– ordonné la réouverture des débats aux fins de susciter les observations des parties sur le moyen d’irrecevabilité soulevé d’office tiré de l’absence d’appel en cause de l’ensemble des propriétaires concernés par l’action en désenclavement de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 21] sise [Adresse 31] de [Localité 33] à [Localité 32], engagée par M. [E] [VE] et M. [S] [VE],

– renvoyé l’affaire à l’audience du 28 novembre 2023 avec une nouvelle clôture au 14 novembre 2023,

– réservé les dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées sur le RPVA le 12 novembre 2023, M. [K] [D] demande à la cour :

Vu les articles 682, 683 et 684 du code civil,

– de réformer le jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 23 mars 2021 (N°RG 15/01049) sur les chefs suivants :

« Juge que l’accès au fonds situé à [Localité 32] cadastré section AR numéro [Cadastre 21] se fera par le tracé figurant au plan annexe 12 (solution n°2) du rapport de [M] [EU] en date du 22 juin 2014, sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19] ;

Condamne [E] [VE] et [S] [VE] à payer à [K] [D] une indemnité de 4.730,00 € en réparation du dommage causé à son fonds par la création de cette servitude ;

Condamne [E] [VE] et [S] [VE] à payer aux propriétaires indivis des parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13], au prorata de leurs droits, la somme de 1.320,00 € ;

Juge qu’en considération de la solution adoptée, chacune des parties conservera à sa charge les dépens par elle exposés »

Et, statuant à nouveau,

A titre principal :

– de déclarer irrecevable la demande de désenclavement de M. [E] [VE] et M. [S] [VE] en ce qu’ils n’ont pas mis dans la cause les propriétaires des parcelles AR n° [Cadastre 22], [Cadastre 23] et [Cadastre 24],

A titre subsidiaire :

– de débouter M. [E] [VE] et M. [S] [VE] de leur demande de désenclavement de leur parcelle AR n° [Cadastre 21] par son fonds qui n’est pas celui à partir duquel ladite parcelle a été créée,

A titre plus subsidiaire :

– de fixer le passage du désenclavement de la parcelle n° [Cadastre 21] sur les parcelles AR n° [Cadastre 12], AR n° [Cadastre 13] et AR n° [Cadastre 25], par le tracé correspondant à la solution n° 1 détaillée par l’expert judiciaire,

– de débouter M. [E] [VE], M. [S] [VE], la SCI Sogaro et Mme [W] [J] de toute demande contraire,

– de condamner solidairement M. [E] [VE] et M. [S] [VE] à lui payer :

– La somme de 7 006,25 euros au titre de l’indemnité de dédommagement en contrepartie de l’instauration du passage correspondant au tracé n°1 (parcelles AR n°[Cadastre 25], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13]),

– Plus subsidiairement, la somme de 75 000 euros au titre de l’indemnité de dédommagement en contrepartie de l’instauration du passage correspondant au tracé n°2 (parcelles AR n°[Cadastre 19], [Cadastre 25], [Cadastre 10], [Cadastre 12], [Cadastre 13]),

A titre accessoire et dans tous les cas :

– de condamner solidairement M. [E] [VE] et M. [S] [VE] à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les condamner solidairement aux dépens, y compris ceux de première instance.

M. [K] [D] fait valoir en substance :

Sur le désenclavement par les parcelles issues du fonds d’origine,

– que les consorts [VE] sont propriétaires de la moitié indivise de la parcelle AR [Cadastre 23] qui permet l’accès à leur fonds depuis le [Adresse 29] ouvert à la circulation publique, que le désenclavement doit obligatoirement être envisagé sur les fonds à partir desquels les parcelles AR [Cadastre 21] et AR [Cadastre 23] ont été détachées selon l’article 684 du code civil,

– que l’expert a écarté l’application de l’article 684 au motif que l’aménagement de l’accès à partir de la parcelle AR [Cadastre 23] impactait défavorablement les parcelles mitoyennes [Cadastre 22] et [Cadastre 24],

– que l’expert a estimé irréaliste l’aménagement d’un accès par les parcelles [Cadastre 22] et [Cadastre 24], en se référant à un critère de moindre gène et pas à un critère d’impossibilité, et que la prétendue difficulté administrative n’est ni démontrée ni certaine,

– que les propriétaires des parcelles [Cadastre 22] et [Cadastre 24] auraient dû être appelés en cause,

Subsidiairement, sur l’incongruité du tracé n° 2,

– que le tribunal a commis une double erreur d’analyse au plan factuel et au plan juridique,

– qu’il n’y a pas d’impossibilité matérielle liée à la configuration des lieux, pour aménager l’accès, la dénivellation entre le pied du mur de soutènement à ouvrir et l’aire commune, étant de 2 mètres, et non de 2,5 mètres comme soutenu par les intimés devant le premier juge,

– qu’à l’inverse, l’expert judiciaire a pu relever que les contraintes importantes liées à l’aménagement d’une voie sur les parcelles [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 10], [Cadastre 19] et [Cadastre 25] dans le cadre de la solution n° 2 seraient très impactantes, sa propriété clôturée se retrouverait coupée en deux, les nuisances sonores accrues et l’agrément paysager de son jardin obéré,

– qu’il y a erreur dans la désignation de la parcelle [Cadastre 9],

– que la seule différence entre les solutions 1 et 2 de désenclavement en termes de nuisances causées aux fonds servants est que la seconde passe à l’intérieur d’une propriété d’habitation clôturée et à 20 mètres de sa maison, alors que la première ne concerne que l’aire commune ouverte à tous,

– que le tribunal a fait une application inexacte de l’article 683 en motivant sa décision sur le caractère prétendument important de l’ouvrage à réaliser pour la solution n° 1, compte tenu de la hauteur du mur séparant l’aire commune du fonds [VE], alors que la rampe d’accès est intégralement située sur le fonds dominant, avec une emprise d’environ 60 m² et s’élevant en pente douce jusqu’à l’aire commune située 2 mètres plus haut, est compatible avec les dispositions du PLU en vigueur, qui ne sont plus celles retranscrites dans le rapport d’expertise,

– que le coût de l’ouvrage est à mettre en perspective avec le montant de l’indemnité à lui verser, bien moins important dans le tracé n°1 que dans le tracé n°2,

Sur les indemnités, dans l’hypothèse subsidiaire où la cour écarterait le passage par les parcelles AR [Cadastre 22] et [Cadastre 24],

– qu’il faut appliquer une valeur actualisée de 295 euros par m²,

– qu’il n’est pas d’accord pour considérer comme l’expert, l’application d’un double abattement de 0,50 (parcelles [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11] et [Cadastre 19]) et de 0,3 (parcelles [Cadastre 12], [Cadastre 13] et [Cadastre 25]),

Sur l’irrecevabilité soulevée d’office,

– qu’il acquiesce à ce moyen dès lors que la loi impose d’aménager le passage sur le fonds de plus grande dimension duquel la parcelle a été détachée, indépendamment de toute notion de gêne, ce qui nécessite pour les demandeurs au désenclavement, de mettre dans la cause les propriétaires de ces parcelles AR n° [Cadastre 22], [Cadastre 23] et [Cadastre 24],

– que la jurisprudence est constante sur ce point,

– subsidiairement, qu’il n’apparaît pas que les ayants droit de M. [V] [D] soient toujours propriétaires d’une quote-part indivise, car il tient ses droits de la donation faite par son père [A] [X] [D] le 5 décembre 1996 et a complété ses droits sur ces parcelles par l’acquisition de ceux que détenait originellement M. [V] [D], qui a vendu à la SARL Sogebor le 28 décembre 1998 notamment la moitié indivise de la parcelle AR [Cadastre 10] et le quart indivis de l’aire commune composée des parcelles AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13], puis la SARL Sogebor lui a cédé ces mêmes droits, par acte du 16 février 2001 dont copie a été produite par les consorts [VE] (leur pièce n° 26), qu’il est donc seul propriétaire de la parcelle AR [Cadastre 10] et propriétaire de la moitié indivise des parcelle AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13], avec la SCI Sogaro et Mme [W] [J] chacune pour un quart.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 23 novembre 2023, la société Sogaro et Mme [W] [J] demandent à la cour :

Vu les dispositions des articles 6 aliéna 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme, 544, 682, 683, 684, 2227, 1873-2 et suivants du code civil, 15, 16 du code de procédure civile et la jurisprudence prise en leur application,

– d’écarter des débats toutes éventuelles écritures qui auraient été déposées le 22 décembre 2022 et qui ne leur ont pas été notifiées,

– d’ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture,

– de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :

« – rejeté les exceptions et demandes de la SCI SOGARO et de [W] [J],

– jugé que l’accès au fonds situé à [Localité 32] cadastré section AR numéro [Cadastre 21] se fera par le tracé figurant au plan annexe 12 (solution n°2) du rapport de [M] [EU] en date du 22 juin 2014, sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

– condamné [E] [VE] et [S] [VE] à payer aux propriétaires indivis des parcelles cadastrées section AR numéro [Cadastre 25] et [Cadastre 13], au prorata de leur droits, la somme de 1.320,00 €,

– jugé que le présent jugement sera publié au service de la publicité foncière par la partie la plus diligente,

– jugé que l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la SCI SOGARO et de [W] [J],

– jugé qu’elles conserveront la charge des dépens par elles exposés »,

Statuant de nouveau,

– de débouter MM. [E] et [S] [VE] et M. [K] [D] de toutes leurs fins, demandes et prétentions, comme n’étant ni recevables ni fondées,

A titre principal :

– de leur déclarer le rapport établi et déposé par M. [EU] le 22 juin 2014 inopposable,

– de débouter MM. [E] et [S] [VE] de leur demande de constitution de servitude de passage fondée exclusivement sur le rapport de M. [EU] à leur encontre,

Subsidiairement dans le cas où par impossible la cour écarterait l’exception d’inopposabilité du rapport de M. [EU] :

– de débouter MM. [E] et [S] [VE] de leur demande de désenclavement depuis le [Adresse 31] de [Localité 33] sur les parcelles AR [Cadastre 13] et [Cadastre 25] comme étant irrecevables,

– de juger que le désenclavement de la parcelle cadastrée AR n° [Cadastre 21] doit être recherché par les parcelles détachées cadastrées AR [Cadastre 24] et [Cadastre 22] depuis le [Adresse 29] dont elles sont limitrophes,

Très subsidiairement dans le cas où par impossible la cour écarterait l’irrecevabilité et l’application des dispositions de l’article 684 alinéa 1 du code civil :

– de débouter MM. [E] et [S] [VE] et M. [D] de leur demande de désenclavement selon le tracé n° 1, passant par les parcelles AR [Cadastre 13], [Cadastre 12] et [Cadastre 25] proposé par M. [EU] en ce qu’il est le plus dommageable,

– d’ordonner le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 21] par le tracé figurant au plan annexé au rapport de M. [I] du 24 janvier 2018 (pièce 18/2) par les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

Très très subsidiairement :

– d’ordonner le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 21] selon le tracé n° 2 proposé par M. [EU] par les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 13], [Cadastre 12], [Cadastre 25], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

– de condamner MM. [E] et [S] [VE] à leur verser la somme de 118 300 euros à titre d’indemnité,

A titre infiniment subsidiaire dans le cas ou par impossible la cour retiendrait le désenclavement selon le tracé n° 1 :

– de condamner MM. [E] et [S] [VE] à leur verser la somme de 148 200 euros à titre d’indemnité,

En tout état de cause,

– de condamner MM. [E] et [S] [VE] à leur verser la somme de 8 500 euros au titre des frais irrépétibles qu’elles ont été contraintes d’exposer tant en première instance qu’en cause d’appel en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner MM. [E] et [S] [VE] aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de Me Jean François Jourdan avocat postulant aux offres de droit.

La société Sogaro et Mme [W] [J] soutiennent en substance :

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture,

– que les consorts [VE] ont notifié des conclusions le 14 novembre 2023 en demandant le rabat de l’ordonnance de clôture,

– que de nouveaux moyens sont soulevés sur l’irrecevabilité de l’action en désenclavement, justifiant le débat contradictoire et le rabat de l’ordonnance de clôture,

Sur l’arrêt avant dire droit,

– que les consorts [VE] n’ont pas attrait à la mesure d’expertise puis au fond M. [R] [O] propriétaire de la parcelle cadastrée AR n° [Cadastre 24] et M. [SW] [O] propriétaire de la parcelle cadastrée AR n° [Cadastre 22],

– que l’enclave de la parcelle AR [Cadastre 21] découle exclusivement de la division de la propriété de Mme [T], ce dont les consorts [VE] étaient dès l’origine pleinement informés, dès lors qu’ils ont produit pour justifier de leurs droits, l’acte de donation-partage du 17 avril 1951,

– que contrairement à ce qu’ils soutiennent, la recevabilité de l’action en désenclavement est bien subordonnée à l’appel en cause de tous les propriétaires des parcelles voisines du fonds enclavé et ce plus encore s’agissant des propriétaires des parcelles dont le détachement est à l’origine de l’enclave,

– que le rapport de M. [EU], qui leur est au demeurant inopposable, n’est pas de nature à permettre à la cour d’exclure l’application des dispositions de l’article 684 alinéa 1 du code civil,

– dans son pré-rapport et son rapport, l’expert s’est limité à des considérations purement subjectives quant à la possibilité d’aménagement d’un accès sur les parcelles AR [Cadastre 22], AR [Cadastre 23] et AR [Cadastre 24], du fait de l’absence de toute étude effective des parcelles AR [Cadastre 22] et AR [Cadastre 24] puisque les propriétaires des parcelles AR [Cadastre 22] et AR [Cadastre 24] n’étaient pas partie à son expertise et qu’il n’avait donc pas accès à leur propriété, qu’ainsi la seule « investigation » de l’expert a constitué dans l’établissement d’un relevé altimétrique de la seule parcelle AR [Cadastre 23], propriété des consorts [VE], telle qu’elle résulte du plan cadastral,

– que les consorts [VE] ne peuvent exciper du rapport de M. [EU] pour justifier l’absence de mise en cause des propriétaires des parcelles AR [Cadastre 22] et [Cadastre 24] puisqu’il est pleinement établi qu’en l’absence de cette mise en cause, M. [EU] n’a pu procéder à aucune étude portant sur ces deux parcelles,

Sur la recevabilité de la demande de désenclavement sur le fondement d’un rapport non contradictoire,

– que dans le cadre de l’expertise les consorts [VE] ont pu se convaincre des mutations des droits de propriété indivis des parcelles AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13] postérieures aux actes des 27 septembre 1967 et 20 novembre 1984,

– que l’inopposabilité d’un rapport d’expertise à une partie qui n’a été ni appelée ni représentée aux opérations d’expertise a été consacrée,

– que le tribunal ne pouvait pas retenir que le rapport de M. [EU] était corroboré « s’agissant d’enclavement » par d’autres pièces versées aux débats, qu’aucune des pièces produites par les consorts [VE], hormis le rapport [EU], n’établissaient l’état d’enclave de la parcelle AR [Cadastre 21], qu’en tant que propriétaires indivises des parcelles AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13] elles sont, au regard des articles 6 alinéa 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme instituant le principe du caractère équitable de la procédure et de l’article 16 du code de procédure civile instituant le principe du contradictoire et de la jurisprudence prise en leur application, recevables et fondées à demander réformation du jugement rendu le 23 mars 2021 en ce qu’il a statué sur les demandes des consorts [VE] au vu et sur le seul fondement du rapport non contradictoire de M. [EU] du 22 juin 2014.

– que le seul fait que Mme [J] ait été assignée le 12 novembre 2018 en sa qualité d’héritière de feue [G] [D]-[J] n’est pas de nature à lui rendre opposable l’expertise ordonnée le 11 mars 2013 son auteur n’étant pas à cette date, propriétaire des parcelles AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13] par lesquelles le désenclavement est demandé,

Sur le désenclavement,

– que le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 21] ne peut, en application des dispositions de l’article 684 du code civil, être demandé que par la parcelle cadastrée AR [Cadastre 24] qui constituait le lot deux du partage du 17 avril 1951 et ce d’autant plus que l’acte de partage prévoyait expressément que les chemins seraient mitoyens « en vue de faciliter l’exploitation de la propriété » et éventuellement par la parcelle AR [Cadastre 22].

– que les consorts [VE] ne pouvaient être accueillis en leur demande de désenclavement par d’autres parcelles que celles dont le détachement est seul à l’origine de l’enclave relative de leur parcelle cadastrée AR [Cadastre 21],

– sur l’application des articles 682 et 683 du code civil, que la solution n° 1 présente de nombreux inconvénients par rapport à la solution n° 2,

– que M. [EU] déclare de façon parfaitement injustifiée qu’en raison de son caractère indivis la parcelle AR [Cadastre 25] « doit être laissée libre dans sa totalité à l’usage de tous les copropriétaire », alors que le caractère indivis des parcelles AR [Cadastre 13] et [Cadastre 25] est issu de l’acte de partage du 16 octobre 1967 par lequel suite au décès de son mari [A] [D], Mme [P] [L] sa veuve a convenu d’un partage de la propriété acquise par son mari entre ses quatre enfants, M. [N] [D], M. [B] [D], Mme [G] [D] et M. [Y] [D], que l’acte ne prévoit aucune affectation particulière ni aucune restriction d’usage, qu’il ne peut donc être soutenu que les parcelles AR [Cadastre 13] et [Cadastre 25] du seul fait qu’elles sont en indivision pour moitié entre les concluantes et M. [D] ne sont d’aucune valeur comme n’étant d’aucun usage alors :

– que d’une part elles sont directement limitrophes des bâtiments d’habitation propriété des concluantes et constituent un espace de vie impérieusement nécessaire à leur jouissance,

– qu’elles ont de tout temps été utilisées par Mme [G] [J] et M. [D] notamment pour y stationner leurs véhicules et ceux de leurs visiteurs,

– que l’accord de M. [D] pour la solution n° 1 s’emplace dans le cadre d’un conflit familial, pour leur nuire,

Sur les indemnités,

– que M. [EU] ne fournit aucun élément de comparaison fondant son analyse se limitant à déclarer que son évaluation résulte de ses propres références et d’informations recueillies téléphoniquement auprès d’agences immobilières,

– que le rapport de M. [I] a été écarté sans faire l’objet d’une quelconque analyse,

– qu’il est incontestable que la constitution de servitude sur les parcelles AR [Cadastre 25] et [Cadastre 13] engendrerait des préjudices, d’immobilisation des parcelles [Cadastre 13] et [Cadastre 25], matériels, nuisances temporaires, de dépréciation de la propriété.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 14 novembre 2023, M. [S] [VE] et M. [Z] [VE] demandent à la cour :

Vu l’article 802 du code de procédure civile,

Vu les articles 682, 683 et 684 du code civil,

Vu le rapport d’expertise,

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 23 mars 2021,

Vu l’arrêt avant dire droit de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 4 mai 2023,

A titre principal :

– d’ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture du 14 novembre 2023,

– de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Grasse le 23 mars 2021 en tant qu’il a :

– jugé le caractère opposable du rapport d’expertise à la SCI Sogaro et à Mme [W] [J],

– constaté l’état d’enclave de la parcelle cadastrée section AR n° [Cadastre 21],

– fixé le tracé de désenclavement selon la solution n° 2 préconisée par l’expert [EU],

– de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Grasse en tant qu’il a :

– déterminé la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 9], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

– fixé l’indemnité à la somme de 4 730 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 10], [Cadastre 19] et [Cadastre 9] et la somme de 1 320 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13],

Et statuant à nouveau,

– de déterminer la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 25], [Cadastre 10] et [Cadastre 19],

– de fixer l’indemnité à la somme totale de 6 000 euros ventilée ainsi : 4 680 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 10], [Cadastre 19] et 1 530 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13],

A titre subsidiaire :

– de fixer le tracé de désenclavement selon la solution n° 1 préconisée par l’expert [EU] et déterminer la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 25], [Cadastre 13] et [Cadastre 11],

– de fixer l’indemnité due par eux à la somme totale de 2 210 euros ventilée ainsi : 680 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 11] et n° [Cadastre 12] et 1 530 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13],

En tous les cas :

– de condamner les parties appelantes à leur verser, chacune, la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance et par moitié les frais d’expertise.

M. [S] [VE] et M. [Z] [VE] arguent pour l’essentiel :

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture,

– qu’ils n’ont pas pu répliquer avant la clôture, aux conclusions notifiées la veille de la clôture le 13 novembre 2023 par la SCI Sogaro et Mme [J],

Sur la recevabilité de la demande de désenclavement,

– sur la propriété indivise des parcelles [Cadastre 10], [Cadastre 25] et [Cadastre 13] :

– que leur pièce n° 26 est constituée par l’acte notarié du 16 février 2001 portant vente par la SARL Sogebor à M. [K] [D], de la moitié indivise de la parcelle AR [Cadastre 10] ainsi que du quart des droits indivis de l’aire commune cadastrée AR [Cadastre 13] et [Cadastre 25],

– que ce point n’est contesté par aucune des parties,

– sur la mise en cause de la SCI Sogaro et Mme [W] [J] :

– qu’il est constant que ni la SCI Sogaro ni Mme [W] [J] n’ont été appelées ni représentées aux opérations d’expertise,

– que Mme [W] [J] a été appelée en la cause en tant qu’héritière de Mme [G] [D] veuve [J], partie à l’expertise, et en cette qualité le rapport d’expertise lui est opposable,

– que Mme [W] [J] en qualité de propriétaire indivise des parcelles AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13], n’a pas été appelée aux opérations d’expertise, mais a été en mesure de discuter le rapport d’expertise,

– qu’il en est de même pour la SCI Sogaro, propriétaire indivise des parcelles AR n° [Cadastre 25] et [Cadastre 13], dont la gérante est Mme [W] [J],

– que l’article 126 du code de procédure civile dispose que dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d’être régularisée, l’irrecevabilité sera écartée,

– que la recevabilité de l’action en réclamation d’une servitude de passage n’est pas subordonnée à l’appel en cause de tous les propriétaires voisins du fonds prétendument enclavé (CA Montpellier, 1ere chambre, décembre 2013, RG 11/07112),

– que si Mme [W] [J] et la SCI Sogaro n’ont pas participé aux opérations d’expertise et n’ont pas été mises en cause dans l’assignation du 6 février 2015, une régularisation a été opérée le 7 avril 2017 et elles ont été en mesure de consulter le rapport d’expertise et le discuter contradictoirement,

– sur la mise en cause des consorts [O] (parcelles AR n° [Cadastre 24] et [Cadastre 22]) :

– qu’il a été largement démontré que l’accès par les parcelles AR [Cadastre 22] et [Cadastre 24] a été traité par l’expert [EU], dans la mesure où dans le pré-rapport cette solution a été écartée rendant ainsi leur mise en cause inutile,

– qu’à partir du moment où l’origine d’un fonds commun ne suffit pas à justifier la constitution d’une servitude de passage, une telle irrecevabilité ne peut être retenue, que ce n’est que si la juridiction considère que la servitude de passage doit être constituée sur le fonds commun, qu’une telle irrecevabilité peut être déclarée,

– que les jurisprudences citées ne sont pas pertinentes car en l’espèce le rapport [EU] a parfaitement démontré que la solution revendiquée par les appelants, ne permettrait pas de respecter les normes de voiries par ce passage,

– que le rapport [EU] contient tous les éléments techniques destinés à démontrer, en dépit de l’existence d’un fonds commun avec la parcelle cadastrée AR [Cadastre 24], qu’un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés et dès lors l’article 682 serait applicable,

– qu’un relevé topographique a bien été dressé depuis le [Adresse 29] jusqu’à la parcelle cadastrée AR [Cadastre 21], en limite du chemin cadastré AR [Cadastre 23],

– que l’absence de mise en cause ne constitue pas l’expression d’une quelconque préférence quant à l’exercice de leur droit de passage, mais une impossibilité technique révélée dès le pré-rapport de l’expert [EU],

Sur l’état d’enclave,

– que l’expert a écarté l’application de l’article 684 du code civil, tout en constatant l’existence d’une origine commune des parcelles :

– que le titre de propriété de 2010 relève que la parcelle cadastrée AR [Cadastre 23] (indivise) est à usage d’accès non carrossable,

– que la SCI Sogaro et Mme [J] contestent en cause d’appel la nature de ce chemin en considérant qu’il s’agit d’un chemin d’exploitation, mais que ce point n’a jamais été débattu et qu’une telle qualification ne relève d’aucun acte,

– que le passage par la parcelle AR [Cadastre 23] a été écartée par l’expert, la largeur de la bande de roulement ne permettant pas le croisement de deux véhicules et que les services de la ville disposent du droit de refuser une autorisation de voirie dès lors qu’il y a un risque sécuritaire ou que le réseau public est insuffisant,

– que les prétendues attestations visant à démontrer l’existence d’un passage sont inopérantes,

– qu’il ressort du dossier que le désenclavement par le fonds commun est non conforme à l’article UJ3 du plan local d’urbanisme en vigueur à la date de l’expertise, que le nouveau document d’urbanisme s’y oppose aussi,

– que constituer une servitude de passage alors que sa mise en ‘uvre excède ses capacités financières, revient finalement à maintenir l’enclavement de la propriété,

– que l’article 684 du code civil dispose que dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l’article 682 serait applicable,

– que l’expert a retenu deux solutions,

– qu’ils préfèrent la solution n° 2,

– que la solution n° 2 est moins onéreuse que la solution n° 1,

– qu’à la lecture du jugement, il apparaît que le tribunal a intégré une parcelle non mentionnée dans le plan ni la liste et que la parcelle [Cadastre 25] est non visée alors qu’elle est bien mentionnée dans les documents, que la servitude de passage s’établira sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 12], [Cadastre 25], [Cadastre 13], [Cadastre 10], [Cadastre 19],

Sur l’indemnité,

– que le montant réclamé par M. [D] pour la solution n° 2 est disproportionné et non justifié, le fonds servant ne constituant ni un jardin, ni une aire de stationnement,

– que pour la solution n° 1, il faut se référer à l’expertise, les demandes de la SCI Sogaro et de Mme [W] [J] étant exorbitantes, alors que l’expert relève que la solution n° 1 ne concerne essentiellement que la parcelle AR [Cadastre 25], qui est un patecq, espace commun à l’usage de divers.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 14 novembre 2023.

A l’audience du 28 novembre 2023, cette ordonnance de clôture a été révoquée avec l’accord des parties pour admettre les conclusions des 14 novembre 2023 et 23 novembre 2023 et une nouvelle clôture est intervenue au jour de l’audience, avant l’ouverture des débats.

L’arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties ont constitué avocat.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le moyen soulevé d’office tiré de l’irrecevabilité de l’action aux fins de désenclavement

La cour a soulevé la question de la recevabilité de la demande de MM [VE] tendant au désenclavement de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 21], à défaut d’avoir assigné l’ensemble des propriétaires concernés, cette question n’ayant été soulevée par aucune des parties appelantes qui concluaient au débouté, ou à l’irrecevabilité du fait de l’inopposabilité du rapport d’expertise.

Aux termes de l’article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue, ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner.

L’article 684 du code civil énonce : « Si l’enclave résulte de la division d’un fonds par suite d’une vente, d’un échange, d’un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l’objet de ces actes. Toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l’article 682 serait applicable. »

Il ressort de la combinaison de ces articles que par priorité le passage doit être recherché sur les fonds ayant une origine commune, ce qui impose d’appeler en la cause tous les propriétaires, à peine d’irrecevabilité de la demande.

Il est constant en outre, que le juge ne peut, pour statuer, se fonder exclusivement sur un rapport d’expertise y compris judiciaire établi non contradictoirement à l’égard de cette partie qui en soulève l’inopposabilité, sauf à ce que ce rapport ait été régulièrement versé aux débats, soumis à la libre discussion des parties et soit corroboré par d’autres éléments de preuve.

A la lecture des actes notariés versés aux débats, à savoir l’acte de partage successoral du 27 septembre 1967 suite au décès de [A] [D] le 5 février 1953, et l’acte d’échange du 20 novembre 1984 intervenu postérieurement au décès de [P] [L] veuve [D] en 1976, ainsi que les actes de vente des 16 février 2001, 1er avril 2011 et 31 janvier 2012 :

– M. [K] [D] qui vient aux droits de son père [A] [X] [D], est propriétaire en pleine propriété des parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 6], [Cadastre 9], [Cadastre 12], [Cadastre 11] et [Cadastre 19], ainsi que d’un quart indivis de la parcelle cadastrée AR [Cadastre 13], avec [V] (ou [B]) [D], [N] [D] et [G] [D] veuve [J], dans l’acte d’échange, lequel mentionne également une aire commune reprise au cadastre AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13] et précise que la parcelle AR numéro [Cadastre 10] reste indivise entre [A] [D] et [V] [D],

– M. [K] [D] a fait l’acquisition le 16 février 2001, de la société Sogebor, qui tenait ses droits de M. [B] [D], des parcelles cadastrées numéros [Cadastre 20], [Cadastre 7], [Cadastre 8], ainsi que de la moitié indivise de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 10] et du quart indivis des parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 3],

– M. [F] [D] a cédé ses droits indivis sur les parcelles AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13] à la SCI Sogaro, en même temps que la pleine propriété des parcelles cadastrées AR [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 16], étant établi par l’acte de partage successoral de 1967 et l’acte d’échange de 1984 (se référant au nouveau cadastre), que les parcelles AR numéros [Cadastre 2] et [Cadastre 3] appartenaient précédemment à [N] [D],

– Mme [G] [D] veuve [J] a fait donation de ses droits, soit un quart en pleine propriété des parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13], à Mme [W] [J], sa fille.

Il est ainsi vérifié que la parcelle cadastrée section AR numéro [Cadastre 10] appartient en totalité à M. [K] [D] et que les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13] lui appartiennent, depuis l’acte notarié du 16 février 2001, pour la moitié en indivision, avec la SCI Sogaro propriétaire d’un quart indivis en vertu de l’acte notarié de vente du 1er avril 2011, et Mme [W] [J] propriétaire d’un quart indivis en vertu de l’acte notarié de donation du 31 janvier 2012, par sa mère, feue [G] [D] veuve [J], décédée le 6 janvier 2018.

L’expertise judiciaire ordonnée le 11 mars 2013, avait pour objet de fournir tous éléments d’appréciation pour dire si le fonds cadastré AR numéro [Cadastre 21] appartenant à MM. [VE], est enclavé, en recherchant s’il dispose d’une issue suffisante pour en assurer la desserte complète vers la voie publique et ses utilisations normales, actuelles ou envisagées, et dans la négative de rechercher les solutions de désenclavement.

Le rapport d’expertise a été déposé le 22 juin 2014, au contradictoire de M. [K] [D] et de Mme [G] [D] veuve [J], qui n’était plus alors, propriétaire de droits sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13], et ce, depuis le 31 janvier 2012.

Il est parfaitement reconnu que la SCI Sogaro et Mme [W] [J] n’ont pas été appelées aux opérations d’expertise, alors qu’elles étaient titulaires de droits indivis sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 25] et [Cadastre 13], si bien que l’expertise dont l’opposabilité est contestée, bien que versée régulièrement aux débats, ne peut constituer le fondement exclusif de la décision sauf à être étayée par d’autres pièces, qui doivent précisément être listées et analysées par la juridiction.

L’expert judiciaire conclut ainsi qu’il suit :

– le fonds [VE] provient d’un plus grand fonds qui incluait les parcelles [Cadastre 24] et [Cadastre 23],

– l’accès par l’aval, [Adresse 29] : il apparaît impossible d’y obtenir une autorisation administrative, et en supposant cela possible, l’impact sur la parcelle [Cadastre 24] constituerait un préjudice tel, qu’il serait insupportable pour le demandeur,

– l’accès par l’aménagement du sentier en contournant les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2] n’est pas possible pour lui donner les caractéristiques permettant un usage par véhicules,

– seules deux solutions sont techniquement acceptables, à savoir les solutions 1 et 2 proposées :

– la solution 1 passe par les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 25], [Cadastre 13] et [Cadastre 11],

– la solution 2 passe par les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 12], [Cadastre 25], [Cadastre 13], [Cadastre 10] et [Cadastre 19].

L’expert judiciaire après avoir relevé que la solution 2 n’est pas la plus courte et a un coût d’aménagement (déplacement de deux gros oliviers, construction de murets de soutènement contre le garage et contre la parcelle [Cadastre 20]) à ajouter à la dépréciation pour la propriété [D] et à l’indemnité d’acquisition plus élevée, préconise la solution 1 qui « rejoint le chemin communal en passant par les parcelles AR [Cadastre 12] (accord de [D]) et [Cadastre 13] et [Cadastre 25] (partie commune ou patec) ».

En premier lieu, sur l’origine commune des fonds, il est produit l’attestation de propriété immobilière de MM. [VE] et l’acte de donation-partage du 17 avril 1951, dont la lecture permet de comprendre que ceux-ci tiennent leurs droits sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 21] (en pleine propriété) et [Cadastre 23] (pour la moitié indivise) de [U] [T], en vertu d’un testament au profit de ses deux petits-neveux.

Feu [U] [T] tenait lui-même ses droits de l’acte de donation-partage consacrant la division de deux propriétés, dont l’une sise à [Adresse 27] confrontant de l’Est : le ruisseau dit Lou Riou, du Sud : le chemin de [Localité 32] à [Localité 28], du Nord : [D] et [J], de l’Ouest : [C], pour une contenance totale de deux hectares douze ares trente et un centiare environ, en sept lots.

[U] [T] s’est vu attribuer le lot n° 1 ainsi décrit : « une parcelle de terre située [Adresse 27] cadastrée sous les numéros [Cadastre 5], [Cadastre 5] de la section A-5 avec la maison paraissant cadastrée sous le numéro [Cadastre 4] de la section A-5, d’une contenance d’environ neuf ares quatorze centiares », l’autre partie de la propriété sise [Adresse 27] constituant le lot n° 2 d’une superficie de deux mille huit cent vingt-cinq mètres carrés « confrontant de l’Est : le ruisseau dit Le Riou, du Sud : le [Adresse 30] à [Localité 32] (sic), de l’Ouest : [C] et du Nord : [D]. ».

Cet acte de donation-partage mentionne que les co-partageants ont convenu que les chemins et sentiers séparant les différents lots entre eux, seront mitoyens et que leur entretien incombera aux propriétaires des lots riverains à cesdits chemins et sentiers.

Par comparaison avec le plan annexé à l’acte de donation-partage, la parcelle AR [Cadastre 21] constitue le lot n° 1 et la parcelle AR [Cadastre 24] le lot n° 2, tandis que la parcelle AR [Cadastre 23], qui confronte la parcelle AR [Cadastre 21] au Sud-Est, longe la parcelle AR [Cadastre 24] à l’Ouest jusqu’au [Adresse 29] (chemin de [Localité 32] à [Localité 28] sur l’annexe de la donation-partage), est désignée dans l’attestation immobilière de MM. [VE] comme une « parcelle de terre à usage d’accès non carrossable », qui leur appartient pour moitié indivise, sans préciser avec qui.

A l’Ouest de la parcelle AR [Cadastre 23], on trouve la parcelle AR [Cadastre 22] (désignée dans l’annexe de l’acte de donation-partage, sous le nom « [C] »).

Il ressort donc de l’examen de ces pièces qui viennent conforter la conclusion de l’expert sur ce point, que les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 21] et [Cadastre 23] proviennent de la division d’un fonds par suite d’un partage. Le passage ne peut donc être demandé que sur les terrains qui ont fait l’objet de ces actes, soit la parcelle AR [Cadastre 24], qui dispose d’un accès à la voie publique, le [Adresse 29], sauf s’il est impossible d’obtenir un passage suffisant.

En deuxième lieu sur l’impossibilité d’accès vers le [Adresse 29] retenue par l’expert judiciaire, celui-ci déclare avoir procédé à un relevé topographique de la parcelle [Cadastre 23], limitrophe de part et d’autre, de parcelles en forme de restanques avec de vieux murs et avoir vu que la réalisation d’un accès par ce côté est totalement irréaliste, car les pentes nécessitent un développé de voie à créer qui conduirait à une dépréciation considérable des deux parcelles bâties [Cadastre 22] et [Cadastre 24], sans compter un branchement incertain sur la voie publique pour lequel la mairie de [Localité 32] s’est prononcée négativement.

Il est constaté qu’aucune autre pièce que le rapport d’expertise ne permet d’étayer cette conclusion de l’expert, intervenue hors le contradictoire de la société Sogaro et de Mme [W] [J], alors en outre, qu’une exploration de la possibilité de passage par d’autres voies que celles proposées par MM. [VE], ne pouvait avoir lieu qu’en présence de tous les autres propriétaires riverains, des parcelles AR [Cadastre 23], qui est en indivision, AR [Cadastre 24] qui a une origine commune avec les parcelles AR [Cadastre 23] et [Cadastre 21], AR [Cadastre 22] dont l’expert indique qu’elle aurait aussi une origine commune comme provenant d’un fonds [T] plus grand.

Dès lors, il n’y a pas lieu d’examiner plus avant les propositions de l’expert judiciaire, quant à la solution de désenclavement passant par les fonds de la société Sogaro et de Mme [W] [J], faite hors leur contradictoire et sans qu’aient été appelés dans la cause les autres propriétaires riverains.

L’action en désenclavement de MM. [VE] dirigée uniquement contre M. [K] [D], la société Sogaro et Mme [W] [J], et pas contre tous les propriétaires des fonds voisins, sera donc déclarée irrecevable, le jugement appelé étant infirmé.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient d’infirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.

MM. [VE], partie perdante, seront condamnés aux dépens, qui comprendront les frais d’expertise, distraits au profit du conseil de la société Sogaro et de Mme [W] [J], qui le réclame.

MM. [VE] seront également condamnés aux frais irrépétibles, qu’il est inéquitable de laisser à la charge de M. [K] [D], la société Sogaro et Mme [W] [J].

Aucune disposition ne prévoit la solidarité entre les personnes condamnées aux dépens et aux frais irrépétibles, et aucun fondement n’est invoqué à l’appui de la demande de condamnation solidaire aux dépens, qui sera donc rejetée.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement appelé ;

Déclare irrecevable la demande en désenclavement de M. [E] [VE] et M. [S] [VE] ;

Condamne M. [E] [VE] et M. [S] [VE] aux dépens, qui comprendront le coût de l’expertise, avec distraction au profit de Me Jean François Jourdan ;

Condamne M. [E] [VE] et M. [S] [VE] à verser à M. [K] [D] la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

M. [E] [VE] et M. [S] [VE] à verser à la société Sogaro et Mme [W] [J] ensemble, la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

 


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