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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le : 19/12/2023
à :
Copie exécutoire délivrée
le : 19/12/2023
à :
Pôle civil de proximité
PCP JCP référé
N° RG 23/06511
N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
N° MINUTE : 2/2023
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 19 décembre 2023
DEMANDEURS
Monsieur [D] [E], demeurant [Adresse 2] – [Localité 4]
comparant en personne assisté de Maitre Mathilde DE PINA, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : K0021
Monsieur [V] [I], demeurant [Adresse 2] – [Localité 4]
représenté par Maitre Jérémie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0021
Monsieur [F], [J] [A], demeurant [Adresse 2] – [Localité 4]
Madame [R], [P], [K] [I] épouse [A], demeurant [Adresse 2] – [Localité 4]
représentés par Maitre Allan CENGIZ-PEREIRA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0021
DÉFENDERESSE
La S.A.R.L. SAINT DOMINIQUE INVESTISSEMENTS prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 3]
représentée par Maitre Benoît VERGER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #G0680
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Nicole COMBOT, 1ère vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Delphine VANHOVE, Greffière,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 07 novembre 2023
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 19 décembre 2023 par Nicole COMBOT, 1ère vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Delphine VANHOVE, Greffière
Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 28 juillet 2009, la SARL [Adresse 2] a donné à bail mixte à usage d’habitation et professionnel à Monsieur [D] [E] un appartement en duplex d’une surface d’environ 262 m² dont 114 m² destinés à l’usage de la profession libérale d’avocat, situé au 5ème et 6ème étage de l’immeuble du [Adresse 2] [Localité 4], moyennant le paiement mensuel d’un loyer de 6.400 euros outre 300 euros de provision sur charges.
Le 4 janvier 2014, la SARL [Adresse 2] a conclu avec Monsieur [D] [E] un nouveau bail mixte, à usage d’habitation et professionnel portant sur les mêmes locaux, moyennant le paiement mensuel d’un loyer de 9.440 euros outre 200 euros de provision sur charges ainsi qu’un bail à usage d’habitation portant sur des locaux situés au 6ème étage du même immeuble d’une surface de 106,05 m², moyennant le paiement mensuel d’un loyer de 600 euros outre 60 euros de provision sur charges, ce loyer étant justifié par l’état d’une partie des locaux impropres à l’usage auxquels ils étaient destinés, et les travaux que le locataire s’engageaient à prendre à sa charge, le bailleur devant néanmoins rembourser une somme forfaitaire de 50.000 euros hors taxes sur présentation des factures.
Par acte sous seing privé du 15 février 2018, la SARL [Adresse 2] a donné à bail à usage d’habitation à Monsieur [V] [I] un appartement d’une surface d’environ 240 m², situé au 4 porte face de l’immeuble du [Adresse 2] [Localité 4], moyennant le paiement mensuel d’un loyer de 6.660 euros outre 275 euros de provision sur charges.
Enfin, par acte sous seing privé du 03 avril 2018, la SARL [Adresse 2] a donné à bail à usage d’habitation à Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A], ci-après désignés les époux [A], un appartement d’une surface d’environ 148 m2, situé au 4ème porte gauche de l’immeuble du [Adresse 2] [Localité 4], moyennant le paiement mensuel d’un loyer de 4.250 euros outre 200 euros de provision sur charges.
La SARL [Adresse 2] qui était propriétaire de l’ensemble des lots composant l’immeuble, lequel n’était donc pas soumis au statut de la copropriété, l’a vendu le 30 juin 2020 à la SARL Saint Dominique Investissements, qui a entrepris d’y réaliser des travaux de rénovation et de sécurité consistant principalement enྭ:
la mise en conformité de certaines parties communes au regard des règles de sécurité incendie et d’accessibilité des lieux aux personnes à mobilité réduite,le réaménagement des locaux se situant aux étages 1 (gauche), 2 (face) et 3 (gauche), la rénovation des caves, de la cour intérieure et des cages d’escalier consistant en la réfection des peintures, du marbre, des sols, des escaliers et des luminaires, la création de parties communes supplémentaires (local déchets et local à vélo)le changement de l’ascenseur et de la machinerie.
Les premiers travaux ont commencé le 03 octobre 2022.
Se plaignant des dysfonctionnements de l’ascenseur en 2020 et notamment d’une panne qui a duré 43 jours à l’été 2020 et des nuisances importantes occasionnés par les travaux de rénovation entrepris par la SARL Saint Dominique Investissements, et l’inertie de celle-ci malgré leurs nombreuses mises en demeure, Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et les époux [A] ont, par acte de commissaire de justice du 6 juillet 2023, assigné la SARL Saint Dominique Investissements devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de PARIS, statuant en référé, aux fins, au visa de la loi du 6 juillet 1989, des articles 1719 et 1724 du code civil et 835 du code de procédure civile de voirྭ:
A titre principalྭ:
Fixer une décote de 70 % de leur loyer, charges comprises, depuis le 24 octobre 2022 jusqu’à complet achèvement des travaux, Condamner la SARL Saint Dominique Investissements à leur payer à titre de provision une somme égale à 70 % de leur loyer, charges comprises, depuis le 24 octobre 2022 jusqu’à complet achèvement des travaux, Condamner la SARL Saint Dominique Investissements à payer à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice de jouissance les sommes deྭ:40.000 euros à Monsieur [D] [E],Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
20.000 euros à Monsieur [V] [I],20.000 aux époux [A], A titre subsidiaireྭ:
Ordonner une expertise afin de déterminer la date de fin des travaux, le planning, la nature et la localisation exacte des travaux accomplis depuis le 3 octobre 2022, et fournir au tribunal les éléments techniques et de fait lui permettant d’apprécier les troubles de jouissance subis selon la localisation des appartements et de déterminer les responsabilités encourues, évaluer et chiffrer les préjudicies subis,En tout état de causeྭ:
Condamner la SARL Saint Dominique Investissements à payer à Monsieur [D] [E] la somme de 3.978 euros correspondant à un trop perçu de loyer, Condamner la SARL Saint Dominique Investissements aux dépens ainsi qu’à payer à chacun des demandeurs la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Après deux renvois pour mettre en état l’affaire, celle-ci a été retenue et plaidée à l’audience du 07 novembre 2023.
Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et les époux [A], assisté, s’agissant du premier locataire et, représentés, s’agissant des deuxième et troisième locataires, par leur conseil, ont sollicité le bénéfice de leurs conclusions déposées à l’audience. Ils ont réitéré leurs demandes dans les termes de leur acte introductif d’instance, sauf à renoncer à leur demande d’expertise, et à réévaluer leur demande de provision à valoir sur leur préjudice de jouissance aux sommes suivantesྭ:
Au titre du préjudice subi antérieurement aux travaux débutés le 3 octobre 2022ྭ:
5.000 euros pour chacun d’eux Au titre du préjudice subi en raison des travaux débutés le 3 octobre 2022ྭ:
97.398,60 euros pour Monsieur [D] [E],67.119,72 euros pour Monsieur [V] [I],40.865,04 euros pour les époux [A], Les époux [A] ont en outre demandé la condamnation de la SARL Saint Dominique Investissements à leur verser une provision de 29.189,28 euros à valoir sur l’indemnisation du trouble de jouissance subi du fait de l’état de leur appartement, et correspondant à six mois de loyer.
Les demandeurs font valoir en substance qu’ils subissent du fait des travaux des nuisances sonores assourdissantes incessantes, la prolifération de rats, des pannes quasi hebdomadaires de l’ascenseur utilisé comme monte-charge avec des délais de remise en route inacceptables, des coupures d’eau et d’électricité, une pose d’échafaudage sans information préalable qui assombrit considérablement les pièces de vie et nuit à leur intimité, la suppression des digicodes à l’entrée avec les problèmes de sécurité qui en découlent nécessairement, que malgré leurs très nombreuses réclamations, le bailleur qui n’a pas contesté les désagréments subis, n’a pris aucune mesure concrète pour y remédierྭ; qu’ils ont été de nouveau privés de l’usage de l’ascenseur à compter du 17 juillet 2023 et jusqu’à ce jour, que cela est particulièrement préjudiciable à Monsieur [D] [E] qui exerce son activité d’avocat au 5ème étage, le contraignant à organiser des rendez-vous avec ses clients à l’extérieur de son cabinet, devenu inaccessible à certains d’entre eux ou en raison des mauvaises conditions de réception.
Ils soutiennent que la bailleresse a manifestement pour objectif, à travers ces travaux sans fin et les nombreuses et importantes nuisances qu’ils génèrent à les contraindre à quitter l’immeuble afin de pouvoir revendre vides les appartements qu’ils louent.
En réplique, la SARL Saint Dominique Investissements a demandé que la pièce portant le n°6-96 qui lui a été communiquée le jour de l’audience après minuit et dont elle n’a pas eu le temps de prendre connaissance soit écartée des débats. Par ailleurs, elle a sollicité le bénéfice de ses conclusions déposées à l’audience aux termes desquelles elle a demandé au juge des contentieux de la protection de prendre acte de son engagement de verser dans les 8 jours de l’ordonnance à intervenir, les sommes deྭ:
3.978 euros à Monsieur [D] [E] euros correspondant au trop perçu de loyer, Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
Au titre de l’indemnisation du préjudice résultant de la privation de l’ascenseur durant 100 jours:
5.487,45 euros à Monsieur [D] [E] correspondant à 15 % de son loyer,2.521,80 euros à Monsieur [V] [I] correspondant à 10 % de son loyer,1.481,50 euros à aux époux [A] correspondant à 10 % de leur loyer.Concernant les autres demandes, elle a conclu, au visa de la loi du 6 juillet 1989, des articles 1719 et 1724 du code civil et 835 du code de procédure civileྭ:
A l’irrecevabilité des demandes des trois locataires de provision de 5.000 euros à valoir sur l’indemnisation du préjudice subi antérieurement aux travaux débutés le 3 octobre 2022, de 29.189,28 euros des époux [A] à valoir sur l’indemnisation du trouble de jouissance subi du fait de l’état de leur appartement,
Au rejet de l’ensemble de leurs demandes.
Elle a dit n’y avoir lieu à référé en raison d’une contestation sérieuse et a demandé la condamnation solidaire des locataires aux dépens ainsi qu’à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle objecte que les demandeurs se plaignent de la réalisation de travaux qu’ils ont eux-mêmes exigée, que curieusement, ils n’ont jamais demandé l’interruption des travaux mais ont soigneusement planifié une stratégie d’épuisement des équipes de la société bailleresse en l’inondant de courriels exagérés, agressifs et menaçants et cherchent aujourd’hui à tirer un profit financier de cette situationྭ; qu’en sa qualité de bailleresse, elle a pris toutes les mesures qui s’imposaient pour répondre aux réclamations des demandeursྭ; que ceux-ci ne produisent aucun constat de commissaire de justice pour preuve de la réalité et de l’ampleur des troubles de jouissance allégués mais se constituent des preuves à eux-mêmes qui sont contredites par le témoignage d’une autre locataire de l’immeuble que les demandeurs ont tenté, sans succès, de rallier à leur cause.
Elle réplique queྭ:
La demande des époux [A] en réparation d’un préjudice subi entre 2018 et 2020 est irrecevable à un double titre, parce que prescrite et dirigée contre une personne n’ayant pas qualité pour y répondre, sachant qu’elle a acquis l’immeuble litigieux le 30 juin 2020, alors que le droit d’agir s’apprécie à la date du fait générateur qui serait, selon les époux [A], un défaut d’entretien de l’immeuble imputable au précédent bailleur, Subsidiairement, leur demande est infondée car ils n’apportent pas la preuve de l’insalubrité de leur logement ni de la consistance des désordres qu’ils allèguent, La demande des trois locataires au titre du préjudice subi antérieurement aux travaux débutés le 3 octobre 2022, qui vise une panne d’ascenseur pendant 43 jours durant l’été 2020 est prescrite, Les travaux critiqués ne portent pas sur les logements loués mais sur les parties communes et ne peuvent donc entrainer une privation d’une partie de la chose louée au sens de l’article 1724 du code civil, Le bailleur ne doit garantir le preneur des troubles qui pourraient résulter de l’exécution de travaux que si une gêne excessive ou anormale et durable est causée au preneur et qu’il ne fait pas d’efforts suffisants pour y remédier, et en l’espèce, les preneurs ne démontrent pas un trouble anormal de jouissance, alors que l’immeuble bénéficie depuis décembre 2022 d’un gardiennage et d’une surveillance de chantier jour et nuit, qu’une société mandatée par la bailleresse est intervenue à chaque fois que la présence de rats lui a été signalée, pour traiter le problème, qu’il en est de même pour les différentes pannes d’ascenseur, que les nuisances olfactives et sonores ne sont pas anormales, que la privation d’ascenseur à compter du 17 juillet a fait l’objet d’une proposition de décote de loyer, Les demandeurs ont modifié de manière substantielle les fondements de leur demande ainsi que le montant des préjudices qu’ils allèguent, entre leur assignation et leurs présentes conclusions, preuve de leurs propres hésitations et du caractère sérieusement contestable de leurs demandes.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions déposées par les conseils respectifs des parties à l’audience et que ceux-ci ont exposées oralement, pour un plus ample exposé des moyens développés à l’appui de leurs prétentions.
Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
I-Sur le rejet de la pièce 6-96 et de la fiche de plaidoirie
Aux termes des articles 15 et 16 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent afin que chacune soit à même d’organiser sa défense, étant observé que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et qu’il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
En l’espèce, il n’est pas contesté par les demandeurs que la synthèse de leurs conclusions ainsi que la fiche les reprenant sous forme de tableaux et la pièce portant le n° 6-96 ont été communiquées dans la nuit à la SARL Saint Dominique Investissements pour une audience débutant le lendemain matin à 9h00, de sorte que le conseil de celle-ci n’a pu en prendre connaissance pour en débattre contradictoirement.
Ces pièces seront donc écartées des débats.
II-Sur la répétition de l’indu au titre du trop-perçu de loyers
L’article 1302-1 du code civil dispose que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu.
En l’espèce, la SARL Saint Dominique Investissements ne conteste pas devoir à Monsieur [D] [E] la somme de 3.978 euros correspondant à un trop perçu de loyer et s’engage à la lui verser dans les 8 jours de la présente ordonnance. Il convient de lui en donner acte et de la condamner au paiement de cette somme à titre provisionnel, en cas de non-respect de son engagement.
III- Sur les demandes de provision
Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et les époux [A] sollicitent des provisions à valoir sur l’indemnisation de différents préjudices de jouissance, distincts selon les demandeurs, la période concernée et le trouble invoqué. Leurs demandes seront donc examinées successivement.
De manière générale, il convient de rappeler qu’en application de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut accorder une provision au créancier. Ce dernier apprécie souverainement le montant de la provision à accorder.
L’obligation non sérieusement contestable vise aussi bien les créances d’origine contractuelle, quasi contractuelle, délictuelle ou quasi délictuelle, le juge des référés étant cependant tenu de préciser la nature de l’origine de cette créance ou la nature de l’obligation la fondant.
Une contestation est sérieuse dès lors que l’un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait être rendue au fond.
De même, une contestation est sérieuse chaque fois que la décision du juge des référés l’obligerait à se prononcer préalablement sur une contestation relative à l’existence d’un droit ou le conduirait à se prononcer sur le fond du litige, par exemple en portant une appréciation sur la validité, la qualification ou l’interprétation d’un acte juridique.
En l’espèce, les baux liant les parties sont soumis à la loi du 6 juillet 1989 et rappellent que le bailleur est tenu d’assurer la jouissance paisible du logement, obligation par ailleurs prévue par l’article 1719 du code civil.
Il est constant que l’obligation qui incombe au bailleur d’assurer à son locataire la jouissance paisible du logement s’étend également aux parties communes dont le locataire a l’usage, notamment celles lui permettant d’accéder dans des conditions normales à son logement, tels que le hall, les escaliers et l’ascenseur.
Il y a lieu de retenir en outre, au visa de l’article 7 e) de la loi du 6 juillet 1989 renvoyant à l’application de l’article 1724 du Code civil, que les travaux réalisés dans les parties communes donnent lieu à indemnisation en raison de la gêne subie si les travaux ont duré plus de 21 jours.
Il appartient aux locataires d’apporter la réalité des troubles et du préjudice allégués, étant observé que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même.
Sur la provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance subi antérieurement aux travaux
Les demandeurs sollicitent une provision de 5.000 euros chacun à valoir sur le préjudice de jouissance subi antérieurement aux travaux, qui résulterait de pannes de l’ascenseur de l’immeuble du [Adresse 2] [Localité 4] aux périodes suivantesྭ: du 17 juillet au 24 août 2020, du 20 au 27 juin 2022 et du 5 au 8 juillet 2022.
La SARL Saint Dominique Investissements oppose aux demandeurs la prescription de leur demande.
Aux termes de l’article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, toutes les actions dérivant d’un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer ce droit. Cet article est applicable aux contrats en cours.
La prescription de l’action en réparation du préjudice de jouissance court à compter de la réalisation du dommage qui en est à l’origine ou de la date à laquelle il est révélé au locataire qui le subit si celui-ci établit qu’il n’en avait pas eu précédemment connaissance.
En l’espèce, Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et les époux [A] ont formulé pour la première fois à l’audience du 4 octobre 2023, une demande de dommages et intérêts à titre provisionnel, au titre du préjudice de jouissance qu’ils affirment avoir subi à l’été 2020 et au printemps et à l’été 2022.
En effet, contrairement à ce qu’ils ont soutenu à l’audience du 07 novembre 2023, s’ils ont en effet évoqué dans leur acte introductif d’instance du 06 juillet 2023, les problèmes liés au dysfonctionnement de l’ascenseur depuis 2020, ils n’ont formulé aucune prétention à ce titre dans leur dispositif, étant rappelé qu’aux termes de l’article 446-2 du code de procédure civile, le juge ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif de l’acte introductif d’instance ou des conclusions.
Leur action en indemnisation du préjudice de jouissance résultant du dysfonctionnement de l’ascenseur durant l’été 2020, et dont la panne a cessé, selon Monsieur [D] [E] le 24 août 2020, est donc irrecevable, comme prescrite depuis le 24 août 2023, et ne saurait donner lieu à l’octroi d’une provision.
Il convient en revanche d’examiner leur demande portant sur 2022 qui n’est pas couverte pas la prescription.
En l’espèce, les pièces versées aux débats par les demandeurs et notamment un couriel en date du 27 juin 2022 de la société ALTERA, à laquelle la SARL Saint Dominique Investissements a confié la gestion de l’immeuble du [Adresse 2] [Localité 4], établissent la réalité d’un arrêt de l’ascenseur de l’immeuble au mois de juin 2022 qui a pris fin le 27 juin 2022, et qui aurait débuté selon Monsieur [D] [E], le 20 juin 2022, sans que la date du début de cette immobilisation soit établie, autrement que par un courriel de Monsieur [D] [E], celui-ci s’abstenant de produire la notice d’information adressée par la société ALTEREA par courriel du 7 juin 2022 et portant selon son objet sur «ྭles travaux ascenseurྭ».
Cette durée d’immobilisation qui a duré trois jours de plus que celle initialement prévue et dont les locataires ont été dûment prévenus n’est pas constitutive, de manière incontestable et avec l’évidence requise en référé, d’un trouble anormal de jouissance justifiant l’allocation d’une provision en référé. Il en va de même de la demande portant sur les trois jours d’immobilisation de l’ascenseur en juillet 2022.
Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et les époux [A] seront déboutés de leurs demandes à ce titre.
Sur la provision sollicitée par les époux [A] à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance subi du fait de l’état de leur appartement
La SARL Saint Dominique Investissements oppose à la demande des époux [A] l’irrecevabilité de sa demande au motif qu’elle n’a acquis l’immeuble que postérieurement aux troubles de jouissance qu’ils allèguent et qu’en outre, leur demande serait prescrite.
Sur le premier moyen, l’article 32 du code de procédure civile dispose qu’est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d’agir.
L’obligation du bailleur passe à l’acquéreur du bien donné à bail, à condition toutefois que les troubles et leur cause ne soient pas antérieurs à la vente. En effet, la vente de l’immeuble ne dispense pas le précédent bailleur de son obligation d’effectuer les travaux qui se sont avérés nécessaires lorsqu’il était propriétaire et lui incombaient. Le vendeur reste tenu d’indemniser le locataire du trouble de jouissance subi du fait de la non-exécution des travaux qui lui incombaient en sa qualité de propriétaire, ce trouble ne cessant que par leur exécution.
En l’espèce, la plupart des troubles dont se plaignent les époux [A], lorsqu’ils prennent la peine de les dater, sont antérieurs au 30 juin 2020, date à laquelle la SARL Saint Dominique Investissements indique avoir acquis l’immeuble, ce qui n’est pas contesté par les époux [A]. Leur demande à l’encontre de la SARL Saint Dominique Investissements tendant à obtenir une provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice qu’ils disent avoir subi du fait de ces troubles sera donc déclarée irrecevable comme étant dirigée contre une personne n’ayant pas qualité pour y répondre.
Il convient en revanche d’examiner leur demande en indemnisation au titre des troubles postérieurs au 30 juin 2020, qui n’est pas irrecevable, étant dirigée contre l’actuel propriétaire des lieux et bailleur depuis cette date.
Il incombe aux époux [A] d’apporter la preuve de la réalité des troubles et du préjudice allégués. Ils ne peuvent se constituer une preuve à eux-mêmes.
Il est exact qu’ils ont porté dès le 7 janvier 2021 à la connaissance du nouveau bailleur l’existence d’une fuite d’eau au niveau du plafond d’une pièce de leur appartement donnant côté rue, mais échouent, en l’état des pièces produites, pourtant fort nombreuses à prouver que cette fuite d’eau a perduré jusqu’au mois de mai 2022, du fait de l’inertie du bailleur et a rendu cette pièce, dont la surface n’est pas précisée, inhabitable, au point de priver leur fils de la jouissance de celle-ci qui lui servirait de chambre à coucher.
Les époux [A] invoquent un problème de non-conformité des radiateurs mais ne produisent, aucun élément autre que leurs propres courriels de réclamation au bailleur, ne serait-ce que l’avis ou le devis d’une entreprise de plomberie qui indiquerait en quoi ces radiateurs ne sont pas conformes et le préjudice qui en résulte pour les occupants des lieux.
Ils se plaignent également d’une privation d’eau chaude durant 11 jours du 25 août au 5 septembre 2022, en raison d’un dysfonctionnement d’une pièce défaillante de la chaudière de leur appartement.
Il résulte des pièces de la procédure qu’ils ont signalé ce problème au gestionnaire de l’immeuble le dimanche 28 août 2022 en fin d’après-midi, lui précisant qu’ils feraient établir le lendemain un devis par le prestataire chargé de l’entretien de leur chaudièreྭ; que ce devis établi le mercredi 31 août a été accepté par le bailleur le jeudi 1er septembre 2022 et adressé le vendredi 2 septembre 2022 tôt le matin, par les époux [A] au prestataire aux fins de réalisation urgente des travaux.
Si les époux [A] ont été privés d’eau chaude, ce qui constitue un réel inconfort constitutif d’un trouble de jouissance, celui-ci a été de courte durée, et ils n’apportent pas la preuve d’une négligence ou d’un manquement du bailleur à ses obligations, lequel en l’espèce, a été particulièrement diligent, pour avoir accepté le devis le lendemain de son établissement et de sa transmission par les époux [A].
Enfin, les époux [A] se plaignent de quatre fuites d’eau dans leur cuisine, survenues les 07 décembre 2020, 02 mars 2021, 02 février 2022 et 20 septembre 2023. Ils se contentent pour les trois premières d’entre elles, de produire des photographies desdites fuites, ne permettant pas d’en déterminer la localisation ni la cause et donc à la charge de qui incombe la réparation et dans l’hypothèse où elle incomberait au bailleur, une défaillance de celui-ci à procéder à la recherche des causes de la fuite et à sa réparation. Leur dernière réclamation du 20 septembre 2023 à la société ALTEREA n’a été suivie d’aucune relance, ce qui rend plausible, une intervention de celle-ci pour remédier au problème.
Ils seront donc déboutés de leur demande en indemnisation des troubles de jouissance postérieurs au 30 juin 2020.
Sur la provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance subi à raison des travaux débutés le 03 octobre 2022ྭ
Les demandeurs réclament à ce titre sur une période de 12 mois, une somme correspondant à 70 % du montant de leur loyer, charges comprises soitྭ:
97.398,60 euros pour Monsieur [D] [E],
67.119,72 euros pour Monsieur [V] [I],
40.865,04 euros pour les époux [A].
Il est constant que la SARL [Adresse 2] a entrepris à compter du 3 octobre 2023 des travaux de rénovation et de sécurité d’ampleur consistant principalement enྭ:
la mise en conformité de certaines parties communes au regard des règles de sécurité incendie et d’accessibilité des lieux aux personnes à mobilité réduite,
le réaménagement des locaux se situant aux étages 1 (gauche), 2 (face) et 3 (gauche),
la rénovation des caves, de la cour intérieure et des cages d’escalier consistant en la réfection des peintures, du marbre, des sols, des escaliers et des luminaires,
la création de parties communes supplémentaires (local déchets et local à vélo)
le changement de l’ascenseur et de la machinerie.
Les demandeurs ne contestent pas la nécessité de ces travaux mais les conditions de leur réalisation, et l’absence d’information de la part du bailleur sur leur déroulement.
Il convient de rappeler que le bailleur est tenu de donner au locataire toutes les informations quant à la nature et à la durée des travaux projetés.
Par ailleurs, il y a lieu d’opérer une distinction entre d’une part, les désagréments inhérents à des travaux importants entrepris par le bailleur dans des parties privatives et les parties communes d’un immeuble, et d’autre part, des nuisances qui excédent par leur durée, leur fréquence et leur intensité la gêne normale qu’un locataire peut avoir à supporter à l’occasion de ceux-ci.
Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que la société ALTAREA, gestionnaire de l’immeuble, a informé les locataires le 23 septembre 2022 que des travaux de rénovation des bureaux se situant aux 1er et 2ème étages débuteraient à compter du 03 octobre suivant, avec protection des parties communes et que des travaux de «ྭcurageྭ» débuteraient entre le 07 et le 10 octobre. Il leur était précisé qu’un planning plus détaillé «ྭserait prochainement porté à [leur] attention »
Or, la SARL Saint Dominique Investissements ne produit aucune pièce aux débats prouvant qu’elle a communiqué ce planning ou fourni d’autres informations aux locataires.
Force est de constater que les travaux qui, au jour de l’audience n’étaient toujours pas achevés, n’ont pas donné lieu avant qu’ils ne débutent à une information précise de la part de la SARL Saint Dominique Investissements, portant à la fois sur la nature de ceux-ci, les modalités de leur réalisation et tout particulièrement leur durée prévisionnelle. Madame [O] [W], qui est également locataire dans l’immeuble et se réjouit par ailleurs des travaux entrepris par le bailleur concernant les caves et les escaliers de service et demande à la société ALTAREA de lui transmettre ses remerciements, précise dans son courriel du 6 avril 2023 que celle-ci «ྭaurait dû faire une communication, annonçant l’ampleur des travaux, pour vos locatairesྭ», ce qui aurait simplifié les choses.
De fait, la SARL Saint Dominique Investissements a ensuite attendu le 26 avril 2023, alors que les travaux avaient déjà débuté depuis presque sept mois, pour communiquer aux locataires des informations relatives à la nature des travaux concernant les parties communes à savoir le remplacement de l’ascenseur, la réfection des cages d’escaliers et du porche et la création d’un local poubelle et d’un local vélo, le seul calendrier fixé étant celui du remplacement de l’ascenseur prévu du 15 juin au 14 août 2023.
La SARL Saint Dominique Investissements a en conséquence manqué à son obligation d’information.
Elle ne conteste pas que la privation de l’ascenseur durant 100 jours au jour de l’audience, justifie une provision correspondant à 10% du loyer pour Monsieur [V] [I] et les époux [A] qui habitent au 4ème étage et à 15 % pour les époux [A] qui habite au 5ème et 6ème étage.
En l’espèce, la privation de l’ascenseur a débuté le 17 juillet 2023 et se poursuivait au jour de l’audience.
Il y a lieu de retenir, au visa de l’article 7 e) de la loi du 6 juillet 1989 renvoyant à l’application de l’article 1724 du Code civil, que les travaux réalisés dans les parties communes donnent lieu à indemnisation en raison de la gêne subie si les travaux ont duré plus de 21 jours.
Les locataires n’ont pas été privés de la totalité de la chose louée, mais d’une partie seulement, soit l’usage de l’ascenseur.
En considération de la durée de l’immobilisation de l’ascenseur au-delà de 21 jours soit durant 93 jours, de l’étage où se situent les locaux loués par Monsieur [D] [E] (5ème étage desservi par l’ascenseur et 6ème étage) et de la profession d’avocat qu’il y exerce et qui l’amène à y recevoir des clients lesquels ont indiqué avoir été contraints, malgré leur âge et la nécessité de transporter des dossiers, de gravir les escaliers jusqu’à son cabinet, il convient d’allouer à Monsieur [D] [E] une somme provisionnelle de 7.189 euros correspondant à 20% du montant de son loyer, charges comprises, selon le calcul suivantྭ: [(10.319,18 + 515)ྭ+ (655,88 + 105)]ྭX 20% : 30 soit 77,30 euros X 93 jours.
En considération de la durée de l’immobilisation de l’ascenseur qui est identique, de l’étage où se situent les locaux loués par Monsieur [V] [I] et les époux [A] (4ème étage) à usage exclusif d’habitation, il convient d’allouer une somme provisionnelleྭde :
3.715,55 euros à Monsieur [V] [I] correspondant à 15% du montant de son loyer, charges comprises, selon le calcul suivantྭ: [(7.565,44 + 425)ྭX 15%] : 30 soit 39,95 euros X 93 jours. Décision du 19 décembre 2023
PCP JCP référé – N° RG 23/06511 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2SLI
2.262,17 euros aux époux [A] correspondant à 15% du montant de leur loyer, charges comprises, selon le calcul suivantྭ: [(4.599,88 + 265)ྭX 15%] : 30 soit 24,32 euros X 93 jours.
Il est par ailleurs établi par les pièces versées aux débats que l’ascenseur a subi plusieurs pannes aux dates suivantesྭ: 20 au 21 octobre 2022, 26 octobre 2022, 24 au 28 novembre 2022, 27 au 28 mars 2023 et 11 au 12 avril 2023. Ces pannes en général de courte durée durent parfois plusieurs jours consécutifs, malgré l’intervention du bailleur auprès de son prestataire, et sont dues en partie à une surcharge en cabine du fait de l’utilisation de l’ascenseur par les ouvriers réalisant les travaux pour y transporter des matériaux lourds, ainsi qu’il résulte du rapport d’intervention de la société ACORUS-RECNIBAT du 24 novembre 2022. Ces pannes répétées constituent de manière incontestable une nuisance, de nature à créer un trouble de jouissance pour les locataires de l’immeuble et les personnes qui leur rendent visite à titre privé ou professionnel.
S’agissant du trouble de jouissance lié à la présence de rats, il ne peut en être tenu compte. En effet, si la présence de rats est établie, il résulte des pièces du dossier d’une part, qu’elle est antérieure au début du chantier, les époux [A] se plaignant déjà en novembre 2020 au précédent gestionnaire de la présence d’un rat dans une poubelle et d’autre part, que les travaux en cause n’ont pas entrainé une «ྭprolifération de ratsྭ». Par ailleurs, la société ALTAREA a missionné une entreprise de dératisation le 6 mars 2023 soit le surlendemain du jour où la présence des rongeurs lui a été signalée par les locataires de même que le 24 mars suivant avec programmation de six passages hebdomadaires curatifs de ladite société. Enfin, il résulte de plusieurs courriels adressés par une autre locataire de l’immeuble, Madame [O] [W], à la société ALTAREA, en mars et avril 2023, «ྭqu’il n’y a pas plus de rats que d’habitude, comme dans tout [Localité 5]ྭ», et qu’elle n’en a vu pour ce qui la concerne qu’un seul, et ce grâce aux produits qui ont été posés afin de les éradiquer. Elle se réjouit par ailleurs des travaux «ྭcolossauxྭ» dans les caves qui ont contribué à leur assainissement «ྭau niveau des ratsྭ» et à l’élimination de «ྭl’odeur de moisi au niveau de la cage d’escalierྭ» ainsi que de ceux réalisés dans les escaliers de service.
S’agissant de l’échafaudage, les époux [A] indiquent avoir été surpris par son installation sans information préalable de la part de la SARL Saint Dominique Investissements qui ne produit aucune pièce pouvant le contraire. Cet échaudage obscurcit les pièces donnant sur une courette intérieure et donc déjà peu claires et porte atteinte à l’intimité de leur vie privée, car les ouvriers ont une vue directe et rapprochée sur lesdites pièces qui sont dépourvues de rideaux, jugés non nécessaires en l’absence de vis-à-vis. Cependant, faute par les époux [A] d’indiquer la durée pendant laquelle cet échafaudage est resté installé et notamment, si cette durée a excédé les 21 jours au-delà de laquelle les travaux donnent lieu à indemnisation, les demandeurs seront déboutés de leur demande à ce titre.
Il convient de relever que parmi les très nombreuses pièces produites par les demandeurs, la majeure partie d’entre elles, comme déjà analysé supra, sont des preuves qu’ils se sont constitués à eux-mêmes, sans que le moindre constat de commissaire de justice soit versé aux débats, pour les corroborer, ce qui est surprenant compte tenu de la profession de Monsieur [D] [E] et de Madame [R] [I] épouse [A].
Cependant, il résulte d’attestations de trois de ses collaborateurs et de plusieurs de ses clients que le bruit des travaux et des outils (perceuse, marteau, marteau piqueur, scieuse) est insupportable voire infernal et s’apparente à un vacarme qui rend les conditions de travail au sein du cabinet difficiles et parfois même impossibles, au point que certains rendez-vous ont dû se dérouler à l’extérieur de son cabinet, que le hall et la cage d’escalier y compris le palier du cabinet de Monsieur [D] [E], sont dans un piteux état, encombrés de matériaux de chantier, et donc difficilement praticables et recouverts d’une épaisse couche de poussière y compris la rampe, qui est de ce fait inutilisable, obligeant certains clients à porter un masque pour s’en protéger.
Décision du 19 décembre 2023
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Les conditions de réalisation des travaux entrepris par la SARL Saint Dominique Investissements provoquent des nuisances qui excédent, avec l’évidence requise en référé, la gêne normale qu’un locataire peut avoir à supporter à l’occasion de ceux-ci et ce d’autant, qu’ils durent désormais depuis plus d’un an.
Cependant, à défaut d’éléments précis et objectifs, en dehors des attestations susvisées, résultant d’éléments de preuve autres que les nombreuses réclamations et photographies versées aux débats par les demandeurs et émanant d’eux, quant à la datation précise de ces nuisances, leur durée, leur fréquence et leur intensité que seule une expertise, à laquelle les demandeurs, après l’avoir sollicitée, ont renoncé, permettrait d’évaluer avec certitude et objectivité, il convient d’allouer à chacun des locataires une provision à valoir sur leur indemnisation qui sera justement évaluée à 5% de leur loyer sur la totalité de la période des travaux, soit :
6.957,03 euros à Monsieur [D] [E] selon le calcul ci-aprèsྭ: [(10.319,18 + 515)ྭ+ [(655,88 + 105)]ྭX 5% X 12 mois, 4.794,26 euros à Monsieur [V] [I] selon le calcul ci-aprèsྭ: (7.565,44 + 425)ྭX 5% X 12 mois, 2.918,92 euros aux époux [A] selon le calcul ci-aprèsྭ: (4.599,88 + 265)ྭX 5% X 12 mois.
Sur la demande de réduction des loyers
L’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 énonce que si le logement loué ne satisfait pas aux dispositions des deux premiers alinéas de l’article 6, le locataire peut demander au propriétaire sa mise en conformité sans qu’il soit porté atteinte à la validité du contrat en cours. (…) Le juge saisi par l’une ou l’autre des parties détermine, le cas échéant, la nature des travaux à réaliser et le délai de leur exécution. Il peut réduire le montant du loyer ou suspendre, avec ou sans consignation, son paiement et la durée du bail jusqu’à l’exécution de ces travaux.
Il résulte des dispositions qui précédent que la suspension du loyer avec ou sans consignation des loyers n’est admissible que si le locataire apporte la preuve que le logement loué est inhabitable ou indécent.
A défaut pour les locataires d’apporter cette preuve, leur demande de réduction des loyers sera rejetée, étant observé que celle-ci ferait double emploi avec la provision pour trouble de jouissance résultant des travaux déjà obtenue.
Sur les mesures accessoires
La SARL Saint Dominique Investissements, partie perdante, supportera les dépens, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge des demandeurs les frais qu’ils ont exposés pour les besoins de la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 1 000 euros chacun leur sera allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SARL Saint Dominique Investissements les frais qu’elle a exposés pour se défendre dans le cadre de la présente instance.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.
Décision du 19 décembre 2023
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PAR CES MOTIFS,
Nous, juge des contentieux de la protection statuant en référé, après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire et en premier ressort rendue par mise à disposition au greffeྭ:
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront mais, dès à présent, vu l’absence de contestation sérieuse,
Ecartons des débats la pièce portant le n° 6-96 ainsi que la synthèse des conclusions des demandeurs et la fiche les reprenant sous forme de tableaux,
Donnons acte à la SARL Saint Dominique Investissements de son engagement de verser à Monsieur [D] [E] la somme de 3.978 euros correspondant à un trop perçu de loyer, dans les 8 jours de la présente ordonnance,
Condamnons la SARL Saint Dominique Investissements, en cas de non-respect de son engagement, au paiement à titre provisionnel de cette somme à Monsieur [D] [E],
Déclarons irrecevable comme étant prescrite la demande de Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I], Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] de provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance résultant du dysfonctionnement de l’ascenseur durant l’été 2020,
Déboutons Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I] et Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] de leur demande de provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance résultant du dysfonctionnement de l’ascenseur durant l’étéྭ2022,
Déclarons irrecevable, comme étant dirigée contre une personne n’ayant pas qualité pour y répondre, la demande de Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] de provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance résultant de l’état de leur logement, antérieurement au 30 juin 2020,
Déboutons Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] de leur demande de provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice de jouissance résultant de l’état de leur logement, postérieurement au 30 juin 2020,
Condamnons la SARL Saint Dominique Investissements à payer, au titre de l’immobilisation de l’ascenseur du 17 juillet 2023 au 7 novembre 2023, les sommes provisionnelles deྭ:
7.189 euros à Monsieur [D] [E],
3.715,55 euros à Monsieur [V] [I],
2.262,17 euros à Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A],
Condamnons la SARL Saint Dominique Investissements à payer au titre des autres nuisances subies en raison des travaux dans l’immeuble les sommes provisionnelles de :
6.957,03 euros à Monsieur [D] [E],
4.794,26 euros à Monsieur [V] [I],
2.918,92 euros à Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A],
Déboutons les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamnons la SARL Saint Dominique Investissements à payer à Monsieur [D] [E], Monsieur [V] [I], Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] la somme de 1 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, étant précisé, que Monsieur [F] [A] et Madame [R] [I] épouse [A] seront considérés comme une seule et même personne,
Condamnons la SARL Saint Dominique Investissements aux dépens de la présente instance,
Rappelons que la présente décision est exécutoire de droit par provision.
LA GREFFIERELA JUGE