Nuisances sonores : décision du 19 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 20/13303

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Nuisances sonores : décision du 19 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 20/13303
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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section

N° RG 20/13303
N° Portalis 352J-W-B7E-CTP5G

N° MINUTE :

Assignation du :
15 Décembre 2020

JUGEMENT
rendu le 19 Décembre 2023

DEMANDEUR

Monsieur [X] [T]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Marine PARMENTIER de la SELARL WOOG & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0283

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] et [Adresse 1] – [Localité 5] représenté par son syndic en exercice, la société CITYA URBANIA ETOILE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représenté par Maître Norbert NAMIECH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0020

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Madame Elyda MEY, Juge
Monsieur Julien FEVRIER, Juge

assistés de Madame Lucie RAGOT, Greffière,

Décision du 19 Décembre 2023
8ème chambre
1ère section
N° RG 20/13303 – N° Portalis 352J-W-B7E-CTP5G

DÉBATS

A l’audience du 21 Septembre 2023 tenue en audience publique devant Mesdames Laure BERNARD, Vice-Présidente, et Elyda MEY, Juge, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seules l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [X] [T] est propriétaire des lots n°8, 19 et 58 dans l’immeuble sis [Adresse 2]- [Adresse 1] [Localité 5] soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis. Ces lots sont constitués comme suit :

-n°8, un appartement situé au 2ème étage dans le bâtiment A, trois chambres de service portant n°38 et 47 aux 6ème étage du batiment B et portant n°5 au 7ème étage du bâtiment A et deux caves n°2 et 3,
-n°19, un appartement à l’entresol, deux chambres de services portant n°28 et 51 au 6ème étage et deux caves n°59 et 11, le tout dans le bâtiment B,
-n° 58, une chambre de service au 6ème étage portant n° 11.

L’assemblée générale du 4 mai 1999 a autorisé la dissociation des chambres de service portant n°28 et 51 du reste du lot n°19.

Les chambres n°28 et 51 du lot n°19 ont été réunies pour ne former qu’un studio, de même que pour les chambres n°38 et 47 du lot n °8. De plus, la chambre n°5 du lot n°8 a été réunie avec le lot n°58 pour ne former qu’un studio.

Le règlement de copropriété datant du 15 octobre 1928 a fait l’objet de plusieurs modificatifs:
– modificatif en date du 7 novembre 1990 portant subdivision du lot n°5 en deux nouveaux lots n°40 et 41,
– modificatif en date du 4 février 1997 portant division du lot n°10 en deux nouveaux lots n°54 et 55,
– modificatif en date du 15 décembre 2004 portant division du lot n°23 en quatre nouveaux lots n°62, 63, 64 et 65,
– modificatif en date du 30 janvier 2012, publié le 29 fevrier 2012, annulant le lot n°13 remplacé par sept nouveaux lots.

M. [T] a souhaité régulariser la réunion de ses chambres et a demandé l’inscription à l’ordre du jour d’une assemblée générale extraordinaire des résolutions portant notamment sur l’adoption d’un modificatif de l’état descriptif de division établi à sa demande par le cabinet Actif Geo, géomètre expert.

Décision du 19 Décembre 2023
8ème chambre
1ère section
N° RG 20/13303 – N° Portalis 352J-W-B7E-CTP5G

Le syndic a convoqué une assemblée générale le 8 octobre 2020 avec un ordre du jour contenant les trois résolutions inscrites à la demande de M. [T] :

– RESOLUTION N°32: information des copropriétaires à la demande de Monsieur [T]. Article sans vote,
– RESOLUTION N°33: Point d’information sur la division de lots dans la copropriété. Article sans vote,
– RESOLUTION N°34 : Adoption du modificatif à 1’état descriptif de division portant création des lots n°80 à 84 par division du lot n°8, création des lots n°85 à 88 par division du lot n°19 et creation du 1ot n°89 par réunion des lots n°58 et 83. Article unanimité.

Le 8 octobre 2020, l’assemblée générale a rejeté la résolution n°34 laquelle était rédigée en ces termes :

“Résolution n°34 : Adoption du modificatif à l’état descriptif de division portant sur la création des lots n°80 à 84 par division du lot n°8, création des lots 85 à 88 par division du lot n°19 et création du lot 89 par réunion des lots n°58 et 83. Article à l’unanimité.

L’assemblée générale, après en avoir délibéré,

Vu le projet de modificatif à l’état descriptif de division et des charges établi par le cabinet ACTIF GEO, géomètre expert, joint à la convocation.

Approuve le modificatif à l’état descriptif de division de l’immeuble sis 23-25 avenue Mac-Mahon et [Adresse 1] [Localité 5], établi par le Cabinet ACTIF GEO, géomètre expert, annexé à la convocation, portant création des lots n°80 à 84 par division du lot n°8, création des lots n°85 à 88 par division du lot n°19 et création du lot n°89 par réunion des lots n°58 et 83, les quotes-parts des parties communes étant désormais réparties sur 1003èmes.

Approuve également la modification de la grille de répartition des charges générales, ainsi rendues nécessaires.

Mandate le cabinet CITYA URBANIA ETOILE, syndic, à l’effet de signer le modificatif à l’état descriptif de division et des charges, ainsi que tous les actes complémentaires, modificatifs et/ou rectificatifs et d’en faire assurer la publication par un notaire.

Abstentions: 3 copropriétaire(s) représentant 113 tantièmes /1003 èmes,
[…]
Votes contre: 19 copropriétaire(s) représentant 664 tantièmes /1003 èmes,
Votes pour: 2 copropriétaire(s) représentant 83 tantièmes /1003 èmes,
[…]

Soit 664 tantièmes/1003 tantièmes.”

Contestant ce refus, M. [T], par acte du 15 décembre 2020, a fait assigner le syndicat des copropriétaires devant le tribunal judiciaire de Paris lui demandant de :

Vu les dispositions des articles 10-1, 11, 42 alinéa 2 et 43 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu l’article 17 du Décret du 17 mars 1967,

Dire le demandeur recevable et bien fondé en toutes ses demandes.

En conséquence,

Annuler la résolution n°34 de l’assemb1ée générale de l’immeuble du 8 octobre 2020,

Valider le modificatif à l’état descriptif de division établi par le cabinet ACTIF GEO, géomètre-expert, portant création des lots n°80 à 84 par division du lot n°8, création des lots n°85 à 88 par division du lot n°l9 et création du lot n°89 par réunion des lots n°58 et 83, et procéder à la nouvelle répartition des charges ainsi rendue nécessaire,

Réputer non écrite la clause figurant au règlement de copropriété de l’immeuble en date du 15 octobre 1928, page 5, 2° selon 1aquel1e “les appartements ne pourront être revendus ou autrement aliénés ou attribués qu’en totalité sans pouvoir être subdivisés d’aucune manière de façon à ce qu’ils conservent leur caractère d’immeuble bourgeois” et la clause selon laquelle: “Les chambres de bonnes affectées aux appartements ne pourront être louées qu’aux personnes propriétaires ou locataires des parties de la maison”,

Dispenser M. [T] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure engagée par le Syndicat des copropriétaires,

Condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 5] à verser à M. [T] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

Condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 5] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Valérie Assouline-Haddad, Avocat aux offres de droit, par application de l’article 699 du Code de procédure civile.

Par conclusions n°1 notifiées par voie électronique le 3 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2]- [Adresse 1] [Localité 5] représenté par son syndic en exercice, la société Citya Urbania Etoile demande au tribunal de :

Vu les articles 8, 9, 11, 24, 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu le règlement de copropriété de l’immeuble et ses modificatifs,

o Débouter M. [X] [T] de l’ensemble de ses demandes

o CondamnerM. [X] [T] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

o CondamnerM. [X] [T] à supporter les entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Me Norbert Namiech sur le fondement de l’article 699 du CPC.

Le 23 mars 2022, le juge de la mise en état a prononcé une clôture partielle à l’égard du demandeur pour non respect du calendrier de procédure et a écarté ses conclusions notifiées le 22 mars 2022.

Par conclusions récapitulatives et aux fins de rabat de la clôture partielle notifiées par RPVA le 12 avril 2022, le demandeur a notamment sollicité :
– le rabat de l’ordonnance de clôture partielle prononcée à son égard,
– la jonction avec l’affaire enrôlée sous le n° RG 21/04090,
– une mesure de médiation avec Mme [M] désignée dans l’affaire n°RG 21/04090,
Par bulletin du 22 juin 2022, le juge de la mise en état a prononcé la clôture des débats et a rejeté la demande de révocation de l’ordonnance de clôture partielle et la jonction demandée.

L’affaire a été fixée à l’audience du 16 février 2023 puis à celle du 21 septembre 2023 à l’issue de laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 19 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d’annulation de la résolution n°34 de l’assemblée générale du 8 octobre 2020

Aux termes de l’article 11 de la loi du 10 juillet 1965, “Sous réserve des dispositions de l’article 12 ci-dessous, la répartition des charges ne peut être modifiée qu’à l’unanimité des copropriétaires. Toutefois, lorsque des travaux ou des actes d’acquisition ou de disposition sont décidés par l’assemblée générale statuant à la majorité exigée par la loi, la modification de la répartition des charges ainsi rendue nécessaire peut être décidée par l’assemblée générale statuant à la même majorité.

En cas d’aliénation séparée d’une ou plusieurs fractions d’un lot, la répartition des charges entre ces fractions est, lorsqu’elle n’est pas fixée par le règlement de copropriété, soumise à l’approbation de l’assemblée générale statuant à la majorité prévue à l’article 24.

A défaut de décision de l’assemblée générale modifiant les bases de répartition des charges dans les cas prévus aux alinéas précédents, tout copropriétaire pourra saisir le tribunal judiciaire de la situation de l’immeuble à l’effet de faire procéder à la nouvelle répartition rendue nécessaire.”

M. [T], au soutien de sa demande d’annulation de la résolution n°34, se fonde sur l’article 11 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 pour affirmer que la résolution aurait du être votée à la majorité de l’article 24 et non à l’unanimité.

En outre, il prétend que le règlement de copropriété a déjà fait l’objet de plusieurs modificatifs votés à la majorité de l’article 24 notamment celui du 7 novembre 1990, du 4 février 1997, du 15 décembre 2004 et du 30 janvier 2012 portant division de lots. Le vote à l’unanimité de la résolution n°34 romprait alors l’égalité entre copropriétaires.

De plus, il se fonde également sur l’article 17 alinéa 2 du décret du 17 mars 1967 pour soutenir que le procès-verbal expose les votes pour et les votes contre mais pas les résultats du vote, faisant encourir l’annulation de la résolution.

Enfin, il affirme que le rejet de la résolution porte atteinte à ses droits acquis puisque la résolution n°12 de l’assemblée générale du 4 mai 1999 a autorisé M. [I], son vendeur, à éclater le lot n°19 pour dissocier les deux chambres de services. Cette assemblée générale est expressément mentionnée à son acte de vente du 16 septembre 1999. Dès lors, la résolution n°34 ne pouvait revenir sur la résolution n°12 de l’assemblée générale du 4 mai 1999.

En réplique, le syndicat des copropriétaires s’oppose à la demande en affirmant que même soumise à la majorité de l’article 24, la résolution n°34 aurait été rejetée puisqu’elle a fait l’objet de deux votes pour et 19 votes contre soit 83/1003èmes contre 664/1003èmes.

Il prétend que la finalité de la résolution visait à entériner la réunion des chambres de services comprises dans le lot n°8 en un lot n°82, celle des chambres n°28 et 51 du lot n°19 en un lot n°88, celle de la chambre n°5 du lot n°8 et de la chambre n°11 du lot n°58 en un lot n°89 et de valider ses nouveaux en lots en studios lui permettant ainsi d’échapper à la clause restrictive relative à la location des chambres de services.

En tout état de cause, il relève que l’adoption d’un modificatif portant atteinte à la destination de l’immeuble doit être soumise à la majorité de l’article 26 alinéa 4 de la loi susvisée ou à tout le moins celle de l’article 25 f). En outre, il soutient que l’article 11 ne peut s’appliquer en l’espèce puisqu’il suppose une division de lots suivie d’une vente de tout ou partie de ces fractions de lot puis d’un vote portant sur la répartition des charges entre ces fractions ce qui n’est pas le cas de M. [T].

Sur le défaut de mention du résultat du vote, le syndicat des copropriétaires relève que les modalités du vote ainsi exposés sont suffisantes pour permettre de reconstituer le sens des votes. En outre, le résultat pouvait se déduire aisément puisqu’il était mis en évidence que l’unanimité exigée n’était pas atteinte.

S’agissant de l’atteinte alléguée aux droits acquis de M. [T], le syndicat des copropriétaires relève que la résolution critiquée est différente de la résolution n°12 votée par l’assemblée générale du 4 mai 1999 puisque la demande de M.[T] porte sur l’éclatement du lot n°19 en quatre lots et non en cinq, et qu’il a ajouté la division du lot n°8 et la réunion de deux chambres de service, le tout dans la même résolution soumise à un seul vote.

Sur ce,

Sur la majorité applicable

En l’espèce, la résolution n°34 soumise par M. [T] a pour objet la création des lots n°80 à 84 par division du lot n°8, la création des lots n°85 à 88 par division du lot n°19 et la création du lot n°89 par réunion des lots n°58 et 83 et la modification de la grille de répartition des charges générales.

En premier lieu, il sera constaté que même soumise à la majorité de l’article 24, le sens de la décision n’aurait pas été changée, celle ayant été rejetée par 19 copropriétaires représentant 664 /1003 tantièmes contre trois copropriétaires représentant 113/1003 tantièmes et deux copropriétaires abstentionnistes représentant 83/1003 tantièmes.

Pour se prévaloir de l’application de la majorité de l’article 24, telle que prévue par l’article 11 alinéa 2 au vote de la modification de la répartition des charges, M. [T] doit ainsi justifier que cette modification est rendue nécessaire par une aliénation séparée d’une ou plusieurs fractions d’un lot.

Il n’est pas contesté que l’assemblée générale du 4 mai 1999 a déjà autorisé la division du lot n°19 en 5 lots (un appartement, deux chambres de service et deux caves) et a décidé d’attribuer à chacun de ces lots des tantièmes dont le total est égal au total des tantièmes du lot n°19.

Cependant, il convient de rappeler que l’article 11 alinea 2 ne s’applique qu’en cas de division de lots à l’exclusion de la réunion de lots, laquelle doit être soumise au vote à l’unanimité des copropriétaires.

Par conséquent, la résolution querellée comportant en un seul bloc ces deux divisions et cette réunion, était nécessairement à la règle de l’unanimité, de sorte que l’annulation de la résolution ne saurait être encourue au motif de l’application d’une règle de majorité erronnée.

Sur l’abus de majorité
Pour démontrer l’abus de majorité, le copropriétaire qui demande la nullité d’une décision doit démontrer que celle-ci a été adoptée sans motif valable dans un but autre que la préservation de l’intérêt collectif de l’ensemble des copropriétaires ou encore qu’elle rompt l’égalité entre les copropriétaires en favorisant les intérêts personnels de copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ou qu’elle a été prise avec l’intention de nuire ou de porter préjudice à certains copropriétaires.

M. [T] se prévaut des modificatifs précédents à l’état descriptif de division ayant donné lieu à des divisions de lots et ayant été votés à la majorité de l’article 24, pour soutenir que le vote de la résolution critiquée a causé une rupture d’égalité entre les copropriétaires et constitue un abus de majorité.

Toutefois, il apparaît qu’aux termes de la résolution n°14 de l’assemblée générale du 15 mai 2000 ayant autorisé, Mme [H], copropriétaire, à diviser le lot n°12 en sept lots et que, si si le vote n’a pas été soumis à la règle de l’unanimité, elle ne visait qu’une division et non une réunion de lots.

Cette constatation peut également être faite pour la résolution n°13 de l’assemblée générale du 4 mai 1999 qui a autorisé M. [I] à diviser son lot n°19 en cinq lots et la résolution

Ainsi, les autorisations données aux autres copropriétaires sont intervenues dans le cadre de résolutions qui n’étaient pas strictement identiques à celle soumise par M. [T].

“Cependant, il ressort du procès-verbal de l’assemblée générale du 3 octobre 1996 que la résolution n°2 n’a pas été soumise au vote selon la règle de l’unanimité alors que celle-ci autorisait la SCP Gescal à diviser le lot n°10 en deux lots et à réunir les lots n°41 et 56. Cette erreur ne peut toutefois pas justifier qu’il soit dérogé à la règle de l’unanimité prévue à l’article 11 de la loi précitée.”

Par conséquent, ce dernier échoue à démontrer l’existence d’une rupture d’égalité entre copropriétaires et partant, d’un abus de majorité.

Sur l’absence de mention du résultat du vote

Pour chaque résolution, en application de l’article 17 du décret du 17 mars 1967, le procès-verbal d’assemblée doit comporter sous l’intitulé de chaque question inscrite à l’ordre du jour, le résultat du vote, avec le nom des copropriétaires qui se sont opposés à la décision et leur nombre de voix. Cependant, la nullité de la résolution n’est pas nécessairement encourue lorsqu’une reconstitution du vote est possible permettant de déterminer le sens du vote et d’identifier les copropriétaires opposants.

En l’espèce, il ressort du préambule du procès-verbal de l’assemblée générale du 8 octobre 2020 que 24 copropriétaires étaient présents ou représentés totalisant 860èmes/1003èmes.

Or, si la résolution litigieuse n’expose que les noms des trois copropriétaires abstentionnistes et des deux copropriétaires ayant voté pour, il précise le nombre des copropriétaires opposants, de sorte qu’en opérant un croisement avec la feuille de présence dont la teneur figure en préambule du procès-verbal de l’assemblée générale, il est possible de déduire les noms des copropriétaires opposants et de déterminer le sens du vote. Par conséquent, la nullité de la résolution ne saurait donc être encourue pour ce motif.

Sur l’atteinte aux droits acquis

Comme le relève à juste titre le syndicat des copropriétaires, la résolution n°34 soumise à la demande de M. [T] comportait plusieurs objets puisqu’elle visait à la fois la division du lot n°8 en cinq lots, celle du lot n°19 en quatre lots et la réunion des lots n°58 et n°83 en un seul lot, de sorte qu’il n’était pas possible pour l’assemblée générale de statuer de manière distincte sur chacune de ses demandes.

Par conséquent, M. [T] ne peut valablement justifier d’une atteinte à ses droits acquis alors que la division du lot n°8 et la réunion des lots n°58 et n°83 n’ont pas été autorisées par l’assemblée générale.

Au surplus, il est relevé que si M. [T] se prévaut des droits acquis par M. [I] à savoir l’autorisation donnée par l’assemblée générale du 4 mai 1999 de diviser le lot n°19 en cinq nouveaux lots, force est de constater que sa demande n’est pas strictement identique puisqu’il sollicite la création que de quatre nouveaux lots issus de la division du lot n°19.

Par conséquent, au vu de l’ensemble des éléments susvisés, la demande d’annulation de la résolution n°34 de l’assemblée générale du 8 octobre 2020 est rejetée.

Enfin, M. [T] se fonde sur l’article 11 de la loi du 10 juillet 1965 pour demander au tribunal de valider le modificatif à l’état descriptif de division et de procéder à la nouvelle répartition des charges. Toutefois, le sens de la décision conduit à débouter M. [T] de sa demande, cette dernière devenant sans objet.

Sur la demande de déclarer non écrites deux clauses du règlement de copropriété

L’article 8. I. de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que “un règlement conventionnel de copropriété, incluant ou non l’état descriptif de division, détermine la destination des parties tant privatives que communes, ainsi que les conditions de leur jouissance ; il fixe également, sous réserve des dispositions de la présente loi, les règles relatives à l’administration des parties communes. Il énumère, s’il y a lieu, les parties communes spéciales et celles à jouissance privative.

Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation.”

Aux termes de son article 9, chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot. Il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble.

L’article 43 de la même loi ajoute que toutes clauses contraires aux dispositions des articles 1er, 1-1, 4, 6 à 37, 41-1 à 42-1 et 46 et celles du décret prises pour leur application sont réputées non écrites.

M. [T] se prévaut de l’article 9 du 10 juillet 1965 pour demander que soit déclarée non écrite la clause prévue p.5, 2° du règlement de copropriété stipulant que “les appartements ne pourront être revendus ou autrement aliénés ou attribués qu’en totalité sans pouvoir être subdivisés d’aucune manière de façon à ce qu’ils conservent leur caractère d’immeuble bourgeois” et la clause selon laquelle: “Les chambres de bonnes affectées aux appartements ne pourront être louées qu’aux personnes propriétaires ou locataires des parties de la maison”.

Il soutient ainsi que la division de lots est permise en l’absence d’atteinte à la destination de l’immeuble. Il observe que la notion de destination est évolutive et que les restrictions prévues au règlement de copropriété en 1928 ne se justifient plus.

Si l’immeuble a une destination bourgeoise, il considère qu’il n’a plus de caractère luxueux. Ses chambres de services ont été réunies avant même son acquisition et constituent trois studios indépendants, détachés des appartements principaux et peuvent donc être loués à des personnes extérieures. En outre, plusieurs subdivisions sont intervenues depuis, modifiant la configuration et la disposition de l’immeuble et conduisant à la vente de chambres de service séparées des appartements principaux. Il cite ainsi le cas de la SCI Eurodesk et de M. [E].
Il conclut que les locations de ces studios ne sont pas contraires au règlement de copropriété et ni à la destination actuelle de l’immeuble. Par conséquent, la clause restreignant la location doit être également réputée non écrite.

En réponse, le syndicat des copropriétaires conclut au débouté. Il se fonde sur l’article 8 de la loi précitée pour affirmer que les restrictions du règlement de copropriété sont justifiées par la destination de l’immeuble qui est une bâtisse haussmanienne de grand standing située dans un quartier prisé de [Localité 6]. Les caractéristiques de l’immeuble traduisent son standing puisque la copropriété est dotée d’un gardien, de 22 vastes appartements mesurant 210-220 m² pour les appartements sur rue et 100 m² pour les appartements sur cour, outre 60 chambres de service. Il précise que si les professions libérales sont acceptées, aucun commerce n’y est exploité.

Il se fonde sur le règlement de copropriété pour faire valoirqu’il s’agit d’un immeuble d’habitation bourgeoise et que les rédacteurs ont entendu préserver la tranquillité des occupants en y inscrivant plusieurs clauses telles que l’interdiction de la location meublée dans les étages, la limitation des commerces et des professions libérales, l’obligation de louer des chambres de service uniquement aux personnes de l’immeuble, etc. Dans le même esprit, il fait valoir que la clause portant interdiction de céder des fractions de lot visait la préservation du caractère résidentiel de l’immeuble.

En outre, il se prévaut d’un arrêt de la cour d’appel de Paris du 24 novembre 2010 reconnaissant la destination particulière de l’immeuble et rejetant les demandes tendant à déclarer non écrites les mêmes clauses contestées par M. [T]. Il considère que la destination de l’immeuble n’a pas évolué depuis 2010.
Sur les divisions passées, le syndicat des copropriétaires soutient que ces dernières ont été autorisées afin que chaque entité soit numérotée et se voit attribuer des tantièmes de copropriété et non pour permettre leur aliénation par fraction qui reste interdite par le règlement. Il précise qu’à l’instar de M. [T], plusieurs copropriétaires ont réuni des lots sans autorisation et font l’objet d’une procédure en cours aux fins de remise en état.

Sur l’interdiction de louer les chambres de services aux personnes extérieures, il affirme que cette clause est licite et fondée sur le souhait de préserver le caractère bourgeois et la tranquillité des lieux en limitant le nombre d’occupants.

Il expose enfin que M. [T] a procédé à la constitution de ses trois studios en infraction au règlement de copropriété et qu’il fait actuellement l’objet d’une procédure pendante devant ce tribunal aux fins de remise en état.

Sur ce,

En l’espèce, aux termes de l’article 1er , 2° du titre 2 du règlement de copropriété, page 5, sont stipulées les deux clauses suivantes:

“Ils [Les appartements] ne pourront être revendus ou autrement aliénés ou attribués qu’en totalité sans pouvoir être subdivisés d’aucune manière de façon à ce qu’ils conservent leur caractère actuel d’appartements bourgeois”
“Les chambres de bonnes affectées aux appartements ne pourront être louées qu’aux personnes propriétaires ou locataire des parties de la maison”.

En premier lieu, il ressort de l’arrêt du 24 novembre 2010 de la Cour d’appel de Paris que, par acte du 6 janvier 2005, la SCI Taupinière a acquis des consorts [O], le lot n°64 constituant une chambre de service détachée de son appartement principal. Cet arrêt n’a pas remis en cause la validité de l’acte de vente de sorte qu’il ne peut être valablement soutenu par le syndicat des copropriétaires qu’aucune vente de fraction de lot n’a eu lieu dans l’immeuble. Cette information est corroborée par le procès-verbal du 8 octobre 2020 qui attribue à la SCI Taupinère une quote part de 2/1003èmes correspondant à ladite chambre. De même, M. [T] soutient qu’un autre copropriétaire, M. [E] a pu acquérir des chambres de services et des caves. Le même procès-verbal expose que ce dernier dispose d’une quote-part de 5/1003èmes, ce qui apparait cohérent avec la propriété de deux chambres de services et de caves.
Il est donc établi que des chambres de services ont été détachées de leurs appartements principaux et cédées à des personnes extérieures à l’immeuble. En tout état de cause, le syndicat des copropriétaires ne conteste pas que des chambres de services ont déjà été détachées des appartements principaux donnant lieu à plusieurs modifications à l’état descriptif de division.

En second lieu, la destination de l’immeuble se définit par les actes qui la déterminent, notamment le règlement de copropriété, par les caractères dudit immeuble et, en particulier, la qualité architecturale, le standing et la situation de celui-ci.

En l’espèce, le règlement de copropriété précise qu’aucun commerce ou profession ne peut être exercé sauf dans les locaux actuellement utilisés à cet usage et que seules les professions libérales peuvent être exercées dans les appartements, de sorte qu’il apparait que la destination de l’immeuble est mixte.

Il convient de relever que Mme [L] [B] experte immobilière près de la Cour d’appel de Paris, du Cabinet E&A, expose dans le rapport “Qualification d’un immeuble” du 7 mars 2022 (pièce 14 du demandeur) que l’immeuble pouvait être considéré comme étant de standing et non de grand standing. Elle relève notamment que :
– la situation de l’immeuble est recherchée mais située sur une voie à forte circulation générant des nuisances sonores et de la pollution;
– une supérette est mitoyenne à l’immeuble;
-deux entrées de service sont situées dans la cour desservent un hall très étroit et encombré de poubelles;
-les digicodes et interphones comportent des étiquettes non homogènes de couleur, taille et police distinctes;

– six sociétés et locaux professionnels, notamment une clinique de chirurgie esthétique, un cabinet d’avocats, deux cabinets d’expertise comptable, sont installés dans l’immeuble générant des allers-venus de visiteurs;
– il n’y a pas de conciergerie permanente; ni d’homme d’entretien dans l’immeuble;
-l’ascenseur principal est étroit et dispose d’une capacité de deux personnes;
– des taches et des traces sombres sont visibles sur les murs des escaliers et bas de fenêtres;
-le hall secondaire comporte un ascenseur grillagé inesthétique et dispose d’une capacité de trois personnes;
– les paliers sont étroits;
– les parties communes secondaires sont étroites et en très mauvais état d’entretien avec des peintures écaillées, des murs décrépis, des fils apparents, etc.
-d’anciens WC communs sont vetustes et servent de dépotoirs;
– l’immeuble est dans un mauvais état d’entretien général;
– l’immeuble ne dispose ni de parking, ni de terrasses ni de visiophone;
– une chauffage à vapeur aurait des difficultés pour chauffer les étages élevés.

En outre, M. [T] verse au débat une attestation du cabinet Foncia concluant que l’immeuble est de standing et non de grand standing.

Ainsi, il est démontré que si l’immeuble présente des attributs d’un immeuble de standing, jouissant d’éléments décoratifs, de vastes appartements ainsi que de prestations typiques d’un immeuble bourgeois, outre sa situation très prisée, il n’est pas démontré qu’il soit un immeuble unique dans le 17ème arrondissement ni qu’il dispose de caractéristiques remarquables.

Si le syndicat des copropriétaires soutient qu’aucun évènement n’est survenu depuis l’arrêt précité de la cour d’appel de nature à faire évoluer la destination de l’immeuble, il ressort pourtant du débat pourtant que les professions libérales ont augmenté au sein de l’immeuble. En outre, comme déjà relevé, plusieurs chambres de service ont été cédées à des personnes extérieures de l’immeuble.

Dès lors, au regard des caractéristiques, de l’état et de la situation de l’immeuble destiné principalement à l’habitation, des modificatifs successifs à l’état descriptif de division ainsi que des cessions antérieures de chambres de service, les clauses critiquées ne peuvent être considérées comme conformes à la destination de l’immeuble. En effet, il convient d’observer que, compte tenu du contexte immobilier actuel dans [Localité 6], le maintien des chambres de services dépendant des grands appartements ne correspond plus aux critères d’occupation actuelle des immeubles, la destination de ceux-ci étant en effet évolutive en fonction des époques et des modes de vie contemporains, outre que la localisation d’un immeuble dans un quartier prisé de la capitale étant, à lui seul, un élément insuffisant à établir son caractère de “très haut standing”.

Dès lors, la clause “Ils [Les appartements] ne pourront être revendus ou autrement aliénés ou attribués qu’en totalité sans pouvoir être subdivisés d’aucune manière de façon à ce qu’ils conservent leur caractère actuel d’appartements bourgeois” figurant au Titre 2, article 1er, 2° du règlement de copropriété sera en conséquence réputée non écrite.

Par ailleurs, pour les mêmes motifs, la restriction relative à la location des chambres de service ne peut se justifier, étant rappelé que les locations meublées sont déjà autorisées au rez de chaussée de l’immeuble. Les craintes du syndicat des copropriétaires sur le fait que ces locations à des personnes extérieures conduiraient à une augmentation des occupants ne sont pas étayées compte tenu de la superficie des chambres. Ces craintes apparaissent d’autant plus injustifiées que le règlement de copropriété permet la redistribution intérieure des lots et, ainsi, la possibilité de cloisonner et de créer des chambres susceptibles, dès lors, d’augmenter le nombre d’occupants.

Par conséquent, la clause “Les chambres de bonnes affectées aux appartements ne pourront être louées qu’aux personnes propriétaires ou locataire des parties de la maison”. figurant au Titre 2, article 1er, 2° du règlement de copropriété sera en conséquence également réputée non écrite.

Sur les autres demandes

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Le syndicat des copropriétaires succombant principalement à l’instance, sera condamné aux entiers dépens.

Maître Valérie Assouline-Haddad, qui en fait la demande, est autorisée à recouvrer ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision dans les conditions prévues à l’article 699 du code de procédure civile.

De plus, le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer la somme de 2.500 euros à M. [T] en application de l’article 700 du code de procédure civile;

En outre, il convient de débouter M. [T] de sa demande de dispense de toute participation au frais de la présente procédure prévue à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire est de droit et il n’y a pas lieu de l’écarter.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

RECOIT M. [X] [T] en son action;

DEBOUTE M. [X] [T] de sa demande d’annulation de la résolution n°34 de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] – [Adresse 1] [Localité 5] tenue le 8 octobre 2020;

DEBOUTE M. [X] [T] de sa demande de validation du modificatif à l’état de description établi par le Cabinet Actif Geo;

DECLARE non écrite la clause “Ils [Les appartements] ne pourront être revendus ou autrement aliénés ou attribués qu’en totalité sans pouvoir être subdivisés d’aucune manière de façon à ce qu’ils conservent leur caractère actuel d’appartements bourgeois”figurant au titre 2, article 1er, 2° du règlement de copropriété ;

DECLARE non écrite la clause “Les chambres de bonnes affectées aux appartements ne pourront être louées qu’aux personnes propriétaires ou locataire des parties de la maison”. figurant au titre 2, article 1er, 2° du règlement de copropriété;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] – [Adresse 1] [Localité 5] aux entiers dépens;

AUTORISE Maître Valerie Assouline-Haddad à recouvrer ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision dans les conditions prévues à l’article 699 du code de procédure civile;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] – [Adresse 1] [Localité 5] à payer à M. [X] [T] la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile;

DEBOUTE M. [X] [T] de sa demande de dispense de participation aux frais de la présente procédure prévue à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

Fait et jugé à Paris le 19 Décembre 2023.

La GreffièreLa Présidente

 


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