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9 novembre 2023
Cour d’appel de Nancy
RG n°
22/01644
ARRÊT N° /2023
PH
DU 09 NOVEMBRE 2023
N° RG 22/01644 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FALZ
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANCY
16 juin 2022
COUR D’APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE – SECTION 2
APPELANTE :
S.A.S. SOGE2MS prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Chrystelle VALLEE de la SELARL CABINET D’AVOCATS C. VALLEE, avocat au barreau de l’ESSONNE substitué par Me BEDET, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉ :
Monsieur [O] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Florence ALEXIS de l’AARPI CABINITIO substituée par Me CLEMENT-ELLES de la SELARL FILOR AVOCATS, avocats au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président : WEISSMANN Raphaël,
Conseillers : BRUNEAU Dominique,
STANEK Stéphane,
Greffier lors des débats : RIVORY Laurène
DÉBATS :
En audience publique du 06 Juillet 2023 ;
L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 09 Novembre 2023 ; par mise à disposition au greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Le 09 Novembre 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.
M. [O] [H] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société S.A.S SOGE2MS à compter du 01 avril 1999, en qualité d’ouvrier de manutention et d’aide aux monteurs.
La convention collective nationale du commerce des articles de sport et équipement de loisirs s’applique au contrat de travail.
En dernier état de la relation contractuelle, la rémunération moyenne mensuelle brute était de 2052,97 euros.
Par courrier du 20 décembre 2019, M. [O] [H] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 31 décembre 2019, avec notification de sa mise à pied à titre conservatoire.
Par courrier du 07 janvier 2020, M. [O] [H] a été licencié pour faute grave.
Par requête du 06 janvier 2021, M. [O] [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Nancy, aux fins :
– de dire et juger qu’il n’a pas commis de faute grave et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– de condamner la société SOGE2MS à lui verser les sommes de:
– 1 378,54 euros brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 137,85 euros brut au titre des congés payés afférents,
– 12 488,87 euros net à titre d’indemnité de licenciement,
– 4 105,94 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois), outre 410,59 euros brut au titre des congés payés sur préavis,
– 31 821,03 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application du plafond fixé par l’article L.1235-3 du code du travail,
– 3 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens.
Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Nancy rendu le 16 juin 2022 qui a:
– dit que M. [O] [H] n’a commis aucune faute grave,
– dit que le licenciement de M. [O] [H] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
– condamné la société SAS SOGE2MS à lui verser les sommes de:
– 1 378,54 euros brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
– 137,85 euros brut au titre des congés payés afférents,
– 12 488,87 euros net à titre d’indemnité de licenciement,
– 4 105,94 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois),
– 410,59 euros brut au titre des congés payés sur préavis,
– 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– condamné la société SAS SOGE2MS au remboursement des allocations Pôle Emploi versées à M. [O] [H] dans la limite de 6 mois,
– condamné la société SAS SOGE2MS à payer à M. [O] [H] la somme de 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société SAS SOGE2MS aux dépens.
Vu l’appel formé par la société SAS SOGE2MS le 13 juillet 2022,
Vu l’article 455 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de la société SAS SOGE2MS déposées sur le RPVA le 07 avril 2023, et celles de M. [O] [H] déposées sur le RPVA le 10 janvier 2023,
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 07 juin 2023,
La société SAS SOGE2MS demande à la cour:
– de la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
– y faisant droit, de réformer le jugement du conseil de prud’hommes de Nancy en ce qu’il a :
– dit que M. [O] [H] n’a commis aucune faute grave,
– dit que le licenciement de M. [O] [H] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
– l’a condamnée à verser à M. [O] [H] les sommes de:
– 1 378,54 euros brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
– 137,85 euros brut au titre des congés payés afférents,
– 12 488,87 euros net à titre d’indemnité de licenciement,
– 4 105,94 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois),
– 410,59 euros brut au titre des congés payés sur préavis,
– 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– l’a condamnée au remboursement des allocations Pôle Emploi versées à M. [O] [H] dans la limite de 6 mois,
– l’a condamnée aux dépens.
*
Statuant à nouveau :
– de dire et juger le licenciement de M. [O] [H] fondé sur une faute grave,
– de débouter M. [O] [H] de ses demandes au titre de la mise à pied conservatoire, du préavis, des congés payés sur préavis, de l’indemnité conventionnelle de licenciement, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*
Subsidiairement :
– de dire et juger que le licenciement de M. [O] [H] est fondé sur une cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences de droit,
– en conséquence, de limiter le montant le montant des condamnations prononcées à son encontre à la somme brute de 17 005,40 euros au titre de l’indemnité de préavis, des congés payés afférents et de l’indemnité conventionnelle de licenciement,
*
A titre infiniment subsidiaire, si par impossible, le licenciement de M. [H] était déclaré sans cause réelle et sérieuse :
– de limiter le montant des condamnations prononcées à l’encontre de la société à la somme brute de 6 158,91 euros à titre de dommages et intérêts, conformément à l’article L.1235- 3 du code du travail,
*
En tout état de cause :
– de débouter M. [O] [H] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions, et de son appel incident,
– de condamner M. [O] [H] à lui payer la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner M. [O] [H] aux entiers dépens d’instance.
M. [O] [H] demande à la cour:
– de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nancy en ce qu’il a :
– dit qu’il n’a commis aucune faute grave,
– dit que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
– condamné la société SAS SOGE2MS à lui verser les sommes de:
– 1 378,54 euros brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
– 137,85 euros brut au titre des congés payés afférents,
– 12 488,87 euros net à titre d’indemnité de licenciement,
– 4 105,94 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois),
– 410,59 euros brut au titre des congés payés sur préavis,
– 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– d’infirmer le jugement entrepris quant au quantum des dommages et intérêts accordés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*
Statuant à nouveau :
– de condamner la société SAS SOGE2MS à lui verser la somme de 31 821,03 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application du plafond fixé par l’article L.1235-3 du code du travail,
– de condamner la société SAS SOGE2MS à lui verser la somme de 3 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner la société SAS SOGE2MS aux entiers frais et dépens.
SUR CE, LA COUR ;
La cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées par les parties sur le RPVA par la société SAS SOGE2MS le 07 avril 2023 et par M. [O] [H] le 10 janvier 2023.
– Sur les motifs du licenciement.
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. C’est à l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier d’en rapporter la preuve.
Par lettre du 7 janvier 2020, la société SOGE2MS a notifié à M. [O] [H] son licenciement en ces termes:
« A la suite de notre entretien du 31 décembre 2019 auquel vous vous êtes présenté accompagné d’un conseiller, je vous informe que j’ai décidé de vous licencier pour les motifs suivants.
J’ai découvert au cours des dernières semaines que vous allez à l’encontre des procédures mises en place au sein de l’entreprise. Ce non-respect des règles de l’entreprise se fait parfois dans le but de vous soustraire au contrôle de la direction, parfois d’y soustraire vos collègues, parfois de détourner le matériel de la comptabilisation des stocks, voire plus grave, pour votre enrichissement personnel.
Vous ne m’avez fait part à aucun moment des raisons pouvant justifier votre comportement malgré les entretiens que j’ai provoqués pour évoquer avec vous les manquements et détournements constatés.
Depuis votre entrée dans la société, vous vous êtes vu offrir, comme tous les autres salariés de l’entreprise, la possibilité de pouvoir bénéficier, au-delà de 2 ans d’ancienneté, de tarifs d’achats préférentiels sur les produits vendus par le magasin (prix d’achat + 5%).
Cette possibilité est encadrée et gérée dans le cadre d’une procédure diffusée le 1er janvier 2011 et que vous avez signée le 5 janvier 2011. Ce type d’achat à tarif « privilégié » est soumis à différentes règles. Chaque achat doit notamment faire systématiquement et sans exception l’objet d’une validation de la part de la direction.
Or il apparaît que le 4 mai 2019 et le 10 décembre 2019, vous avez effectué 5 achats différents qui ont donné lieu à l’émission de 5 factures. Tous ces achats ont été effectués au tarif salarié sans qu’aucun d’entre eux ne fasse l’objet de la moindre demande de votre part ni de validation de la part de la direction. Vous avez donc pris sur vous de vous soustraire à chaque fois à votre obligation de validation pour ce type d’achat.
Après vérification, il s’avère que vous vous êtes affranchi de toute demande pour bénéficier des conditions tarifaires avantageuses au sein de la société depuis le 19 décembre 2018, date de votre dernière demande d’achat salarié.
Lors de notre entretien du 31 décembre 2019, vous avez feint de découvrir que ces achats étaient soumis à validation malgré le fait que vous ayez signé la procédure et que vous avez respecté celle-ci jusqu’au 19 décembre 2018.
Le 12 décembre 2019, lors de la visite de Mme [R], directrice générale, sur le magasin de Velaine, votre collègue M [W], est arrivé au magasin en milieu de matinée. L’information de l’absence de M [W] ayant été transmises au siège de l’entreprise à [Localité 5], vos collègues sur place se sont étonnés que malgré son absence, M [W] ait pu valider un pointage d’entrée sur son espace personnel à 8H21 ce même 12 décembre.
Interrogé par M. [U], responsable administratif de la société, sur la réalisation de son pointage alors qu’il était absent, M [W] a révélé dans un mail que c’est vous qui aviez pointé à sa place depuis son espace personnel en totale infraction de la procédure de gestion du temps qui régit entre autre les pointages.
Procédure que vous avez signé le 9 octobre 2007 et qui précise : « Chaque salarié possède un dossier créé à son nom, avec un accès sécurisé par un mot de passe. Cet accès est strictement personnel. Seul l’employé titulaire du compte est autorisé à accéder à son propre dossier. En cas de non-respect de cette règle de fortes sanctions peuvent être prises à l’encontre du salarié ayant accédé au dossier dont il n’est pas titulaire (par exemple, pointage pour un autre salarié).
Ce faisant vous avez permis à votre collègue de falsifier sa présence en effectuant de faux pointages. Non seulement la société n’était pas au courant de son déplacement et de son absence mais du fait de votre faux pointage, elle le croyait en poste au magasin.
Lors de l’audit réalisé par le Responsable des ventes, M. [N] [R], les 13 et 14 décembre 2019, un stock de pièces mises à l’écart du reste du stock a été découvert dans un abri de jardin en métal situé derrière l’atelier du magasin.
Un constat d’huissier a été réalisé le 20 décembre 2019 pour attester qu’une vingtaine de pièces pour un total de 1100 euros ont été soustraits au stock du point de vente tant sur le plan physique que comptable, mettant l’entreprise dans l’illégalité au niveau fiscal et soustrayant surtout ces pièces à toute comptabilité et traçabilité.
Les réponses fournies aux questions de l’huissier, n’ont pas permis d’obtenir d’explications satisfaisantes à la soustraction de ces biens des registres comptables et physiques de l’entreprise, allant totalement à l’encontre de toutes les procédures en vigueur au sein de l’entreprise.
Lors de notre entretien du 31 décembre 2019 vous m’avez expliqué que ces pièces (alors que certaines d’entre elles sont neuves) étaient mises à l’écart notamment par vous-même, car elles étaient en attente de destruction.
Vous n’avez apporté aucune justification qui explique pourquoi ces pièces n’apparaissaient pas dans le stock informatique ou comptable. Dans le cadre de la démarche environnementale du traitement des emballages et suite à la demande d’inventaire d’un fournisseur dans le cadre du rachat d’accessoires logistique/ stockage bois et métal, l’entreprise a pris contact les 17 et 18 décembre 2019, avec différents prestataires locaux pour connaître le circuit le plus rentable pour la vente de ces accessoires.
A ma grande surprise, j’ai découvert que l’entreprise, via le magasin de [Localité 6], vendait déjà des grandes quantités de ses accessoires aux sociétés de rachat local. Des factures d’achat et des reçus de paiement m’ont été présentés par les différents fournisseurs.
L’ensemble de ces documents (non exhaustifs) témoignent d’un total de 7 paiements effectués entre le 21 mars 2016 et le 24 mai 2019 pour un montant total de 1049 €.
Tous ces reçus et factures, sans exception sont à votre nom, [O] [H], et non à celui de la société. Ces paiements rémunèrent la cession de biens (palettes de transport, accessoires en acier et en aluminium’) appartenant à l’entreprise.
Lorsque les factures d’achat vous ont été présentées, vous avez reconnu qu’effectivement, bien que ces ventes de marchandises portaient su des biens appartenant à l’entreprise, qu’elles étaient effectuées durant vos heures de travail et avec le véhicule et le matériel de l’entreprise, les revenus de ces ventes étaient encaissées par vous-même et qu’une partie était reversée à d’autres salariés. L’entreprise ne percevant aucun revenu sur la vente des matériels détournés.
Le 19 décembre 2019, lendemain de votre mise à pied conservatoire, vous êtes retourné chez le fournisseur EPALIA pour leur reprocher de vous avoir dénoncé. Votre conduite porte atteinte au bon fonctionnement de l’entreprise. Les explications recueillies lors de l’entretien n’ont pas permis de modifier cette appréciation. J’ai en conséquence, décidé de procéder à votre licenciement pour faute grave. Compte tenu de la gravité de faits qui vous sont reprochés, votre maintient dans l’entreprise s’avère impossible : le licenciement prend donc effet immédiatement à la date d’envoi de la présente, le 7 janvier 2020, sans indemnité de préavis ni de licenciement […] »
– Sur le non-respect des procédures internes relatives à l’achat de matériel.
La société SOGE2MS reproche à M. [O] [H] de n’avoir pas respecté la procédure d’achat de matériel à prix préférentiel au bénéficie des salariés en ne sollicitant pas, comme il en avait l’obligation, l’accord préalable de l’employeur.
M. [O] [H] soutient d’une part qu’il estimait ne devoir solliciter l’accord de l’employeur que pour les achats d’un montant annuel supérieur à 1500 euros, et d’autre part que les commandes ont été validées par son supérieur hiérachique.
Il ressort d’une note interne en date du 5 janvier 2011 (pièce n° 3 du dossier de la société), visée par M. [O] [H], prévoyait:
– que pour bénéficier des conditions préférentielles d’achat, un bon de commande devait être établi et obligatoirement transmis au siège social et validé au préalable à tout achat par la direction ;
– que le montant total des achats de marchandises sur une année calendaire était limité à la somme de 1500 euros par salarié.
La société apporte au dossier des factures (pièces n° 4 à 8 de son dossier) faisant apparaître que ces documents sont établis au nom de M. [O] [H], et mentionnent le nom de M.[Y] [W].
Si la société soutient que M. [Y] [W] n’était pas le supérieur hiérarchique de M.[H] et ne disposait d’aucune autonomie de gestion, il apparaît, aux termes des conclusions de la société (page 3) qu’il devait ‘veiller à l’application…des procédures de la société’ ;
M. [O] [H] pouvait donc se persuader que M. [W] disposait du pouvoir pour présenter à la direction de la société les autorisations d’achat.
Par ailleurs, il convient de relever que le montant annuel cumulé des factures apportées au dossier par la société est notablement inférieur à la somme de 1500 euros.
Dès lors, le grief n’est pas établi.
– Sur le non-respect de la procédure de pointage.
La société SOGE2MS reproche à M. [O] [H] d’avoir pointé le matin du 12 décembre 2019 en lieu et place de M. [W] ;
M. [O] [H] ne conteste pas les faits, expliquant que M. [W] lui avait demandé de pointer pour lui afin de la garantir en cas d’accident de la route, M. [W] ayant décidé le jour dit de se rendre directement de son domicile chez un client.
Le grief est donc établi.
– Sur le grief relatif à la soustraction de biens des registres comptables et physiques de l’entreprise.
La société SOGE2MS reproche à M. [O] [H] d’avoir soustrait des pièces qui devaient être entrées en stock et de les avoir entreposées dans un abri de jardin situé à l’arrière des locaux de l’entreprise dans l’attente de les revendre à son profit personnel.
M. [O] [H] conteste ce grief.
C’est par une exacte appréciation des éléments du dossier, et en particulier le rapport établi par la DIRECCTE dans le cadre de la demande d’autorisation de licenciement de M. [W], que les premiers juges ont estimé que d’une part l’employeur n’apportait aucun justificatif permettant de connaître la provenance ou la destination de ces pièces, et d’autres part que, tous les salariés ayant accès à cet endroit, il n’était pas démontré que les pièces trouvées dans ce local, à les supposées issues de détournement, avaient été déposées sur place par M. [H].
Dès lors, le grief n’est pas établi.
– Sur le grief relatif à la vente à son profit de biens appartenant à la société.
La société SOGE2MS expose qu’elle a découvert les 17 et 18 décembre 2019 que M.[O] [H] avait vendu entre mars 2016 et mai 2019 divers biens appartenant à l’entreprise.
M. [O] [H] conteste ce grief, faisant valoir qu’ils sont prescrits.
La société SOGE2MS ne démontre pas qu’elle a eu connaissance de ces faits dans le délai prévu par l’article L 1332-4 du code du travail.
Dès lors, le grief n’est pas établi.
Compte tenu de ce qui précède, seul le fait du 12 décembre 2019 relatif au non-respect des consignes de pointage peut être retenu.
Si M. [O] [H] a fait l’objet d’un avertissement en 2013, il convient de constater que cette sanction, qui datait de plus de sept ans à la date du licenciement, portait sur des faits de caractère différent de ceux retenus pour le licenciement.
Dès lors, il convient de considérer que le seul fait fautif établi ne justifie pas une mesure de licenciement.
Il y a lieu de dire le licenciement de M. [O] [H] sans cause réelle et sérieuse et en conséquence de confirmer la décision entreprise sur ce point.
– Sur les conséquences du licenciement.
C’est par une exacte appréciation de l’ancienneté de M. [O] [H], soit 20 ans et 9 mois et de sa rémunération mensuelle moyenne brute, que les premiers juges condamné la société SOGE2MS à lui payer les sommes de:
– 1 378,54 euros brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
– 137,85 euros brut au titre des congés payés afférents,
– 12 488,87 euros net à titre d’indemnité de licenciement,
– 4 105,94 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois),
– 410,59 euros brut au titre des congés payés sur préavis ;
La décision entreprise sera confirmée sur ces points.
Il ressort du dossier qu’ultérieurement à son licenciement après 20 ans de présence dans l’entreprise, M. [O] [H] a alterné des périodes de chômage et des contrats de travail à durée déterminée, avant d’obtenir un juillet 2021 un contrat à durée indeterminée pour une rémunération mensuelle brute de 1700,54 euros, soit une rémunération inférieure à celle qu’il percevait antérieurement.
Les premiers juges ont donc exactement fixé à la somme de 25 000 euros l’indemnisation de M. [O] [H] au titre du licenciement sans cause réeelle et sérieuse, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.
La société SOGE2MS qui succombe supportera les dépens d’appel.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [O] [H] l’intégralité des frais irrépétibles qu’il a exposés ; il sera fait droit à cette demande à hauteur de 2500 euros.
PAR CES MOTIFS:
La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement rendu le 16 juin 2022 par le conseil de prud’hommes de Nancy ;
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes ;
Y ajoutant:
CONDAMNE la société SOGE2MS aux dépens de la procédure d’appel ;
LA CONDAMNE à payer à M. [O] [H] une somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
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