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3 mai 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
20/00693
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
————————–
ARRÊT DU : 03 MAI 2023
PRUD’HOMMES
N° RG 20/00693 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LOJA
Monsieur [J] [Y]
c/
SAS CHAUSSON MATERIAUX
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 janvier 2020 (R.G. n°F 19/00077) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PÉRIGUEUX, Section Industrie, suivant déclaration d’appel du 07 février 2020,
APPELANT :
Monsieur [J] [Y]
né le 10 Janvier 1973 à [Localité 3] ([Localité 3]) de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Alexandre ALJOUBAHI, avocat au barreau de PERIGUEUX
INTIMÉES :
SAS Chausson Matériaux, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]
N° SIRET : 528 648 892 03671
représentée par Me Axelle MOURGUES, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée de Me Cécile AUTHIER substituant Me Florence MILAN de la SCP CAPSTAN, avocat au barreau de TOULOUSE,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 mars 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bénédicte Lamarque, conseiller chargé d’instruire l’affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sylvie Tronche, conseillère
Madame Bénédicte Lamarque, conseillère
Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [J] [Y], né en 1973, a été engagé en qualité de magasinier chauffeur par la SAS Chausson Matériaux, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 octobre 2006.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du négoce des matériaux de construction.
Suite à un avenant du 1er octobre 2012, M. [Y] a occupé les fonctions d’agent technico-commercial, puis, par nouvel avenant en date du 1er février 2017, celles de responsable d’accueil.
En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [Y] s’élevait à la somme de 1.425,43 euros.
Par courrier du 13 novembre 2017, M. [Y] a été sanctionné par un avertissement en raison d’une mauvaise tenue du libre-service. Par courrier du 28 novembre 2017, M. [Y] a contesté cet avertissement. Par lettre datée du 11 décembre 2017, la société Chausson Matériaux a maintenu cette sanction.
Le 14 décembre 2017, M.[Y] a été destinataire d’un nouvel avertissement en raison d’un comportement inapproprié à l’égard de son responsable hiérarchique. Par courrier du 18 décembre 2017, M.[Y] a contesté cet avertissement.
Le 18 décembre 2017, M.[Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie, prolongé régulièrement jusqu’au 23 mars 2018.
Le 6 février 2018, M. [Y] a été convoqué par le médecin conseil de la caisse d’assurance maladie dans le cadre du suivi de l’arrêt de travail pour une consultation fixée au 12 février 2018.
A la suite d’une visite du 20 mars 2018, le médecin du travail a conclu à la reprise du travail à compter du 24 avril 2018 en mi-temps thérapeutique.
Le 24 avril 2018, la société Chausson Matériaux a adressé à M.[Y] un avenant au contrat de travail proposant un mi-temps thérapeutique.
A partir de juillet 2018, M. [Y] a repris son travail à temps plein.
Par lettre datée du 11 octobre 2018, M. [Y] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 23 octobre 2018 avec mise à pied à titre conservatoire.
Il a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 26 octobre 2018.
Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnité, outre des rappels de salaires, le paiement de sa mise à pied conservatoire, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et la remise sous astreinte des documents de fin de contrat, M. [Y] a saisi le 30 avril 2019 le conseil de prud’hommes de Périgueux qui, par jugement rendu le 21 janvier 2020, a :
– débouté M. [Y] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société Chausson Matériaux de l’ensemble de ses demandes,
– dit que chaque partie assumera ses propres dépens.
Par déclaration du 7 février 2020, M. [Y] a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 17 juin 2021, M. [Y] demande à la cour de réformer le jugement en ce qu’il l’a débouté de l’ensemble de ses demandes et dit que chaque partie assumera ses propres dépens et, statuant à nouveau, de :
– condamner la société Chausson Matériaux à lui payer la somme de 9.262,71 euros à titre de rappel de salaire (heures supplémentaires) pour les années 2015, 2016, 2017, 2018, et celle de 926,27 euros au titre des congés payés afférents,
– dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
– annuler la mise à pied conservatoire,
– condamner la société Chausson Matériaux à lui payer les sommes suivantes :
* 6.144 euros bruts au titre de l’indemnité de licenciement,
* 3.882,40 euros bruts au titre du préavis,
* 388,20 euros bruts au titre des congés payés,
* 1.193,40 euros bruts à titre de paiement de la mise à pied conservatoire,
* 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– dire que toutes les sommes réclamées seront productives d’intérêts au taux légal et ordonner la capitalisation des intérêts,
– ordonner à la société Chausson Matériaux la remise sous astreinte de 100 euros par jour de retard des documents et salaires rectifiés, relatifs à la fin de contrat, conformément à l’arrêt à intervenir,
– condamner en cause d’appel la société Chausson Matériaux au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
– débouter la société Chausson Matériaux de l’ensemble de ses demandes.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 juillet 2020, la société Chausson Matériaux demande à la cour de’:
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Périgueux du 21 janvier 2020 dans toutes ses dispositions,
– constater la réalité, le sérieux et la gravité des griefs fondant le licenciement pour faute grave de M.[Y],
– dire bien-fondé le licenciement pour faute grave de M.[Y],
– débouter M.[Y] de l’ensemble de ses demandes,
A titre principal,
– déclarer irrecevable la demande nouvelle de demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des congés payés y afférents,
A titre subsidiaire,
– constater que la demande de rappel de salaire au titre du minima conventionnel doit être limitée à 2.661,76 euros bruts,
– condamner M.[Y] à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M.[Y] aux dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 14 mars 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Si deux sociétés figurent dans le jugement déféré et dans la déclaration d’appel, il apparaît en réalité qu’il s’agit de la même société dont le siège social est situé à [Localité 4], la deuxième société assignée n’étant qu’un établissement secondaire de la SAS Chaussons Matériaux.
Sur l’exécution du contrat de travail
– Sur l’irrecevabilité de la demande en paiement des heures supplémentaires
La société soulève l’irrecevabilité de la demande en rappel de salaire au titre des heures supplémentaires en ce qu’elle est une demande nouvelle et distincte de celle portée en première instance de rappel de salaire pour non-respect du minima conventionnel.
Le salarié soutient au contraire que la demande de paiement d’heures supplémentaires se rattache à la demande initiale de rappel de salaire.
Devant le conseil des prud’hommes, M. [Y] sollicitait le paiement d’un rappel de salaire conformément aux dispositions conventionnelles fixant un minima pour une durée de travail de 151,67 heures alors que son contrat prévoyait une rémunération sur la base de 39 heures de travail par semaine pour un montant de 7.410,17 euros outre les congés payés y afférents.
Il maintient cette demande en appel, mais y ajoute une demande de rappel de salaire correspondant à la majoration de 25% des 4 heures effectuées chaque mois au-delà de la durée légale hebdomadaire, sollicitant ainsi le paiement d’heures supplémentaires à hauteur de 1.852,54 euros outre les congés payés y afférents.
Dès sa requête initiale, M. [Y] a fait un calcul de son salaire de base rapporté au taux horaire sur 151,67 heures mensuelles et sur 169 heures mensuelles, pour le voir comparer aux minima conventionnels.
En sollicitant en cause d’appel le paiement majoré de la 36ème à la 39ème heure, le salarié formule une demande tendant aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si le fondement juridique est différent, demande qui se rattache à la demande initiale, conformément à l’article 565 du code de procédure civile, et qui est dès lors recevable.
– Sur la demande de paiement des heures supplémentaires et le rappel de salaires
Pour voir condamner la société à lui verser la somme de 7.410,17 euros, M. [Y] invoque la contradiction entre les dispositions de son contrat qui ont fixé son salaire pour 39 heures de travail par semaine sans comptabiliser les heures supplémentaires dues au-delà des 35 heures légales, les 12 jours de RTT ne pouvant lui être décomptés comme correspondant à la majoration de 25% de la rémunération horaire puisqu’il n’a jamais bénéficié d’un forfait annuel.
M. [Y] sollicite également le paiement d’un rappel de salaires à hauteur de 1.852,54 euros correspondant à la différence entre les salaires perçus entre 2015 et 2018 et les minima conventionnels qui auraient dû lui être versés sur ces années en s’opposant à la compensation de ce différentiel par le versement d’une prime d’objectifs.
Au soutien de ses demandes, M. [Y] produit les avenants à son contrat de travail du 1er octobre 2012 et du 1er février 2017 et ses bulletins de paie faisant état de la réalisation de 169 heures par mois.
La société ne conteste pas les horaires invoqués mais se fonde sur l’accord d’entreprise du 5 juillet 1999 aménageant la durée du travail par son annualisation sur un cycle de 13 semaines, pour soutenir que M. [Y] a bénéficié d’une rémunération pour 169 heures au taux de base et de 12 jours de RTT correspondant à la majoration de 25% de la rémunération horaire pour les heures de travail effectif réalisées entre la 36ème et la 39ème heure.
La société soutient par ailleurs que le minima conventionnel a été respecté dès lors que la prime d’objectifs doit être intégrée et rappelle qu’il faut “neutraliser” les mois durant lesquels il a été en arrêt de travail, soit du 20 décembre 2017 au 23 avril 2018. Elle mentionne avoir cessé d’être adhérente au syndicat FNBM à partir du 1er janvier 2018, de sorte que l’avenant du 13 février 2018 étendu par l’arrêt ministériel en date du 29 mai 2019 ne lui est pas opposable.
Subsidiairement, elle demande que soit fixé à la somme de 2.661,76 euros le montant des rappels de salaire qui pourraient être dûs à M. [Y].
***
Si une entreprise relève d’un accord d’aménagement du temps de travail (accord de branche ou d’entreprise) conclu avant le 21 août 2008, date d’entrée en vigueur de la loi dite “Travail” n°2008-789 du 20 août 2008, aménagement au titre duquel peut figurer l’ancienne modulation du temps de travail, elle peut, en vertu de l’article 20 de la dite loi, continuer d’appliquer cet accord et ce, sans limitation de durée, tant qu’il n’est pas dénoncé ou remplacé.
En vertu de l’article L 3122-9 ancien du code du travail, une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l’année à condition que, sur un an, cette durée n’excède pas un plafond de 1 607 heures.
La convention ou l’accord précise les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation.
La convention ou l’accord doit respecter les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail définies au chapitre Ier.
En l’espèce, la convention collective du 8 décembre 2015 applicable en l’espèce, prévoit en son article 4. 2 “la possibilité pour les entreprises d’organiser et d’aménager le temps de travail, hors forfaits en jours, en laissant le choix aux entreprises,” dans le respect des règles légales en matière de durée maximale journalière, hebdomadaire et sur une période de 12 mois consécutifs. L’accord d’entreprise en date du 29 juin 1999 prévoit en son chapitre 2 une organisation du temps de travail “se traduisant par une modulation sur l’année permettant d’adapter la durée du travail aux variations de l’activité.
L’avenant à l’accord d’entreprise en date du 2 septembre 2013, et non du 5 juillet 2010 comme indiqué à tort par la société, précise que la “durée du travail est organisée dans le cadre d’un “cycle” de 13 semaines dont la durée moyenne de travail effectif est de 35 heures en moyenne ou d’une durée supérieure pour les salariés bénéficiant d’heures supplémentaires contractualisées” afin de faire face aux fluctuations d’activité tout en permettant aux salariés de prendre des heures de récupération de façon régulière. Les jours de récupération doivent être pris à l’intérieur de ce “cycle”.
Les heures supplémentaires sont dues pour chaque heure effectuée au-delà de la base contractuelle incluant ces heures supplémentaires.
Ce même avenant prévoit le lissage de la rémunération sur la base de l’horaire mensuel moyen rémunéré stipulé au contrat, indépendamment de l’horaire réellement accompli. S’il apparaît que le salarié a accompli une durée du travail supérieure à la durée correspondant au salaire lissé, il est accordé au salarié un complément de rémunération équivalent à la différence de rémunération entre celle correspondant aux heures réellement effectuées et celles rémunérées.
En l’espèce, l’avenant au contrat de travail de M. [Y] du 1er octobre 2012 prévoit dans son article “HORAIRES DE TRAVAIL” :
“Les activités de M. [Y] ne pouvant s’intégrer dans un cadre d’horaire fixe et prédéterminé, M. [Y] sera soumis à un forfait de 39,00 h par semaine durant lequel il organisera son temps de travail.
De ce fait, le décompte du temps de travail de M. [Y] sera effectué en journées travaillées.
En contrepartie, M. [Y] se verra attribuer 12 jours de congés supplémentaires au cours d’une période de 12 mois consécutifs”.
L’avenant du 1er février 2017 n’a pas touché à ce dispositif qui est resté applicable aux nouvelles fonctions de responsable d’accueil.
L’avenant au contrat de travail ne fait référence ni à la convention collective, ni à l’accord d’entreprise ; toutefois l’article L. 3121-43 du même code précise que la mise en place d’une organisation de modulation de jours RTT dans un cadre annuel ou de cycle prévue par un accord postérieur au 24 mars 2012, l’avenant à l’accord cadre datant 2 septembre 2013, ne nécessite pas une formalisation de l’accord express du salarié par écrit.
En application des dispositions contractuelles, de l’accord d’entreprise et de son avenant applicable, le salarié est donc recevable à demander le paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà des 35 heures, dans le cadre de la modulation déduction faite des 7,80 h supplémentaires par mois, compensées par l’acquisition d’un jour RTT mensuel, en se basant sur le montant conventionnel minimal qu’il aurait dû percevoir pour calculer son taux horaire.
La convention collective du 8 décembre 2015 applicable en l’espèce prévoit en effet un salaire minimum conventionnel mensuel correspondant à la durée légale du travail par catégorie professionnelle pour tous les ETAM.
Aux termes de l’article “rémunérations” de l’avenant au contrat de travail signé entre les parties le 1er octobre 2012, la rémunération mensuelle brute du salarié a été répartie comme suit :
“- salaire fixe mensuel brut : 1.460 euros,
– Prime d’objectif fixe, dans un premier temps, à hauteur de 250 euros, puis variable, calculée sur les réalisations du mois précédent,
– Prime d’ancienneté : 100,61 euros”.
L’avenant au contrat de travail du 1er février 2017 a modifié les montants convenus de la façon suivante, supprimant la prime d’objectif :
“- salaire fixe mensuel brut : 1.813,3 euros
– Prime d’ancienneté : 159,40 euros,”
La réalisation des objectifs impartis au salarié étant directement liée à l’exécution par celui-ci de sa prestation de travail, il en résulte que la prime contractuelle, allouée en fonction de la réalisation de ces objectifs, constitue pour les mois où elle est versée, un élément de salaire entrant dans le calcul du minimum conventionnel garanti.
Ainsi, du 1er novembre 2015 au 31 janvier 2017, M. [Y] a perçu une rémunération de base augmentée d’une prime d’objectifs fixe de 250 euros mensuelle, laquelle constitue pour les mois où elle est versée, un élément de salaire entrant dans le calcul du minimum conventionnel garanti. A partir du 1er février 2017, son salaire de base a été augmenté de 250 euros pour être maintenu à 1.813,30 euros, le salarié ne bénéficiant plus contractuellement d’une prime d’objectifs.
M. [Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie du 18 décembre 2017 au 23 mars 2018.
Conformément à la convention collective applicable, il avait droit à une prise en charge à 100% de son traitement pendant les 90 jours de son arrêt maladie étant dans la 11ème année d’ancienneté, soit jusqu’au 30 mars 2008 compte tenu des deux jours de carence. L’employeur était donc tenu au complément du salaire jusqu’au 30 mars 2018.
M. [Y] a ensuite repris à mi-temps thérapeutique du 24 avril au 30 juin 2018 percevant une rémunération de 1.023,71 euros pour 82,33 h par mois.
A partir de juillet 2018 jusqu’au 30 septembre 2018, il a perçu un salaire de base de 1.941,20 euros, exerçant de nouveau à temps plein.
Ainsi, au regard de ces minima conventionnels fixés pour 151,67 heures à 1.772, 04 euros de novembre 2015 à février 2016, à 1.784,25 euros de mars 2016 à février 2017 à 1.802,10 euros de mars 2017 à septembre 2018, des droits au maintien du salaire pendant la période d’arrêt maladie du 20 décembre 2017 au 30 mars 2018, de la rémunération brute perçue par M. [Y] comprenant la rémunération de base et la prime d’objectifs, après application d’une majoration de 25% pour les heures effectuées contractualisées jusqu’à la 39ème heure calculée à partir des minima conventionnels, déduction faite des heures compensées au taux horaire non majoré par les jours RTT, la société sera condamnée à lui verser la somme de 7.750,43 euros au titre du rappel de salaire sur les trois années entre novembre 2015 et septembre 2018 ainsi que la somme de 775,04 euros au titre des congés payés y afférents.
Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement en date du 26 octobre 2018 qui fixe l’objet du litige comporte cinq griefs.
L’employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d’un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise.
1 – Sur le grief tiré de l’absence de port des équipements de protection individuels,
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« (…) Nous avons constaté que vous ne portez pas régulièrement les équipements de protection individuelle, pourtant obligatoires lors de l’exécution de vos fonctions.
En effet, le 11 septembre 2018, alors que Monsieur [I], responsable du contrôle de gestion, effectuait une tournée sur l’agence de ST-MARTIAL, ce dernier a constaté que vous ne portiez pas votre gilet fluorescent, pourtant constitutif des équipements de protection individuels.
Nous vous rappelons pourtant que le règlement intérieur est très clair sur ce point.
En effet, ce dernier stipule que “chaque salarié utilise les moyens de protection individuelle ou collective appropriés en fonction des postes de travail et mis à sa disposition et respecte strictement les consignes données à cet effet.
Les protections doivent être bien ajustées afin de jouer leur rôle en cas de nécessité et d’éviter l’accident ou la maladie professionnelle.
Sera considéré comme faute professionnelle le refus ou la négligence de porter des protections individuelles spécifiques”.
Cette mesure vise à vous protéger des risques lorsque vous êtes sur le parc puisque le moindre incident peut être dramatique. A ce titre, il est inadmissible que nous soyons obligés de vous rappeler à l’ordre sur un sujet aussi important que la sécurité.
Lors de entretien, vous avez reconnu que ces faits étaient possibles, ce qui démontre que vous reconnaissez ne pas porter régulièrement vos équipements de protection individuels ».
L’employeur reproche au salarié de ne pas avoir respecté l’article L. 4122-1 du code du travail et l’article 15 du règlement intérieur alors qu’il est amené à se déplacer sur le parc de marchandises.
M. [Y] conteste ce grief au motif qu’en sa qualité de responsable d’accueil, il n’avait pas à porter de manière continue le gilet fluorescent et que s’il s’agissait d’assurer sa sécurité physique, la personne qui l’a croisé sans gilet aurait dû immédiatement lui signaler afin qu’il le mette.
***
En l’espèce, le règlement intérieur en son article 15 indique que « chaque salarié utilise les moyens de protection individuelle ou collective appropriés en fonction des postes de travail et mis à sa disposition et respecte strictement les consignes données à cet effet. (…) Sera considérée comme faute professionnelle le refus ou la négligence de porter de protections individuelles spécifiques ».
L’employeur ne produit aucune consigne propre au poste de responsable d’accueil du salarié justifiant qu’il avait l’obligation de porter un gilet fluorescent. Cependant, les parties reconnaissent que lors des déplacements dans le parc de marchandises, le port de ce gilet était obligatoire comme relevant des équipements individuels de protection indispensables à assurer la sécurité des salariés.
Or, M. [Y] a été vu le 11 septembre par le responsable du contrôle de gestion « Présent sur le parc sans porter son gilet fluorescent », lequel a adressé un courriel à la direction le 13 septembre 2018.
Ce grief est donc établi.
2 – Sur le grief tiré du détournement de la tarification préférentielle réservée au personnel de l’entreprise
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
‘ il existe au sein de l’entreprise une tarification préférentielle réservée aux salariés de notre société, dont les conditions d’utilisation sont précisées par les notes de service n° 14 et n°24.
Or, force est de constater que, les 16 août et 21 septembre 2018, vous avez fait bénéficier à votre nièce, Madame [X] [S], des tarifs réservés à notre personnel.
Lors de l’entretien, vous avez dans un premier temps nié les faits en affirmant que vous n’aviez jamais fait aucune remise à votre nièce. Or, après que Monsieur [D] vous ait apporté la preuve de ses affirmations, vous avez fini par reconnaître une partie des faits, démontrant par conséquent votre mauvaise foi.
Ainsi, vous avez accordé à une personne extérieure à l’entreprise des remises très en dessous des prix du marché de la zone pour des clients particuliers jusqu’à 53%, et ce à l’insu de votre hiérarchie.
Il s’ agit d’un abus de confiance vis à vis de votre employeur qui vous permet de bénéficier d’une tarification préférentielle. Vous avez ainsi contourné notre procédure interne en faisant un tout autre usage d’une faveur qui vous a été attribuée personnellement.
Par ailleurs, ces man’uvres constituent un préjudice réel pour l’entreprise, car les marchandises ont été facturées sans que l’entreprise puisse bénéficier de la marge de fonctionnement habituelle.
De tels agissement conduisent nécessairement à la remise en cause de la tarification préférentielle pour l’ ensemble des salariés, et il est déplorable que les agissements d’une seulepersonne puissent pénaliser le personnel d’une société toute entière ».
L’employeur reproche au salarié d’avoir établi des factures à sa nièce à un prix de 44% inférieur au prix public, en méconnaissance des notes de services qui réservaient la possibilité d’appliquer un tarif privilégié aux seuls salariés et pour leur résidence principale.
Il fait valoir l’autonomie du salarié dans l’exécution de ses missions qui étaient de vendre et prendre les commandes, d’assurer la prise en charge commerciale et de superviser les missions des équipes au comptoir, expliquant l’absence de contrôle de tous les bons de livraison qu’il établissait, le logiciel n’émettant d’alerte informatique qu’en cas de prix en dessous de la marge.
Pour expliquer l’application d’un tarif privilégié à sa nièce, M. [Y] soutient avoir appliqué le tarif réservé aux clients particuliers et non aux salariés et que s’il avait appliqué une remise non autorisée, le logiciel aurait déclenché immédiatement une alerte informatique. Au vu des factures produites, il soutient qu’il n’est pas démontré qu’il aurait appliqué le tarif réservé aux salariés, la procédure spécifique n’ayant pas été suivie.
***
En l’espèce, par notes de service des 18 novembre 2009 et 24 juin 2014, signées par M. [Y] le 25 mars 2015, l’utilisation du compte de tarification personnelle est soumise à des conditions spécifiques, et notamment le bénéfice personnel du salarié, pour des travaux de construction d’habitation ou de rénovation de sa résidence principale, étant précisé que le non-respect de l’une de ces conditions serait constitutif d’une faute susceptible de justifier le licenciement du salarié.
Or, il ressort des pièce versées aux débats que M.[Y] a établi plusieurs factures au nom de Mme [S] [X], sa nièce, le 16 août 2018 pour un montant de 70,13 euros HT alors que le prix public était de 112,47 euros, appliquant une décote de 37,65% et le 21 septembre 2018 pour différents produits et pour un montant total de 35,29 euros au lieu d’appliquer le prix public de 57,85 euros.
Le salarié ne démontre pas que des clients dits “particuliers” pourraient bénéficier de tarifs préférentiels ni que sa nièce ferait partie de ces clients.
En procédant de sa seule initiative à une réduction de prix, M. [Y] a manqué à ses obligations contractuelles, sans qu’il puisse être reproché à l’employeur de ne pas avoir mis en place un système d’alarme bloquant le logiciel de prise de commande en cas de détournement par les salariés.
Le grief est établi.
3 – Sur le grief tiré du non respect de la procédure liée aux inventaires
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« Dans le cadre de vos fonctions, il vous appartient notamment de compter et/ou de saisir les inventaires et de rechercher les causes des écarts éventuels. Nous constatons cependant un manque de rigueur dans la réalisation de cette mission, pourtant essentielle.
Nous vous rappelons que nos procédures internes prévoient des règles très précises pour les comptages d’inventaires. Ainsi, lors des inventaires journaliers, vous devez, à partir de l’édition d’une liste qui vous est remise, compter le stock effectivement présent sur le parc.Une fois ce premier comptage réalisé, vous devez saisir informatiquement les résultats trouvés, après quoi, à l’aide d’une édition chiffrée du stock informatique, i1 doit être procédé à un second comptage. La différence éventuelle entre les stocks physique et informatique doit alors faire l’objet de régularisations, de manière à maintenir un stock informatique le plus précis possible.
Or, le 12 octobre 2018, suite à un audit du contrôleur de gestion affecté a 1’agence de ST-MARTIAL, nous avons constaté que vous aviez délibérément été à l”encontre de cette procédure.
En effet, nous avons constaté que vous étiez I’auteur de plusieurs inventaires saisis à blanc.
Ainsi, vous avez saisi de fausses quantités afin d’obtenir directement les quantités informatiques, vous permettant alors de valider les inventaires très rapidement et sans écarts.
C’est notamment le cas des inventaires 24201043 et 24210337.
Nous avons également retrouvé la trace de nombreux inventaires validés à blanc par vous-même sur la période de mars à septembre 2018.
Votre comportement est particulièrement grave car vos agissements ont pour conséquence une différence entre les stocks physiques réels et les stocks informatiques. Ainsi, les stocks sont évidemment faussés avec toutes les conséquences préjudiciables que cela peut entraîner pour l’entreprise, comme en particulier des données fausses sur notre application mobile ou notre site Internet à destination des clients, ou encore un risque de rupture d’approvisionnement sur un produit ou de surstock inutile sur un autre.
En effet, nous vous rappelons que le bon fonctionnement d’une agence est fondé sur un stock juste à un instant précis, et que votre attitude aurait pu remettre en cause la qualité de notre service client et n’est, en tout état de cause, pas compatible avec notre démarche d’excellence opérationnelle.
Lors de l’entretien, vous avez une nouvelle fois nié catégoriquement les faits dans un premier temps, jusqu’à ce que Monsieur [D] vous apporte la preuve de ses affirmations.
Par conséquent, il est évident que vous aviez parfaitement conscience du fait que vous agissiez hors procédure, ce que nous ne pouvons tolérer ».
L’entreprise reproche au salarié d’avoir saisi de fausses quantités informatiques pour valider l’inventaire sans écart en ne procédant pas au comptage de la marchandise comme il le lui était demandé.
M. [Y] invoque la complexité de la procédure, alors qu’il n’avait pas été formé pour y procéder, rappelant sa nomination au poste de responsable en février 2017, qu’il n’a occupé que jusqu’en décembre 2017, date à laquelle il a été en arrêt de travail pour maladie, pour reprendre en mi-temps thérapeutique fin avril 2018 et à temps plein au 1er juillet 2018.
Il mentionne également les difficultés rencontrées par d’autres salariés, visés pour des erreurs dans la procédure d’inventaire où l’employeur leur reprochait la mauvaise gestion des stocks. Il soutient que la société ne produit que des bordereaux d’écart et non les bordereaux d’inventaire.
***
Il ressort des courriels produits reprenant des copies d’écran que des inventaires ont été réalisés par M. [Y] sans respect de la procédure prévue à cet effet et ont eu pour conséquence de fausser le stock de matériels dans l’entreprise comme étant non conforme à la réalité.
Toutefois, la société ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle avait donné les moyens à M. [Y] de réaliser sa mission notamment en assurant sa formation conformément à l’article L. 6321-1 du code du travail et la procédure apparaissait suffisamment complexe pour que d’autres salariés aient également reçu des avertissements pour ces mêmes fautes professionnelles.
Ce grief ne peut donc être retenu.
4 – Sur le grief lié au non-respect des procédures internes liées à la facturation
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
* Auto-facturation
« Le 14 septembre 201 8, Monsieur [I] nous a alerté sur le fait que vous n’aviez pas respecté la procédure interne liée à la facturation, et ce à plusieurs reprises.
A titre d’exemples, nous avons constaté que vous vous étiez facturé de la marchandise sur votre propre compte les 14 et 16 août 2018.
Ces faits sont d’autant plus graves qu’après investigations, nous avons relevé de précédents écarts de votre part concernant des facturations datant de 2017 et 2018.
En tant que responsable d’accueil, vous n’êtres pas sans savoir, que conformémént aux procédures en vigueur au sein de notre entreprise, il est strictement interdit au personnel d’établir une facture en son nom propre.
En effet, les notes de service n°14 et 24 précisent que ” les débits et commandes de marchandises ainsi que leurs chargements ne doivent pas être effectués par le titulaire du compte lui-même.”
Vous ne pouvez arguer du fait que vous n’aviez pas connaissance de l’existence de cette procédure puisque vous avez signé la demande d’utilisation de la grille 9 le 27 mars 2015, qui rappelle explicitement cette consigne.
* Etablissement de fausses factures
Concernant le bon de facturation du 16 août 2018, vous avez en réalité établi la facture de 6 blocs portes sur le compte de votre nièce, puis édité un avoir sur la totalité de cette commande, pour au final refacturer 4 blocs portes sur votre propre compte, et un bloc porte sur le compte de votre nièce.
Lors de l’entretien, vous avez précisé agi ainsi car lorsque a vous appelé votre nièce afin que cette dernière vienne récupérer la marchandise, elle vous a indiqué ne pas avoir les fonds nécessaires pour régler cet achat. Vous avez alors établi un avoir, pour au final vous refacturer une partie et l’autre partie à votre nièce.
Il est à noter qu’en agissant de la sorte, vous avez détourné l’utilisation de la grille de tarification préférentielle puisque vous vous êtes facturé de la marchandise destinée en réalité à votre nièce, et que vous avez facturé votre nièce au tarif des collaborateurs de l’entreprise.
Par ailleurs, il semble évident que I’usage de tels procédés vous a permis d’établir de fausses factures au nom de votre nièce afin que cette dernière puisse débloquer des fonds auprès d’établissements bancaires.
En effet, la facturation ayant été réalisée à 14h50 et 1’avoir à 14h51, il est évident que votre façon de procéder avait un tout autre but puisque vos explications ne peuvent correspondre à la réalité des événements.
En utilisant de telles man’uvres, vous avez usé des moyens de l’entreprise et les avez détournés en faveur d’un membre de votre famille.
Vos agissements sont d’autant plus graves qu’il ne s’agit pas de faits isolés puisque vous avez procédé de la même façon le 28 septembre 2018, en établissant une facture suivi d’un avoir sur le compte de votre nièce, puis une refacturation sur votre propre compte.
Nous vous rappelons qu’ une facture est un document comptable officiel. Dès lors, la facture et les éléments qui y figurent doivent être sincères, exacts et complets et l’opération réalisée également réelle et conforme à ces éléments. A ce titre, le code du commerce prévoit que tout manquement à ces règles est puni d’une amende de 75 000 euros.
Ainsi, ce en qui est agissant de inadmissible. la sorte, vous avez délibérément placé notre société dans une situation illégale, ce qui est inadmissible.
* Commandes spéciales sans acompte
Par ailleurs, nous vous rappelons que, conformément la procédure n°2 des procédures générales de l’entreprise, toute commande spéciale d’un client au comptant doit faire l’objet d’un acompte
En l’espèce, vous avez une nouvelle fois transgressé nos procédures internes puisque dans les situations précédentes, vous avez commandé de la marchandise pour un client au comptant sans avoir préalablement encaissé d’acompte, ce qui est inadmissible.
Or, du fait de votre fonction, vous savez pertinemment que cette procédure est essentielle puisqu’elle nous permet de bénéficier d’au moins 30% du montant de la marchandise retirée, et ce, même dans le cas où le client ramènerait la marchandise.
Cet acompte se justifie autant plus que, s’agissant de “commandes spéciales”, il est très difficile pour notre entreprise de revendre le matériel retourné par la suite.
Encore une fois, force est de constater que vous avez outrepassé les missions qui vous incombaient en ne respectant pas les consignes en vigueur au sein de notre société.
* Bons de facturation sans encaissements
De la même façon, vous avez contourné la procédure selon laquelle un bon de facturation doit impérativement donner lieu à un encaissement pour les clients au comptant.
En effet, en 1’espèce, bien que les factures aient directement été suivies d’ un avoir, vous avez établi des bons de facturation pour des clients au comptant, et ce sans avoir préalablement encaissé la somme correspondante.
Une telle façon de procéder est inadmissible puisque le bon de facturation précise que la marchandise a bien été payée, ce qui n’est pas le cas en réalité ».
L’employeur reproche au salarié d’avoir établi une facture pour son propre compte, en 2017, mais également les 14 et 16 août 2018, de n’avoir pas demandé à sa nièce le 3 août 2018 de verser l’acompte de 30% au moment de la commande de 5 blocs porte, celle-ci n’ayant pas de compte client, d’avoir établi un avoir pour les mêmes produits le jour même au nom de sa nièce, puis de les avoir facturés à son nom propre en appliquant les tarifs réservés aux salariés afin que sa nièce n’ait pas à les régler directement et d’avoir ainsi réglé le 16 août 2018 le paiement de 4 blocs portes au tarif privilégié des salariés, sa nièce n’en ayant payé qu’une seule.
Il reproche également au salarié d’avoir réitéré cette facturation le 28 septembre 2018 par le même jeu de commande sans paiement d’acompte et d’avoir, le même jour édité une facture à son nom pour ces mêmes produits mais à un prix privilégié de salarié.
Pour contester ce grief, M. [Y] soutient avoir fait valider ses achats par son supérieur hiérarchique, que les marchandises étaient pour lui, et qu’en tout état de cause elles ont été réglées.
Il est démontré par les prises de commandes au nom de M. [Y], des commandes passées au nom de sa nièce établies par lui, de l’absence de versement de tout acompte, des jeux d’écriture sur les avoirs le même jour de la commande puis quelques jours plus tard d’une facture au nom du salarié sans respect des procédures internes, M. [Y] ne démontrant pas avoir respecté la procédure interne avec l’accord de son supérieur hiérarchique, que les marchandises ainsi achetées l’ont été avec le tarif réservé aux salariés mais étaient à destination d’un membre de sa famille, ces faits constituant une série de fautes contractuelles.
Le grief est établi.
5 – Sur le grief tiré du comportement à l’égard de la clientèle
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« Le 27 juin 2018, notre client SARL AJM nous a fait part de son mécontentement quant à votre prestation de travail. Or, malgré plusieurs mails faisant état d’un manque de rigueur dans l’exercice de vos fonctions, force est de constater que la situation ne s’est pas améliorée puisque ce dernier nous a écrit une nouvelle fois le 9 octobre 2018 afin de nous signaler qu’il ne souhaitait plus se rendre sur I’agence de ST-MARTIAL.
De la même façon, le 9 octobre 2018, nous avons reçu un courrier de notre client [Z] [T] nous faisant part de votre comportement particulièrement déplacé à l’égard de vos collègues de travail, mais également à l’égard de la clientèle de l’agence.
Une telle attitude est inacceptable sur votre lieu de travail. Vous êtes en effet soumis au regard de nos clients, ce qui vous oblige à porter une attention particlière à votre comportement.
Or, de tels agissements portent gravement atteinte à l’image de marque de notre société, ce que nous ne pouvons tolérer. Nous vous rappelons qu’en tant que commerçant, la satisfaction de nos clients est notre priorité absolue, et que de ce fait, nous devons veiller à leur assurer une qualité de service irréprochable, mais également un accueil convivial et chaleureux en agence.
De la même façon, il est anormal que vous ayez suscité le mécontentement de plusieurs clients, alors qu’il résulte de vos obligations contractuelles d’observer un comportement irréprochable à leur égard.
Ainsi, en tant que responsable d’accueil, votre fiche fonction précise que vous êtes responsable de la qualité du service client et de l’accueil physique ou téléphonique. A ce titre, vout devez notamment porter une attention particulière à votre présentation et à votre présentation et à votre comportement puisque vous véhiculez l’image de la société ».
L’employeur reproche au salarié d’avoir manqué à ses obligations découlant de ses missions contractuelles en qualité d’agent responsable de l’accueil, des clients s’étant plaint à plusieurs reprises du manque d’organisation de M. [Y] lorsqu’il passe les commandes, de ce qu’il ne répond pas à “leurs attentes techniques et commerciales”, ou encore qu’il “reste dans son fauteuil, se moque de tous ne vient pas en aide à ses collègues, rigole quand il voit certains de ses collègues sur le parc”.
M. [Y] soulève l’irrecevabilité des attestations versées en ce qu’elles ne respecteraient pas les prescriptions imposées par l’article 202 du code de procédure civile et met en doute leur véracité car elles datent de la période où il allait être licencié.
***
Les courriers produits aux débats étant adressés à la direction de la société pour se plaindre du comportement du salarié n’ont pas à respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile.
Toutefois, M. [Y] verse de nombreuses attestations de collègues et de clients qui démontrent au contraire son professionnalisme et viennent contredire ces 3 courriers produits par la société, aucun collègue du salarié ne s’étant par ailleurs plaint de ce que M. [Y] ne venait pas les aider.
Ce grief n’est pas établi.
M. [Y] invoque sa santé fragile, ayant été placé en arrêt de travail pour maladie produisant la lettre en date du 17 février 2018, du Dr [N] psychiatre, à son médecin traitant, le décrivant comme souffrant d’un “syndrome dépressif majeur avec anorexie, amaigrissement, douleur morale, insomnie importante, dévalorisation, sur un terrain anxieux (…) Ce monsieur paraît très sincère dans ce qu’il dit qu’il aurait subi réellement des pressions très importantes au niveau professionnel”.
Au vu des 3 griefs établis sur les 5 reprochés au salarié dans la lettre de licenciement, de ce qu’ils portent sur des manquements à des obligations essentielles du contrat et des procédures internes, dont il était porté à la connaissance des salariés qu’ils seraient susceptibles d’être sanctionnés disciplinairement, y compris par le licenciement, de ce que M. [Y] a réitéré les faits contrevenant aux procédures de facturation, sans que des problèmes de santé n’interfèrent dans de tels agissements, il est démontré que la gravité de ces fautes justifiait l’impossibilité pour l’entreprise de maintenir le salarié à son poste ainsi que la mise à pied à titre conservatoire et le licenciement pour faute grave .
Les demandes de M. [Y] seront rejetées et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les demandes financières
Le licenciement reposant sur une faute grave et M. [Y] fondant sa demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire sur l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, celle-ci sera rejetée et le jugement déféré confirmé de ce chef.
La cour ayant dit le licenciement fondé, les demandes portant sur le paiement de l’indemnité légale de licenciement, de l’indemnité de préavis et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse seront rejetées et le jugement déféré confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
La société devra délivrer à M. [Y] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiés en considération des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, la mesure d’astreinte sollicitée n’étant pas en l’état justifiée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société, partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement à M. [Y] de la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cours d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Déclare recevable la demande en paiement d’heures supplémentaires formée par M. [Y],
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté M. [Y] de ses demandes de rappel de salaire correspondant à la différence entre les salaires perçus et les minima conventionnels qui auraient dû lui être versés et de paiement des heures supplémentaires entre 2015 et 2018,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Chausson Matériaux à verser à M. [Y] les sommes de :
– 7.750,43 euros au titre du rappel de salaire correspondant aux heures effectuées non payées entre 2015 et 2018
– 775,04 euros au titre des congés payés y afférents,
Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le conseil de prud’hommes, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
Ordonne à la société Chausson Matériaux de délivrer à M. [Y] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiés en considération des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,
Condamne la société Chausson Matériaux SAS aux dépens ainsi qu’à payer à M. [Y] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire