Non-respect des procédures internes : 19 avril 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 19/01931
Non-respect des procédures internes : 19 avril 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 19/01931
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19 avril 2022
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
19/01931

ARRÊT N°

N° RG 19/01931 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HLGH

MLG/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MENDE

01 avril 2019

RG :F 18/00014

[Y]

C/

S.A.R.L. BIENMANGER.COM

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 19 AVRIL 2022

APPELANTE :

Madame [W] [Y]

née le 16 Mars 1973 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Céline ROUSSEAU de la SCP CABINET ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉE :

S.A.R.L. BIENMANGER.COM

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe POUGET, avocat au barreau de LOZERE

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 03 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l’audience publique du 17 Février 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 Avril 2022

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 19 Avril 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [W] [Y] a été embauchée par la SARL Bienmanger.com en contrat à durée indéterminée à compter du 16 juin 2015 en qualité de chef de projet internet.

Par courrier en date du 24 novembre 2017 Mme [Y] a été convoquée à un entretien préalable à une rupture conventionnelle fixé au 30 novembre 2017.

Par courrier recommandé en date du 12 décembre 2017, Mme [Y] a été convoquée à une entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 21 décembre 2017 et a fait l’objet d’une mise à pied conservatoire.

Par courrier en date du 20 décembre 2017, l’employeur a refusé la rupture conventionnelle.

Par courrier recommandé en date du 4 janvier 2018, Mme [Y] a été licenciée pour faute grave.

Par requête en date du 28 mars 2018, Mme [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Mende aux fins de contester son licenciement et obtenir réparation de ses divers préjudices, lequel par jugement en date du 1er avril 2019 a :

– Débouté Mme [Y] de l’ensemble de ses demandes.

– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

– Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Mme [Y] a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 10 mai 2019.

‘ Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 23 juillet 2019, Mme [Y] demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Mende le 1er avril 2019.

Statuant de nouveau :

– condamner la SARL Bien manger.com à lui payer les sommes suivantes nettes de CSG-CRDS :

> 6425 euros à titre d’indemnité compensatrice,

> 642 euros à titre de congés payés

> 1820 euros au titre du remboursement de la mise à pied conservatoire (soit le salaire compris entre le 12 décembre 2017 et le 4 janvier 2018) ,

> 182 euros à titre de congés payés afférents,

> 2763,12 euros à titre d’indemnité de licenciement,

> 15000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et, à tout le moins sans cause réelle et sérieuse,

> 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

– la sanction se matérialisant par un licenciement pour faute grave a violé le principe du ‘non bis in idem’ en sanctionnant des faits l’ayant déjà été par le biais d’un avertissement,

– l’ancienneté des griefs est supérieure à une année,

– l’employeur ne rapporte pas la preuve que ses retards occasionnels ont perturbé le bon fonctionnement de l’entreprise ou ont engendré des répercutions sur les résultats de l’entreprise de sorte que le maintien de la relation de travail était possible,

– aucun des griefs exposés dans la lettre de licenciement ne peut être retenu à son encontre.

‘En réplique aux termes de ses écritures transmises le 10 octobre 2019, la SARL Bienmanger.com sollicite :

– déclarer Mme [W] [Y] infondée en son appel,

– la débouter de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

– confirmer le jugement querellé.

Y ajoutant,

– la condamner à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que :

– Mme [Y] a été licenciée en raison de 4 griefs : le non respect de l’horaire de travail, le non respect des procédures internes de l’entreprise, son comportement à l’égard de la hiérarchie et de l’équipe et ses insuffisances professionnelles,

– le principe du ‘non bis in idem’ ne peut être invoqué puisque la salariée n’a pas tenu compte des avertissements en réitérant son comportement fautif,

– les multiples retards suffisent à caractériser la faute grave,

– les retards ont altéré la qualité du travail de la salariée et créés un trouble au sein de l’entreprise s’illustrant par la plainte d’autres salariés.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens, il convient de se référer aux écritures.

Par ordonnance en date du 1er décembre 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 3 février 2022..

L’audience de plaidoirie a été fixée au 17 février 2022.

MOTIFS DE L’ARRÊT :

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend immédiatement impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise. Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en apporter la preuve.

La lettre de licenciement en date du 4 janvier 2018 notifiant le licenciement pour faute grave de la salariée indique que : ‘ suite à l’entretien préalable du jeudi 21/12/2017 à 16h30 auquel vous avez été convoquée par lettre recommandée avec AR le 12/12/2017, entretien auquel vous étiez présente et assistée de M.[V] [S], nous vous notifions par la présente votre licenciement sans préavis pour faute grave et ceci pour les motifs suivants :

1- Le non respect de l’horaire de travail

Suite à de trop nombreux retards, nous vous avons adressé un avertissement le 23/06/2017 concernant le respect des horaires de travail. Nous vous avons adressé une remarque orale le 19/09/2017 après une arrivée tardive ( 10h10) et à nouveau le 29/09/2017, après une arrivée à 9h40. Vous avez reconnu ces retards chroniques mais contesté l’avertissement du 23/06/2017 par lettre du 29/09/2017.

Le vendredi 27/10/2017, nous vous avons indiqué que nous maintenions l’avertissement du 23/06/2017 et lors d’un entretien, avons attiré une nouvelle fois votre attention sur le respect de l’horaire collectif et la durée de travail (heure d’arrivée, heure de départ, durée effective de travail, temps de pause). La déléguée du personnel vous a également alertée.

Or :

– le lundi 30/10/2017 à 9h10 – alors que l’horaire collectif prévoit une embauche à 9h – vous avez indiqué par mail ‘je dois emmener ma chienne chez le vétérinaire car elle est malade depuis hier. Je voudrais donc faire du télétravail aujourd’hui.’

– le mardi 31/10/2017, nous avons constaté qu’à 9h35 vous n’étiez toujours pas présente à votre poste de travail sans explication ni demande préalable.

Lors de notre entretien du 21/12/2017, vous avez d’ailleurs reconnu ces deux retards.

Votre non-respect répété de l’horaire collectif de travail est constitutif d’une faute grave.

Vu le nombre d’alertes que nous vous avons fait à ce sujet, et vu la concomitance entre une énième explication – le vendredi 27 octobre au soir- et un énième retard- le lundi 30 octobre à 9h vous n’étiez pas à votre poste, nous retenons que ces retards répétitifs et délibérés et le refus de respecter nos demandes relatives au respect des horaires sont constitutifs d’insubordination.

L’insubordination est constitutive d’une faute grave.

2- Le non respect des procédures relatives aux demandes de congés et de télétravail

Concernant votre demande de télétravail du lundi 30 octobre 2017 au motif que votre chienne était malade, nous vous avons indiqué à plusieurs reprises que la prise de congés ou l’organisation de journées en télétravail était soumise à notre validation préalable.

Le lundi 30 octobre 2017, en nous indiquant à 9h10 clairement que vous ne viendriez pas au motif que votre chienne était malade, vous ne nous avez laissé d’autres choix que d’accepter une demi-journée de congés et une demi-journée de télétravail.

La prise de congés et l’organisation de journées de télétravail sans autorisation préalable est une faute grave et traduit une nouvelle fois un comportement d’insubordination.

3- Des problème d’attitude vis-à-vis de la hiérarchie et de l’équipe

A plusieurs reprises, et encore le vendredi 27/10/2017, vous avez proféré des commentaires désobligeants vis-à-vis de la gérance , notamment en présence de collègues.

Votre comportement et votre attitude nuisent gravement au fonctionnement normal de la société et au fonctionnement harmonieux de l’équipe et pose de multiples problèmes : de coordination avec les équipes, de respect des règles collectives… Par exemple, le mardi 31 octobre 2017 à l’ouverture, nous avons été confrontés à un problème critique relevant de vos attributions, que nous avons dû résoudre par nous-mêmes vu que vous n’étiez pas arrivée.

Cela n’est pas tolérable et votre comportement est fautif.

4- Des insuffisances professionnelles graves

Deux ans après votre arrivée dans la société, nous constatons que vous semblez souvent perdue ou incapable de donner une réponse aux questions qui vous sont posées, questions que vous laissez d’ailleurs souvent sans réponse. Cela génère des critiques et plaintes de la quasi-totalité des services ; l’insatisfaction quant aux réponses que vous apportez est quasi générale.

Cela conduit les responsables de pôles à chercher à vous court circuiter pour obtenir des réponses ou pire à ne même plus remonter leurs problèmes ou demandes d’amélioration. Ce qui est parfaitement anormal.

Par exemple, depuis de longs mois, vous travaillez au passage RWD du site. Ce projet n’a abouti que fin novembre 2017 en votre absence parce que j’ai repris son pilotage personnellement en main et en urgence. Alors que vous deviez livrer ce projet en juillet 2017, au plus tard courant été 2017. C’est donc très insuffisant.

Nous retenons dans votre insuffisance professionnelle grave en ce qu’elle résulte d’un désinvestissement injustifié dans l’accomplissement de vos fonctions.

Pour ces motifs nous vous notifions votre licenciement sans préavis pour faute grave. Ce licenciement prend donc effet immédiatement à la date de la notification de la présente à savoir le 4 janvier 2018, sans indemnité de préavis, ni de licenciement.

Nous vous rappelons que vous avez fait l’objet par courrier d’une mise à pied à titre conservatoire prenant effet le 13/12/2017 qui prend fin par la présente notification de votre licenciement. Par conséquent, la période non travaillée ( du 13/12/2017 au 4/01/2018) nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée.

Nous vous indiquons que vous êtes libre de toute obligation de non-concurrence à notre égard. Les documents relatifs à la fin de contrat de travail sont disponibles auprès des services RH ( Leslie Herail) avec qui vous voudrez bien prendre rendez-vous pour pouvoir les retirer. Vous récupérerez également les affaires personnelles que vous avez laissées à votre bureau et vous voudrez bien restituer le matériel informatique en votre possession ( ordinateur portable et accessoires).

Concernant la séquence liée à votre demande d’une rupture conventionnelle, à votre demande d’une indemnité de rupture supra légale et aux différentes menaces que vous avez proférées dans ce cadre :

– menace de consultation d’un syndicat – ce qui est votre droit

– menace de saisir l’inspection du travail- ce qui est votre droit

– menace de saisir le conseil de prud’hommes – ce qui est votre droit

– menace de saisir le médecin du travail- ce qui est votre droit- pour vous faire déclarer inapte- ce qui nous semble par contre relever de la seule appréciation du médecin du travail.

Au vu des explications que vous avez fournies lors de l’entretien du 21 décembre à 16h30, nous notons pour mémoire vos menaces – considérant qu’elles constituent une forme de chantage sortant de la simple négociation entre les parties- mais ne le prenons pas en compte pour motiver votre licenciement.’

Il résulte de ce courrier que le motif du licenciement repose sur le non respect des horaires de travail, le non respect des procédures relatives aux demandes de congés payés et télétravail, des problèmes d’attitude vis-à-vis de la hiérarchie et de l’équipe et des insuffisances professionnelles graves.

> Sur le grief relatif au non respect de l’horaire de travail et sur le grief relatif au non respect des procédures relatives aux demandes de congés payés et télétravail

Afin de démontrer le grief allégué, l’employeur verse au débats les pièces suivantes :

– courrier d’avertissement de l’employeur en date du 23 juin 2017 : ‘ depuis le début de l’année nous notons régulièrement que vous arrivez après l’horaire d’embauche ou partez avant l’heure de fin de journée. Nous notons également une prise régulière de pauses aux cours des journées de travail.

Pour exemple, le mercredi 21 juin, vous êtes arrivés à 9h40, êtes partie à 17h30 et dans la journée vous avez également pris 1h40 de pause comme j’ai pu le constater en partageant votre bureau.

Je vous rappelle les horaires de travail collectif:

> le matin 9h- 12h30

> l’après-midi 14h- 17h30

A votre demande et sur notre validation, de légers aménagements peuvent être organisés ( heure d’arrivée ou de départ).

Je vous rappelle que les temps de pause (café, repas, appels personnels, lecture journaux…) ne font pas partie du temps de travail effectif.

Le non respect des horaires de travail est un manquement au contrat de travail qui nous lie. Cela perturbe également le fonctionnement de la société et les tâches à mener avec l’ensemble des équipes.

Ce courrier vaut avertissement pour les faits énoncés. Leur réitération m’amènerait à prendre les sanctions qui s’imposent.’

– courrier de Mme [Y] en date du 20 septembre 2017 de contestation de son avertissement indiquant notamment : ‘ ce matin 20/09 vous m’avez fait une remontrance verbale devant une collègue, ce que j’estime humiliant, parce que je suis arrivée à 9h35. Vous m’avez menacée en affirmant qu’il s’agissait du ‘dernier avertissement’. C’est ce qui motive la remise de ce courrier aujourd’hui. Je précise à l’intention de l’inspection du travail que je ne suis pas la seule à arriver après 9h le matin mais que je suis la seule à subir ces reproches. Je m’efforcerai désormais d’effectuer les horaires que vous indiquez puisque vous considérez que toute flexibilité horaire constitue un ‘manque de respect grave’ et donc un casus belli. Si un problème informatique bloquant intervient en dehors de ces plages horaires fixées, je vous ferai une demande préalable d’heures supplémentaires comme indiqué dans mon contrat de travail.’

– courrier en réponse de l’employeur en date du 9/10/2017 confirmant l’avertissement et rappelant à la salariée les horaires de travail et son obligation de demander préalablement à l’employeur pour réaliser des heures supplémentaires et pour modifier les horaires de travail ainsi que la confirmation de l’avertissement oral en raison de nouveaux retards le 19 et 29 septembre 2017.

– courrièl de Mme [Y] en date du 02/11/2016 à 9h30 : ‘ mon fils est malade et je ne suis pas en forme olympique, je fais donc du télétravail aujourd’hui.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 10/01/2016 à 9h15 : ‘ je travaille chez moi aujourd’hui, mon fils est malade, je l’emmène chez le médecin’.

– courrièl de Mme [Y] en date du 06/09/2016 à 10h32 : ‘ je vais travailler chez moi aujourd’hui car ma voiture m’a fait quelques frayeurs sur la route (direction) du coup, j’ai fait demi-tour et je viens de la poser chez le garagiste’

– courrièl de Mme [Y] en date du 17/10/2016 à 10h44 : ‘ j’ai très mal au dos ce matin, pour le moment ça ne passe pas donc je vais travailler de chez moi aujourd’hui’

– courrièl de Mme [Y] en date du 13/10/2016 à 8h13 : ‘ je suis convoquée chez le médecin-conseil de la sécu. Ensuite je vais à BMS car je vais travailler sur un bug avec [P] sur les lots dynamiques qui doit fausser les stocks donc c’est une prio. J’y sera vers 11 heures je pense.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 18 octobre 2016 à 8h13 : ‘ je n’étais déjà pas en forme hier et ça se confirme : j’ai un genre de gastro, day-off aujourd’hui, je vais voir le médecin.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 9 novembre 2016 à 9h25 : ‘je travaille de chez moi aujourd’hui, l’état des routes n’est pas au top et j’ai peur que cela ne s’améliore pas.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 14 novembre 2016 à 8h32 : ‘ mon fils après un stage de théâtre intensif ce w.e, ne peut plus poser le pied par terre (entorse’). Je l’emmène chez le médecin à 9h30. Si rien de trop grave et quil ne faut pas aller à l’hôpital je travaillerai à distance.’

– courrièl de la direction le 15 novembre 2016 : ‘ pour hier a passé en congés. Elle n’a pas pu travailler. Elle te fait passer sa feuille.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 28 novembre 2016 : ‘ j’ai de nouveau mal dans le rein, ce n’est sans doute pas très grave mais il faut que je me repose et que j’aille voir le médecin. Je serai donc absente aujourd’hui.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 6 décembre 2016 : ‘ j’ai un rdv médical à [Localité 4] demain à 11h, je vais donc travailler de chez moi et je ne serai pas dispo en fin de matinée du coup.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 5 janvier 2017 : ‘ désolée mais ce matin je ne suis pas en état de venir travailler, je tousse non stop et cela m’épuise. Je vais donc essayer de me reposer et si je peux je ferai du télétravail cette a.m. J’espère que je serai plus en forme demain, dans ce cas je me rendrai chez BMS, j’ai plein de choses à voir avec [P].’

– courrièl de Mme [Y] en date du 23 janvier 2017 à 8h50 : ‘ j’ai un problème de chaudière et j’attends le plombier, je vais donc travailler à la maison aujourd’hui.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 3 février 2017 à 10h17 : ‘ j’ai mal au dos, je travaille chez moi aujourd’hui’

– courrièl de Mme [Y] en date du 10 février 2017 à 8h50 :’ je viens d’avoir le garagiste au téléphone et ma voiture sera prête cet a.m : je vais donc travailler de chez moi aujourd’hui.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 14 février 2017 à 9h19 : ‘ j’ai rdv au tribunal d’instance à Millau à 14h, c’est prévu depuis 2 mois mais j’avais oublié que c’était cette semaine, c’est google agenda qui vient de me le rappeler. Je travaille donc de chez moi aujourd’hui : ce matin sûr, je ne serai pas joignable en début d’a.m et si jamais c’est trop long, je vous préviendrai et je posera mon a.m (mais je ne pense pas ).’

– courrièl de Mme [Y] en date du 20 mars 2017 à 9h07 : ‘ je serai absente aujourd’hui : je pose un jour de congé pour m’occuper de mon fils qui a fait un passage aux urgences hier soit et qui n’est pas en forme ce matin.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 21 mars 2017 à 10h13 : ‘ mon fils n’est toujours pas bien : il a du mal à respirer, il vient d’avoir une injection de cortisone et si ça passe pas je dois le ramener aujourd’hui. Je reste donc encore avec lui aujourd’hui.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 30 mars 2017 à 10h03 : ‘ j’ai dû passer à la boutique Orange ce matin (portable KO), je pars maintenant.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 2 mai 2017 à 9h08 : ‘ j’étais en retard ce matin , je n’étais pas prête à l’heure pour partir avec JY : je travaille donc de chez moi;’

– courrièl de Mme [Y] en date du 15 mai 2017 à 9h29 : ‘ j’ai un 2ème rdv chez le dentiste vendredi 19 à 14h, vu mes problèmes de locomotion actuels, je travaillerai donc de chez moi.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 26 juin 2017 à 9h10 : ‘ je serai absente aujourd’hui je vais voir le médecin.’

– courrièl de Mme [Y] en date du 3 juillet 2017 à 9h04 : ‘ je serai absente : je pose un jour de congés. Désolée de prévenir au dernier moment mais je dois passer chez le garagiste et à la préfecture.’

– échange de courrièls entre Mme [Y] et son employeur en date du 30 Octobre 2017 :

‘ à 9h10 Mme [Y] écrit : je dois emmener ma chienne chez le vétérinaire car elle est malade depuis hier. Je voudrais donc faire du télétravail

à 9h19 l’employeur répond : il me semble difficile d’être chez le véto et en télétravail en même temps. On peut éventuellement prévoir : demi journée de congés et demi-journée de télétravail. Le cas échéant précise moi quelle demi journée tu sera joignable pour organiser la journée. Ou sinon journée en congés.

À 9h40 Mme [Y] répond : ‘ j’ai rendez-vous chez le véto à midi cela ne me semble donc pas être incompatible avec du télétravail’ Dans la convention collective des entreprises de vente à distance il y a un accord du 06/07/2015 relatif au télétravail ‘les parties au présent accord veulent promouvoir et faciliter l’organisation de travail qui permettront aux salariés qui le souhaitent, notamment pour des raisons de vie personnelle, de réaliser, par accord individuel avec leur employeur, tout ou partie de leur temps de travail à leur domicile ou en dehors des locaux de l’entreprise en utilisant les technologies de l’information et de la communication.

Vu le travail à faire pour le projet RWD, il me semble judicieux que je puisse travailler à distance . Si je n’ai pas ton accord je prends 1 journée de congé.’

– attestation de M.[K] en date du 7 août 2018 qui sera écartée pour ne pas respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile

– attestation de Mme [O] en date du 3 août 2018 qui sera écartée pour ne pas respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile

– attestation de M.[X] qui sera écartée pour ne pas respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile

– les retards relevés par l’employeur et notés sur son agenda à raison de 18 retards entre 10mn et 2 heures entre le 18 janvier 2016 et le 31 octobre 2017.

En réplique Mme [Y] verse au débat :

– le relevé de son agenda Google du mois d’avril au mois d’octobre 2017 pour démontrer qu’elle faisait du covoiturage presque tous les jours sur cette période de sorte que ses collègues étaient aussi des retardataires,

– le tableau récapitulatif des jours où elle est arrivée après 9h30 mais partie après 17h30,

– relevé Redmine dont il convient de rappeler qu’il ne s’agit pas d’une pointeuse mais juste les heures où elle a mis à jour une tâche.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les retards réguliers, les prises de congés ou de journées de télétravail sans demande préalable sont incontestables et démontrés par l’employeur.

Contrairement à ce qu’affirme Mme [Y], ces griefs ne peuvent être considérés comme prescrits ou déjà sanctionnés par les deux avertissements en ce qu’ils s’inscrivent dans un comportement fautif qui perdure et qui s’est poursuivi à la suite des deux avertissements comme le démontrent les nombreux courrièls.

Mme [Y] a régulièrement imposé à son employeur des jours de congés ou de télétravail en le prévenant le matin et toujours après l’heure à laquelle elle aurait déjà dû être présente et ce, même après avoir fait l’objet de deux avertissements lui rappelant précisément ses obligations.

Les deux premiers griefs sont établis et constituent à eux seuls une faute suffisamment grave rendant immédiatement impossible le maintien de Mme [Y] dans l’entreprise.

> sur le grief relatif aux problèmes d’attitude vis-à-vis de la hiérarchie et de l’équipe

L’employeur reproche à Mme [Y] d’avoir tenu des propos dénigrants vis-vis de la direction en présence d’autres salariés et produit l’attestation de Mme [R] qui sera écartée pour ne pas respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile.

En réplique Mme [Y] produit une attestation de M.[U] en date du 18 mai 2018 qui sera écartée pour ne pas respecter les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile.

L’employeur ne rapporte pas la preuve de ce grief qui ne sera pas retenu à l’encontre de la salariée.

> Sur le grief relatif à l’insuffisance professionnelle

L’employeur reproche à Mme [Y] de s’être désinvestie de son travail notamment du projet RWD qui n’a abouti que fin novembre 2017 quand la direction en a repris le pilotage alors que la salariée devait le livrer en juillet 2017.

Toutefois, l’employeur procède par affirmation sans démontrer le grief de sorte qu’il ne peut être retenu contre la salariée.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les griefs relatifs au non respect de l’horaire de travail et au non respect des procédures relatives aux demandes de congés payés et télétravail sont établis et suffisamment graves pour justifier le licenciement pour faute grave, le maintien de la relation de travail étant impossible face au comportement de Mme [Y] qui n’a pas jugé nécessaire de le modifier même à la suite de deux avertissements.

En conséquence le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [Y] de l’ensemble de ses demandes.

Sur les dépens

La cour condamne Mme [Y] aux dépens de la procédure d’appel.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Succombant au procès Mme [Y] sera condamnée à payer la somme de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l’arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 1er avril 2019 par le conseil de prud’hommes de Mende en toutes ses dispositions.

Condamne Mme [W] [Y] aux dépens d’appel,

Condamne Mme [W] [Y] à payer à la SARL Bienmanger.com la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Mme BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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