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Noms de domaine : 20 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/00851

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Noms de domaine : 20 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/00851

ARRET N°286

N° RG 22/00851 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GQJO

[W]

S.A.R.L. SORTIES EN MER

C/

S.A.S. RHEA MARINE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 20 JUIN 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00851 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GQJO

Décision déférée à la Cour : jugement du 11 février 2022 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.

APPELANTS :

Monsieur [F] [W]

[Adresse 2]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Jonathan ROUXEL de la SCP ROUXEL JEHANNOT DE BARTILLAT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me François -Xavier AWATAR, avocat au barreau de LYON

S.A.R.L. SORTIES EN MER

[Adresse 2]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Jonathan ROUXEL de la SCP ROUXEL JEHANNOT DE BARTILLAT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me François -Xavier AWATAR, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

S.A.S. RHEA MARINE ( EXEL YACHTING) venant aux droits de la société CHANTIER NAVAL LATTITUDE 46 ( CNL 46)

[Adresse 3]

[Localité 1]

ayant pour avocat postulant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE – JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me Aurélien BARRIE de la SELARL POLDER AVOCATS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 26 Avril 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**************

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Chantier Naval Latitude 46 (CNL 46), aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine désormais dénommée Exel Yachting, avait pour activité la construction et la commercialisation de bateaux de plaisance, principalement des voiliers et des yachts à moteur.

Le voilier dénommé ‘Tofinou’ et le yacht dénommé ‘[C]’ constituent deux de ses produits emblématiques.

La société Sorties en mer, dirigée par Monsieur [F] [W], a pour activité la location de bateaux.

Le 10 novembre 2014, la société Sorties en Mer a fait l’acquisition de divers noms de domaines se rapportant aux deux noms des modèles susdits, fabriqués par la société CNL 46.

Par courriers recommandés des 13 et 16 juillet 2018, la société CNL 46 a mis en demeure Monsieur [F] [W], ès-qualité de dirigeant de la société Sorties en mer :

– de cesser d’utiliser les noms de domaine associés à Tofinou et [C],

– de cesser d’utiliser les codes couleurs des marques Tofinou et [C],

– d’effectuer le transfert des noms de domaine associés aux marques Tofinou et [C] au bénéfice de la société CNL 46.

En l’absence de réponse, la société CNL 46 a fait assigner, par exploit d’huissier du 17 avril 2019, la société Sorties en mer devant le président du tribunal de commerce de Lyon, statuant en référé, afin que soient ordonnées toutes mesures propres à faire cesser le trouble manifestement illicite et notamment :

– qu’il soit enjoint à la société Sorties en mer de cesser d’utiliser les noms de domaine précités,

– que la société Sorties en mer soit condamnée à transférer ces noms de domaines à ses frais, à la société CNL 46.

Par ordonnance du 25 juillet 2019, le président du tribunal de commerce de Lyon a statué ainsi :

– ordonne à la société Sorties en mer de cesser d’utiliser, à quelque titre que ce soit, les noms de domaines susvisés, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée ;

– ordonne à Monsieur [F] [W] de transférer à ses frais, ces noms de domaines à la société CNL 46, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision.

Le président du tribunal de commerce de Lyon s’est réservé la liquidation de ces deux astreintes.

Cette ordonnance n’a pas été frappée d’appel.

La société CNL 46 a été contrainte d’adresser plusieurs courriers officiels pour obtenir, trois mois après la signification de l’ordonnance du 25 juillet 2019, le transfert complet des noms de domaines.

Par exploit d’huissier du 22 novembre 2019, la société CNL 46 a saisi le président du tribunal de commerce de Lyon, statuant en référé, afin qu’il liquide l’astreinte prononcée à l’encontre de Monsieur [F] [W].

Par ordonnance en date du 11 septembre 2020, le juge des référés a liquidé l’astreinte à hauteur de 39.000 euros et a condamné Monsieur [F] [W] à payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [F] [W] a interjeté appel de cette ordonnance le 22 septembre 2020.

Par un arrêt en date du 9 juin 2021, la cour d’appel de Lyon a débouté Monsieur [F] [W] de l’intégralité de ses demandes et liquidé l’astreinte à la somme de 43.500 euros.

Le 30 septembre 2020, Monsieur [F] [W] a assigné la société CNL 46 devant le premier président de la cour d’appel de Lyon aux fins de solliciter, à titre principal, la suspension de l’exécution provisoire attachée à l’ordonnance du 11 septembre 2020, et à titre subsidiaire, la consignation du montant des condamnations sur un compte séquestre.

Par ordonnance de référé du 2 novembre 2020, le premier président de la cour d’appel de Lyon a débouté Monsieur [F] [W] de l’intégralité de ses demandes.

Par assignation en date du 5 janvier 2021, Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer ont fait assigner la CNL 46 devant le tribunal de commerce de La Rochelle afin notamment de voir :

– dire que CNL 46 n’a été victime d’aucun agissement parasitaire,

– condamner sous astreinte la CNL 46 à transférer les 9 noms de domaine à Monsieur [W]

– condamner la CNL 46 à rembourser l’astreinte acquittée par Monsieur [W] à savoir 39.000 euros.

Par jugement en date du 11 février 2022, le tribunal de commerce de La Rochelle a statué ainsi :

Vu les articles 1240 et suivants du code civil,

Vu les articles 32-1, 484, 488 et 873 du code de procédure civile,

Vu les articles L131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

Vu la jurisprudence citée et les pièces versées aux débats,

– Reçoit la société Sorties en Mer et Monsieur [F] [W] en leurs demandes, fins et conclusions mais les dit mal fondées,

– Dit que les agissements de la société Sortie en mer et de Monsieur [F] [W] sont parasitaires à l’égard de la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine,

– Dit que la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] se sont sciemment placés dans le sillage de la société Chantier Naval Latitude 46 aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine,

– Dit que ces agissements parasitaires de la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] ont causé un préjudice à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine,

– Déboute la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] du chef de leur demande visant à voir constater la non-utilisation des noms de domaine transférés la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine,

– Déboute Monsieur [F] [W] du chef de sa demande de restitution des noms de domaine transférés à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine,

– Déboute Monsieur [F] [W] du chef de sa demande de remboursement de l’intégralité de l’astreinte acquittée,

– Déboute Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer du chef de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– Reçoit la société Chantier Naval Latitude aux droits de laquelle vient la société Rhé Marine 46 du chef de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– Condamne solidairement Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer à payer à la société Chantier Naval Latitude aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine la somme de 3.000 euros de dommages-intérêts,

– Condamne solidairement Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer au paiement de la somme justement appréciée de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne solidairement, conformément à ce qu’indique l’article 696 du code de procédure civile, Monsieur [F] [W] et la société Sorties en Mer, au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe s’élevant à la somme de quatre vingt euros et vingt neuf centimes TTC.

Par déclaration en date du 31 mars 2022, Monsieur [F] [W] et la société Sorties en Mer ont relevé appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués en intimant :

– la société Rhea Marine.

Un second appel a été déclaré le 1er avril 2022 par les mêmes appelants et à l’égard de la même intimée.

Par ordonnance du 06 avril 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures n° RG 22/0851 et 22/0857. La procédure est poursuivie sous le numéro RG 22/0851.

Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 29 mars 2023, demandent à la cour de :

Vu les articles 1240 et suivants du Code civil

Vu les articles 32-1, 484 et 488 du Code de procédure civile,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces versées aux débats,

– Réformer le jugement du tribunal de commerce de La Rochelle en date du 11 février 2022 en ce qu’il :

A dit mal fondés la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] en leurs demandes, fins et conclusions ;

A dit que les agissements de la société Sorties en mer et de Monsieur [F] [W] sont parasitaires à l’égard de la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine ;

A dit que la société Sorties en mer et de Monsieur [F] [W] se sont sciemment placés dans le sillage de la société Chantier Naval Latitude 46 aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine, afin de tirer profit, sans contrepartie pécuniaire, de la renommée et du prestige de la société Chantier Naval Latitude 46 ;

A dit que ces agissements parasitaires de la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] ont causé un préjudice à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine;

A débouté la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] du chef de leur demande visant à voir constater la non-utilisation des noms de domaine transférés la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine ;

A débouté Monsieur [F] [W] du chef de sa demande de restitution des noms de domaine transférés à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine ;

A débouté Monsieur [F] [W] du chef de sa demande de remboursement de l’intégralité de l’astreinte acquittée ;

A débouté Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer du chef de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

A reçu la société Chantier Naval Latitude 46 aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine du chef de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

A condamné solidairement Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer à payer à la société Chantier Naval Latitude aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine la somme de 3.000 euros de dommages-intérêts ;

A condamné solidairement Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer au paiement de la somme justement appréciée de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

A condamné solidairement, conformément à ce qu’indique l’article 696 du code de procédure civile, Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer, au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe s’élevant à la somme de quatre-vingt euros et vingt-neuf centimes TTC.

Et statuant à nouveau :

– Dire la société Sorties en mer et Monsieur [F] [W] recevables et bien fondés en leur action,

– Juger que la société Chantier Naval Latitude 46 ne démontre pas la réunion des éléments nécessaires pour engager une action en parasitisme à l’encontre de Monsieur [F] [W] et la société Sorties en mer,

– Juger que la société Chantier Naval Latitude 46 n’utilisait pas les noms de domaine qui lui ont été transférés,

– Dire et juger que la société Chantier Naval Latitude 46 n’a été victime d’aucun agissement parasitaire de nature à pouvoir engager une action en parasitisme,

En conséquence,

– Condamner la société Rhéa Marine (désormais Exel YachtingM) venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 à transférer les noms de domaine suivants à Monsieur [W] sous astreinte de 1.500 euros par jour et par nom de domaine à compter du 8ème jour suivant la signification de la présente décision :

tofinou.be

tofinou.eu

tofinou.fr

tofinou.net

andreyale.be

andreyale.com

andreyale.eu

andreyale.fr

andreyale.net

– Condamner la société Rhéa Marine (désormais Exel Yachting) venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 au remboursement de l’intégralité de l’astreinte acquittée par Monsieur [W] soit 43.500 euros,

– Condamner la société Rhéa Marine (désormais Exel Yachting) venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 au paiement de la somme de 5.000 euros à Monsieur [F] [W] et 3.000 euros à la société Sorties en mer à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En toutes hypothèses,

– Débouter la société Rhéa Marine (désormais Exel Yachting) venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

– Condamner la société Rhéa Marine (désormais Exel Yachting) venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 au paiement de la somme de 38 886,08 euros à Monsieur [W] et la société Sorties en mer au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,

La société Rhéa Marine désormais Exel Yachting, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 13 avril 2023, demande à la cour de :

– Vu l’article 559 du code de procédure civile,

– Vu les articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

– Vu la jurisprudence,

– Vu les pièces,

– Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de La Rochelle le 11 février 2022 en toutes ses dispositions ;

En conséquence, y ajoutant,

– Débouter monsieur [W] et la société Sorties en mer de l’intégralité de leurs demandes,

– Condamner solidairement monsieur [W] et la société Sorties en mer à payer à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine, désormais dénommée Exel Yachting, la somme de 20.000 euros au titre de dommages-intérêts pour appel abusif ;

– Condamner solidairement la société Sorties en mer et monsieur [F] [W] à payer une somme de 10.000 euros à la société Chantier Naval Latitude 46, aux droits de laquelle vient la société Rhéa Marine, désormais dénommée Exel Yachting, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner solidairement la société Sorties en mer et monsieur [F] [W] aux entiers dépens de l’instance.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 mars 2023.

Par conclusions en date du 5 avril 2023, la société intimée a sollicité le rabat de l’ordonnance de clôture aux fins de voir accueillir ses conclusions au fond le 13 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

S’agissant de l’ordonnance de clôture, la question a été évoquée au cours des débats devant la cour, de son éventuel rabat aux fins de prononcer la clôture de l’instruction à l’audience. L’avocate des appelants s’y est opposée en ce que les conclusions postérieures de la Société Exel Yachting n’apporteraient aucun élément nouveau.

La cour constate que les appelants ont déposé des conclusions le jour même de l’ordonnance de clôture. La société intimée a sollicité le rabat de l’ordonnance aux fins d’y répondre. Les conclusions des appelantes sont pour le moins tardives. Il convient dès lors, pour garantir le respect du principe du contradictoire :

-d’ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture en date du 29 mars 2023,

-de fixer la clôture des débats à la date de l’audience et d’accueillir les conclusions de la société Exel Yachting déposées le 13 avril 2023.

S’agissant du fond, il convient au préalable de cadrer strictement le débat opposant les parties et pour ce faire, de distinguer moyens et prétentions aux fins d’éviter toute confusion sur le périmètre des questions soumises à la cour.

Les prétentions au principal de M. [W] et de la société Sorties en mer sont les suivantes :

-paiement de la somme de 43.500 € au titre en remboursement de l’astreinte acquittée,

-transfert au profit de M. [W] des neuf noms de domaines ltigieux,

-paiement des sommes de 5.000 € et 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Certes, le jugement dont appel contient dans son dispositif des considérations en lien avec des agissements parasitaires reprochés à M. [W] et la société Sorties en mer. Il s’agit en réalité du rappel des motifs conduisant au débouté de leurs demandes. La présence dans le ‘par ces motifs’ du jugement, de motifs aux côtés de chefs de jugements, résulte de la mention au dispositif des conclusions des demandeurs, de purs moyens puisqu’il y était notamment demandé de ‘Dire et juger que la société CNL 46 n’a été victime d’aucun agissement parasitaire de nature à pouvoir engager une action en parasitisme’. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a jugé le 9 janvier 2020 (Cass.2e civ. 9 janvier 2020, n° 18-18.778) que des écritures dont le dispositif comporte des demandes tendant à constater, dire et juger, ne constituent pas des prétentions mais des rappels de moyens.

I Sur la demande en paiement de la somme de 43.500 € :

Les appelants sollicitent cette somme au titre du remboursement de l’intégralité de l’astreinte acquittée par M. [W]. Cette mesure trouve sa cause dans une ordonnance de référé du 25 juillet 2019 contre laquelle aucun recours n’a été exercé.

Il n’appartient pas à la cour ni de revenir sur les motifs de cette condamnation sous astreinte qui a été acceptée et finalement exécutée, ni de s’interroger sur l’existence ou non d’actes de parasitismes préalables au prononcé de ladite astreinte. Les appelants ne sont fondés à solliciter le remboursement des sommes acquittées en vertu de cette astreinte que s’ils démontrent en quoi la société intimée les aurait empêchés de s’exécuter, déclenchant ainsi le jeu de l’astreinte et contribuant au montant de sa liquidation.

Les appelants tentent de le faire en prétendant que la société intimée aurait fait obstacle au transfert des noms de domaine. Ils font valoir à cette fin :

-qu’aux termes du contrat imposé par OVH à tous ses contractants, ‘toute décision de justice exécutoire signifiée à OVH ainsi que toute sentence arbitrale dûment notifiée à OVH emportant transfert ou annulation du nom de domaine enregistré par le client sera exécutée en l’état et sur le champ par OVH sans notification préalable au client’,

-que le transfert aurait pu intervenir plus tôt, si la société CNL 46 n’avait pas volontairement tardé à communiquer à Monsieur [W] l’identifiant de CNL 46 indispensable au transfert des noms de domaine sur le site OVH.

Ces moyens – au demeurant contradictoires entre eux – appellent les deux observations suivantes de la part de la cour.

1) Il résulte de la décision du juge des référés du 25 juillet 2019, que c’est Monsieur [W] qui a été enjoint de réaliser le transfert des noms de domaines. Si comme il le prétend aujourd’hui, il suffisait de signifier à OVH la décision de justice exécutoire pour emporter transfert des noms de domaines litigieux, la cour se demande pourquoi il ne l’a pas fait lui-même immédiatement, ce qui lui aurait permis d’échapper à l’astreinte.

2) Monsieur [W] prétend qu’il était dans l’impossibilité d’opérer le transfert demandé parce qu’il n’avait pas connaissance de l’identifiant OVH de la société CNL 46 et qu’il a été contraint de prendre attache avec elle le 18 octobre 2019 pour l’obtenir oralement, et avoir confirmation officielle par courrier du 25 octobre 2019. Ce moyen ne manque pas d’étonner. En effet, si comme il le prétend, il avait impérativement besoin de l’identifiant OVH de CNL 46 pour effectuer le transfert, la cour se demande pourquoi il n’a pas sollicité ledit identifiant spontanément, et en tout cas dès le premier courrier officiel du 29 juillet 2019, plutôt que de demeurer taisant. La question se pose dans les mêmes termes pour les courriers de relance qui ont suivi et qui sont demeurés sans réponse.

Il résulte de l’ensemble des ces observations que le retard pris dans l’exécution du transfert des noms de domaines n’est nullement imputable à la société intimée et les appelants ne sont pas fondés à en réclamer le remboursement.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point par substitution de motifs.

II Sur la demande de condamnation à transférer neuf noms de domaines à Monsieur [W] sous astreinte :

Les appelants sollicitent la condamnation de la société EXEL YACHTING à transférer neuf noms de domaine à M. [W] en faisant valoir notamment :

-que les appelants n’ont commis aucun agissement parasitaire à l’encontre de l’intimée, en ce que notamment les parties n’exercent pas la même activité,

-que les noms de domaine étaient totalement libres de droit lorsqu’ils ont été acquis le 10 novembre 2014,

-que bien que les noms de domaine lui aient été transférés, la société intimée ne les a jamais utilisés, ce qui démontre que l’acquisition de ces noms de domaine par M. [W] ne lui cause aucun préjudice.

Comme évoqué ci-dessus, il est nécessaire de rappeler le périmètre du présent contentieux. Suite à l’ordonnance du juge des référés du 25 juillet 2019, qui a été acceptée et finalement exécutée, la société intimée est désormais titulaire des neuf noms de domaines litigieux. C’est à l’aune de cette situation de fait qu’il appartient à la cour de statuer dans la limite de sa saisine. La question qui lui est posée est de déterminer si M. [W] est aujourd’hui fondé à solliciter le transfert de ces noms de domaine à son profit. Il ne peut pour ce faire, se contenter de prétendre qu’aucun grief ne saurait lui être reproché. C’est pourquoi, les moyens développés par lui sur le terrain de l’absence de parasitisme de sa part sont parfaitement inopérants. C’est à lui, en sa qualité de demandeur, de rapporter la preuve d’un comportement fautif de la société intimée. Il échoue à le faire, ne démontrant ni même alléguant quelque faute que ce soit à l’encontre de la société Exel Yachting. En tout état de cause, le fait que cette société soit désormais titulaire des noms de domaine résulte de l’exécution d’une décision de justice non contestée.

En outre, M. [W] se trompe dans les conclusions qu’il tire du fait que la société intimée n’utilise pas les noms de domaine qui lui ont été transférés. Cela ne signifie pas que M. [W] ne lui cause aucun préjudice. Le seul fait que la société Exel Yachting soit désormais titulaire des noms de domaine concernés empêche autrui de les utiliser, ce qui présente un intérêt capital pour elle, quand bien même elle ne s’en servirait pas, ce qui est son droit le plus strict.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point par substitution de motifs.

III Sur les demandes accessoires :

1) Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive :

Les appelants qui succombent seront déboutés de leur demande dommages-intérêts pour résistance abusive.

La cour constate que si les appelants échouent en leur demande initiale et en leur appel, il n’en reste pas moins qu’ils n’ont fait qu’exercer régulièrement des voies de droit qui leur sont ouvertes par la loi sans qu’il ne soit démontré à leur encontre quelque volonté de nuire que ce soit. L’exercice d’une action en justice et d’une voie de recours, même mal fondée ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstances particulières le rendant fautif. Cet abus de droit n’est pas démontré en l’espèce.

Les premiers juges ont condamné solidairement M. [W] et la société Sorties en mer à payer à la société intimé la somme de 3.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive. Le jugement déféré sera réformé de ce chef.

Pour les raisons évoquées ci-dessus, la société intimée sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour appel abusif.

2) Sur les frais et dépens :

Monsieur [W] et la société Sorties en mer qui succombent au principal seront condamnés aux entiers dépens de première instance et d’appel. Ils seront déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnés solidairement de ce chef au paiement de la somme de 6.000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Ordonne le rabat de l’ordonnance de clôture en date du 29 mars 2023,

Fixe la clôture des débats à la date de l’audience et accueille les conclusions de la société Rhea Marine, désormais dénommée Exel Yachting , venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 déposées le 13 avril 2023,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a condamné solidairement M. [W] et la société Sorties en mer à payer à la société intimée la somme de 3.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Déboute la société Rhea Marine, désormais dénommée Exel Yachting , venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [W] et la société Sorties en mer de leur demande de dommages intérêts pour résistance abusive,

Déboute la société RHEA Marine, désormais dénommée EXEL YACHTING, venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 de sa demande de dommages-intérêts pour appel abusif,

Déboute Monsieur [W] et la société Sorties en mer de leur demande au titre des frais irrépétibles,

Condamne solidairement Monsieur [W] et la société Sorties en mer à payer à la société Rhea Marine, désormais dénommée Exel Yachting , venant aux droits de la société Chantier Naval Latitude 46 la somme de 6.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement Monsieur [W] et la société Sorties aux dépens d’appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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