Mise à pied disciplinaire : 30 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/00272

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Mise à pied disciplinaire : 30 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/00272
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ARRÊT DU

30 Juin 2023

N° 964/23

N° RG 22/00272 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UEI7

PS/CH

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CALAIS

en date du

25 Janvier 2022

(RG 21/00043 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Juin 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANT :

M. [H] [S]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Mickaël ANDRIEUX, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Alex DEWATTINE, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS : à l’audience publique du 09 Mai 2023

Tenue par Patrick SENDRAL

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Anne STEENKISTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 11 avril 2023

FAITS ET PROCEDURE

Le 24 septembre 2015 la société AUCHAN HYPERMARCHE a engagé M. [S] en qualité de technicien de maintenance. Le 7 février 2019 elle l’a mis à pied à titre disciplinaire. Le 4 février 2020 elle l’a convoqué à l’entretien disciplinaire avant de le licencier pour faute grave le 18 février suivant.

Par jugement ci-dessus référencé le conseil de prud’hommes, saisi par M. [S] de réclamations salariales et indemnitaires au titre de son licenciement à ses dires abusif, les a rejetées et l’a condamné à payer un euro de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi qu’une indemnité de procédure.

Vu l’appel formé par M. [S] contre ce jugement et ses conclusions du 17/11/2022 ainsi closes :

infirmer le jugement, débouter la société AUCHAN HYPERMARCHE de ses demandes et la condamner au paiement des sommes suivantes :

indemnité compensatrice de préavis : 3405,14 euros outre l’indemnité de congés payés afférente

indemnité de licenciement : 2413,61 euros

dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 10 215 euros

article 700 du code de procédure civile : 1500 euros

Vu les conclusions d’appel incident du 30 mars 2023 par lesquelles l’employeur demande la confirmation du jugement en ses dispositions critiquées par l’acte d’appel, le rejet des demandes adverses et la condamnation de l’appelant à lui verser 2000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive outre 4800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

MOTIFS

Le bien fondé du licenciement pour faute grave

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

«’Malgré vos explications lors de l’entretien, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave pour les motifs suivants : Le jeudi 30 janvier 2020, à 13h30 vous avez lancé violemment votre mètre ainsi que votre masse sur un collègue de travail. Suite à cela, vous avez poursuivi ce même collègue de travail dans la réserve, puis vous lui avez asséné un premier coup de poing. Vous avez ensuite tenté de lui en mettre un second avant que Monsieur [P] responsable de la logistique vous sépare. Lors de l’entretien, vous avez reconnu les faits, même si vous nous préciser qu’il ne s’agit pas vraiment d’un coup de poing mais d’une gifle. Vous reconnaissez également avoir lancé votre mètre et votre masse et vous nous dites avoir conscience de la gravité de vos actes. Vous nous expliquez “être sorti de vos gonds” suite aux taquineries répétées de votre collègue et que vous regrettez votre geste. Malgré tout, au vu des faits qui vous sont reprochés et de l’ensemble des éléments, nous ne pouvons que constater que vous avez enfreint les obligations qu’il vous incombait de respecter dans l’entreprise, notamment prévues dans le Règlement intérieur… Vous avez démontré votre incapacité à contrôler vos pulsions agressives lorsque vous êtes confronté à une contrariété. Ce comportement n’est pas acceptable dans un contexte professionnel. II va à l’encontre du respect de la personne, il est en totale contradiction avec les règles élémentaires de savoir être qui sont indispensables à notre métier et affecte le fonctionnement du magasin.

En tant qu’employeur, nous sommes garant de la sécurité de nos collaborateurs. Votre comportement agressif et menaçant nous place dans l’impossibilité d’assurer cette sécurité. Nous avons l’obligation de réagir face à un tel comportement. Nous vous rappelons que vous avez déjà fait l’objet en février 2019 d’une mise à pied de deux jours pour comportement violent et propos injurieux…»

Dans ses écritures d’appel la société AUCHAN HYPERMARCHE détaille ces griefs et soutient que le maintien du salarié dans l’entreprise était impossible même durant le préavis.

M. [S], qui conteste tout manquement, indique que l’employeur ne pouvait le licencier faute de mise à pied à titre conservatoire et de gravité suffisante des faits reprochés. Il qualifie de viciée et d’irrecevable l’exploitation par un commissaire de justice de bandes de vidéo surveillance accréditant le jet d’un objet en direction de son collègue et il soutient que les précédents disciplinaires ne sauraient suffire à valider son éviction immédiate.

Sur ce,

Aux termes de l’article L 1232-1 du code du travail tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Lorsque l’employeur invoque une faute grave du salarié il lui incombe d’en rapporter la preuve à charge pour le juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des griefs et de rechercher s’ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

En premier lieu, sont reprochés au salarié des faits prétendument commis le 30 janvier 2020 de sorte que pour vérifier leur matérialité il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé des sanctions précédentes. M. [S], qui conteste le jet d’un objet en direction de son collègue [Y], indique cependant qu’un incident l’a opposé à ce dernier, que suite à ses propos insultants il s’est avancé excédé vers lui et que l’ayant rattrapé il lui a «donné une tape sur l’oreille à tort ou à raison». Il ressort du témoignage de M. [Y] et de M. [P] que M. [S] a porté un coup de poing à M. [Y]. La matérialité des faits de violences est donc établie sans qu’il y ait lieu de rechercher si M. [S] a ou non lancé un objet en direction de son collègue.

L’intéressé fait plaider que l’incident n’a pas eu de degré de gravité mais la commission de violences sur un collègue de travail est en tant que telle un acte grave. Elles constituaient une réponse disproportionnée et inacceptable au comportement verbal provocateur de M. [Y] le jour des faits.

L’employeur n’a commis aucune irrégularité en visant la mise à pied disciplinaire de 2019 dans la lettre de licenciement. Par ailleurs, même si aucune mise à pied conservatoire n’a été prononcée les faits ont donné lieu à une réaction quasi immédiate de la société intimée puisqu’elle a convoqué M. [S] à l’entretien préalable 4 jours après.

Sans qu’il soit nécessaire d’examiner les moyens pris de la prétendue irrégularité des sanctions antérieures, les faits ainsi établis rendaient impossible le maintien de la relation contractuelle du fait de leur gravité et des antécédents du salarié.

Pour l’ensemble de ces raisons il convient de confirmer le jugement.

La demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive

L’abus dans la contestation de la rupture, y compris jusqu’en appel, n’étant pas caractérisé la demande sera rejetée.

Les frais de procédure

Il n’est pas inéquitable de condamner M. [S] au paiement d’une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a alloué une somme à l’employeur à ce titre.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

CONFIRME le jugement sauf en ce qu’il a condamné M. [S] à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive et a laissé à chaque partie la charge de ses dépens

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant

CONDAMNE M. [S] à payer à la société AUCHAN HYPERMARCHE la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais d’appel

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes

CONDAMNE M. [S] aux dépens d’appel et de première instance.

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS

 


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