SOC.
CA3
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 décembre 2021
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 11060 F
Pourvoi n° D 20-15.447
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 DÉCEMBRE 2021
M. [K] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 20-15.447 contre l’arrêt rendu le 13 février 2020 par la cour d’appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l’opposant à la société Adrexo, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. [G], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Adrexo, après débats en l’audience publique du 20 octobre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [G] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. [G]
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté M. [G] de ses demandes indemnitaires pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU’il résulte de l’article L. 1152-1 du code du travail qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’aux termes de l’article L. 1154-1 du même code, en cas de litige en la matière, il appartient au salarié d’établir les faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral et il incombe à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement, et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ; que lorsque le salarié établit des faits précis et concordants, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; que M. [G] reproche à son employeur d’avoir mis en place depuis 2013 une méthode de gestion du personnel agressive et destructrice, caractérisée par des pressions, de menaces et des sanctions ; malgré ses doléances sur son mal-être, n’avoir rien fait pour apaiser la situation, ainsi que les tensions immédiates entre lui et son supérieur, M. [V] ; n’avoir organisé, au sein de la zone Grand Est, ni plan d’action, ni formation, ni même sensibilisation au problème du harcèlement moral, validant au contraire la nouvelle politique managériale ; avoir ainsi recouru à un moyen illicite d’écrémer la masse salariale en poussant à bout les équipes ; l’avoir rabaissé, émis de façon injustifiée des remarques vexatoires ou humiliantes pour le faire douter de le pousser à adopter une gestion plus efficace et rentable ou à démissionner, notamment lors d’un entretien annuel du 4 décembre 2013, puis les 10, 28 et 30 janvier 2014 ; lui avoir abusivement reproché d’amener son chien à l’entrepôt, l’avoir faussement accusé de fumer au travail, l’avoir invectivé lorsqu’il avait voulu mettre en oeuvre son droit de retrait ; avoir exprimé des injonctions paradoxales en prescrivant des consignes confuses et contradictoires, en contestant des procédures pourtant prédéfinies par l’employeur, en lui enjoignant de prioriser des tâches pourtant tout aussi urgentes, en lui fixant des objectifs irréalisables, en fixant des prescriptions irréalistes, en corrigeant des fautes inexistantes, dans le but de rendre impossible l’exécution de sa mission, d’entretenir une situation d’échec et de provoquer son épuisement professionnel ; l’avoir mis à l’écart avant son licenciement en changeant les codes d’accès au centre, en supprimant des mails et documents personnels, en lui bloquant l’accès à sa messagerie professionnelle depuis son téléphone portable, en retirant de son bureau ses effets personnels, marquant ainsi que son retour n’était pas souhaité, ce qui a généré une détresse psychique majeure ; que l’entretien annuel du 28 janvier 2013 a pointé à la fois des résultats positifs (management qualité, bonne maîtrise du climat social, résultat d’exploitation enfin positif, année économiquement positive, progression du chiffre d’affaires et du taux de marge) et des insuffisances (légères baisse du taux, travail de gestion et la sous-consommation gestion de la modulation) à revoir, objectif « autres coûts » non atteints) ; qu’il en a été de même le 15 janvier 2014 lorsque le directeur régional [Z] [V] a relevé que si le score qualité avait été atteint, et si l’année 2013 avait été belle en qualité, le management qualité n’avait pas été satisfaisant et la gestion de la modulation non atteinte ; qu’en commun, il a été décidé la mise en place d’un entretien téléphonique hebdomadaire ; que le bilan de compétence pour 2013 a aussi, à côté de points de réussite, signalé des difficultés (gestion de l’activité colis, gestion de la sous-modulation, de l’adaptation des contrats au sous-dépôt de [Localité 4], qui tend à devenir un dépôt à part entière, gestion de la modulation, pas d’évolution de la marge sur [Localité 3]) ; que l’évaluateur a noté que le salarié devait avoir une âme de patron de centre de profit, montrer plus de fermeté dans les négociations avec équipe (toujours impliqué au quotidien), prendre plus de décisions (décisions davantage cohérentes depuis formation), organiser des réunions mensuelles (2 en management équipe) ; que M. [G] a indiqué qu’il y avait là un bilan intéressant qui permettait de se remettre en question pour progresser ; que dans ce contexte, le dossier révèle trois évènements particuliers au cours du mois de janvier 2014 : le 10 janvier, M. [G] a fait connaître à [Y] [D], directeur de zone opérationnelle que le ton avait monté avec M. [V] lors d’une conversation téléphonique, qu’il prenait des médicaments anxiolytiques depuis deux mois, qu’il avait le ressenti d’être nul alors qu’il devait pallier l’absence d’un salarié absent et avait eu une bonne action sur la pression sociale ; que M. [V] ne devait pas « remettre le feu » avait qu’il ne connaisse pas très bien la vie d’un centre et n’avait pas connu les « années de galère » du service, que face à cette situation, il était prêt à repasser adjoint ; le 28 janvier, il est revenu de même sur l’organisation du dépôt, estimant que le poste devenait de plus en plus compliqué, ce qui a provoqué une réaction de M. [V] qui lui a rappelé qu’il était son « N+1 » et qu’il convenait qu’il s’adresse directement à lui ; le 30 janvier, M. [V] est venu rencontrer M. [G] qui, à l’issue, a fait connaître qu’il ne voulait plus travailler avec lui et voulait que cesse un management basé sur le stress ;
que l’employeur a ensuite souscrit, le 11 février 2014, une déclaration d’accident du travail assortie de réserves selon lesquelles, alors que M. [V] avait rappelé d’emblée des règles d’hygiène tenant à la consommation de tabac au travail et à l’interdiction de la présence d’un chien de compagnie, M. [G] avait écourté l’entretien et était parti en voiture dans un état de colère ; qu’au cours de l’enquête réalisée par la caisse primaire d’assurance-maladie, deux versions des faits ont été présentées : selon M. [G], M. [V] avait été désagréable, cinglant et autoritaire le 4 décembre 2013, ce qui lui avait donné l’impression d’être rabaissé, M. [V] avait eu le même comportement le 10 janvier 2014 en lui faisant des reproches au sujet de la modulation, M. [V] s’était montré froid pressant le 30 janvier, avait injustement mis en cause son chien, pacifique et ayant le statut de mascotte, ne l’avait pas laissé s’expliquer sur le tabac, de sorte que face à un ton haut, lui-même avait perdu pied, s’était senti en danger, et avait invoqué son droit de retrait ; d’après M. [V], en charge de la région de [Localité 5] depuis environ six mois, le bilan avait été jugé globalement positif pour 2013, l’entretien avait été cordial avec quelques remarques, la rencontre du 30 janvier était destinée à une prise de contact et à un aménagement des fonctions, notamment en matière de coaching et de révision de certains points d’organisation ; alors que des salariés avaient demandé une intervention au sujet du tabagisme et du chien, malade, M. [G] s’était emporté et était parti ; de façon générale, M. [G] s’était laissé déborder par un travail qu’il n’était plus en mesure d’assumer pleinement, s’était senti dépassé, n’avait pas voulu en parler alors qu’il aurait pu demander une réorientation sur un poste moins prenant ; qu’il est certain que l’état de M. [G] était perturbé depuis décembre 2013 puisque plusieurs salariés avaient remarqué qu’il était amaigri, marqué par des poches sous les yeux, stressé, irritable ; que divers témoignages confirment qu’au sein de l’agence, le salarié [Y] [P] était absent en raison d’une maladie qui s’est avérée trop grave pour que son retour puisse être envisagé ; qu’il ne ressort cependant pas du dossier que la conversation téléphonique du 10 janvier 2014 ait donné lieu à des excès verbaux de la part de M. [V] ; que M. [G] a lui même indiqué dans son mail précité que M. [V] s’était énervé, car M. [G] lui faisait répéter ses propos en raison de la mauvaise qualité de la communication, que le ton était monté entre eux et que M. [V] lui avait demandé de lui parler autrement ; que le compte-rendu de l’entretien annuel du 28 janvier ne révèle pas en lui-même le recours à des formes de management abusives alors que les évaluations de M. [V] apparaissent équilibrées entre points favorables et points difficiles ; que le précédent entretien effectué par un autre supérieur avait déjà révélé des difficultés, que M. [G] avait lui-même fait mentionner qu’il avait trouvé le bilan intéressant et que la mise en place d’un contact téléphonique hebdomadaire relevait d’une volonté de soutien et d’accompagnement plutôt que de la volonté d’abaisser le salarié et le conduire au départ ; que rien dans le dossier ne vient conforter les doléances de M. [G] relatives au caractère confus ou contradictoire de consignes, à la contestation de procédures prédéfinies, à la priorisation abusive de tâches, à la fixation d’objectifs irréalisables ou de prescription irréalistes, à la correction de fautes inexistantes : que rien non plus de présumer que l’employeur aurait cherché à rendre impossible l’exécution de sa mission, à entretenir une situation d’échec et à provoquer son épuisement professionnel comme il le prétend ; que le salarié [J] [R] a au contraire attesté qu’il n’avait pas parlé, et que M. [V] ne lui avait rien dit de mal sur M. [G] ; que le fait que l’entreprise ait ultérieurement établi, le 30 octobre 2014, un plan de sauvegarde de l’emploi ne suffit pas à faire présumer l’existence de pressions sur le salarié ou une volonté « d’écrémer la masse salariale » comme il le prétend ; qu’un rapport de situation rédigé en septembre 2013 par un membre du CHSCT n’apparaît pas probant, puisque, s’il invoque un management dangereux pour la santé du personnel, il n’est aucunement circonstancié et se borne à faire état, de façon générale, de pressions, menaces et sanctions sans en préciser la teneur ; qu’un ce qui concerne la rencontre du 30 janvier, M. [R] a également attesté que l’interdiction de fumer dans les locaux professionnels n’était jamais respectée dans l’établissement malgré l’intervention antérieure de l’inspection du travail et le rappel fait par des panneaux, que M. [G] lui-même ne sortait pas toujours pour fumer, qu’il amenait régulièrement son chien dans les locaux ; que ce témoin a précisé que l’entretien n’avait duré que deux minutes, que M. [G] avait élevé la voix, avait tapé sur le mur, avant de sortir en claquant la porte ; qu’une note de service du 27 novembre 2012 avait posé l’interdiction d’animaux sur le lieu de travail ; que le jour même de l’entretien, M. [V] a écrit à son propre supérieur que l’assistante n’en « pouvait plus » de la présence de l’animal qui dérangeait beaucoup, que le comportement de M. [G] avait été intolérable, que ce dernier lui avait déjà raccroché au nez et prenait prétexte de problématiques non fondées ; qu’il résulte de ces faits qu’il n’est pas démontré que M. [V] ait agi fautivement le 10 janvier, que les termes des évaluations professionnelles faites le 28 janvier ont été mesurées et justifiées par la situation constatée et les résultats de M. [G] que M. [V] étant en droit, le 30 janvier, d’inviter M. [G] à respecter lui même les règles licites relatives à la consommation de tabac et à l’interdiction des animaux sur le lieu de travail et que la cour ne peut pas présumer qu’il l’aurait fait en termes excessifs ou blessants ; que s’il est vrai qu’en juillet 2013, le médecin du travail avait émis une alerte sur la prévention des risques psychosociaux et la déléguée du personnel [X] [B] avait demandé la réunion du CHSCT en raison de la dégradation de la santé de deux salariés, ces faits ne concernaient aucunement M. [G] puisque cette déléguée avait seulement fait état d’un malaise subi le 20 juin 2013 par M. [R], déjà cité, qui avait évoqué une grande pression de la direction, un management primitif, un système humiliant manifesté par un tableau des « tops » et des « flops », d’un « burn out » ayant donné lieu à une déclaration de maladie professionnelle de la part de la salariée [H], employée dans un autre établissement et à laquelle on aurait voulu imposer une mutation géographique, et de la convocation en entretien préalable du salarié [A] en raison d’une erreur due, selon lui, à son état psychologique ; que même si ce refus de l’employeur de convoquer un CHSCT extraordinaire a été considéré comme une entrave par un inspecteur du travail, aucun amalgame ne peut être fait entre la situation de ces salariés et celle de M. [G] ; que la même déléguée du personnel a ultérieurement, lors de son départ de l’entreprise en 2016, pris l’initiative de remercier M. [V] pour son ouverture au dialogue et son humanité ; qu’en ce qui concerne les faits postérieurs à l’arrêt de travail prescrit à compter du 30 janvier 2014, M. [G] a lui-même indiqué dans un message du 14 mars 2014 que le changement des serrures de l’établissement avait été consécutif à la disparition d’un compresseur, ce qui est corroboré par l’attestation du salarié [I] [F] ; qu’alors que son absence s’est prolongée près de dix-huit mois, l’éventuelle suppression de l’accès à la messagerie professionnelle et le réaménagement de son bureau, à les supposer établis à une date qui n’est d’ailleurs pas démontrée, n’a pas été susceptible d’entraîner une dégradation des conditions de travail de l’intéressé ; que la suppression de mails et documents personnels n’est nullement prouvée ; qu’à l’issue de cet examen, les faits de l’employeur dont la matérialité est établie s’avèrent justifiés par des éléments objectifs exclusifs de tout harcèlement ; que la cour en tire la conviction qu’ils ne peuvent pas relever d’un harcèlement moral ; que l’inaptitude de M. [G] n’a donc pas été la conséquence d’un harcèlement moral de sorte qu’il doit être débouté de sa demande tendant à faire déclarer le licenciement nul et de sa demande corrélative de dommages-intérêts ; que, sur l’existence ou l’inexistence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, à titre subsidiaire, M. [G] demande l’application d’une « jurisprudence constante » qu’il illustre par une décision de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 13 décembre 2007 (n° de pourvoi 06-45818) ; que par cette décision, pour rejeter le pourvoi formé par un employeur contre la décision l’ayant condamné à payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour de cassation a considéré que la cour d’appel avait justifié sa décision en constatant que le licenciement avait été prononcé pour une inaptitude résultant d’agissements fautifs de l’employeur, commis antérieurement à la date d’application de la loi du 17 janvier 2002 ayant institué l’article L 122-49 du code du travail relatif au harcèlement moral ; qu’il résulte de la combinaison de l’article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et des articles L. 1226-10, L 1226-12, en leur rédaction applicable en la cause, et L. 1231-1 du code du travail que le licenciement motivé par l’inaptitude du salarié est privé de cause réelle et sérieuse lorsque cette inaptitude a pour cause des agissements fautifs de l’employeur ; que la cour dispose des éléments médicaux suivants : une lettre par laquelle le médecin du travail fait part au médecin traitant qu’il a vu récemment M. [G] pour grande souffrance au travail avec situation psychologique précarisée et fait état de la trace d’un traumatisme psychologique (tremblements, palpitations, agitation) évoquant un tableau d’épisode de stress aigu ; un certificat du médecin traitant en date du 30 janvier, décrivant un harcèlement moral, une anxiété (troubles du sommeil, palpitations, amaigrissement), tout en signalant un « antécédent dépressif » ; lettre du 8 avril 2014 dans laquelle le professeur [W], après avoir relaté les dires de M. [G] selon lequel l’entreprise serait en difficultés, elle aurait subi des pertes financières importantes, une nouvelle organisation générant une souffrance au travail aurait été mise en place, estime judicieux qu’il poursuive son arrêt maladie en attendant les décisions des « instances » (y compris le conseil de prud’hommes), s’agissant d’une situation très conflictuelle ; certificat du médecin traitant en date du 15 décembre 2014 selon lequel M. [G] et suivi depuis le 30 janvier 2014 pour syndrome anxio-dépressif sévère, perte d’appétit, troubles du sommeil, instabilité, asthénie ; rapport du médecin psychiatre [T], saisi par le tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI), dont il ressort que M. [G] tient un discours plutôt vindicatif, qu’une réaction dépressive est perceptible au travers un tableau clinique peu fourni, assez pauvre (tristesse de l’humeur, hyporexie, instabilité émotionnelle, troubles du sommeil, épuisement physique et psychique) ; qu’il existe une modification de la personnalité assez significative, avec méfiance, diplopie perceptive, quête du dissimulé (tendance à tout grossir), tendance à l’isolement, à l’évitement et à la rupture des contacts, qu’il en ressort un écart psychologique de la personnalité à type de méfiance et de rigidité comportementale sur un tempérament pré morbide anxieux et une humeur dysphorique ou labile accentuant les troubles du caractère, le retrait affectif et l’évitement social, et que cet état entraîne une incapacité au taux de 30 % en raison de la gêne importante et la vie sociale et familiale, et de l’inaptitude à reprendre ses fonctions habituelles dans les conditions « dénoncées » ; certificat du psychiatre [E] [L], daté du 6 novembre 2015, relatant une symptomatologie suffisamment prégnante, inhibante et handicapante pour le rendre inapte à tout emploi, la fin des indemnités journalières au 1er août 2015 n’étant pas médicalement justifiée ; décision du TCI du 22 avril 2016 retenant une incapacité au moins égale à 25 % ; que, comme la cour l’a constaté plus haut, M. [G] a fait état de la prise d’anxiolytiques à partir du mois de décembre 2014, soit avant même les faits qu’il a imputés à M. [V] ; que le médecin traitant ne démontre pas que son employeur aurait mis en place une nouvelle organisation tendant à une gestion du personnel agressive et destructrice, à base de pressions, menaces et sanctions ; que s’il est certain que les conditions de travail de M. [G] ont été affectées par l’absence pour maladie de son collaborateur, M. [P], il n’a pas demandé d’aide dans son message précité du 10 janvier 2015, ne disant qu’il ne comptait pas ses heures que pour appuyer sa thèse selon laquelle M. [V] interviendrait de façon intempestive dans l’établissement de [Localité 5] ; que la cour, pour les motifs déjà énoncés au sujet de la demande d’annulation du licenciement pour harcèlement moral, considère que l’action de M. [V] au cours du mois de janvier 2015 n’a pas un caractère fautif ; que partiellement l’entretien du 30 janvier, manifestement déclencheur de l’arrêt de travail, n’a pas donné lieu à abus de sa part, mais à une réaction disproportionnée de M. [G] qui n’a pas accepté les remontrances pourtant faites à juste escient à propos du respect de l’interdiction de fumer sur les lieux du travail et de l’interdiction d’y amener des animaux ; que les appréciations médicales fondées sur les seuls dires de M. [G] ne sont pas susceptibles de démontrer l’existence d’un manquement imputable à l’employeur ; qu’il en va de même du fait que le médecin du travail ait retenu l’existence d’un danger immédiat pour sa sécurité et sa santé ; que la reconnaissance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute imputable à l’employeur et ne permet pas de présumer l’existence d’une telle faute ; qu’il ne ressort donc pas du dossier la preuve que l’inaptitude de M. [G] a été la conséquence de manquements imputables à son employeur ;
ALORS QUE la mise en place d’un management collectif qualifié par un témoin de primitif, fondé sur un système humiliant manifesté par un tableau des « tops » et des « flops » générant une grande pression, et ayant fait l’objet d’une alerte du médecin du travail sur la prévention des risques psychosociaux, affecte nécessairement tous les salariés de l’entreprise ; qu’en déboutant M. [G] de ses demandes fondées sur le harcèlement moral au travail aux motifs inopérants que c’était à propos d’autres salariés qu’avait été demandée la réunion extraordinaire du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, de sorte qu’aucun amalgame ne pouvait être fait avec sa situation, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION, subsidiaire
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir réduit à 1 000 € net de CSG et de CRDS la demande indemnitaire de M. [G] pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat ;
AUX MOTIFS QUE M. [G] reproche à son employeur de n’avoir pris aucune mesure pour lutter contre son mal-être ; que la cour a retenu plus haut que n’étaient pas démontrés la mise en place d’une méthode managériale agressive, une modification brutale de l’organisation du travail ; la délivrance d’injonctions paradoxales et contradictoires ; qu’aucun lien n’est démontré entre les situations cidessus signalées par la déléguée du personnel et la situation de M. [G] ; qu’il n’est donc pas établi que le refus de l’employeur de saisir le CHSCT a porté préjudice à M. [G] ; qu’en revanche, il est certain qu’averti le 10 janvier 2014 du fait que M. [G] prenait un traitement anxiolytique depuis deux mois et qu’il était en conflit avec M. [V], leur supérieur, [Y] [D], a tardé à réagir ; qu’il a attendu le 4 février suivant, après l’incident du 30 janvier 2014, pour admettre l’existence d’un malêtre attribué par lui à un problème de communication et de compréhension entre les deux hommes et à l’absence pour maladie de l’adjoint de M. [G], été pour lui proposer de le rencontrer après son arrêt maladie afin de discuter et d’apporter le soutien nécessité par ces difficultés ; que l’employeur a ainsi manqué à son obligation de sécurité découlant de l’article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l’époque ; que ce manquement, même si la cour estime qu’il n’est pas à l’origine de l’inaptitude de M. [G], a causé à ce dernier un préjudice constitué par l’accroissement de la pénibilité de son travail ; que compte tenu de la durée pendant laquelle ce dommage a été subi, soit trois semaines, une indemnité de 1 000 € constituera une exacte réparation ;
ALORS QU’ayant constaté que l’employeur avait été alerté sur la mise en place d’un management collectif conduisant à une pression excessive sur l’ensemble du personnel, entraînant nombre d’arrêts maladie, ruptures conventionnelles ou inaptitudes médicales et un signalement du médecin du travail, en rejetant la demande indemnitaire du salarié aux motifs inopérants qu’il ne démontrait pas avoir été victime d’un harcèlement, la cour d’appel a violé les articles L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 1152-4 du code du travail.