COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 28 AVRIL 2022
N° 2022/
MA
Rôle N° RG 19/17228 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFEK4
[V] [A]-[C]
C/
SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU
Copie exécutoire délivrée
le : 28/04/22
à :
– Me Jean-michel RENUCCI de la SELARL ACTANCE MEDITERRANEE, avocat au barreau de NICE
– Me Philippe SANSEVERINO, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 15 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 19/195.
APPELANT
Monsieur [V] [A]-[C], demeurant Résidence Flavia, Bât 6 Entrée 3 – 305, Chemin des Moyennes Bréguières – 06600 ANTIBES
représenté par Me Jean-michel RENUCCI de la SELARL ACTANCE MEDITERRANEE, avocat au barreau de NICE substituée par Me Lise KLINGUER, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU , demeurant Boulevard Général Leclerc – 06310 BEAULIEU SUR MER
représentée par Me Philippe SANSEVERINO, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 16 Décembre 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Michelle SALVAN, Présidente, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre
Madame Mariane ALVARADE, Conseiller
Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2022, prorogé au 28 avril 2022.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 avril 2022,
Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
M. [V] [A]-[C] a été engagé par la SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU en qualité d’agent portuaire 1er échelon, à compter du 3 juillet 2007, suivant contrat à durée indéterminée, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était en dernier lieu de 2700 euros.
Il a été élu délégué du personnel le 20 février 2012, son mandat ayant été renouvelé le 25 mars 2016.
Le salarié a fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire de trois jours par lettre du 23 octobre 2014.
Il lui était par suite notifié un rappel à l’ordre le 17 janvier 2018 et deux avertissements les 14 mars et 17 avril 2018.
Suivant requête du 11 juillet 2018, M. [A]-[C] a saisi la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir l’annulation des sanctions qui lui ont été infligées et la résiliation judiciaire de son contrat de travail, prétendant avoir été victime de harcèlement moral et de discrimination.
Par jugement rendu le 15 octobre 2019, le conseil de prud’hommes de Nice a débouté M. [A]-[C] de l’ensemble de ses demandes.
M. [A]-[C] a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 7 février 2020, M. [A]-[C], appelant, demande à la cour de :
‘Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau,
Dire et juger que la société intimée a commis des agissements de harcèlement moral et discriminatoire à son encontre,
Dire et juger que la société intimée a manqué à son obligation de sécurité,
Dire et juger que la société intimée a commis des manquements graves empêchant la poursuite du contrat de travail,
Prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts et griefs exclusifs de l’employeur,
Dire et juger que cette résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Annuler les trois sanctions disciplinaires qui lui ont été notifiées,
Condamner la société intimée au paiement des sommes suivantes:
– Indemnité compensatrice de préavis : 5454.66 € brut (2 mois)
– Congés payés afférents : 545.47 € brut
– Indemnité de licenciement : 9092 € net (à actualiser au jour du prononcé du jugement)
– Congés payés mémoire (à actualiser au jour du prononcé du jugement)
– Dommages et intérêts suite à annulation des sanctions disciplinaires : 5000 €
– Dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination : 30 000 € net
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
A titre principal, si le harcèlement moral est retenu : 50 000 €
A titre subsidiaire, si le harcèlement moral n’est pas retenu : 30 000,63 € net (soit 11 mois de salaire, à actualiser au jour du prononcé du jugement en fonction de l’ancienneté du salarié)
En tout état de cause,
Condamner la société intimée à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
Remettre les documents sociaux de fin de contrat sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir,
Lui régler la somme de 3000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,
Assortir les condamnations à intervenir des intérêts légaux à compter de la demande, ces intérêts devant être capitalisés au jour de la saisine de la juridiction prud’homale,
Débouter la société intimée de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.’
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 6 mai 2020, la SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU, intimée, demande à la cour de :
‘A titre principal:
– dire et juger irrecevable la demande de M. [A] [C] au titre des dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité l’action conformément aux dispositions des articles 564 et suivants du code de procédure civile,
– confirmer en tous points le jugement déféré,
A titre subsidiaire :
Si par extraordinaire la Cour devait faire droit à la demande de résiliation judiciaire :
– dire et juger que M. [A]-[C] ne peut solliciter une somme supérieure à :
– 5400 € bruts au titre du préavis
– 7650 € au titre de l’indemnité de licenciement
– 8100 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– débouter M. [A] [C] de l’ensemble de ses autres demandes,
En tout état de cause :
– condamner M. [A] [C] à verser à la société PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU la somme de 4500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [A] [C] aux entiers dépens.’
Le 30 novembre 2021, M. [A]-[C] a notifié de nouvelles écritures, demandant à la cour de :
‘- se déclarer incompétente pour trancher la/les fins de non-recevoir soulevées en cause d’appel par l’intimée, seul le conseiller de la mise en état ayant qualité pour les examiner par application des dispositions de l’article 907 et 789 du code de procédure civile,
– réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau,
– dire et juger que la société intimée a commis des agissements de harcèlement moral et discriminatoire à l’encontre de M. [A] [C] en raison de ses activités syndicales de représentation du personnel,
– dire et juger que la société intimée à manquer à son obligation de sécurité,
– dire et juger que la société intimée a commis de manquements graves empêchant la poursuite du contrat de travail,
– prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [A]-[C] aux torts et griefs exclusifs de l’employeur,
– dire et juger que cette résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– annuler les trois sanctions disciplinaires notifiées à M. [A]-[C],
– condamner la société intimée au paiement des sommes suivantes:
Indemnité compensatrice de préavis : 5454.66 € brut (2 mois)
Congés payés afférents : 545.47 € brut
Indemnité de licenciement : 9456,00 € net
Dommages et intérêts à la suite de l’annulation des sanctions disciplinaires : 5000 €
Dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination : 30 000 € net
Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
A titre principal, si le harcèlement moral est retenu : 50 000 €
A titre subsidiaire, si le harcèlement moral n’est pas retenu : 30 000,63 € net (soit 11 mois de salaire, à actualiser au jour du prononcé du jugement en fonction de l’ancienneté du salarié),
En tout état de cause,
– condamner la société intimée à :
régler à M. [A] [C] la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
remettre les documents sociaux de fin de contrat sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir,
régler à M. [A] [C] la somme de 3000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,
– assortir les condamnations à intervenir aux intérêts légaux à compter de la demande, ces intérêts devant être capitalisés au jour de la saisine de la juridiction prud’homale,
– débouter la société intimée de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions’.
Aux termes de conclusions transmises par la voie électronique le 1er décembre 2021, la SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU a demandé à la cour d’écarter des débats les conclusions de M. [A]-[C], notifiées le 30 novembre 2021, ainsi que la pièce 48.
L’ordonnance de clôture est par suite intervenue le 2 décembre 2021.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le rejet des conclusions de l’appelant notifiées le 30 novembre 2021
Conformément aux dispositions de l’article 802 alinéa 1 du code de procédure civile, issues du décret n 2019-1333 du 11 décembre 2019, après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.
L’article 15 du code de procédure civile énonce en outre : « Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense. ».
Aux termes de l’article 16 du même code « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. ».
La SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU fait valoir qu’elle n’a pas disposé du temps utile pour prendre connaissance des nouvelles conclusions notifiées par l’appelant, alors que les ajouts sont nombreux et qu’il est soulevé de nouveaux moyens dont un moyen d’irrecevabilité manifestement dans le but de l’empêcher d’y répondre, que le manquement au principe du contradictoire est caractérisé.
Il apparaît que le conseil de l’appelant a communiqué ses dernières écritures contenant 45 pages ainsi qu’une nouvelle pièce portant le numéro 48, le 30 novembre 2021, respectivement à 18H52 et à 18H55, que l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 2 décembre 2021 à 8H34, l’intimée ne disposait que d’un seul jour pour répliquer.
Il en est résulté une atteinte manifeste aux droits de la défense, dès lors que la société intimée s’est trouvée empêchée de faire valoir ses moyens et arguments en réponse, alors que l’appelant a eu pour sa part plus de 18 mois pour répliquer aux seules conclusions de son adversaire notifiées le 6 mai 2020 et qu’il a été informé le 26 août 2021 de ce que la clôture serait prononcée le 2 décembre 2021.
Il conviendra en conséquence d’écarter les conclusions en cause, outre la pièce n°48, notifiées le 30 novembre 2021 et de se référer aux conclusions et pièces communiquées antérieurement.
Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail
Par application des articles 1227 et 1228 du code civil et des articles 1231-1 et 1222-1 du code du travail, le salarié est admis à demander la résiliation judiciaire du contrat de travail en cas d’inexécution par l’employeur des obligations découlant du contrat.
La résiliation judiciaire du contrat de travail sera prononcée aux torts de l’employeur si les manquements de ce dernier à ses obligations, contractuelles, tels qu’invoqués par le salarié, le justifient, le juge devant apprécier les manquements en cause au jour de sa décision, ceux-ci devant être d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. Cette résiliation produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au soutien de sa demande, M. [A]-[C] allègue :
avoir été victime de harcèlement moral,
avoir fait l’objet de discrimination en raison de ses activités syndicales de représentation du personnel,
un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Sur le harcèlement moral
En application des dispositions de l’article L1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Aux termes du même article et de l’article L.1154-1 du code du travail, en sa rédaction applicable à la cause, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il revient à la présente cour de rechercher si M. [A]-[C] rapporte la preuve de faits qu’il dénonce au soutien de son allégation d’un harcèlement moral, si les faits qu’il présente, appréhendés dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et dans l’affirmative, si l’employeur justifie que les agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Au soutien de sa demande de reconnaissance d’une situation de harcèlement moral, M. [A]-[C] allègue :
– de multiples modifications apportées à son contrat de travail, notamment matérialisées par des changements horaires, ayant par ailleurs été confiné à des tâches ingrates sans disposer du matériel adéquat pour les réaliser, ainsi,
– le 23 décembre 2014, le président, M. [I], lui a imposé une modification de ses conditions de travail en le changeant d’affectation à compter du 1er janvier 2015 et en modifiant ses horaires de travail, et alors qu’il travaillait au plan d’eau, il s’est vu affecté sous les ordres de M. [F] en qualité d’agent portuaire, au service du maître de port terre-plein,
-le 22 décembre 2017, il lui était imposé une nouvelle modification de ses horaires de travail qui étaient désormais fixés du lundi au vendredi de 9H00 à 17H00 avec une pause entre 12H30 et 13H30,
de multiples sanctions infondées qui lui ont été infligées, dont il sollicite par ailleurs l’annulation, ayant fait l’objet de rappels à l’ordre et d’avertissements, ainsi,
– le 23 octobre 2014, il lui était notifié une mise à pied de trois jours à la suite d’une altercation verbale avec son supérieur hiérarchique, M. [W], pour avoir dénoncé des propos tenus par ce dernier à son encontre en ces termes « tu me casses les couilles » et « tes états d’âme on n’en a rien à foutre » et indiqué être outré par son comportement et les « formules indignes d’un manager », l’employeur ayant considéré que les faits n’étaient pas avérés, estimant que ce comportement qui consistait à porter des accusations infondées à l’encontre d’un salarié susceptible de lui valoir des sanctions disciplinaires n’était pas acceptable et constituait un manquement à ses obligations, la liberté d’expression ne lui permettant pas de porter atteinte à la considération d’un salarié, de surcroît son supérieur, en remettant en cause sa capacité à manager une équipe sans justifier ses propos,
– le 17 janvier 2018, il faisait l’objet d’un rappel à l’ordre, pour des retards répétés, et en particulier le 16 janvier 2018 pour avoir repris son poste qu’à 13h40, sans avoir au préalable averti son supérieur hiérarchique et le 17 janvier 2018 pour l’avoir quitté à 12h30 et ne l’avoir rejoint qu’à 13h45, sanctions qu’il contestait par courrier du 21 février 2018,
– le 14 mars 2018, l’employeur répondait à sa lettre de contestation lui notifiant en outre un premier avertissement et le 17 avril 2018, il lui était adressé un second avertissement, pour non-respect des directives de son supérieur hiérarchique et remise en cause de son autorité et pour nouveaux retards dans la prise de poste,
la multiplicité de ces sanctions en l’espace de trois mois traduisant l’acharnement de l’employeur à son encontre, le dernier avertissement du 17 avril 2018 démontrant les pressions exercées par son supérieur hiérarchique,
la suppression abusive de l’accès au matériel informatique, non justifiée par des éléments objectifs, alors que ces missions justifiaient l’utilisation de ce matériel, qui lui permettait de rendre compte à son supérieur et de communiquer avec le reste des salariés, de sorte qu’elle constitue une sanction déguisée injustifiée infligée sans le respect de la procédure disciplinaire, alors encore que l’employeur ne peut soutenir qu’il en faisait un usage abusif, ne produisant qu’un seul courriel qu’il aurait adressé à son supérieur (courriel du 30 janvier 2018), le retrait de ce matériel ayant affecté son travail, son rôle de délégué du personnel et ayant eu pour objectif de l’isoler et de limiter sa communication dans l’entreprise,
sa mise à l’écart, en ce que Mrs [F] et [I] se sont ingéniés à l’ostraciser, ses collègues de travail ayant reçu la consigne verbale de ne pas lui adresser la parole,
le traitement réservé à ses demandes de congés payés, devant être approuvées par le CODIR de la société au contraire de ses collègues, son supérieur hiérarchique, M. [F] ayant expliqué que ses congés sollicités pour 2018 avaient été refusés car ils n’étaient pas accordés aux agents portuaires entre le 15 juin et le 15 septembre, alors qu’il n’était plus affecté au plan d’eau depuis le 1er janvier 2015, qu’il avait bénéficié en 2017 de jours de congés payés entre le 15 juin et le 15 septembre, de sorte que le refus d’octroi des congés est abusif, observant en outre que c’est à la suite de sa demande d’explications quant au refus de ses congés payés que le matériel informatique lui a été retiré,
un acharnement de l’employeur qui a fait diligenter un contrôle médical à son encontre alors qu’il a justifié de son arrêt maladie.
Il ajoute qu’il n’était pas le seul à subir les agissements de harcèlement moral,
– que son prédécesseur M. [T], délégué du personnel, avait également dénoncé des faits identiques, les ayant consignés sur le registre spécial en janvier 2011 et a été évincé peu de temps après, aucune enquête n’ayant été diligentée de la part de l’employeur,
– que Mme [B], s’est plainte de harcèlement et a porté l’affaire devant la juridiction prud’homale,
– que Mme [U] a quitté la société après avoir déposé plainte pour violences,
– que depuis la prise de poste de M. [I], les ruptures conventionnelles et licenciements se sont multipliés.
Le salarié fait en outre état :
de reproches infondés dans le cadre de ses dernières écritures de première instance, l’employeur dénonçant à son tour un comportement provocateur et irrespectueux envers la direction qu’il aurait prétendument adopté depuis sa saisine du conseil de prud’hommes, produisant le témoignage de M. [H], avec lequel il aurait eu une altercation en février 2019, alors que ce témoignage n’évoque ni injures, ni menaces, ainsi qu’une simple main courante,
de faits nouveaux s’étant déroulés postérieurement à l’audience de plaidoirie devant le conseil de prud’hommes de Nice, ainsi,
– ses heures de délégation prises le 1er juillet 2019 ne lui étaient pas réglées, et il a été considéré en absence injustifiée, situation qu’il a dénoncée par courrier du 18 septembre 2019, relevant que l’employeur s’est rendu coupable du délit d’entrave,
– le cahier de liaison seul outil mis à sa disposition pour lui permettre de communiquer avec son supérieur hiérarchique avait disparu, alors qu’il ne disposait plus d’accès à un ordinateur, sans que sa direction informée ne daigne réagir, pour réapparaître deux mois plus tard,
– l’employeur a renouvelé le parc de vélos mis à disposition du personnel pour les rondes dans le port, lui laissant un ancien vélo en très mauvais état, alors que sa dernière fiche de poste communiquée dans la lettre d’avertissement du 14 mars 2018 précisait expressément qu’il relevait de ses fonctions d’effectuer des rondes sur le port, et alors qu’il était contraint d’emprunter les nouveaux vélos de ses collègues, leur supérieur hiérarchique a modifié les codes des cadenas sans les transmettre aux agents concernés pour éviter qu’ils ne les lui transmettent,
– il a été contraint de dénoncer l’absence depuis deux ans de la moindre commande de tenues vestimentaires,
– l’établissement d’une note de service le 4 septembre 2019, remise à son retour de congé le 9 septembre 2019, lui interdisant l’accès à l’atelier, afin manifestement de donner une base au harcèlement et à la discrimination dont il est l’objet, les serrures de l’atelier ayant été changées,
– la pose d’un cadenas sur l’ancien vélo qui lui était attribué, avec interdiction de l’utiliser, sa fiche de poste ayant été modifiée,
– la quasi-intégralité de ses attributions déléguée aux autres agents portuaires,
– le refus systématique de ses demandes,
– l’absence d’entretien annuel de fin d’année en décembre 2019, en définitive organisée en janvier 2020.
Il produit :
Sur les modifications apportées au contrat de travail,
– le courrier de l’employeur du 23 décembre 2014
– le courrier de l’employeur du 22 décembre 2017
– les échanges de courriels des 18 décembre 2017, 18 et 25 janvier 2018 concernant les travaux contre la rouille.
Sur les sanctions infligées,
– la lettre de mise à pied du 23 octobre 2014
– la lettre de contestation du salarié en date du 29 octobre 2014
– la lettre de rappel à l’ordre du 17 janvier 2018
– la lettre lui notifiant un avertissement en date du 14 mars 2018
– la lettre lui infligeant un second avertissement du 17 avril 2018
Sur la suppression du matériel informatique,
– le courriel de son supérieur hiérarchique, M. [F] du 9 février 2018,
Sur la mise à l’écart,
– les attestations de plusieurs salariés, ainsi,
Mme [U], assistante QHSE, rapporte : « dès mon arrivée au sein de la société du Port de Plaisance de Beaulieu, en octobre 2015, il m’a clairement été formulé, à plusieurs reprises par la direction, M. [I] et certains membres du Codir dont M. [P] et [F], qu’il valait mieux éviter tout contact avec M. [A]-[C] (délégué du personnel) et qu’il en allait de l’avenir de mon contrat de travail dans l’entreprise. Suite à une violence physique subit sur ma personne par M [I], et pour laquelle une plainte a été déposée, lors d’un déjeuner avec certains membres du CODIR, j’en ai immédiatement référé à M. [A]-[C] qui a été le seul à se révolter contre ce comportement et ces méthodes déstabilisantes »,
Mme [B], assistante de direction, déclare : « …il m’a été demandé à plusieurs reprises de manière non officielle par M. [I] et M [F] d’éviter de fréquenter M [A]-[C] au sein du Port de Beaulieu. J’ai également constaté une importante stratégie d’isolement à son encontre, menée sur l’ensemble du personnel de la société alors que celui-ci a toujours eu des états de service excellents, un très bon relationnel avec ses collègues et s’est toujours montré disponible et à l’écoute envers tous ceux qui l’ont sollicité en sa qualité de délégué du personnel. »,
M. [N], agent portuaire, indique : « il (M. [I]) a demandé à plusieurs reprises de manière officieuse par les maîtres de port, de mettre M [A]-[C] à l’écart.»,
Sur les congés payés,
– les courriels échangés avec son supérieur hiérarchique, M. [F], les 7 et 8 février 2018.
Il produit en outre son dossier médical contenant un arrêt travail du 1er août 2018, des prescriptions datées des 17 et 31 juillet 2018 et des radios oculaires
Sur les faits postérieurs à l’audience de plaidoirie devant le conseil de prud’hommes,
– son courrier du 17 juillet 2019 adressé à l’employeur expliquant les motifs de son absence le 1er juillet 2019, à savoir l’utilisation de la journée au titre du contingent d’heures de délégation qui avait fait de l’objet d’une demande d’autorisation auprès de son supérieur hiérarchique, et indiquant faire l’objet d’une discrimination en ce qu’il ne dispose pas d’un vélo neuf comme ses autres collègues, déplorant en outre l’absence de commandes de matériel depuis deux ans au niveau vestimentaire
– courrier du 18 septembre 2019 qu’il a adressé en réponse au courrier du 26 août 2019 de l’employeur,
– le SMS à son supérieur hiérarchique concernant la disparition du cahier de liaison et des extraits de ce document,
– la note de service du 4 septembre 2019, relative à l’utilisation des ateliers et portant changement de toutes les clés d’accès,
– le courrier de l’employeur du 8 octobre 2019 faisant suite à sa lettre du 18 septembre 2019, contestant ses propos,
– l’attestation de Mme [B], assistante de direction partageant un bureau avec M. [F], qui déclare « avoir été témoin de refus systématiques de la part de celui-ci à l’égard de ses demandes, notamment lorsqu’il avait besoin de moyens techniques dans le but d’effectuer des tâches professionnelles »,
– les plannings de décembre 2019 démontrant qu’aucun entretien d’évaluation n’a été organisé fin 2019 et le compte-rendu annuel d’entretien qui s’est déroulé le 23 janvier 2020.
Ces éléments pris dans leur ensemble permettent de laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral.
En réponse, aux fins de justifier que les faits avancés par la salariée sont étrangers à tout harcèlement moral, l’employeur fait valoir :
que le comportement du salarié s’est dégradé au cours de la relation contractuelle, se désinvestissant de son travail et acceptant de moins en moins l’autorité hiérarchique,
qu’il faisait l’objet d’une mise à pied le 23 octobre 2014, pour avoir prêté à M. [W], des propos injurieux, dénonciation qui s’était avérée infondée,
que pour éviter de nouvelles difficultés, il décidait de le transférer au sein du service Terre plein sous la direction de M. [F], le salarié n’ayant émis aucune contestation,
qu’il n’en est résulté aucune modification de ses conditions de travail, alors qu’il demeurait toujours agent portuaire,
que ce transfert ne constituait pas une double sanction mais une mesure permettant d’éviter toute situation de tension au sein de la société,
que M. [A]-[C] sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail se prévalant de manquement de l’employeur à ses obligations, son comportement démontre toutefois que lesdits manquements n’ont pas rendu impossible la poursuite de la relation contractuelle, alors qu’il a poursuivi l’exécution de son contrat de travail, et qu’il invoque des faits anciens,
que postérieurement à l’audience de jugement du conseil de prud’hommes du 25 juin 2020, le salarié adoptera une attitude particulièrement déplacée et accusatoire dans le but manifeste de se constituer des preuves à lui-même dans le cadre d’un appel, créant de nombreux incidents, se servant de la protection que lui confère son mandat de délégué du personnel pour provoquer ses supérieurs hiérarchiques et refuser d’effectuer des tâches entrant dans ses fonctions, qu’il n’a pas manqué de réagir en répondant point par point à l’intéressé,
que le salarié se dit victime de harcèlement moral depuis des années, qui serait notamment caractérisé par de multiples sanctions injustifiées, sans avoir jamais formulé la moindre protestation, ni mentionné ces faits sur le cahier des délégués du personnel,
qu’il n’a pas non plus alerté l’inspection du travail ou la médecine du travail, alors qu’en sa qualité de délégué du personnel, il jouissait d’une totale liberté d’expression,
qu’à l’annonce des faits dénoncés par le précédent délégué du personnel il a fait afficher une note de service dès février 2011, incitant les salariés se prétendant victimes de tels actes de les dénoncer et d’en informer l’inspection du travail et la médecine du travail,
Sur les modifications apportées au contrat de travail,
que M. [A]-[C] a été placé avec son accord dans le service terre plein à compter du 1er janvier 2015, pour y exercer les mêmes fonctions d’agent portuaire,
que les fréquents changements d’horaires qu’il mentionne se résument à une seule modification opérée à compter de janvier 2018, alors qu’il a apposé sa signature sur la lettre de notification, matérialisant son acceptation,
que sur la modification de ses fonctions, et en particulier le fait de lui confier des tâches ingrates sans disposer du matériel adapté, il ne produit qu’un seul échange de courriels avec son supérieur hiérarchique sur le traitement de boiseries, alors que la convention collective prévoit au titre des tâches d’un agent portuaire technique l’entretien des installations et des équipements, des locaux et des infrastructures et l’entretien courant…,
Sur les sanctions infligées au salarié,
que dès lors qu’elles sont justifiées, les sanctions en cause ne peuvent s’apparenter une situation de harcèlement moral,
qu’il lui a été infligé quatre sanctions en 11 ans, de sorte qu’il n’a subi aucun acharnement comme il le prétend,
que l’action en contestation de la mise à pied disciplinaire du 23 octobre 2014 est prescrite en application de l’article L 1471 ‘ 1 du code du travail,
que sa contestation plus de quatre ans après les faits s’inscrit manifestement dans une volonté de décrédibiliser l’employeur à des fins spéculatives, alors qu’il n’avait à l’époque émis aucune protestation à l’encontre de cette sanction, ce qui atteste de son caractère justifié,
que le rappel à l’ordre du 17 janvier 2018, infligé en raison du non-respect de ses horaires de travail a également été adressé à d’autres salariés (M. [E], Mme [B]),
que M. [A]-[C] n’a d’ailleurs pas contesté avoir pris son poste avec retard ayant prétendu qu’il était dans l’enceinte portuaire pour répondre aux questions d’usagers alors que ce n’est pas sa fonction,
que l’avertissement du 14 mars 2018, pour non-respect des consignes, le salarié s’étant abstenu de remplir son carnet de liaison, est également justifié alors qu’il a délibérément refusé d’obéir aux directives de son supérieur,
que l’avertissement du 17 avril 2018 a été infligé au salarié pour propos déplacés tenus à l’endroit de son supérieur et insubordination,
Sur la suppression de l’accès au matériel informatique,
que la sanction est définie par l’article L 1331-1 du code du travail comme « toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. »,
qu’aucune des missions du salarié telles que prévues dans sa fiche de poste ne nécessite l’utilisation d’un ordinateur, alors qu’il en faisait un usage abusif,
que la disposition d’une adresse de messagerie professionnelle comme tous les salariés du port n’induit nullement l’accès à un matériel informatique,
sur la mise à l’écart,
que pour justifier ses allégations, le salarié produit aux débats des attestations dépourvues de toute crédibilité, ainsi,
les propos de Mme [Z], sa compagne, sont partiaux, ce d’autant qu’elle a quitté l’entreprise début 2015 alors que les faits dénoncés se situent en 2017/2018,
Mme [K] [B] a également saisi la juridiction prud’homale en adoptant la même stratégie que le salarié et a été déboutée de sa demande au titre du harcèlement moral, produisant des attestations établies par M.[A]-[C], d’une part, M.[N] et Mme [U], d’autre part, les mêmes ayant attesté en sa faveur,
Mme [U] a démissionné de son poste, sa plainte ayant été classée sans suite,
qu’il verse pour sa part plusieurs attestations démontrant que les rapports avec le salarié pouvaient être compliqués du fait de sa mauvaise volonté à exécuter son travail, dont celles de :
M. [H] qui déclare : « ..[V] n’a jamais fait preuve de bonne volonté quant à la réalisation de ses tâches lorsqu’il était rattaché au service plan d’eau. A de nombreuses reprises il a fallu négocier pour qu’il exécute des tâches faisant parties de sa fiche de poste(…) ses revendications étaient uniquement dans un objectif personnel. M. [A] [C] ne s’est jamais réellement occupé du bon fonctionnement du service.
C’est une des raisons pour lesquelles mon responsable M. [R] [W] et moi-même avons décidé d’accepter sa demande de transfert de service »,
Mme [Y] qui indique « (‘) il n’a jamais su répondre aux attentes de son N+1. Nonchalant et sans initiative (‘). Aucune volonté de progresser, remarque désobligeante dans le cahier de mission, travail incomplet, souvent traînant sur le port sans motif. Il n’a pas saisi l’opportunité réelle que lui offrait la direction. En aucun cas M. [A] n’a été écarté des missions et autres faits du service terre-plein »,
Sur les congés payés,
qu’aux termes de la fiche de procédure relative aux congés payés, il est prévu que ‘l’ensemble du service d’exploitation posera ses congés en dehors des trois mois de la très haute saison (15 juin – 15 septembre). Les congés par poste (agent portuaire/agent nettoyage/maître de port) devront être pris équitablement avant et après la saison’,
que cette règle concerne donc tous les salariés,
que le refus des congés du salarié pendant cette période d’activité plus importante était donc prévisible,
que ses congés n’étaient en outre nullement décidés par le comité de direction, aucune pièce ne venant corroborer cette affirmation,
Sur les nouveaux griefs invoqués en cause d’appel,
sur le non-paiement de ses heures de délégation, le SMS adressé à son supérieur hiérarchique le 1er juillet 2019 à 5h55, ne fait aucunement état d’une de l’utilisation d’heures de délégation,
que pour éviter toute polémique la déduction opérée en juillet a été supprimée et son salaire reconstitué,
sur la disparition du carnet de liaison,
que par lettre du 8 octobre 2019, il lui était rappelé l’obligation de remplir ce document et il était observé que cette disparition permettait de justifier a posteriori l’absence de reporting par le salarié,
que peu de temps après, le document en question réapparaissait,
sur la suppression du vélo,
que ces fonctions ne nécessitaient pas l’utilisation d’un vélo, alors qu’il n’était pas amené à effectuer des rondes sur le port, la fiche de poste que le salarié verse au dossier n’étant pas celle définie en 2015, qu’il a signée et qui figure en pièce jointe à la lettre d’avertissement du 14 mars 2018 et à la lettre du 8 octobre 2019,
que s’agissant de la pose de cadenas, il ne verse aux débats aucun élément aux fins d’étayer ses affirmations,
sur la note de service du 4 septembre 2019,
qu’ayant constaté que les portes d’accès aux locaux techniques étaient laissées ouvertes, une première note avait déjà été établie en janvier 2019 sans avoir été respectée,
qu’il a donc été décidé de changer les clés d’accès et de confier la responsabilité du matériel entreposé aux maîtres de port,
que ladite note est applicable à tous les agents et le salarié n’a donc pas été privé de ses moyens de travailler,
sur le retrait de ses tâches qui seraient effectuées par d’autres agents,
le salarié ne précise pas les moyens techniques qui lui seraient refusés, l’attestation de Mme [B], de pure complaisance, n’étant d’aucun secours,
qu’en réalité aucune des tâches confiées aux salariés ne lui a été retiré, alors qu’il refusait au contraire d’effectuer les tâches en question et qui de fait, étaient exécutées par son supérieur hiérarchique,
sur l’organisation de l’entretien d’évaluation au titre de 2019 effectuée en janvier 2020, les entretiens se déroulent chaque année entre fin novembre et fin janvier en fonction des disponibilités de chacun,
que le salarié ne peut prétendre avoir droit un traitement spécial, alors que la lecture du compte-rendu d’entretien démontre la position d’opposition permanente du salarié aux observations de sa direction.
Ces éléments sont de nature à justifier de ce que les décisions de l’employeur sont étrangères à tout harcèlement moral, la cour ajoutant que :
S’agissant des sanctions disciplinaires,
– sur le rappel à l’ordre du 17 janvier 2018, les faits ne sont pas sérieusement contestés par le salarié, la sanction prononcée n’encourt pas la nullité en ce qu’elle est justifiée et proportionnée aux faits reprochés,
– sur l’avertissement du 14 mars 2018, l’employeur précisait avoir pris l’initiative d’être présent lors de la réunion de service du 20 février afin de régler le problème relationnel développé avec son supérieur hiérarchique, qu’il fait référence au courrier du salarié du 21 février qui souhaitait privilégier le dialogue aux fins de désamorcer tout malentendu, et a décidé, au vu de cette situation, de remettre en place le cahier de mission mentionnant le contenu des tâches à accomplir chaque semaine et devant être revu lors de réunions hebdomadaires, qu’il a été demandé au salarié de remplir ce cahier chaque jour pour un bon suivi de l’exécution des tâches à effectuer, ce que le salarié a refusé de faire, le salarié n’ayant alors émis aucune contestation, de sorte que la sanction est justifiée et qu’il n’y a pas lieu de prononcer son annulation,
– sur l’avertissement du 17 avril 2018, employeur indique que le salarié a fini par appliquer les directives mais utilisait le carnet de liaison pour contester les remarques et tenir des propos désobligeants à l’encontre de son supérieur en adoptant un ton particulièrement inadapté,
que les deux extraits du cahier de mission produits permettent suffisamment de justifier la sanction prononcée, pouvant être retenu un ton critique du salarié à l’endroit de son supérieur, et proportionnée à raison des précédentes mesures disciplinaires.
Sur le surplus des faits,
qu’alors qu’il résulte du dossier, et en particulier de ses entretiens annuels d’évaluation et des mentions portées au cahier de liaison, que le salarié disposait d’une large liberté d’expression, il n’a jamais fait état d’une situation de harcèlement moral, avant sa saisine de la juridiction prud’homale, s’interrogeant sur d’éventuelles pressions dans son courrier de contestation de l’avertissement notifié le 17 janvier 2018, sans plus de précision, les faits dénoncés par son prédécesseur, qui se situeraient au demeurant en 2011, ne permettant pas d’établir des agissements de harcèlement moral à son endroit, ni un comportement récurrent de l’employeur,
que le salarié n’est pas fondé à se prévaloir de modifications de ses conditions de travail, ou encore de changements horaires, qu’il a manifestement acceptés, alors qu’il apparaît que les tâches qui lui étaient confiées entraient dans la définition de ses fonctions,
que dès lors que ses fonctions ne nécessitaient pas l’utilisation d’un ordinateur, il ne peut être fait grief à l’employeur d’avoir supprimé son accès, ayant constaté une utilisation abusive, alors que ce retrait ne peut être assimilé à une sanction au sens de l’article L 1331-1 du code du travail,
qu’au vu des observations et des justifications présentées par l’employeur, la mise à l’écart n’apparaît pas caractérisée, les attestations qu’il verse au dossier ne devant pas être écartées pour non-conformité aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, lesquelles ne sont pas prescrites à peine de nullité, alors qu’il revient à la cour d’apprécier leur valeur probante, le Conseil de prud’hommes ayant très justement constaté que le salarié s’était de lui-même placé dans une situation d’opposition systématique et injustifiée face aux directives de ses supérieurs hiérarchiques,
que les demandes de congés payés pendant la période estivale étaient susceptibles d’être refusées à tout salarié s’agissant d’une période d’accroissement de l’activité, ce dont le salarié était parfaitement informé,
que les faits invoqués par le salarié qui se seraient déroulés postérieurement à l’audience de jugement doivent être considérés avec précaution et ne pourront en tout état de cause être retenus à la lumière des observations formulées par l’employeur.
En conséquence, M. [A]-[C] sera débouté de sa demande en reconnaissance et en indemnisation d’une situation de harcèlement moral.
Il sera également débouté de sa demande de dommages et intérêts pour annulation des sanctions disciplinaires.
Sur la discrimination
Aux termes de l’article L 1132-1 du code du travail ‘Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.’
L’article L.1134-1 du code du travail prévoit par ailleurs qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
L’article L.2141-5 alinéa 1er du code du travail dispose :’Il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.’
Il s’en suit que l’employeur ne peut prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale ou représentative pour arrêter ses décisions, l’activité syndicale étant entendue au sens large et s’appliquant à tout représentant du personnel, même sans étiquette syndicale.
En application de l’article L.1132-4 du code précité ‘Toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul’.
M. [A]-[C] prétend avoir été discriminé sur le fondement des mêmes éléments que ceux développés au soutien d’une situation de harcèlement moral, alléguant :
– des sanctions abusives et des modifications imposées de ses attributions et conditions de travail,
– son transfert au sein de l’équipe dirigée par M. [F] dans le but de multiplier les pressions et vexations à son endroit alors qu’il a entrepris d’exercer pleinement ses prérogatives de représentant du personnel en défendant notamment ses collègues de travail,
– les sanctions systématiques pour quelques retards justifiés à la prise de poste alors que ceux de la plupart de ses collègues de travail ne sont pas sanctionnés,
– le refus opposé à ses demandes de congés et leur validation par le CODIR,
– la suppression de l’accès au matériel informatique,
– le non-paiement de ses heures de délégation,
soutenant en outre que ces agissements ne sont pas isolés, alors que son prédécesseur, M. [T], délégué du personnel en 2011, a dénoncé le même type de comportement discriminatoire.
M. [A]-[C] qui se prétend discriminé ne produit toutefois aucun élément permettant de laisser supposer qu’il aurait été privé d’un droit ou d’un avantage par rapport à d’autres salariés placés dans la même situation.
Il conviendra en conséquence de le débouter de sa demande de dommages et intérêts.
Sur le manquement à l’obligation de sécurité
En application de l’article L 4121-1 du code du travail l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Cette obligation, non seulement lui interdit de prendre, dans l’exercice de son pouvoir de direction, toutes mesures de nature à compromettre cette santé physique et mentale des travailleurs mais lui impose de mener des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, des actions d’information et de formation, outre la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
M. [A]-[C] fait valoir qu’en application des dispositions sus-visées, l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur lui impose de diligenter une enquête, dès lors que des faits susceptibles de caractériser des agissements constitutifs d’un harcèlement moral lui sont relatés,
qu’il a dénoncé de tels agissements par courrier du 18 septembre 2019 qu’il a adressé en réponse au courrier de l’employeur du 26 août 2019 et à la note de service du 4 septembre 2019.
L’employeur conclut à l’irrecevabilité de cette demande présentée pour la première fois en appel.
N’étant pas sérieusement discutable que le salarié se prévaut d’un moyen nouveau à l’appui de sa demande initiale de résiliation du contrat de travail, la demande de dommages et intérêts formulée de ce chef, de fait se rattache aux prétentions initiales par un lien suffisant de sorte qu’elle sera déclarée recevable.
L’employeur relève toutefois justement l’inopérance de ce moyen alors que par jugement du 15 octobre 2019, le salarié était débouté de ses demandes au titre du harcèlement moral.
La cour retient en outre que le salarié n’avait préalablement à la saisine de la juridiction prud’homale dénoncé aucun fait de harcèlement moral et qu’il ne peut être fait grief à l’employeur de n’avoir diligenté aucune enquête.
Le manquement de l’employeur, non caractérisé, ne sera pas retenu et M. [A]-[C] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.
* * *
En l’absence de manquements caractérisés et d’une gravité telle qu’elle rend impossible la poursuite de la relation de travail, il n’y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail.
Sur les dépens et les frais non-répétibles :
M. [A]-[C] qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens et il y a lieu de le condamner à payer à la SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 2000 euros.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Déboute M. [V] [A]-[C] de sa demande de dommages et intérêts au titre du manquement à l’obligation de sécurité,
Condamne M. [V] [A]-[C] à payer à la SA SOCIÉTÉ DU PORT DE PLAISANCE DE BEAULIEU une somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [V] [A]-[C] aux dépens,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.
LE GREFFIERLE PRESIDENT