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SOC.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme X…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10604 F
Pourvoi n° X 17-15.360
Aide juridictionnelle partielle en défense
au profit de Mme Y….
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 16 juin 2017.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Reassort Merchandising assistance (RMA), société anonyme, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 25 janvier 2017 par la cour d’appel de Nancy (chambre sociale), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme Marie-Annick Y…, domiciliée […] ,
2°/ à Pôle emploi de Vandoeuvre-lès-Nancy, dont le siège est […] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 21 mars 2018, où étaient présents : Mme X…, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z…, conseiller rapporteur, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de la société Reassort Merchandising assistance, de Me A…, avocat de Mme Y… ;
Sur le rapport de M. Z…, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Reassort Merchandising assistance aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Reassort Merchandising assistance à payer à Me Haas la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision.
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour la société Reassort Merchandising assistance.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
La société Reassort Merchandising Assistance fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir requalifié les contrats de travail à durée déterminée de Mme Y… en un contrat de travail à durée indéterminée, à temps plein, à compter du 5 décembre 2008, d’avoir dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l’avoir condamnée à payer à la salariée les sommes de 1.445,41 € à titre d’indemnité de requalification, de 8.672,46 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 1.541,45 € à titre d’indemnité légale de licenciement, et de 2.890,22 € à titre d’indemnité de préavis, outre celle de 289,02 € au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE selon l’article L. 1242-12 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif et, à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée ; que faute de comporter la signature du salarié, le contrat ne peut être considéré comme ayant été établi par écrit et est présumé avoir été conclu pour une durée indéterminée ; qu’en outre, l’absence d’écrit ne permet pas de prouver le motif du recours au contrat à durée déterminée ; que Mme Y… fait valoir qu’elle a travaillé pour la société RMA sans contrat écrit et qu’il appartient à celle-ci de produire l’ensemble des contrats dont elle entend se prévaloir ; qu’elle observe que si la société RMA a fini par communiquer un certain nombre de contrats, ceux-ci ne sont toutefois pas signés de sa main, à l’exception de seulement deux d’entre eux ; que la société RMA fait valoir que les contrats à durée déterminée ont été conclus dans le cadre de l’avenant à la convention collective nationale du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire du 13 février 2006 relatif à l’animation commerciale, étendu par arrêté du 16 avril 2007 ; que cet avenant a créé le contrat d’intervention à durée déterminée d’animation commerciale qui est défini par son article comme “un contrat de travail à durée déterminée conclu spécifiquement pour pourvoir l’emploi par nature temporaire d’un animateur commercial, en application des dispositions de l’article L. 122-1-1 (3°) du code du travail” (devenu l’article L. 1242-2) ; qu’elle estime donc qu’elle était fondée à recourir à des contrats à durée déterminée d’usage en application de l’article L. 1242-2 (3°) du code du travail ; que la société RMA soutient également que Mme Y… est nécessairement en possession des contrats signés de sa main au motif que les magasins dans lesquels elle intervenait exigeaient qu’elle soit en mesure de présenter un contrat de travail en règle ; qu’elle considère qu’il appartient à Mme Y… de produire ces contrats de travail pour prouver le bien fondé de ses prétentions ; qu’il appartient à l’employeur de prouver qu’il a bien respecté les formalités exigées par l’article L. 1242-12 dès lors qu’il entend revendiquer le bénéfice des dispositions applicables aux contrats à durée déterminée ; qu’il incombe donc à la société RMA, sans qu’elle puisse soutenir qu’il en résulte une inversion de la charge de la preuve, d’établir que les contrats à durée déterminée ont bien été signés par Mme Y… ; que le contrat daté du 24 novembre 2008 ayant pris effet à compter du 5 décembre 2008 par lequel Mme Y… a été embauchée pour la première fois par la société RMA ne comporte pas la signature de la salariée ; que sur les 18 contrats communiqués par la société RMA, seuls ceux du 1er octobre 2013 et du 12 novembre 2013 comportent la signature de Mme Y… tandis que les autres en sont dépourvus (24 novembre 2008, 10 juillet 2009, 21 septembre 2009, 27 novembre 2009, 11 mai 2010, 2 novembre 2010, 25 novembre 2010, 26 novembre 2010, 30 août 2011, 30 septembre 2011, 21 octobre 2011, 28 septembre 2011, 30 septembre 2011, 10 octobre 2012, 24 mars 2014) ; qu’il s’ensuit que les contrats à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée à compter du 5 décembre 2008 ;
1°) ALORS QUE le défaut de signature d’un contrat de travail à durée déterminée n’entraîne pas la requalification en contrat à durée indéterminée si le salarié a délibérément refusé de le signer de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse ; qu’en se bornant à relever que l’employeur ne prouvait pas que les contrats à durée déterminés avait tous été signés par la salariée pour en déduire la requalification en contrat à durée indéterminée, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Y… ne disposait pas de tels contrats dès lors qu’elle devait les présenter à son arrivée sur chaque site préalablement à la réalisation des prestations d’animation commerciale, ce dont il aurait résulté que le refus de produire ces contrats régulièrement signés en justice caractérisait la mauvaise foi de la salariée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1242-12 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1315 du code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, les dispositions de l’article L. 1242-12 du code du travail, tels qu’interprétées par la Cour de cassation, sont contraires à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle de l’employeur en ce qu’elles impliquent que faute de comporter la signature du salarié, le contrat de travail à durée déterminée est automatiquement requalifié en un contrat à durée indéterminée sans que l’employeur, en dehors du cas où le salarié aurait refusé de signer le contrat par mauvaise foi ou intention frauduleuse, ne puisse prouver par d’autres moyens l’accord des parties sur la durée déterminée du contrat ; que l’abrogation de ces dispositions par le Conseil constitutionnel prive l’arrêt attaqué de fondement juridique.
SECOND MOYEN DE CASSATION
La société Reassort Merchandising Assistance fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir requalifié les contrats de travail à durée déterminée de Mme Y… en un contrat de travail à durée indéterminée, à temps plein, à compter du 5 décembre 2008 et de l’avoir condamnée à payer à la salariée les sommes de 1.445,41 € à titre d’indemnité de requalification, de 8.672,46 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 1.541,45 € à titre d’indemnité légale de licenciement, et de 2.890,22 € à titre d’indemnité de préavis, outre celle de 289,02 € au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE selon l’article L. 3123-14 du code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit ; qu’il mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine et entre les semaines du mois ; qu’il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ; que la société RMA soutient que Mme Y… ne peut revendiquer l’exercice d’une activité à temps plein dans la mesure où si une journée d’animation correspondait à 7 heures de travail, elle n’a cependant jamais travaillé 35 heures par semaine ou 151,67 heures par mois ; qu’elle ne peut soutenir qu’elle se tenait en permanence à disposition puisqu’elle travaillait aussi pour d’autres employeurs ; qu’elle souligne que Mme Y… n’a travaillé pour elle que 244 heures en 6 ans et a perçu au total une somme de 3 709,53 € ainsi que cela des résulte des bulletins de salaire ; que les premiers juges ont retenu que Mme Y… avait travaillé 244 heures sur 16 mois et ont calculé, à partir des salaires effectivement versés à Mme Y…, un salaire moyen sur l’ensemble de cette période ; qu’ils en ont donc conclu que Mme Y… travaillait dans le cadre d’un contrat de travail à temps partiel à raison de 15,25 heures mensuelles ; que les contrats invoqués par la société RMA, qui se bornent pour l’essentiel à préciser qu’une prestation d’animation commerciale dure 7 heures par jour, ne sont pas des contrats de travail à temps partiel et s’analysent en réalité comme des contrats à durée déterminée à temps plein conclus pour des courtes périodes, le plus souvent pour un ou deux jours, de sorte qu’aucune durée hebdomadaire ou mensuelle n’était envisagée ; que la requalification de ces contrats en un contrat à durée indéterminée oblige donc à considérer que Mme Y… aurait normalement dû travailler à raison de 7 heures par jour, soit 35 heures hebdomadaires ou 151,67 heures mensuelles ; qu’il s’ensuit que Mme Y… est bien fondée à soutenir qu’elle devait bénéficier d’un contrat à durée indéterminée à temps plein du fait de la requalification ;
1°) ALORS QUE lorsque le contrat écrit du salarié à temps partiel mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, il appartient au salarié poursuivant la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein de prouver qu’il était dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et était tenu de se tenir constamment à la disposition de l’employeur ; qu’en considérant, pour requalifier les contrats de travail en contrat à temps plein, qu’aucune durée hebdomadaire ou mensuelle n’était envisagée par les contrats successifs de travail, après avoir relevé que ceux-ci prévoyaient pour l’essentiel une prestation d’animation commerciale de 7 heures par jour, le plus souvent pour un ou deux jours, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que les contrats de travail à temps partiel faisaient mention des jours et heures travaillées et qu’il appartenait donc à la salariée de démontrer qu’elle avait été tenue de rester à disposition permanente de l’employeur entre chacun des 18 contrats de quelques jours conclus entre le 5 décembre 2008 et le 19 avril 2014, a violé les articles L. 3123-14 du code du travail ensemble les articles 1134 et 1315 du code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et réciproquement, la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat laissant inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; qu’en énonçant, pour requalifier les contrats de travail à temps partiel et contrats à temps plein, que la requalification des contrats à durée déterminée de Mme Y… en un contrat de travail à durée indéterminée obligeait à considérer que cette dernière aurait normalement dû travailler à raison de 7 heures par jour, soit 35 heures hebdomadaires ou 151,67 heures mensuelles, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-14 du code du travail ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement, la non-conformité du contrat de travail à temps partiel entraîne une présomption simple de temps complet que l’employeur peut renverser en rapportant la preuve, par tous moyens, de la durée exacte de travail convenue et de ce que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et n’était pas tenu de se tenir constamment à sa disposition ; qu’en se bornant à relever, pour requalifier les contrats de travail à durée déterminée de Mme Y… en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, qu’aucune durée hebdomadaire ou mensuelle n’était envisagée par les contrats successifs de travail de Mme Y…, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l’employeur ne rapportait pas la preuve de la durée exacte de travail de la salariée n’ayant travaillé pour elle que 244 heures en 6 ans et de ce que cette dernière, travaillant aussi pour d’autres employeurs, ne se tenait pas en permanence à sa disposition, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3123-14 du code du travail.