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SOC.
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 février 2017
Rejet
M. CHAUVET, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président
Arrêt n° 216 F-D
Pourvoi n° P 14-27.093
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 octobre 2015.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. [X] [S], domicilié [Adresse 1],
contre l’arrêt rendu le 26 septembre 2014 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (9e chambre C), dans le litige l’opposant à la société Les Robinets Presto, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 3 janvier 2017, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. [S], de Me Haas, avocat de la société Les Robinets Presto, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 septembre 2014), que M. [S] a été engagé en qualité de responsable grands comptes, statut cadre, le 1er janvier 2010 par la société Les Robinets Presto ; qu’à la suite de la réorganisation de la stratégie commerciale de l’entreprise, il a été affecté à la mission de “prescripteur institutionnel” à compter du 1er septembre 2011 ; qu’invoquant la modification d’un élément essentiel de son contrat de travail, il a saisi, le 25 octobre 2011, la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de ce contrat ; qu’il a été licencié pour faute grave par lettre du 24 novembre 2011 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur et de condamnation de ce dernier à lui verser diverses indemnités de rupture et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l’employeur, qui propose à un salarié la signature d’un avenant au contrat de travail, reconnaît ce faisant l’existence d’une modification du contrat de travail ; qu’en refusant de considérer que le salarié avait subi une modification de son contrat de travail, quand elle constatait pourtant que l’employeur avait proposé à M. [S] la signature d’une nouvelle fiche de poste valant avenant, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1134 et 1184 du code civil ;
2°/ que la transformation importante des attributions et responsabilités principales d’un salarié occupant des fonctions de direction constitue une modification du contrat de travail, peu important l’absence de modification des conditions de rémunération de l’intéressé ; qu’en décidant que le salarié n’avait subi aucune modification de son contrat de travail, quand elle constatait pourtant que la réorganisation décidée par l’employeur avait pour effet de priver le salarié de la quasi-totalité des missions commerciales précédemment confiées dans le cadre de ses fonctions de responsable grands comptes, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé l’article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1134 et 1184 du code civil ;
3°/ que le retrait des fonctions d’encadrement suite à une réorganisation du service caractérise une modification du contrat de travail ; qu’en considérant que le poste de prescripteur national n’emportait pas de modification contractuelle, ni par conséquent l’exigence d’un accord exprès de M. [S], pour en déduire que sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur n’était pas fondée, sans même rechercher, ainsi qu’elle y était invitée par les conclusions du salarié, si la perte des fonctions d’encadrement ne caractérisait pas une diminution des responsabilités de M. [S] et, partant, une modification de son contrat de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 et 1184 du code civil ;
4°/ que constitue une modification du contrat de travail une modification dans la structure de la rémunération ; que M. [S] faisait valoir devant la cour d’appel que la modification du contrat de travail entraînait la perte du bénéfice de la rémunération variable stipulée dans son contrat de travail qui était fondée sur des objectifs en terme de chiffre d’affaires et qu’il avait déjà pu percevoir ; qu’il ajoutait que le nouveau poste de prescripteur était totalement déconnecté de tout objectif en matière de résultat financier, ce qui signifiait indéniablement que cette prime variable disparaissait et était supprimée ; qu’en se bornant à relever que M. [S] ne donnait aucun chiffre afférent à la perte de la prime alléguée, pour en déduire qu’il n’avait subi aucune modification de son contrat de travail, sans même vérifier ainsi qu’elle y était invitée, si le nouveau poste de prescripteur bénéficiait dans son principe d’une rémunération variable, ce qui touchait à la structure de la rémunération que l’employeur ne pouvait modifier sans l’accord du salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 et 1184 du code civil ;
5°/ que l’accord du salarié à la modification de son contrat de travail doit être exprès et ne peut pas résulter de la seule poursuite du contrat de travail aux conditions modifiées ; qu’en considérant, pour dénier toute modification du contrat de travail, que M. [S] avait « accepté clairement sa nouvelle mission », qui ne comportait plus la force de vente, sans constater l’accord exprès du salarié sur une telle modification, la cour d’appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 et 1184 du code civil ;
6°/ que l’aveu exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques ; que M. [S] faisait valoir que l’employeur reconnaissait de son propre aveu que son précédent poste « n’avait plus de raison d’être », et qu’il avait reconnu devant les premiers juges que le poste de responsable grands compte avait disparu ; qu’en se bornant à énoncer que le salarié n’avait subi aucune modification de son contrat de travail, sans même s’expliquer sur cet aveu extrajudiciaire de l’employeur, de nature à démontrer que le salarié avait effectivement subi une modification de son contrat de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1354 du code civil ;
Mais attendu qu’appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et procédant aux recherches prétendument omises, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a constaté que le salarié, dont la mission de prospection figurait déjà au contrat de travail, s’était vu confier les fonctions de prescripteur institutionnel rattaché au responsable des ventes national comme auparavant et qu’il conservait en outre ses attributions commerciales, son champ d’intervention ainsi qu’une classification et une rémunération identique ; qu’ayant retenu, par motifs adoptés, que l’intéressé avait gardé sa qualification et, par motifs propres, que ses responsabilités de cadre n’étaient pas affectées par la réforme organisationnelle opérée, elle a pu en déduire que cette mesure ne constituait pas une modification du contrat de travail mais s’analysait en un changement des conditions de travail décidé par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, et qui critique une motivation surabondante en sa cinquième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le condamner à payer à l’employeur la somme de 17 773,59 euros (en réalité 1 773,59 euros tel que rectifié par l’arrêt du 27 mars 2015), alors, selon le moyen :
1°/ que juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause qui lui sont soumis ; qu’en considérant que la note du 5 septembre 2011 fixant les nouvelles modalités de remboursement des frais professionnels était opposable à M. [S] puisque cette note était mentionnée comme diffusée aux chefs de vente, et aux cadres de la division commerciale et donc nécessairement à des responsables tels que M. [S], quand il ne ressortait pas de la lecture de cette note qu’elle avait été diffusée aux cadres de la division commerciale, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, ensemble le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ;
2°/ que les juges ne peuvent procéder par la voie de simples affirmations sans justifier en fait leur appréciation ni préciser et analyser les pièces sur lesquelles ils se fondent pour justifier leur décision ; qu’en affirmant péremptoirement qu’il serait fait droit à la demande de la société Les Robinets Presto, sans même préciser sur quel élément elle se fondait pour justifier sa décision, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;