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SOC.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 septembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. X…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10903 F
Pourvoi n° B 16-14.877
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Keria, société anonyme, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 3 février 2016 par la cour d’appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l’opposant à Mme Natacha Y…, domiciliée […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 28 juin 2017, où étaient présents : M. X…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller, M. A…, avocat général, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Keria, de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme Y… ;
Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Keria aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Keria à payer à Mme Y… la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Keria
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le licenciement de Mme Y… était sans cause réelle et sérieuse et condamné la société Keria Luminaires à payer à Mme Y… les sommes de 7.735,41 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 773,54 euros au titre des congés payés sur préavis, 1.976,82 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement et 15.471 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige reproche à Mme Y… un comportement volontaire tendant à : – s’opposer à l’organisation du travail en refusant la mise en place du travail du dimanche, – à négliger la maîtrise des coûts malgré les mises en garde, – à manquer aux règles de sécurité malgré les consignes et la formation qui lui a été dispensée, – à passer outre les directives en matière d’organisation du magasin et de merchandising, – à mettre en place un affichage anarchique malgré une note du 27 septembre 2012, – à ne pas suivre les performances commerciales de son équipe malgré les demandes formulées le 12 janvier 2013, – à un manque de suivi des ampoules ; que le caractère volontaire de ces manquements allégués peut effectivement en faire des fautes graves si ces faits ainsi que leur aspect volontaire étaient établis, l’employeur ayant la charge de la preuve en la matière ; que l’employeur prétend administrer la preuve de la faute grave en produisant des attestations de M. Laurent B…, les constats opérés par lui avec les photographies qu’il a effectuées, des notes de services établissant les consignes et des échanges de mails ; que dans la mesure où M. Laurent B… n’est autre que le responsable des ventes, supérieur hiérarchique de madame Y…, ces attestations, qui ne sont rien d’autres que les dires de l’employeur, n’ont pas de force probante ; qu’à l’absence de force probante des attestations, s’ajoute l’absence de précision des photographies prises qui ne peuvent être assurément rattachées au magasin dirigé par Mme Y…, aucun signe distinctif ne permettant de le faire et d’imputer à son magasin les manquements allégués ; quant aux échanges de courriels, pour certains seulement échangés entre M. B… et Mme Y…, ils laissent apparaître que sur le grief lié au gaspillage d’énergie celle-ci a fait savoir en décembre 2012 à sa hiérarchie qu’elle n’avait pas le contrôle du réglage de la température et qu’en février 2013, le problème n’était toujours pas réglé malgré les demandes d’intervention techniques ; que sur la maîtrise de l’énergie Mme Y… avait répondu à sa hiérarchie que tout le magasin était équipé en ampoules économique ; que seule la négligence dans le remplacement des wagos pour assurer la sécurité est démontrée puisqu’il ressort des mails échangés avec Mme Y… que le remplacement a été fait en décembre 2012 alors que le matériel avait été livré en été 2011 ; qu’or, le problème est connu depuis fin 2011 puisqu’un échange de mails entre M. B… et Mme Y… a eu lieu en décembre 2011 ; que la mise en oeuvre du remplacement a été faite à compter du 19 décembre 2012, après l’inspection de M. B… du 16 décembre 2012, preuve que le manquement reproché lors du licenciement mis en oeuvre deux mois plus tard ne justifiait pas une impossibilité de laisser Mme Y… en fonction ; que tous les autres manquements dont l’aspect volontaire n’est pas établi par les échanges de mails ou les pièces décrites ci-dessus à la force probante nulle, relèvent plutôt de l’insuffisance professionnelle que de la faute grave ; qu’au final, l’employeur échoue à rapporter la preuve d’une faute grave imputable à Mme Y… de sorte que le licenciement sera dit sans cause réelle et sérieuse et le jugement qui a déclaré le licenciement justifié mais pas pour faute lourde, alors que la faute lourde n’était pas alléguée et que la requalification d’un licenciement disciplinaire en licenciement pour cause réelle et sérieuse sans faute n’est pas possible, sera infirmé sur ce point et sur le rejet de l’indemnité de licenciement abusif ; que Mme Natacha Y… a donc droit : – à une indemnité de préavis (L. 1234-1 du code du travail) égale à trois mois de salaire brut selon la convention collective des commerces de détails non alimentaires applicable ; que Mme Y… prétend à un salaire mensuel brut de 1.600,00 euros ; qu’or, selon le seul bulletin de paye de février 2013 figurant au dossier, Mme Y… percevait un salaire brut primes comprises de 2.430,00 euros ; que cependant l’employeur admet dans ses écritures un salaire brut mensuel de 2.578,47 euros, de sorte que l’indemnité de préavis sera calculée sur la base du salaire admis par l’employeur, soit de 7.735,41 euros et le jugement qui a accordé 7.249,83 euros sera infirmé ; – à des congés payés sur préavis (L. 3141-1, L. 3141-22 du code du travail) : 773,54 euros et le jugement qui a accordé la somme de 724,98 euros sera infirmé ; – à l’indemnité légale de licenciement puisqu’elle a un an de service ininterrompu à la date du licenciement (L. 1234-9 et R. 1234-2 et R. 1234-4 du code du travail) soit trois ans et 10 mois soit une indemnité de 1.976,82 euros et le jugement qui lui a accordé 2.080,00 euros sera infirmé ; – à une indemnité de licenciement pour licenciement abusif, qui ne peut être inférieure à six mois de salaire, brut (article L. 1235-4 du code du travail, Mme Y… ayant plus de deux ans d’ancienneté) ; que faute de justificatifs sur la situation de Mme Y… après le licenciement, le préjudice sera entièrement réparé par l’allocation d’une somme de 15.471,00 euros ;
1°) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que le juge doit examiner l’ensemble des motifs qui y sont énoncés ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement du 20 février 2013 invoquait comme motif de licenciement une opposition systématique à la politique de l’entreprise en matière d’ouverture le dimanche ; qu’en accordant à la salariée diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité de préavis et congés payés afférents et d’indemnité légale de licenciement, sans se prononcer sur le refus de Mme Y… de mettre en place le travail du dimanche décidé dans l’entreprise, visé par l’employeur dans la lettre de rupture, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QUE la preuve des faits reprochés au salarié peut se faire par tous moyens ; qu’en déniant tout caractère probant aux attestations produites par la société Keria au seul motif qu’elles émanaient de M. B…, responsable des ventes et supérieur hiérarchique de Mme Y…, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil ;
3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE constitue une faute grave ou à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement, le fait pour un salarié de ne pas respecter les règles de sécurité applicables dans l’entreprise ; qu’en constatant que Mme Y… avait fait preuve de négligence dans le remplacement des wagos pour assurer la sécurité et en ne recherchant pas si cette faute ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la société Keria Luminaires à payer à Mme Y… la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la discrimination ;
AUX MOTIFS QUE s’agissant de la demande de dommages et intérêts pour discrimination Mme Y… fait valoir que la rupture du contrat de travail est en réalité motivée par sa volonté de devenir représentant du personnel, et donc par ses activités syndicales ; qu’en effet, le 4 décembre 2012 Mme Natacha Y… a été désignée en qualité de représentant de la CGT au comité central d’entreprise et le 11 décembre 2012, la société Keria a contesté cette désignation qui a abouti à un jugement d’annulation de sa nomination le 6 février 2013 ; que le 16 décembre 2012 soit quelques jours après le recours à l’encontre de sa désignation en qualité de représentante syndicale au comité central d’entreprise, une visite sera réalisée par M. Laurent B… en vue d’inspecter le magasin tenu par Mme Y…, qu’il tenait déjà pour responsable de l’absence d’ouverture du magasin certains dimanches ; que cette visite sera renouvelée le 23 décembre 2012 et le résultat retranscrit dans la lettre de licenciement démontre une recherche tatillonne des moindres petits défauts dans la tenue du magasin, défauts qui habituellement doivent se régler amiablement, pour en faire des griefs de nature à évincer Mme Y… sans indemnités ; que le calendrier des opérations de contestation de la désignation de Mme Y… en qualité de représentante syndicale au comité central d’entreprise et celui du licenciement, ajouté à la méthode acharnée pour imputer à Mme Y… divers griefs même dérisoires démontre que ce sont effectivement les activités syndicales de Mme Y… qui lui valent la procédure telle qu’elle a été menée ; qu’aussi Mme Y… apporte la preuve suffisante de sa discrimination sans que l’employeur n’établisse l’absence de discrimination de sa part, ses affirmations selon lesquelles Mme Y… aurait tenté de se protéger par un mandat syndical finalement annulé étant sans valeur probante ; que par conséquent, l’allocation d’une somme de 10.000 euros réparera intégralement le dommage moral que Mme Y… a nécessairement subi ; que le jugement qui l’a déboutée sur ce point sera infirmé ;
1°) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; que pour condamner la société Keria à verser à la salariée la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la discrimination, la cour d’appel a retenu que le résultat retranscrit dans la lettre de licenciement démontre « une recherche tatillonne des moindres petits défauts dans la tenue du magasin, défauts qui habituellement doivent se régler amiablement, pour en faire des griefs de nature à évincer Mme Y… sans indemnités » et que le calendrier des opérations de contestation de la désignation de Mme Y… en qualité de représentante syndicale au comité central d’entreprise et celui du licenciement, « ajouté à la méthode acharnée pour imputer à Mme Y… divers griefs même dérisoires » démontre que ce sont effectivement les activités syndicales de Mme Y… qui lui valent la procédure telle qu’elle a été menée ; qu’en statuant ainsi, en des termes incompatibles avec l’exigence d’impartialité, la cour d’appel a violé l’article 6 paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.