Avocat en Propriété intellectuelle : nouvelle intervention remarquable de Maître Mojica

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Avocat en Propriété intellectuelle : nouvelle intervention remarquable de Maître Mojica

République française

Au nom du peuple français

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PARIS

ARRET DU 06 AVRIL 2018

(n°61, 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 17/01312

Décision déférée à la Cour : jugement du 18 novembre 2016 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n°14/03917

APPELANTES AU PRINCIPAL et INTIMEES INCIDENTES

S. A.S. STOREVER FRANCE, exerçant sous le nom commercial storever, anciennement MUSICMATIC FRANCE – représentée par sa présidente, la S. A. STOREVER, société de droit belge, agissant elle même en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé boulevard International 55. Bâtiment K 1070 Bruxelles Belgique – ayant son siège social situé

1070 ANDERLECHT

76, avenue de la Liberté

Société POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE)

Société civile, prise en la personne de ses co gérants domiciliés en cette qualité au siège social situé

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro D 334 784 865

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS, avocat au barreau de PARIS, toque B 1055

Assistée de Me MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque B 524

Société DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE (SACEM)

92200 NEUILLY SUR SEINE

Assistée de Me plaidant pour le Cabinet , avocat au barreau de PARIS, toque E 457

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l’affaire a été débattue le 8 février 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Colette PERRIN, Présidente

Mme Véronique RENARD, Conseillère

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

FAITS ET PROCEDURE

La société Tapis Saint Maclou exploite une chaîne de magasins qui proposent à la vente des produits de revêtement de sols et de décoration d’intérieur.

La société de droit luxembourgeois Jamendo, dont l’actionnaire majoritaire est la société belge Musicmatic SA, se présente comme une plate forme de distribution en ligne d’oeuvres musicales, fournissant divers services aux artistes, utlisateurs et entreprises qui interagissent entre eux via ses sites web..

La société Musicmatic France, filiale de la société belge Musicmatic SAS, devenue la société Storever France (ci après la société Musimatic France) propose des solutions digitales audios, vidéos et mobiles pour les réseaux de points de ventes et notamment de diffuser de la musique « libre de redevances » provenant du catalogue de la société Jamendo.

La Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (ci après la SACEM), est une société de gestion collective dont l’objet social est notamment de percevoir les redevances de droits d’auteur en raison de l’exploitation des ‘uvres relevant de son répertoire.

La Société pour la Perception de la Rémunération Équitable de la Communication au Public des Phonogrammes du Commerce (ci après la SPRE) est une société civile de gestion collective chargée de percevoir, sous le contrôle du Ministère de la Culture, la rémunération due aux artistes interprètes et aux producteurs de phonogrammes au titre de l’article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle. Elle redistribue les sommes collectées entre les sociétés de gestion collective représentant les artistes interprètes (ADAMI et SPEDIDAM) et celles représentant les producteurs (SCPP et SPPF).

La SPRE a confié mandat à la SACEM de procéder à la facturation de cette rémunération pour les lieux sonorisés, catégorie dont relèvent les magasins de la société Tapis Saint Maclou.

Les sociétés de gestion collective ADEMI et SPEDIDAM sont chargées du reversement de ces rémunérations à leurs bénéficiaires.

Par contrat du 5 février 2009, la société Musicmatic France s’est engagée à mettre à la disposition de

la société Tapis Saint Maclou des « players MM B. », pour une période de vingt quatre mois à compter du 1er mars 2009, renouvelable automatiquement à chaque échéance pour une période d’un an; il était stipulé que les titres ou musiques mis à disposition étaient libres de tous droits de diffusion.

Le 22 mars 2013, la SACEM, pour le compte de la SPRE, a demandé paiement à la société Tapis Saint Maclou de la somme de 117 826,82 euros au titre de la rémunération équitable instituée par l’article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle.

Par courrier du 10 avril 2013, la société Tapis Saint Maclou a mis en demeure la société Musicmatic France de justifier du règlement de la rémunération équitable depuis 2009 ou, à défaut, de lui payer la somme de 117 826,82 euros.

Par lettre du 21 novembre 2013, la société Tapis Saint Maclou a notifié à la société Musicmatic France la résiliation du contrat du 5 février 2009 à la date d’échéance prévue en respectant un préavis de trois mois, le contrat devant prendre fin le 28 février 2014.

Ayant reçu le 5 décembre 2013 un courrier recommandé de la SPRE, intitulé «Dernier avis avant contentieux », lui demandant de régler la somme de 117 826,82 euros concernant la période courant du 15 avril 2009 au 31 décembre 2013, la société Tapis Saint Maclou a, par acte du 25 février 2014, assigné la société Musicmatic France afin de faire constater la résiliation du contrat pour faute et mettre en jeu la garantie due au titre du contrat, ainsi que la SPRE et la SACEM en déclaration de jugement commun.

Les sociétés Musicmatic SA et Jamendo sont intervenues volontairement à la présente procédure.

Par mémoire du 4 septembre 2014, les sociétés Musicmatic France, Musicmatic SA et Jamendo ont soulevé une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l’article L214-1 du Code de la propriété intellectuelle, question qui, par jugement du 6 mars 2015, a été écartée comme étant dépourvue de caractère sérieux.

Par jugement contradictoire en date du 18 novembre 2016, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris a :

– déclaré recevables les interventions volontaires de la société Musicmatic SA et de la société Jamendo SA ;

– dit n’y avoir lieu à renvoi des questions préjudicielles devant la Cour de justice de l’Union européenne ;

– condamné la société Tapis Saint Maclou à payer à la SPRE la somme de 117 826,82 euros avec intérêts au taux légal sur la somme de 93 464,29 euros à compter du 16 mai 2013, date de la mise en demeure, puis pour le surplus à compter du 5 décembre 2013 ;

– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 5 décembre 2013 conformément aux dispositions de l’article 1154 du Code civil ;

– prononcé la résolution du contrat conclu le 5 février 2009 entre la société Tapis Saint Maclou et la société Musicmatic France aux torts de cette dernière ;

– condamné in solidum la société Tapis Saint Maclou, la société Musicmatic France, la société Musicmatic SA et la société Jamendo SA à payer à la SPRE la somme globale de 4 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné la société Tapis Saint Maclou à payer à la SACEM, la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné la société Musicmatic France à garantir la société Tapis Saint Maclou pour le paiement de l’intégralité des condamnations prononcées par le présent jugement contre cette dernière ;

– condamné la société Musicmatic France, la société Musicmatic SA et la société Jamendo SA à payer à la société Tapis Saint Maclou la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné in solidum la société Tapis Saint Maclou, la société Musicmatic France, la société Musicmatic SA et la société Jamendo SA aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Les sociétés SAS Musicmatic France, Musicmatic SA, Jamendo SA ont interjeté appel de cette décision le 16 janvier 2017.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 janvier 2018, les sociétés SAS Musicmatic France, Musicmatic et SA, Jamendo SA demandent à la cour d’appel de Paris, au visa des articles 214-1 et 214-5 du Code de la propriété intellectuelle, 1103 et 1104 du Code civil, de :

– les recevoir en leur appel et les y déclarer bien fondées,

– déclarer les sociétés Tapis Saint Maclou et SPRE mal fondées en leurs appels incidents, les en débouter ;

en conséquence

– infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 18 novembre 2016 en toutes ses dispositions ;

et statuant à nouveau :

– dire et juger qu’un renvoi préjudiciel devant la CJUE doit être opéré concernant les deux questions préjudicielles soulevées, à savoir :

– question 1 : « les articles 8§2 et/ou 10§2 et 3 de la Directive 2006/115 s’opposent ils à une disposition nationale d’un État membre tel que l’article L 214-5 CPI en ce qu’il prévoit le principe d’une collecte obligatoire et systématique par une société de gestion collective de la rémunération équitable même pour les artistes interprètes et/ou producteurs qui ne sont pas membres de cette société de gestion collective ‘ ».

– question 2 : « les articles 8§2 et/ou 10§3 de la Directive 2005/115 s’opposent ils à une disposition nationale telle que l’article L 214-5 CPI ayant comme conséquences que les artistes interprètes et les producteurs concernés qui ne sont pas membres des sociétés de gestion collective visées, mais dont le phonogramme, publié à des fins commerciales, ou une reproduction de ce phonogramme, est utilisé pour une radiodiffusion par le moyen des ondes radioélectriques ou pour une communication quelconque au public, ne reçoivent pas de rémunération équitable car ne se voient pas redistribuer la rémunération pourtant prélevée de manière systématique et obligatoire aux utilisateurs ‘ » ;

en conséquence :

– transmettre à la CJUE les deux questions préjudicielles telles qu’elles sont libellées dans les présentes conclusions ;

subsidiairement au fond :

– dire et juger qu’il n’y a pas lieu à résiliation du contrat du 5 février 2009 pour faute du chef de Musicmatic SAS ;

en conséquence :

– dire et juger qu’en l’absence de faute de Musicmatic SAS, il n’y a pas lieu de déclencher la garantie à laquelle s’était engagée Musicmatic SAS envers Tapis Saint Maclou ;

en tout état de cause :

– débouter la SPRE, la SACEM et Tapis Saint Maclou de l’ensemble de leurs demandes à l’encontre de Musicmatic SAS, Musicmatic SA et Jamendo SA;

– condamner la SPRE, la SACEM et Tapis Saint Maclou à leur payer à chacune la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par maître Laurence Taze Bernard conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 juin 2017, la société Saint Maclou, au visa des articles 1134 et 1137 du code civil, L 214-4 du code de la propriété intellectuelle, demande à la cour d’appel de Paris de:

– donner acte à Tapis Saint Maclou qu’elle s’en rapporte quant au renvoi préjudiciel ;

à titre principal, infirmer le jugement et :

– débouter la SPRE et la SACEM de l’ensemble de leurs demandes ;

à titre subsidiaire, confirmer le jugement et :

– constater la résiliation pour faute du contrat en date du 5 février 2009;

– condamner Musicmatic France, Musicmatic SA à garantir Tapis Saint Maclou de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre suite à une réclamation présentée par la SPRE ou la Sacem ;

– les condamner solidairement à lui payer la somme de 15 000€ pour trouble de jouissance ;

– les condamner solidairement, et subsidiairement la Sacem et la SPRE, d’avoir à lui payer une somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP Grapotte Benetreau dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

 

 

1070 ANDERLECHT


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