Marque descriptive : l’affaire Sapitech
Marque descriptive : l’affaire Sapitech
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La marque verbale française SAPITEC n°3980640 n’encourt pas la nullité pour absence de caractère distinctif.

Celle-ci est distinctive et non descriptive des produits pour lesquels elle se trouve enregistrée.

Le nom SAPITEC ne constitue pas nécessairement la contraction directe du terme « sapiteur » qui désigne un sachant, un technicien ou encore un expert judiciaire et du terme « technicien » défini comme une personne qui connaît et pratique une technique ou encore comme un professionnel qualifié d’une technique.

A supposer que le signe SAPITEC corresponde à la contraction de SAPITEUR et de TECHNICIEN, ce qui n’est pas évident, puisqu’il peut tout aussi bien être la contraction de SAPIENS ou SAPIN et TECHNIQUE, cela n’en fait pas pour autant un signe qui désigne l’activité de construction. Le signe SAPITEC est tout au plus évocateur de ce que l’on va recevoir l’avis éclairé de personnes payées pour avoir cet avis.

Aux termes de l’article L. 711-1 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au moment du dépôt, la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Conformément à l’article L. 711-2 du même code applicable à la même époque, le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie au regard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif : a) les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ; b) les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ; c) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage.

En application de l’article L. 714-3 du même code, est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux prescriptions des articles L. 711-1 à L. 711-4.

Résumé de l’affaire

L’affaire oppose la société SAPITEC, spécialisée dans la maintenance du clos couvert des bâtiments et titulaire de la marque verbale “sapitec”, à la société SAPITECH, une entreprise familiale spécialisée dans la recherche de fuites et d’infiltrations. SAPITECH a enregistré le nom de domaine “sapitech.fr” et la société SAPITEC l’accuse de contrefaire sa marque et de concurrence déloyale. Malgré des tentatives de résolution à l’amiable, les deux parties n’ont pas trouvé d’accord. SAPITEC a donc assigné SAPITECH en justice pour contrefaçon de marque et concurrence déloyale. Les deux sociétés ont des demandes et des conclusions opposées, et la clôture de la procédure a été prononcée le 9 octobre 2023.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

16 juillet 2024
Tribunal judiciaire de Lyon
RG n°
21/02357
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 3 cab 03 C

N° RG 21/02357 – N° Portalis DB2H-W-B7F-VYUI

Jugement du 16 Juillet 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :
Maître Laurène DELSART de la SELARL DELSART AVOCATS – 1476
Me Marie MARCOTTE – 471

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 16 Juillet 2024 devant la Chambre 3 cab 03 C le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 09 Octobre 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 07 Novembre 2023 devant :

Marc-Emmanuel GOUNOT, Vice-Président,

Ce magistrat siégeant en qualité de juge rapporteur, en application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile,

Assisté de Patricia BRUNON, Greffier,

Et après qu’il en eut été délibéré par :

Marc-Emmanuel GOUNOT, Vice-Président,
Cécile WOESSNER, Vice-Présidente,
Delphine SAILLOFEST, Vice-Président,

Dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

S.A.S.U. SAPITEC,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Marie MARCOTTE, avocat postulant du barreau de LYON et par Me Jérémie VERNIAU, avocat plaidant du barreau de LYON

DEFENDERESSE

S.A.R.L. SAPITECH,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Laurène DELSART de la SELARL DELSART AVOCATS, avocat postulant du barreau de LYON et par Maître Charlotte BALDASSARI, avocat plaidant du barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE

La société SAPITEC est spécialisée depuis 1998 dans les travaux de maintenance du clos couvert des bâtiments et notamment dans la recherche et la réparation de fuites d’eau.

Elle se prévaut de deux noms de domaine « sapitec.fr » et « sapitec.eu ».

La société SAPITEC est titulaire de la marque verbale française « sapitec » n°3980640 déposée le 6 février 2013 pour différents services appartenant aux classes 36, 37 et 42.

La société SAPITECH est une petite entreprise familiale créée en 2015 et ayant pour activité exclusive la recherche de fuites et d’infiltrations en dehors de tous travaux de réparation.

Afin de promouvoir son activité, elle a enregistré le nom de domaine « sapitech.fr » le 13 mai 2015.

Considérant que la société SAPITECH contrefaisait sa marque « sapitec » et se livrait à des actes de concurrence déloyale, la société SAPITEC a fait établir un procès-verbal de constat d’huissier de justice le 29 avril 2020.

A la suite d’échanges téléphoniques entre les deux sociétés, le conseil de la société SAPITEC a adressé le 5 juin 2020 à la société SAPITECH un courrier lui demandant son accord pour renoncer à la poursuite de l’usage du signe « Sapitech » et lui proposant la signature d’un protocole transactionnel.

En l’absence de réponse à ce courrier, le conseil de la société SAPITEC a, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 10 novembre 2020, mis en demeure la société SAPITECH d’avoir à cesser d’ici le 30 novembre 2020, tout emploi du signe «sapitech » et également, entre autres, de faire procéder à la modification de la dénomination sociale de la société SAPITECH. Aux termes de ce courrier, elle lui proposait toutefois le recours à une mesure de médiation sous l’égide du CIMA.

Par courrier officiel du 24 novembre 2020, le conseil de la société SAPITECH a fait connaître qu’elle n’entendait pas faire droit aux demandes de la société SAPITEC aux motifs que le fait d’utiliser le signe « sapitech » pour désigner une activité de recherche de fuites et infiltrations n’opèrerait aucune confusion avec l’activité de maintenance du clos couvert de la société SAPITEC sous le signe non distinctif « sapitec », laquelle se réalise dans des lieux géographiques différents et n’engendrerait ainsi aucun préjudice pour cette dernière.

Le conseil de la société SAPITEC a mis en demeure une ultime fois la société SAPITECH d’avoir à se conformer, avant le 31 décembre 2020, aux exigences énoncées dans son courrier du 10 novembre 2020, en vain.

Telles sont les circonstances dans lesquelles par assignation du 2 mars 2021, la sasu SAPITEC a fait citer devant le tribunal judiciaire de LYON la sarl SAPITECH en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.

Dans le dernier état de ses écritures notifiées le 9 février 2023 la société SAPITEC sollicite qu’il plaise :
Vu les articles L. 713-2 et L. 713-3-1 alinéa 5 nouveaux du Code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles L.711-2, L. 713-3 et L. 716-1 anciens du Code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article 716-4-10 du Code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 1240 et 1241 du Code Civil,
Vu les articles 46 et 700 du Code de Procédure Civile,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu les moyens qui précèdent,
Vu la jurisprudence citée,
A TITRE PRINCIPAL
DEBOUTER la société SAPITECH de sa demande d’annulation de la marque « SAPITEC » n°3980640 ;
A TITRE SUBSIDIAIRE
Dans le cas où le tribunal jugerait que la marque « SAPITEC » n°3980640 encourrait la nullité pour défaut de caractère distinctif, mais que ladite marque a cependant acquis un tel caractère distinctif par l’usage intensif que la société SAPITEC en a fait a compter de son enregistrement,
DEBOUTER la société SAPITECH de sa demande d’annulation de la marque « SAPITEC » n°3980640 ;
EN TOUTE HYPOTHESE
CONDAMNER la société SAPITECH, au titre de la contrefaçon de marque et de la concurrence déloyale, sous astreinte de 500€ par jour de retard, passé le délai d’un mois de la signification du jugement à intervenir, à cesser toute utilisation de la dénomination sociale « SAPITECH » et à procéder aux formalités nécessaires afin de modifier celle-ci et de ne plus porter atteinte de quelque manière que ce soit à la marque et à la dénomination sociale « SAPITEC » ;

CONDAMNER la société SAPITECH, au titre de la contrefaçon de marque et de la concurrence déloyale, sous astreinte de 500€ par jour de retard, passé le délai d’un mois de la signification du jugement à intervenir :
À cesser toute utilisation du nom de domaine sapitech.fr et en particulier toute redirection dudit nom de domaine vers tout site internet en rapport direct ou indirect avec le domaine de la construction et de la recherche de fuites d’eau,
À ne pas renouveler celui-ci à compter de son expiration et à le laisser tomber dans le domaine public ;

CONDAMNER la société SAPITECH, au titre de la contrefaçon de marque et de la concurrence déloyale, sous astreinte de 500€ par infraction constatée, passé le délai d’un mois de la signification du jugement à intervenir, à cesser toute reproduction du signe « SAPITECH » sur son site internet et sur tout autre support ;

SE RESERVER de liquider les astreintes ;

CONDAMNER la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme globale et forfaitaire, à parfaire, de 102.167€, au titre du préjudice subi par la société SAPITEC du fait des actes de contrefaçon de la Marque « SAPITEC » ;

CONDAMNER la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme globale et forfaitaire de 50.000€, au titre du préjudice subi par la société SAPITEC du fait des actes de concurrence déloyale ;

CONDAMNER la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme globale et forfaitaire, a parfaire, de 102.167€, au titre du préjudice subi par la société SAPITEC du fait d’une part de l’atteinte portée au caractère distinctif de la marque « SAPITEC », et d’autre part du fait du manque a gagner résultant de l’absence de paiement par la société SAPITECH de redevances de droit d’usage de la marque « SAPITEC » ;

CONDAMNER la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme globale et forfaitaire de 50.000€, au titre du préjudice subi par la société SAPITEC du fait du risque de confusion créé par la société SAPITECH entre les dénominations sociales et noms de domaine « SAPITEC » et « SAPITECH », et des investissements qui devront être consacrés à la dissolution de ce risque de confusion ;

DEBOUTER la société SAPITECH de sa demande reconventionnelle de condamnation de la société SAPITEC pour procédure abusive ;

CONDAMNER la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme globale de 10.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER la société SAPITECH aux entiers dépens de l’instance ;

ORDONNER l’exécution provisoire du jugement a intervenir nonobstant appel et sans constitution de garantie.

Dans le dernier état de ses écritures notifiées le 9 mai 2023 la société SAPITECH sollicite qu’il plaise :
Vu les articles 1 et 2 du Code civil ;
Vu l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services et son décret d’application ;
Vu les articles L. 716-2 ; L. 716-5 II 2° ; L.713-2 et L.716-4-10 du Code de la propriété intellectuelle ;
Vu les articles L.714-3, L.711-1 et L.711-2 ancien du Code de la propriété intellectuelle ;
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil ;
Vu les articles 32-1, 514-1 et 700 du Code de procédure civile ;
Vu la jurisprudence citée ;
Vu les moyens qui précèdent ;
Vu les pièces versées au débat ;

A TITRE PRINCIPAL :

PRONONCER la nullité de la marque « SAPITEC » n°3980640 pour les services visés dans les classes 37 et 42 pour défaut de caractère distinctif et pour descriptivité ;

DEBOUTER la société SAPITEC de sa demande relative à l’acquisition du caractère distinctif de sa marque par l’usage ;

EN CONSEQUENCE, DIRE ET JUGER que la société SAPITECH n’a commis aucun acte de contrefaçon à l’encontre de la société SAPITEC ;

DIRE ET JUGER que la société SAPITECH n’a commis aucun acte de concurrence déloyale à l’encontre de la société SAPITEC ;

A TITRE SUBSIDIAIRE :

DIRE ET JUGER que la société SAPITECH n’a commis aucun acte de contrefaçon à l’encontre de la société SAPITEC ;

EN TOUTE HYPOTHESE, DIRE ET JUGER que la société SAPITECH n’a commis aucun acte de concurrence déloyale à titre subsidiaire des actes de contrefaçon ;

A TITRE RECONVENTIONNEL :

CONDAMNER la société SAPITEC à payer à la société SAPITECH la somme de 20 000 euros pour procédure abusive ;

ECARTER l’exécution provisoire de droit, celle-ci n’étant pas compatible avec la nature de l’affaire ;

EN TOUTE HYPOTHESE :

DEBOUTER la société SAPITEC de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER la société SAPITEC à payer à la société SAPITECH la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la société SAPITEC aux entiers dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 9 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Dans la mesure où l’existence de droits sur la marque sapitec n°3980640 invoquée par la société SAPITEC est déterminante pour apprécier le bien-fondé de ses demandes, il y a lieu de statuer en premier lieu sur la demande reconventionnelle formée par la société SAPITECH en nullité de la marque sapitec n°3980640.

Sur la demande reconventionnelle en nullité de la marque sapitec n°3980640

La marque sapitec n°3980640 dont la nullité se trouve poursuivie, a été déposée le 6 février 2013 (pièce n°8 demanderesse), soit antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, le 11 décembre 2019. En conséquence, la validité de la marque contestée doit être appréciée au regard de la loi n°92- 597 du 1er juillet 1992 dans sa version en vigueur au jour du dépôt de cette marque.

Aux termes de l’article L. 711-1 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au moment du dépôt, la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Conformément à l’article L. 711-2 du même code applicable à la même époque, le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie au regard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif : a) les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ; b) les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ; c) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage.

En application de l’article L. 714-3 du même code, est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux prescriptions des articles L. 711-1 à L. 711-4.

La société SAPITECH fait valoir que la marque verbale sapitec n°3980640 n’est pas distinctive pour être descriptive des produits pour lesquels elle se trouve enregistrée.

La défenderesse soutient que le nom SAPITEC constituerait la contraction directe du terme « sapiteur » qui désigne un sachant, un technicien ou encore un expert judiciaire et du terme « technicien » défini comme une personne qui connaît et pratique une technique ou encore comme un professionnel qualifié d’une technique.

Elle considère que la combinaison de ces deux termes permet au public pertinent, composé tant de professionnels que de particuliers, d’établir un lien direct et concret entre la marque déposée et les services couverts par cette dernière en classes 37 et 42 ; que le public pertinent ne percevra pas d’emblée le terme SAPITEC comme une indication de l’origine commerciale desdits services, mais comme un mot destiné à désigner lesdits services rendus par des sapiteurs et techniciens du secteur considéré.

Or, à supposer que le signe SAPITEC corresponde à la contraction de SAPITEUR et de TECHNICIEN, ce qui n’est pas évident, puisqu’il peut tout aussi bien être la contraction de SAPIENS ou SAPIN et TECHNIQUE, cela n’en fait pas pour autant un signe qui désigne l’activité de construction. Le signe SAPITEC est tout au plus évocateur de ce que l’on va recevoir l’avis éclairé de personnes payées pour avoir cet avis.

Il s’ensuit que la marque verbale française SAPITEC n°3980640 n’encourt pas la nullité pour absence de caractère distinctif.

La demande de nullité sera donc rejetée.

Sur la demande principale en contrefaçon de la marque verbale française sapitec n°3980640

Sur la matérialité des actes de contrefaçon

La société SAPITEC fait grief à la société SAPITECH de reproduire sans autorisation la marque Sapitec au sein de la dénomination sociale et du nom de domaine Sapitech, ainsi que sur le site internet de la société SAPITECH.

L’article L. 713-3 ancien du code de la propriété intellectuelle dispose que sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public :
a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ;
b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.

Aux termes de l’article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, qui s’applique également au cas d’espèce dès lors qu’il n’est pas discuté que les usages querellés ont perduré postérieurement à l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions :
Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou services :
1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.

La contrefaçon ne peut être retenue qu’à la condition de caractériser un usage du signe litigieux effectué sans le consentement du titulaire de la marque, prenant place dans la vie des affaires et concernant des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque opposée est enregistrée. Enfin, l’usage litigieux doit porter atteinte ou être susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services.

L’appréciation de la contrefaçon commande de rechercher si, au regard des degrés de similitude entre les signes et les produits et/ou services, il existe un risque de confusion, comprenant un simple risque d’association. Le risque de confusion doit être apprécié de manière globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, tels que la notoriété de la marque et l’importance de sa distinctivité. Toutefois, la contrefaçon s’appréciant par référence au titre de propriété, il est exclu de s’attacher aux conditions réelles d’exploitation de la marque par le demandeur.

Le principe de spécialité impliquant que des opérateurs économiques puissent exploiter un signe identique à une marque déposée dès lors que cette utilisation est effectuée pour des produits ou services différents de ceux visés au dépôt, il convient de procéder en premier lieu à la comparaison des produits et services.

S’agissant de la comparaison des produits et services

La marque verbale française SAPITEC n°3980640 a été déposée le 6 février 2013 par la société SAPITEC pour différents produits et services appartenant aux classes 36, 37 et 42 (pièce n°8 demanderesse), à savoir :

Classe 36 « Assurances ; affaires financières ; affaires monétaires ; affaires immobilières ; services de caisses de prévoyance ; banque directe ; émission de chèques de voyage ou de cartes de crédit ; estimations immobilières ; gestion financière ; gérance de biens immobiliers ; services de financement ; analyse financière ; constitution ou investissement de capitaux ; consultation en matière financière ; estimations financières (assurances, banques, immobilier) ; placement de fonds » ;
Classe 37 « Construction ; informations en matière de construction ; conseils en construction ; supervision (direction) de travaux de construction ; maçonnerie ; travaux de plâtrerie ou de plomberie ; travaux de couverture de toits ; services d’isolation (construction) ; démolition de constructions ; location de machines de chantier ; nettoyage de bâtiments (ménage), d’édifices (surfaces extérieures) ou de fenêtres ; nettoyage ou entretien de véhicules ; assistance en cas de pannes de véhicules (réparation) ; désinfection ; dératisation ; nettoyage de vêtements ; rénovation de vêtements ; entretien, nettoyage et réparation du cuir ou des fourrures ; repassage du linge ; travaux de cordonnerie ; rechapage ou vulcanisation (réparation) de pneus ; installation, entretien et réparation d’appareils de bureau ; installation, entretien et réparation de machines ; installation, entretien et réparation d’ordinateurs ; entretien et réparation d’horlogerie ; réparation de serrures ; restauration de mobilier ; construction navale » ;
Classe 42 « Evaluations et estimations dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs ; recherches scientifiques et techniques ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; recherche et développement de nouveaux produits pour des tiers ; étude de projets techniques ; architecture ; décoration intérieure ; élaboration (conception), installation , maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation pour ordinateur ; analyse de systèmes informatiques ; conception de systèmes informatiques ; consultation en matière d’ordinateurs ; numérisation de documents ; logiciel-service (SaaS) ; conseils en technologie de l’information ; hébergement de serveurs ; contrôle technique de véhicules automobiles ; services de conception d’art graphique ; stylisme (esthétique industrielle) ; authentification d’œuvre d’art ; audits en matière d’énergie ».

La société SAPITEC reproche à la société SAPITECH de reproduire son signe tant dans sa dénomination sociale que dans son nom de domaine et au sein de son site internet à des fins de promotion de son activité, les signes en présence étant exploités chacun pour « des services identiques dans le domaine de la construction, à savoir celui de la recherche de fuites d’eau. ». Elle se réfère aussi visiblement à « l’imitation de sa marque » et à « la similarité des services concernés » (page 23 de ses conclusions).

Par ailleurs, au dispositif de ses écritures, la société SAPITEC fait référence à la contrefaçon de sa marque, sans viser de services particuliers. Il pourrait donc s’en déduire qu’elle se fonde sur l’intégralité de sa marque. Elle conclut toutefois dans le corps de ses écritures au « caractère identique ou similaire » des services dans le domaine de la construction visés au dépôt avec ceux exploités par la défenderesse en ne renvoyant qu’à la classe 37.

Aucun développement n’étant consacré aux classes 36 et 42, aucune contrefaçon ne peut être retenue à ce titre.

En ce qui concerne les services visés au dépôt en classe 37, si la société SAPITEC conclut à la contrefaçon du fait de leur caractère identique ou similaire avec ceux exploités par la société SAPITECH, elle ne consacre aucun développement précis sur ce point. Il convient donc de ne s’attacher qu’à la comparaison des produits et services pour lesquels le caractère identique ou similaire relève de l’évidence.

Il n’est pas discuté que la défenderesse est spécialisée dans la recherche de fuites d’eau et d’infiltrations. La société SAPITEC apporte la preuve que la société défenderesse s’est fait immatriculer sous la dénomination sociale « SAPITECH » lors de sa création le 13 juillet 2015 et qu’elle l’exploite dans le cadre de ses activités de recherches de fuites d’eau et d’infiltrations (pièce n°9 et procès-verbal de constat d’huissier du 29 avril 2020 pièce n°1 demanderesse). Il en va de même du nom de domaine sapitech.fr qu’elle a enregistré le 13 mai 2015 et qui renvoie vers le site web de présentation de la société SAPITECH et de ses activités de recherches de fuites d’eau et d’infiltrations.

Aucun des services visés au dépôt en classe 37 n’est identique à l’activité de recherche de fuites d’eau exercée par la société SAPITECH. Seuls les services suivants peuvent être considérés comme similaires à l’activité de recherche de fuites d’eau : « Construction ; informations en matière de construction ; conseils en construction ; supervision (direction) de travaux de construction ; maçonnerie ; travaux de plâtrerie ou de plomberie ; travaux de couverture de toits ; services d’isolation (construction) ; démolition de constructions ».

Il n’y aura cependant contrefaçon sur le fondement de l’article L. 713-3 ancien et L. 713-2 2° qu’à la condition que les signes soient considérés comme similaires et qu’il existe un risque de confusion.

S’agissant de la comparaison des signes

L’appréciation de la similitude visuelle, auditive et conceptuelle des signes doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants.

La défenderesse exploite le signe SAPITECH. La demanderesse considère que sa marque SAPITEC et le signe utilisé par la société SAPITECH sont similaires sur le plan visuel et identiques sur le plan phonétique et auditif.

La seule différence entre les signes en présence est l’ajout de la lettre H en suite de la désinence commune avec la marque SAPITEC. Les signes présentent cependant la même structure et la même composition, chacun d’entre eux présentant le même préfixe « SAPI » et la même désinence « TEC ».

La marque dont se prévaut la demanderesse étant de nature verbale, il est exclu de considérer, comme la société défenderesse l’y invite, que les différences graphiques respectives des signes SAPITEC et SAPITECH excluent tout risque de confusion. Il convient, au contraire, de considérer le signe SAPITEC dans sa forme purement verbale et de le comparer au signe SAPITECH, dont le graphisme n’est pas à ce point particulier et dominant qu’il prendrait le pas sur l’élément verbal et conduirait à conclure que les signes sont peu similaires ou même différents au plan visuel.

La présence de la lettre H au sein du signe SAPITECH n’enlève rien à l’impression visuelle d’ensemble très similaire.

En outre, l’identité phonétique entre les signes en présence est évidente puisque les deux signes ont la même prononciation. Chacun des signes présente la même syllabe d’attaque « SAPI » et la même syllabe finale « TEC », sans que l’ajout de la lettre H dans le signe de la défenderesse ne modifie cette similitude puisque cette lettre finale ne se prononce pas en référence à l’abréviation couramment usitée « tech » du mot « technique ».

Enfin, au plan conceptuel, les deux termes, par leur terminaison, renvoient spontanément à l’univers de la technique ou de la technologie en ce qu’elle porte sur un domaine spécifique – SAPI – qui n’est pas nécessairement identifiable. Il existe donc une forte proximité entre les signes au plan conceptuel.

La forte similarité entre les signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel est ainsi établie.

S’agissant du risque de confusion

Conformément aux motifs rappelés ci-dessus, la contrefaçon s’appréciant par référence au titre de propriété, il est exclu de s’attacher aux conditions réelles d’exploitation de la marque par la société SAPITEC. Ainsi, le fait que la société SAPITEC soit spécialisée dans la recherche de fuites d’eau tout comme la société SAPITECH est inopérant pour caractériser le risque de confusion.

Du fait de la similarité des signes et des services en présence une confusion s’opérera nécessairement dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, qui pensera que ces services proviennent d’entreprises économiquement liées ou ayant conclu un partenariat avéré.

La société défenderesse tire argument de ce que les deux sociétés en cause ont affaire essentiellement à une clientèle de professionnels et d’institutionnels, davantage qualifiés que des particuliers dans le domaine de la construction, de sorte qu’ils ne percevraient pas d’emblée le terme « SAPITEC » comme une indication de l’origine commerciale desdits services mais au contraire comme un mot destiné à désigner lesdits services rendus par des sapiteurs et techniciens du secteur considéré. Ce moyen est toutefois inopérant dès lors que le caractère distinctif de la marque « sapitec » est établi.

Du reste, le courriel adressé à la société SAPITEC le 9 septembre 2021 par une gestionnaire de copropriété, qui venait de faire appel aux services de la société SAPITECH pour recherche de fuites dans une copropriété confirme cet élément. Cette gestionnaire sollicite en effet de la société SAPITEC son rapport d’intervention croyant s’adresser à la société SAPITECH.

Le critère géographique, à savoir que la société SAPITEC exerce en région lyonnaise, tandis que la société SAPITECH exerce en région sud n’est pas davantage opérant pour écarter l’existence d’un risque de confusion. Une marque est déposée pour toute la France et jouit donc nécessairement d’un rayonnement national.

Partant, l’utilisation du signe « SAPITECH » comme dénomination sociale et dans un nom de domaine pour promouvoir sur internet les activités de recherches de fuites d’eau constitue une imitation de la marque SAPITEC n°3980640 susceptible, eu égard à la similitude des services concernés, de générer un risque de confusion.

La contrefaçon est donc établie.

Sur la réparation des préjudices résultant des atteintes à la marque

Sur les demandes d’interdiction

Les mesures d’interdiction sollicitées apparaissent justifiées, dans la limite toutefois de ce qui a été retenu au titre de la contrefaçon.

Il convient en conséquence de condamner la société SAPITECH :
-à cesser toute utilisation de la dénomination sociale « SAPITECH » pour promouvoir et proposer des services de recherche de fuites d’eau et à procéder aux formalités nécessaires afin de modifier celle-ci, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement,

– à cesser toute utilisation du nom de domaine sapitech.fr et en particulier toute redirection dudit nom de domaine vers tout site internet en rapport avec l’activité de recherche de fuites d’eau et à ne pas renouveler celui-ci à compter de son expiration et à le laisser tomber dans le domaine public, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement,

-à cesser toute reproduction du signe « SAPITECH » sur son site internet et sur tout autre support en lien avec son activité de recherche de fuites d’eau, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement.

Il n’y a pas lieu de se réserver la liquidation des astreintes ainsi prononcées. La demande de ce chef sera rejetée.

Sur l’indemnisation du préjudice

L’article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle dispose que pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.
A l’appui de la demande d’indemnisation forfaitaire de son préjudice, la demanderesse fait valoir que les actes de contrefaçon commis par la société SAPITECH ont porté atteinte à la distinctivité de sa marque et par conséquent à sa valeur. Elle indique ne pas disposer d’éléments de preuve suffisants pour apprécier avec précision son préjudice et considère de ce fait qu’il doit être évalué à la redevance qui aurait été appliquée chaque année si elle avait concédé une licence d’exploitation de la marque « SAPITEC ». Elle sollicite donc, sur la base des bilans communiqués au titre des exercices 2016, 2018 et 2019, 5% HT du chiffre d’affaires réalisé par la société SAPITECH sur ces trois années, soit la somme de 52 167€ HT, à parfaire si la défenderesse produit l’intégralité de ses bilans.

L’existence du préjudice subi par la société SAPITEC du fait de la contrefaçon ne saurait être mis en cause au motif qu’elle n’intervient pas dans la région sud. Une marque est en effet déposée pour toute la France, de sorte que le critère géographique pour écarter le préjudice n’est pas topique.

En tout état de cause, la contrefaçon aboutit toujours à une violation de l’exclusivité conférée au titulaire de la marque, qu’il convient d’indemniser.

La société SAPITEC ne produit cependant aucun élément permettant de retenir que les redevances annuelles auraient pu être de 5% du chiffre d’affaires hors taxes.

Compte de la durée de la contrefaçon, qui perdure depuis 2015 mais également du caractère limité du préjudice économique, puisque les deux entreprises se sont développées dans des zones géographiques distinctes, aucun élément n’établissant que la société SAPITECH développe son activité ailleurs que dans la région sud, il convient d’allouer à la société SAPITEC la somme de 10 000€ à titre de dommages-intérêts en indemnisation du préjudice matériel causé par la contrefaçon.

La société SAPITEC réclame également une somme de 50 000€ en indemnisation de son préjudice moral en expliquant qu’elle « a pour projet de déployer son activité sur la région sud » et qu’elle « rencontrera pendant une durée qui peut difficilement être évaluée, des difficultés à se distinguer des services proposés par la défenderesse sur ladite région, sous le signe « SAPITECH ». Elle précise que cette somme « couvrira les dépenses et les ressources qui devront être allouées à la reconstruction du caractère distinctif de la marque auprès du public sur la région Sud. ».

Ces éléments caractérisent un préjudice économique non encore certain et non pas l’existence d’un préjudice moral.

Toutefois le préjudice moral de la société SAPITEC, qui résulte nécessairement de la contrefaçon du fait de la banalisation de la marque dans un temps proche de son dépôt, est indéniable et nécessite une indemnisation à hauteur de 3 000€.

La société SAPITECH sera en conséquence condamnée à lui payer la somme totale de 13 000€ en indemnisation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon.

Sur les actes de concurrence déloyale

Le droit de la concurrence déloyale et le parasitisme étant fondés sur les dispositions des articles 1240 et 1241 du Code civil, il appartient à la demanderesse de caractériser la ou les fautes qui auraient été commises par la défenderesse, étant précisé que toute faute de concurrence déloyale induit nécessairement un préjudice.

Constitue notamment une faute de concurrence déloyale le fait de susciter un risque de confusion avec les produits ou l’activité d’un autre opérateur économique.

Ainsi la reprise d’un signe identifiant une activité commerciale identique ou similaire susceptible de créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle constitue un acte de concurrence déloyale, sanctionné sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.

Il appartient à la société SAPITEC qui recherche à l’encontre de la société défenderesse, une condamnation complémentaire au titre de la concurrence déloyale, d’établir l’existence de faits distincts de ceux avancés à l’appui de sa demande en contrefaçon de marque.

Contrairement à ce qui se trouve soutenu par la défenderesse, la société SAPITEC fait état de faits distincts de ceux utilisés pour établir la contrefaçon de marque. Elle soutient en effet qu’en utilisant la dénomination sociale SAPITECH et le terme SAPITECH dans son nom de domaine, la défenderesse génère un risque de confusion avec sa dénomination sociale SAPITEC, acquise en 1998 et ses noms de domaine : sapitec.fr réservé le 17 octobre 2001 et sapitec.eu réservé le 22 février 2019 et qu’elle utilise sans discontinuer depuis la date de leur enregistrement pour renvoyer vers le site internet de présentation de son activité et de ses offres de services.

En l’espèce, l’immatriculation de la sas SAPITEC sous la dénomination « SAPITEC » intervenue le 17 juin 1998 est antérieure à celle effectuée le 13 juillet 2015 par la société SAPITECH.

Au terme de l’extrait d’immatriculation au registre national du commerce et des sociétés produit au débat, parmi les activités principales déclarées par la société SAPITEC figure en effet la recherche de fuites (pièce n°7 demanderesse). Au vu du procès-verbal de constat d’huissier de justice du 29 avril 2020 que la demanderesse a fait établir, cette activité correspond bien à son activité réelle puisqu’il résulte des captures d’écran de son site internet qu’elle est « spécialiste dans la maintenance du clos couvert » et qu’à ce titre elle est spécialisée dans la « recherche de fuites et fissure » (pièce n°1 demanderesse).

La société SAPITEC ne verse en revanche aucune pièce attestant de ce qu’elle est propriétaire du nom de domaine sapitec.fr, comme un certificat d’enregistrement et qu’elle exploite effectivement ce nom de domaine. La concurrence déloyale reprochée à la société SAPITECH à ce titre ne peut donc pas prospérer.

Les captures d’écran auxquelles l’huissier instrumentaire a procédé dans son procès-verbal de constat du 29 avril 2020 ne laissent en effet apparaître que le nom de domaine « sapitec .eu ». La propriété de ce nom de domaine par la société SAPITEC n’est pas discutée, de même que son exploitation, laquelle est d’ailleurs établie par les captures d’écran prises par l’huissier de justice. La société SAPITEC exploite en effet son site internet en tant que spécialiste du clos couvert et en particulier dans « la recherche de fuites et fissure ». Il est également établi que la société SAPITECH exploite son nom de domaine sapitech.fr pour l’activité de « recherche de fuite d’eau, recherche d’infiltrations d’eaux pluviales et recherche de fuite sur piscine ».

Pour autant, il est établi et non contesté que la société SAPITEC exerce en région lyonnaise et la société SAPITECH en région sud. S’agissant de prestations de services et ce, contrairement à des produits, il est indéniable que le critère géographique est déterminant. Le public souhaitant recourir à un service de recherche de fuites s’adressera en effet au premier chef à une entreprise exerçant dans le secteur géographique du lieu où la prestation de service a été commandée. Or, il résulte tant du procès-verbal de constat d’huissier versé par la demanderesse que de celui du 10 décembre 2020 produit par la défenderesse» (pièce n°2) que la localisation géographique de la société SAPITEC est [Localité 4] dans le Rhône (69) avec une zone d’action à [Localité 6], [Localité 9], [Localité 3], [Localité 5], [Localité 10], [Localité 7], tandis que la localisation géographique de la société SAPITECH est [Localité 8] dans le Var (83) avec une zone d’action dans les Bouches-du-Rhône, les Alpes-Maritimes et le Var.

Le fait que la société SAPITEC ait pour projet de développer son activité en région sud, ce qui du reste n’est démontré par aucune pièce, n’est pas de nature à établir un quelconque risque de confusion né et actuel propre à caractériser des actes de concurrence déloyale.

Partant, faute de risque de confusion suffisamment avéré, aucune faute de concurrence déloyale n’est établie à l’encontre de la société SAPITECH.

Les demandes présentées par la société SAPITEC au titre de la concurrence déloyale seront donc rejetées.

Sur la demande reconventionnelle de la société SAPITECH en paiement d’une amende civile et de dommages et intérêts pour procédure abusive

Vu l’article 32-1 du code de procédure civile ;

Vu l’article 1240 du code de procédure civile ;

La société SAPITECH sollicite l’allocation d’une somme de 10 000€ à titre d’amende civile et également la même somme pour procédure abusive.

Il n’appartient cependant pas à une partie de conclure à la condamnation de son adversaire au paiement d’une amende civile en application de l’article 32-1 du code de procédure civile, étant au surplus observé que lorsqu’elle est prononcée, une telle condamnation n’intervient pas au profit d’une partie contrairement à ce que demande la société SAPITECH.

Par ailleurs pour être accueillie dans sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, la défenderesse doit démontrer un abus de procédure, un préjudice dans son existence et son montant, autre que le montant des frais irrépétibles, et un lien de causalité.

Dans les conclusions de la société SAPITECH, il n’existe pas de démonstration de ces trois éléments permettant d’entrer en voie de condamnation. Le recours de la demanderesse n’a de toute façon pas été complètement vain puisqu’elle obtient partiellement gain de cause, de sorte que l’abus de procédure n’est pas établi.

Les demandes en paiement formées par la société SAPITECH au titre de la procédure abusive seront rejetées.

Sur les demandes accessoires

La société SAPITECH, qui succombe au principal, sera condamnée aux dépens et à payer à la société SAPITEC la somme de 5 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 514-1 du code de procédure civile la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire. Il y a cependant lieu à l’écarter s’agissant des mesures d’interdiction.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition de la présente décision au greffe du tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

REJETTE la demande de nullité de la marque verbale française SAPITEC n°3980640 ;

REJETTE l’action en contrefaçon de marque de la société SAPITEC pour les services visés à l’enregistrement en classe 36 et 42 et pour les services de « location de machines de chantier ; nettoyage de bâtiments (ménage), d’édifices (surfaces extérieures) ou de fenêtres ; nettoyage ou entretien de véhicules ; assistance en cas de pannes de véhicules (réparation) ; désinfection ; dératisation ; nettoyage de vêtements ; rénovation de vêtements ; entretien, nettoyage et réparation du cuir ou des fourrures ; repassage du linge ; travaux de cordonnerie ; rechapage ou vulcanisation (réparation) de pneus ; installation, entretien et réparation d’appareils de bureau ; installation, entretien et réparation de machines ; installation, entretien et réparation d’ordinateurs ; entretien et réparation d’horlogerie ; réparation de serrures ; restauration de mobilier ; construction navale » visés en classe 37 ;

DIT qu’en utilisant le signe « SAPITECH » afin de promouvoir son activité de recherche de fuites d’eau, la société SAPITECH a commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque SAPITEC n°3980640  uniquement pour les services de « Construction ; informations en matière de construction ; conseils en construction ; supervision (direction) de travaux de construction ; maçonnerie ; travaux de plâtrerie ou de plomberie ; travaux de couverture de toits ; services d’isolation (construction) ; démolition de constructions » ;

CONDAMNE la société SAPITECH à cesser toute utilisation de la dénomination sociale «SAPITECH» pour promouvoir et proposer des services de recherche de fuites d’eau et à procéder aux formalités nécessaires afin de modifier celle-ci, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement ;

CONDAMNE la société SAPITECH à cesser toute utilisation du nom de domaine sapitech.fr et en particulier toute redirection dudit nom de domaine vers tout site internet en rapport avec l’activité de recherche de fuites d’eau et à ne pas renouveler celui-ci à compter de son expiration et à le laisser tomber dans le domaine public, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement ;

CONDAMNE la société SAPITECH à cesser toute reproduction du signe « SAPITECH » sur son site internet et sur tout autre support en lien avec son activité de recherche de fuites d’eau, sous astreinte provisoire d’une durée de trois mois à raison de 150€ par jour de retard, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement ;

REJETTE la demande tendant à se voir réserver la liquidation des astreintes ainsi prononcées ;

CONDAMNE la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme de 13 000€ en indemnisation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon ;

REJETTE l’intégralité des demandes formées par la société SAPITEC au titre de la concurrence déloyale ;

REJETTE les demandes en paiement formées par la société SAPITECH au titre de la procédure abusive  ;

CONDAMNE la société SAPITECH aux dépens ;

CONDAMNE la société SAPITECH à payer à la société SAPITEC la somme de 5 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE l’exécution provisoire, excepté en ce qui concerne les mesures d’interdiction ;

REJETTE le surplus des demandes.

En foi de quoi le Président et le Greffier ont signé la présente décision.

LE GREFFIER LE PRESIDENT
Patricia BRUNON Marc-Emmanuel GOUNOT


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