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Le fait que des pages de la plateforme Amazon mentionnent, tant dans leur adresse URL que dans leur titre et les meta- tags associés, voire plus rarement dans leur description, des marques déposées mais dont les produits ne sont pas vendus, ne caractérise pas la pratique prohibée des marques d’appel.
Il n’est pas interdit en soi de réserver des mots-clés reproduisant la marque d’un tiers dès lors qu’aucun risque de confusion n’est créé dans l’esprit du public pertinent. Des suggestions de compléments de termes de recherche (« peignoir car » conduisant à la proposition « peignoir carre blanc » par exemple), si elles invitent effectivement l’internaute à lancer une recherche sur de tels termes, donc en l’espèce sur des produits de marque « CARRE BLANC », n’induisent pour autant aucun doute dans l’esprit du consommateur raisonnablement attentif et moyennement avisé, lequel ne peut se méprendre au vu des résultats obtenus sur l’absence de produit authentique offert à la vente sur le site Amazon.
La contrefaçon de marque ne peut en conséquence être retenue ici, pas plus que la pratique de la marque d’appel n’apparaît constituée, l’internaute, même invité à lancer une recherche sur cette marque n’étant pas trompé par l’absence de disponibilité de produits authentiques, étant observé qu’à l’occasion d’une telle recherche, il se trouve déjà sur le site et n’a pas été dirigé sur celui- ci suite à une annonce ou un lien lui laissant croire à la possibilité d’acquérir de tels produits.
Pour rappel, y compris en matière de contrefaçon de marque, la responsabilité de l’hébergeur peut être engagée s’il ne réagit pas promptement à la réception d’une notification de contenus illicites.
L’article 6 III.-1. de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique impose aux personnes dont l’activité est d’éditer un service de communication au public en ligne de mettre à disposition du public « b) S’il s’agit de personnes morales, leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social, leur numéro de téléphone et, s’il s’agit d’entreprises assujetties aux formalités d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de leur inscription, leur capital social, l’adresse de leur siège social ».
Cette disposition a pour but de permettre l’identification de l’éditeur du site, responsable de son contenu. A défaut, si l’éditeur n’est pas identifiable, le titulaire du nom de domaine présumé exploitant est susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard des tiers.
L’hébergeur ne peut, lui, voir sa responsabilité recherchée au titre des informations stockées mises à la disposition du public que s’il a eu connaissance de leur caractère illicite et n’a pas agi promptement pour les faire retirer après avoir reçu une notification, conformément aux dispositions de l’article 6-I-2 de la LCEN précitée, qui dispose que :
« Les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère manifestement illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ».
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Paris
3e chambre 2e sec
10 juin 2022
Sur les personnes
Avocat(s) : Fabienne PANNEAU, Julien LACKER
Texte intégral
A l’audience du 17 mars 2022 tenue en audience publique devant Catherine Ostengo et Elise Mellier, juges rapporteurs, qui sans opposition des avocats ont tenu seules l’audience, et après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.
Avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu, en dernier lieu, par mise à disposition au greffe le 10 juin 2022.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à dispositions au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
Le groupe CARRE BLANC se présente comme le leader français de la distribution du linge de maison depuis 25 ans. En son sein, la société CARRE BLANC EXPANSION est titulaire de la marque française « CARRE BLANC » n° 073 534 168 déposée le 29 octobre 2007 et régulièrement renouvelée pour du « linge de maison » et des « peignoirs », tandis que la société CARRE BLANC DISTRIBUTION exploite le site internet accessible via le nom de domaine dont elle est titulaire.
La société de droit luxembourgeois AMAZON EUROPE CORE édite et exploite une plateforme ou boutique accessible à l’adresse amazon.fr, sur laquelle sont offerts aux consommateurs français une large gamme de produits commercialisés par la société de droit luxembourgeois AMAZON EU ou par des vendeurs tiers indépendants.
Considérant que les pratiques de référencement des sociétés AMAZON étaient constitutives de contrefaçon de la marque « CARRE BLANC » et déloyales, les sociétés CARRE BLANC ont fait dresser par huissier de justice différents constats internet sur le moteur de recherche Google et demandé à plusieurs reprises aux sociétés AMAZON de faire cesser les actes litigieux.
Insatisfaites des réponses apportées, elles ont ensuite, par acte du 27 septembre 2019, fait assigner les sociétés AMAZON en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
*
Aux termes de leurs conclusions n° 2.1 signifiées par voie électronique le 1er septembre 2021, les sociétés CARRE BLANC EXPANSION et CARRE BLANC DISTRIBUTION demandent au tribunal de :
Vu notamment les articles L. 713-2 et L. 713-5 ancien du code de la propriété intellectuelle,
Vu notamment les articles L. 713-2 et L. 713-3 actuel du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 1240 (anciennement l’article 1382) et suivants du code civil,
– DIRE ET JUGER que la marque « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 déposée le 29 octobre 2007 et dûment renouvelée est une marque valable dont la distinctivité a été accrue par l’usage et qui est renommée ;
– DIRE ET JUGER que l’usage de la marque « CARRE BLANC » associé à divers mots descriptifs pour désigner des produits identiques ou similaires aux produits de « linge de maison » et aux « peignoirs » constitue une reproduction illicite ou à défaut une imitation illicite de la marque française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 déposée le 29 octobre 2007 ;
– DIRE ET JUGER qu’en reproduisant les termes « CARRE BLANC » et notamment sur internet,
1/ dans la description des pages qu’elle a créées et notamment dans le titre, l’adresse URL visibles dans les résultats dits naturels des moteurs de recherche,
2/ dans les annonces publicitaires du moteur de recherche BING,
3/ dans les suggestions de recherches du site amazon.fr,
4/ dans la description des fiches produits
5/ dans le nom d’un peignoir vendu sur Amazon.fr, les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l ont commis des actes de contrefaçon de la marque française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 dont la société CARRE BLANC
EXPANSION est titulaire? ;
– DIRE ET JUGER qu’en reproduisant les termes « CARRE BLANC » dans la description des pages qu’elle a créées et notamment dans le titre, l’adresse URL visibles dans les résultats dits naturels des moteurs de recherche, dans les annonces publicitaires du moteur de recherche BING, les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CARRE BLANC DISTRIBUTION notamment en portant atteinte à la valeur du nom de domaine carreblanc.com dont la société CARRE BLANC DISTRIBUTION est titulaire notamment en détournant du trafic destiné à ce site? ;
– DIRE ET JUGER que les 7 constats d’huissiers ainsi que les lettres de mise demeure et leurs pièces jointes ont démontré de manière loyale et probante que les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l ont utilisé la marque CARRE BLANC pour faire la promotion de produits concurrents des sociétés CARRE BLANC et que cet usage n’a jamais permis au public d’être mis en relation avec des produits authentiques CARRE BLANC et qu’il n’y a donc pas lieu d’appliquer l’exception de référence nécessaire mais au contraire de juger qu’il s’agit d’un usage en tant que marque d’appel qui doit être jugé illicite ;
– DIRE ET JUGER qu’en tirant profit des investissements et de l’image de qualité des produits « CARRE BLANC » et notamment en exploitant des balises méta-tag et meta name contenant la marque CARRE BLANC tels que notamment « Housse De Couette Carre Blanc, Amazon.fr », « Linge De Maison Carre Blanc, Amazon.fr » dans les pages du site amazon.fr, les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CARRE BLANC DISTRIBUTION? ;
EN CONSÉQUENCE,
– REJETER la demande de nullité de la marque CARRE BLANC pour la classe 24 pour défaut d’intérêt à agir et car la demande n’est pas fondée ;
– FAIRE INTERDICTION aux sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l d’utiliser sous quelque forme que ce soit et de quelque manière que ce soit, y compris à titre de marque, de dénomination sociale, de nom commercial, d’enseigne, de sigle, de nom de domaine, adresse internet (URL et email), de mot clé, d’identifiant sur les réseaux sociaux, ou de publicité le signe « CARRE BLANC », pour désigner des produits identiques ou similaires aux produits de « linge de maison » et aux « peignoirs » couverts par la marque « CARRE BLANC » et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et par mention passé un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement à intervenir ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l à verser à la Société CARRE
BLANC EXPANSION la somme de 150 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la reproduction illicite et de l’imitation illicite de la marque française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 déposée le 29 octobre 2007 ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l à verser à la société CARRE
BLANC DISTRIBUTION la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale dont elle s’est rendue coupable ;
– AUTORISER les sociétés CARRE BLANC EXPANSION et CARRE BLANC DISTRIBUTION à faire publier le dispositif du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues de leur choix et aux frais avancés des sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l, le coût de chaque insertion ne devant pas excéder la somme de 5 000 euros hors taxes ;
– ORDONNER la publication en partie haute de la page d’accueil du site amazon.fr du dispositif du jugement à intervenir pendant une durée d’un mois dans les quinze jours de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé ce délai ;
– ORDONNER aux sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l, sous astreinte in solidum de 1 000 euros par
jour de retard à l’expiration d’un délai de 30 jours suivant le prononcé du jugement à intervenir la production des documents suivants pour la période précédant de 5 ans la date de signification du présent acte :
o Tous documents indiquant le nombre de consultations sur cette période des pages du site amazon.fr contenant « carre-blanc » ou
« carré-blanc » dans leur URL tant pour le trafic généré par Google que par d’autres moteurs de recherches ou par les recherches sur le site amazon.fr et notamment toutes les pages commençant par :
[…]
– SE RÉSERVER la liquidation de l’astreinte prononcée ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l à verser à chacune des sociétés CARRE BLANC EXPANSION et CARRE BLANC DISTRIBUTION la somme de 30 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir pour l’ensemble des mesures sollicitées au présent dispositif, nonobstant appel et sans constitution de garantie? ;
– CONDAMNER in solidum les sociétés AMAZON EU S.à.r.l. et AMAZON EUROPE CORE S.à.r.l aux entiers dépens dont il est
précisé qu’ils incluent les frais des constats d’huissier versés à la présente procédure dont distraction sera ordonnée au profit de Maître Julien LACKER, Avocat Associé de l’AARPI GOMIS & LACKER AVOCATS, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
*
Aux termes de leurs conclusions récapitulatives n° 5 signifiées par voie électronique le 8 décembre 2021, les sociétés AMAZON EU et AMAZON EUROPE CORE demandent au tribunal de :
Vu les articles L. 711-2, L. 713-3, L. 713-5, L. 713-6, L. 714-3 et L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu l’article 6 de la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique,
Vu les articles 31, 32, 122, 696 et 700 du code de procédure civile,
À TITRE PRINCIPAL,
– ÉCARTER des débats les procès-verbaux de constat d’huissier produits par les demanderesses en ce que, à défaut d’avoir été réalisés de manière loyale, ils n’ont aucune force probante ;
– PRONONCER la nullité de la marque verbale « Carré Blanc », enregistrée sous le n° 07 3 534 168 pour la classe 24 ;
En conséquence, JUGER la société Carre Blanc Expansion irrecevable à agir et donc irrecevable en toutes ses demandes, fins et prétentions ;
– ACCUEILLIR les sociétés Amazon EU et Amazon Europe Core en leur fin de non-recevoir et les y déclarer bien fondées ;
En conséquence,
– PRONONCER la mise hors de cause totale de la société Amazon EU ;
– PRONONCER encore la mise hors de cause de la société Amazon Europe Core concernant les demandes relatives à de prétendus actes de contrefaçon constitués par l’offre à la vente sur la Boutique d’un peignoir dont l’intitulé contenait le terme « carré blanc » et les offres de vendeurs tiers sur la Boutique contenant l’expression « carré blanc » dans leur descriptif ;
EN TOUT ÉTAT DE CAUSE,
– DÉBOUTER la société Carré Blanc Expansion de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions portant sur des actes de contrefaçon ;
– DÉBOUTER la société Carré Blanc Distribution de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions portant sur des actes de concurrence déloyale ;
– REJETER par voie de conséquence l’ensemble des demandes indemnitaires des sociétés Carré Blanc Expansion et Carré Blanc
Distribution, en ce compris leurs demandes de publicité et d’interdiction ;
EN CONSÉQUENCE,
– CONDAMNER in solidum la société Carré Blanc Expansion et la société Carré Blanc Distribution à verser à la société Amazon EU et à la société Amazon Europe la somme de 50 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Les CONDAMNER in solidum aux entiers dépens d’instance, dont distraction au profit de Me Panneau, Avocat au Barreau de Paris, par application de l’article 699 du même code.
*
La clôture a été prononcée le 13 janvier 2022 et l’affaire a été plaidée le 17 mars 2022.
Pour un exposé complet de l’argumentation des parties, il est, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoyé à leurs dernières conclusions précitées.
DISCUSSION
A titre liminaire, sur la demande de mise hors de cause des sociétés AMAZON
La société AMAZON EU sollicite sa mise hors de cause faute de qualité à défendre, s’estimant totalement étrangère aux griefs formulés par les sociétés CARRE BLANC, lesquels ne visent que des pratiques de vendeurs tiers sur la boutique Amazon, ainsi que des pratiques de référencement qui ne lui sont pas imputables.
De son côté, la société AMAZON EUROPE CORE, qui se présente comme un simple gestionnaire technique de la boutique Amazon et étrangère aux activités de vente de la place de marché, soutient que seule la demande tirée du référencement naturel et payant est recevable à son encontre, et qu’elle doit être mise hors de cause pour le surplus des demandes.
Les sociétés CARRE BLANC concluent au rejet de ces demandes, la société AMAZON EUROPE CORE étant la titulaire du nom de domaine sous lequel est hébergée la boutique Amazon et se reconnaissant responsable du référencement du site litigieux, et la société AMAZON EU en étant l’exploitant effectif. La responsabilité solidaire de ces deux entités doit en conséquence pouvoir être recherchée au cas d’espèce.
Sur ce,
Aux termes de l’article 32 du code de procédure civile, « Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir ».
Par ailleurs, l’article 6 III.-1. de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique impose aux personnes dont l’activité est d’éditer un service de communication au public en ligne de mettre à disposition du public « b) S’il s’agit de personnes morales, leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social, leur numéro de téléphone et, s’il s’agit d’entreprises assujetties aux formalités d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de leur inscription, leur capital social, l’adresse de leur siège social ». Cette disposition a pour but de permettre l’identification de l’éditeur du site, responsable de son contenu. A défaut, si l’éditeur n’est pas identifiable, le titulaire du nom de domaine présumé exploitant est susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard des tiers.
L’hébergeur ne peut, lui, voir sa responsabilité recherchée au titre des informations stockées mises à la disposition du public que s’il a eu connaissance de leur caractère illicite et n’a pas agi promptement pour les faire retirer après avoir reçu une notification, conformément aux dispositions de l’article 6-I-2 de la LCEN précitée, qui dispose que « Les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère manifestement illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ».
En l’espèce, il sera en premier lieu observé que l’objet social figurant dans l’extrait Kbis des sociétés en cause est sans incidence sur leur activité réelle et leur responsabilité éventuelle face aux faits qui leur sont reprochés.
Il est indiqué dans les conditions d’utilisation du site que celui-ci « appartient à, et sa maintenance est effectuée par, Amazon Europe Core SARL ». Les conditions générales de vente de ce site précisent par ailleurs que « Amazon EU SARL et/ou ses sociétés affiliées (« Amazon ») vous fournissent des fonctionnalités de site internet et d’autres produits et services quand vous visitez ou achetez sur le site internet Amazon.fr (le « Site Internet ») » (pièces 10.4 et 10.3 CARRE BLANC – version du 22 mai 2020 identique à celle du 27 juin 2019 selon les sociétés AMAZON elles-mêmes).
Il apparaît ainsi que, si seule la société AMAZON EUROPE CORE, en tant que titulaire du nom de domaine et prestataire en charge de la maintenance technique du site, reconnaît être responsable des stratégies de référencement, naturel et payant, du site internet correspondant, la société AMAZON EU peut néanmoins être considérée comme co-éditrice du site et des fonctionnalités qu’il offre ; en particulier, si cette dernière soutient que le contenu des fiches- produit est de la seule responsabilité des vendeurs tiers concernés, elle ne conteste pas en revanche exercer une activité de « retail » en commercialisant elle-même directement via le site des produits dits « Amazon Basics » pour lesquels elle ne peut à tout le moins contester fournir le contenu des pages de présentation dédiées.
Enfin, les co-défenderesses soutiennent toutes les deux être étrangères aux services de la place de marché de la boutique Amazon, lesquels sont, selon elles, fournis par une société distincte qui n’est pas citée en tant que partie à la procédure. Mais, outre qu’elles n’indiquent pas l’identité de cette société tierce et se sont gardées de l’appeler en garantie, la rubrique légale du site internet « www.amazon.fr> mentionne que « Amazon Europe Core SARL, Amazon EU SARL et/ou leurs sociétés affiliées (« Amazon ») vous fournissent des fonctionnalités de site internet et d’autres produits et services quand vous visitez le site internet Amazon.fr (le « site internet »), effectuez des achats sur le site Internet (…) », de sorte qu’une ambiguïté apparaît entretenue sur ce point, laquelle doit profiter au tiers mis dans l’incapacité de déterminer avec certitude le véritable éditeur de la place de marché, ce d’autant que toute notification d’un contenu manifestement illicite doit être faite, d’après ces mêmes conditions d’utilisation, auprès de la société AMAZON EU SARL.
Il n’y a en conséquence pas lieu de mettre hors de cause, même partiellement, aucune des co-défenderesses à ce stade, et leur responsabilité éventuelle sera ensuite examinée pour chacun des actes litigieux que leur reprochent les sociétés CARRE BLANC.
1- Sur la validité de la marque « CARRE BLANC » n° 07 3534 168
Selon les sociétés AMAZON, le signe « Carré Blanc » constitue la désignation nécessaire, générique ou usuelle du linge de maison, catégorie recouvrant les produits pour lesquels la marque litigieuse est enregistrée. La marque « CARRE BLANC » étant manifestement descriptive pour les produits visés au dépôt et aucune acquisition de la distinctivité par l’usage n’étant démontrée, elle doit être déclarée nulle en totalité, étant rappelé qu’il s’agit d’un motif absolu de nullité. En conséquence, la demanderesse doit être déclarée irrecevable à agir.
La société CARRE BLANC EXPANSION soutient pour l’essentiel que sa marque, qui n’est pas accordée en genre et en nombre avec les produits couverts, n’est pas purement descriptive ; une précédente demande d’invalidation a d’ailleurs été rejetée par la cour d’appel de Paris dans son arrêt en date du 5 mars 2019.
En tout état de cause, sa marque est devenue notoire et renommée (sic), de sorte qu’elle ne saurait aujourd’hui être annulée.
Sur ce,
Aux termes de l’article L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable à compter du 2019, « Ne peuvent être valablement enregistrés et, s’ils sont enregistrés, sont susceptibles d’être déclaré nuls :
(…)
2° Une marque dépourvue de caractère distinctif ;
3° Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications pouvant servir à désigner, dans le commerce, une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation du service ;
4° Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce ;
5° Un signe constitué exclusivement par la forme ou une autre caractéristique du produit imposée par la nature même de ce produit, nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ou qui confère à ce produit une valeur substantielle ;
(…)
Dans les cas prévus aux 2°, 3° et 4°, le caractère distinctif d’une marque peut être acquis à la suite de l’usage qui en a été fait ».
En l’espèce, la marque verbale française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 a été déposée le 29 octobre 2007 dans les classes 3, 4, 5, 6, 8, 9, 11, 14, 16, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42 et 44 ; elle désigne plus particulièrement en classe 24 des « Tissus à usage textile ; linge de maison ; linge ouvré ; linge de table en matières textiles ; nappes ; napperons individuels ; chemins de table ; dessous de carafes ; ronds de table ; serviettes de table et tapis de table en matières textiles ; toiles cirées (nappes) ; couvertures de lit et de table ; draps ; tissus pour la lingerie ; enveloppes de matelas ; toile à matelas ; linge de lit ; literie (linge) ; sacs de couchage (enveloppes cousues remplaçant les draps) ; dessus-de-lit (couvre-lits) ; édredons (couvre-pieds de duvet) ; couvre-pieds ; courtepointes ; housses et taies d’oreillers ; housses pour coussins ;
essuie-mains en matières textiles ; linge de bain (à l’exception de l’habillement) ; serviettes de plage ; mouchoirs de poche et serviettes à démaquiller en matières textiles ; gants et serviettes de toilette en matières textiles ; essuie-verres ; tissus d’ameublement ; embrasses en matières textiles ; tissus et étoffes pour meubles ; housses de protection pour meubles ; revêtements de meubles en matières textiles ou en matières plastiques ; portières (rideaux) ; vitrages (rideaux) ; rideaux
en matières textiles ou en matières plastiques ; stores en matières textiles ; rideaux de douche en matières textiles ou en matières
plastiques ; tentures murales en matières textiles ; bannières ; calicots ; drapeaux et fanions (non en papier) ; étiquettes en tissu ; coiffes de chapeaux ; couvertures de voyage ; plaids ; canevas pour la tapisserie ou la broderie ; tissus recouverts de motifs dessinés pour la broderie ; toiles gommées (autres que pour la papeterie) ; textiles non-tissés ; tricots (tissus) ; tissus de laine, de lin et de jute ; tissus de coton, cotonnades ; tissus de soie ; crêpe (tissu), crépon ; étoffes de laine ; doublures (étoffes) ; moleskine (tissu), flanelle (tissu), jersey (tissu), taffetas (tissu) ; tulles ; velours ; damas (étoffe) ; frise (étoffe) ; matières plastiques (succédanés du tissu) ; tissus élastiques ; tissus en fibre de verre à usage textile ; tissus imitant la peau d’animaux ».
Les sociétés AMAZON soutiennent qu’elle n’est rien d’autre que la désignation usuelle du linge de maison.
Toutefois, s’il est exact qu’un simple morceau de tissu peut être désigné par l’expression « carré (de tissu) » et qu’il est usuellement fait référence au terme « blanc » pour désigner la catégorie du linge de maison, pour autant, le signe « carré blanc » ne peut à l’évidence être qualifié de descriptif de l’ensemble des produits visés par la marque litigieuse en classe 24. En effet, d’une part la catégorie du linge de maison ne recouvre traditionnellement que les draps de lit, les housses en tissu, le linge de toilette et le linge de table, voire les voilages, mais pas l’intégralité des produits à base d’étoffe ; d’autre part et surtout, l’association des deux termes « carré » et « blanc » en change la signification individuelle et ne renvoie précisément qu’à un carré de tissu de couleur blanche, de sorte que le signe litigieux est tout au plus évocateur des produits du linge de maison.
Il ne peut davantage être excipé du principe à valeur constitutionnelle de la liberté du commerce et de l’industrie et argué du caractère nécessaire pour les tiers de l’emploi de ces termes pour désigner du linge de maison, le monopole accordé à la marque « CARRE BLANC » ne portant que sur l’association de ces deux termes et chacun d’eux restant en conséquence librement utilisable par quiconque dans leur sens générique ou usuel et notamment à titre d’adjectif accordé en genre et en nombre correspondant à une des caractéristiques du produit ainsi qualifié.
Au surplus, la notoriété aujourd’hui acquise par la marque verbale « CARRE BLANC » litigieuse pour du linge de maison, pour lequel elle est reconnue leader du marché, apparaît aujourd’hui suffisamment établie par les nombreuses pièces versées en ce sens (pièces 3.2 et 3.4.1 à 3.4.78 + rapports d’activité 3.5.1 à 3.5.35 + avis positifs des consommateurs 3bis.07 CARRE BLANC), notamment au regard du nombre de points de vente (240) en France et dans une vingtaine de pays, de la croissance de son chiffre d’affaires (pièce 12 CARRE BLANC) et des efforts promotionnels consacrés à son développement depuis 30 ans par la société CARRE BLANC EXPANSION, qui attestent d’une certaine intensité d’utilisation du signe, encore renforcée par le partenariat noué depuis 2003 avec le tournoi de Roland-Garros ; de sorte que, s’agissant d’un signe seulement évocateur et non purement
descriptif de cette catégorie de produits, sa titulaire peut en tout état de cause revendiquer une distinctivité acquise par l’usage.
Les sociétés AMAZON seront en conséquence déboutées de leur demande en nullité de la marque « CARRE BLANC » n° 07 3534 168.
2- Sur la contrefaçon de marque
Les sociétés CARRE BLANC soutiennent que les sociétés AMAZON ont commis des actes de contrefaçon de la marque française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 de différentes manières, à savoir à travers une stratégie répréhensible en matière de référencement naturel, de référencement payant, via l’emploi d’un tableau de concordance, sur des descriptions de produits accessibles en ligne et dans le nom même d’un produit non authentique.
En réponse, les sociétés AMAZON sollicitent liminairement que les procès-verbaux de constat internet soient écartés des débats pour déloyauté procédurale. Elles soutiennent par ailleurs que les demanderesses ne peuvent s’opposer à l’utilisation de la marque
« CARRE BLANC » dès lors que des produits authentiques de différentes natures (housses de couettes, draps, serviettes) sont offerts à la vente sur la boutique accessible via le nom de domaine.
Sur ce,
Aux termes de l’article L. 713-3 du code de propriété intellectuelle, « Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :
1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque ».
La Cour de justice de l’Union européenne a en outre dit pour droit que « le titulaire de la marque est habilité à interdire l’usage sans son consentement, d’un signe identique à ladite marque par un tiers, lorsque cet usage a lieu dans la vie des affaires, est fait pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque ».
Il s’ensuit que le titulaire d’une marque est habilité à interdire à un annonceur de faire, à partir d’un mot clé identique ou similaire à ladite marque que cet annonceur a, sans le consentement dudit titulaire, sélectionné dans le cadre d’un service de référencement sur internet, de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels ladite marque est enregistrée, lorsque ladite publicité fait usage de la marque de manière visible et ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute moyen de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci, ou au contraire d’un tiers. L’achat de mot-clé dans le cadre de campagnes de référencement payant n’est ainsi pas répréhensible en soi, et seule la création d’un risque de confusion dans l’esprit du public, en ce qu’un tel risque porte atteinte à la fonction d’identification de la marque, rend critiquable l’usage d’un mot clé identique à la marque d’un concurrent.
Par ailleurs, le fait, pour un distributeur, d’annoncer la vente de produits d’une marque alors qu’il n’en détient pas ou en détient un nombre d’exemplaires insuffisant pour répondre à la demande normale de la clientèle, afin d’attirer cette dernière et lui proposer des produits d’une autre marque, constitue la pratique prohibée dite « de la marque d’appel ».
A titre liminaire, sur la validité des constats d’huissier
Les défenderesses considèrent que l’huissier a manqué à la nécessaire loyauté procédurale en restreignant les recherches menées sur les termes « CARRE BLANC » dans le moteur Google aux seules pages issues du site amazon.fr. Elles soutiennent sur ce point qu’un simple internaute ne serait jamais amené à utiliser une telle fonctionnalité, très spécifique et inconnue du grand public, de sorte qu’une recherche classique ayant pour sujet « linge de maison carre blanc » ou « housse de couette carre blanc » ne renverrait pas les mêmes résultats que ceux obtenus par l’huissier, le procédé employé constituant un stratagème illicite devant conduire le tribunal à écarter les procès-verbaux de constat.
L’objet des constats d’huissier n’était toutefois pas de reproduire à l’identique le parcours d’un internaute lambda intéressé par un produit de marque « CARRE BLANC » sur tous sites internet ou plateforme de vente en ligne, mais d’identifier, au sein de centaines de millions de pages internet, celles renvoyées par le moteur de recherche provenant uniquement du site amazon.fr. Le fait de limiter les recherches menées, via le choix d’une option librement proposée par le moteur Google, aux seules pages issues d’un site donné ne témoigne donc d’aucun rôle actif de l’huissier ni mise en place d’un stratagème tendant à provoquer un résultat spécifique, qui s’en trouverait ainsi faussé, les défenderesses ne soutenant au demeurant nullement que les pages obtenues en résultats de la recherche ne contiendraient pas en réalité les termes « CARRE BLANC » soit dans leur contenu même, soit en méta- tags optimisant le référencement, naturel ou payant.
Il n’est en conséquence pas justifié d’écarter des débats les procès- verbaux litigieux, dont les résultats ont pu être par ailleurs contradictoirement discutés.
2.1- Sur le référencement naturel
Il est établi par les différents procès-verbaux de constat en date des 7 février 2018, 4 avril et 27 mai 2019 (pièces 5.1, 5.2, 5.3 CARRE BLANC) que les pages litigieuses du site internet mentionnent, tant dans leur adresse URL que dans leur titre et les meta- tags associés, voire plus rarement dans leur description, les termes « Carre » et « Blanc » en combinaison. Or, si les meta-tags associés, qui ont pour but d’optimiser le référencement naturel (ou SEO, Search Engine Optimization), en l’espèce sur Google, ne sont pas immédiatement visibles pour l’internaute sur la page de résultats, tel est en revanche le cas du titre de la page, de son adresse URL et de sa description succincte, comme le montre l’exemple suivant :
Les éléments composant la marque verbale « CARRE BLANC » étant reproduits à l’identique, il convient de s’interroger d’une part sur son usage à titre de marque dans les titres, URL et descriptions litigieux, d’autre part sur la justification éventuelle d’un tel usage pour commercialiser des produits authentiques et enfin du risque de confusion susceptible d’être corrélativement engendré dans l’esprit de l’internaute d’attention moyenne.
En l’espèce, les sociétés AMAZON réfutent tout usage de la marque « CARRE BLANC », arguant de la liberté d’usage des adjectifs
« carré » et « blanc », mais également du droit d’employer ces termes dans leur sens générique et usuel de « carré de tissu » et « linge de maison ». Toutefois, force est de constater que si des adjectifs qualificatifs sont évidemment utilisables par quiconque pour décrire le produit concerné, une housse de couette n’est pas nécessairement carrée mais plutôt rectangulaire et a fortiori un peignoir ne l’est pas, et en tout état de cause l’emploi des termes litigieux à titre d’adjectifs engendrerait logiquement un accord au féminin, à tout le moins pour une housse de couette ; au contraire, l’adjectif rouge mentionné dans l’exemple litigieux démontre bien que le terme “Blanc” n’est pas employé comme qualificatif de la couleur de la couette. Par ailleurs, rien ne vient justifier le choix d’une première lettre majuscule pour chacun des termes « Carre » et « Blanc », ni leur présentation immédiatement accolés. L’usage du signe « CARRE BLANC » à titre de marque pour désigner une housse de couette ou un peignoir est ici en conséquence suffisamment établi.
Les défenderesses soutiennent qu’un tel usage n’est pour autant pas interdit dès lors qu’il s’agit de promouvoir sur les pages du site en question d’authentiques produits de marque « CARRE BLANC ». Là encore toutefois, les procès-verbaux précités établissent qu’aucun produit authentique n’était offert à la vente sur les pages accessibles en cliquant sur les liens indiqués par les URL litigieuses, ce qu’un internaute d’attention moyenne était naturellement amené à croire, alors même que celui-ci se voyait systématiquement proposer des housses de couette, des peignoirs ou plus généralement du linge de maison de marques concurrentes de celle des demanderesses, étant au surplus observé que si les sociétés AMAZON démontrent que du linge de toilette ou une housse de couette marqués « Carré Blanc x Roland-Garros » ont pu être offerts à la vente sur le site à compter du 14 juin 2020 (pièces 2.e et 2.f AMAZON), il n’est pas démontré par les défenderesses que cette commercialisation existait déjà à la date des constats litigieux antérieurs et surtout ces produits spécifiques n’étaient en tout état de cause pas offerts à la vente sur les pages vers lesquelles pointaient les liens en cause. Le recours à la marque « CARRE BLANC » dans le titre, l’URL, voire la description des pages litigieuses a donc permis d’accroître le référencement naturel de ces pages donc le trafic induit, en remontant leur apparition dans les résultats de recherche, alors même qu’aucun produit authentique n’y était proposé, ce qui est constitutif de la pratique prohibée de la marque d’appel.
2.2- Sur le référencement payant
Les procès-verbaux de constat établissent également suffisamment, à tout le moins du 27 mai au 13 septembre 2019 (pièces 5.3 et 5.4 CARRE BLANC), l’achat sur les moteurs de recherche bing.fr et yahoo.com des mots-clés « carre » et « blanc », voire d’un unique mot clé « carre blanc » reproduisant à l’identique la marque verbale litigieuse, dès lors que ces mots-clés apparaissent en en-tête des annonces affichées sur les résultats de recherche :
Or, pour les mêmes raisons qu’exposées ci-avant à propos du référencement naturel, l’emploi de ces termes est constitutif d’un usage à titre de marque, qui plus est à titre de marque d’appel dès lors que là encore aucun produit authentique n’était en réalité accessible à la vente sur les pages litigieuses, peu important sur ce point que l’internaute n’ait pu se méprendre sur le fait que le site accessible via ces annonces était le site notoirement connu Amazon et non le site de la marque « Carré Blanc » puisqu’il était amené à croire qu’il pourrait se procurer des produits authentiques alors qu’il ne se voyait finalement proposer que des produits concurrents.
2.3- Sur les suggestions de recherches
Les sociétés demanderesses considèrent contrefaisant le fait, dans l’outil de recherches du site de suggérer de manière automatique les termes associés « carre blanc » alors même qu’aucun produit authentique n’est ensuite proposé à la vente, assimilant cette pratique à celle des tableaux de concordance prohibés.
Toutefois, de la même manière qu’il n’est pas interdit en soi de réserver des mots-clés reproduisant la marque d’un tiers dès lors qu’aucun risque de confusion n’est créé dans l’esprit du public pertinent, il doit être relevé que les suggestions de compléments de termes de recherche (« peignoir car » conduisant à la proposition « peignoir carre blanc » par exemple), si elles invitent effectivement l’internaute à lancer une recherche sur de tels termes, donc en l’espèce sur des produits de marque « CARRE BLANC », n’induisent pour autant aucun doute dans l’esprit du consommateur raisonnablement attentif et moyennement avisé, lequel ne peut se méprendre au vu des résultats obtenus sur l’absence de produit authentique offert à la vente sur le site (constat d’huissier du 2 juin 2020 – pièce 5.5 CARRE BLANC).
La contrefaçon de marque ne peut en conséquence être retenue ici, pas plus que la pratique de la marque d’appel n’apparaît constituée, l’internaute, même invité à lancer une recherche sur cette marque n’étant pas trompé par l’absence de disponibilité de produits authentiques, étant observé qu’à l’occasion d’une telle recherche, il se trouve déjà sur le site et n’a pas été dirigé sur celui- ci suite à une annonce ou un lien lui laissant croire à la possibilité d’acquérir de tels produits.
2.4- Sur les fiches produits
Les demanderesses reprochent encore à leurs adversaires, à tout le moins jusqu’au 18 septembre 2020, la mention, sans aucune justification, des termes « carre blanc » au sein du contenu de pages consacrées à des produits présentés sur le site (pièces 5.5, 5.6, 5.7 CARRE BLANC) :
Toutefois, il n’est pas établi que le contenu de ces pages dédiées à la présentation et à l’offre à la vente de produits par des vendeurs tiers a été établi par ou à tout le moins sous le contrôle des défenderesses et leur serait donc imputable, alors même que les conditions générales de vente rappellent que seuls les vendeurs tiers sont responsables des informations publiées relatives aux produits qu’ils commercialisent. Et en tout état de cause, le recours à de tels mots-clés, dans le but d’optimiser le référencement des pages en question, n’est susceptible de constituer une contrefaçon de marque que s’il en résulte un risque de confusion dans l’esprit de l’internaute. Or celui-ci ne peut être porté à croire que le produit présenté sur la page dédiée en question, clairement présenté comme étant d’une marque tierce, serait commercialisé par les sociétés CARRE BLANC ou même par une société affiliée.
2.5- Sur le nom d’un peignoir
Les sociétés CARRE BLANC reprochent enfin aux défenderesses l’offre à la vente, constatée par procès-verbal d’huissier en date du 4 avril 2019 (pièce 5.2 CARRE BLANC) d’un peignoir présenté comme authentique alors qu’il n’en est rien :
En l’espèce, les sociétés AMAZON ne contestent pas que le peignoir litigieux n’est pas un produit de marque « CARRE BLANC », comme le laisse pourtant entendre l’usage de cette marque verbale, reproduite à l’identique, dans son nom même, en sus de l’URL et le titre de la page produit. Or, les autres éléments verbaux composant le nom du produit litigieux sont soit purement descriptifs (« bath peignoir » et « XL » pour la taille), soit sans signification particulière (HNL) contrairement à la marque « Carré Blanc » dont la notoriété a de surcroît été considérée comme établie. Et le fait que le produit soit indiqué être vendu par un tiers (HNL) ne suffit pas à écarter dans l’esprit du public pertinent tout risque qu’il s’imagine en présence d’un produit authentique vendu par un distributeur des sociétés CARRE BLANC, risque que la mention « Marque : HNL Bath » figurant en petits caractères sur le bas de la fiche-produit ne suffit pas à écarter.
La contrefaçon est en conséquence caractérisée, et s’il n’est pas établi que les défenderesses seraient effectivement éditrices de la page litigieuse, et non le vendeur tiers HNL, la responsabilité de la société AMAZON EU est néanmoins susceptible d’être engagée en tant qu’hébergeur s’il apparaît qu’elle n’a pas remédié à cette situation après en avoir été dûment informée par la société CARRE BLANC EXPANSION, étant rappelé que la connaissance que peut avoir un hébergeur de contenus de leur illicéité manifeste est présumée dès lors qu’une notification respectant les conditions posées par l’article 6-I-5 de la LCEN lui a été adressée.
Toutefois, en l’espèce, si la société CARRÉ BLANC EXPANSION a bien adressé, par courrier du 12 juin 2020 deux procès-verbaux de constat datés des 2 et 8 juin 2020 (pièces 4.15, 5.5 et 5.6 CARRE BLANC) à l’appui desquels elle reprochait à la société AMAZON de contrefaire sa marque « CARRE BLANC », elle ne mentionnait pas précisément dans son courrier ni l’existence de griefs spécifiques à l’usage du signe « Carré Blanc » dans le nom du peignoir, ni la page produit litigieuse, ne mettant ainsi pas en mesure la défenderesse d’identifier, au sein de volumineux constats, l’URL critiquée et sur laquelle intervenir.
Aussi, faute de notification conforme aux dispositions de la LCEN, la société CARRE BLANC EXPANSION sera déboutée de ses demandes relatives au nom du peignoir HNL.
3- Sur la concurrence déloyale
La société CARRE BLANC DISTRIBUTION soutient que les agissements contrefaisants des sociétés AMAZON ont eu pour c on sé qu e nc e un e b a iss e de fr é qu e nta tio n d u s ite
qu’elle exploite, lui ouvrant droit à réparation de son préjudice propre au titre de la concurrence déloyale.
Les défenderesses considèrent que les conditions de mise en œuvre de l’article 1240 du code civil ne sont nullement rapportées ici.
Sur ce,
Des actes de contrefaçon de marque sont susceptibles de constituer pour le licencié de la marque en cause qui l’exploite effectivement un préjudice propre réparable. Toutefois, pour donner lieu à réparation, ce préjudice de concurrence déloyale suppose, conformément aux principes de responsabilité délictuelle de droit commun, que soient démontrés, outre la réalité et le quantum du dommage allégué, une faute et un lien de causalité.
En l’espèce, la contrefaçon ayant été retenue au titre des stratégies de référencement naturel et payant mises en œuvre par la société AMAZON EUROPE CORE, aucune faute distincte n’a à être établie par le distributeur des produits en cause.
La société CARRE BLANC DISTRIBUTION soutient avoir conséquemment subi un préjudice, lequel résulte de la baisse de fréquentation du site qu’elle exploite en raison du détournement de trafic vers le site et de la perte de chance de vendre davantage de produits de marque « CARRE BLANC ». Elle ne produit toutefois à l’appui de ses assertions, au sein même de ses écritures et sans pièce jointe au bordereau, qu’un unique graphe présenté comme provenant « du site de référence dans le domaine du référencement Abondance.com » et aux termes duquel « Amazon, en étant en 2e et 3e position sur la marque CARRE BLANC, détourne 25,4% + 15,5% du trafic organique soit 40,90% du trafic de recherche sur les moteurs de recherche » :
Dès lors, et après avoir rappelé qu’il s’infère nécessairement un préjudice, fut-il seulement moral, d’actes de concurrence déloyale, mais qu’en l’espèce la société CARRE BLANC DISTRIBUTION n’allègue d’aucun préjudice moral mais uniquement d’un préjudice économique, pour lequel l’unique élément précité, non explicité ni étayé, est bien insuffisant à démontrer tant la réalité que le quantum, les demandes présentées au titre de la concurrence déloyale ne peuvent qu’être rejetées.
4- Sur les mesures réparatrices et indemnitaires
Outre des mesures d’interdiction sous astreinte et de publication judiciaire, les sociétés CARRE BLANC sollicitent la communication d’informations relatives à la fréquentation des pages litigieuses du site amazon.fr
En réparation des actes de contrefaçon, la société CARRE BLANC EXPANSION, soutenant que son préjudice est d’autant plus grand qu’il est porté atteinte à une marque de renommée, sollicite par ailleurs la condamnation in solidum des défenderesses à lui verser la somme de 150 000 euros, tandis que la société CARRE BLANC DISTRIBUTION évalue à la somme de 50 000 euros l’indemnité à lui allouer au titre de son préjudice de concurrence déloyale.
Outre les mises hors de cause totale de la société AMAZON EU et partielle de la société AMAZON EUROPE CORE, les défenderesses concluent au rejet de ces demandes indemnitaires, qu’elles considèrent injustifiées, aucun préjudice n’étant selon elles en tout état de cause démontré.
Sur ce,
Les demandes au titre de la concurrence déloyale présentées par la société CARRE BLANC DISTRIBUTION ayant été rejetées, seules les demandes en contrefaçon de marque formées par la société CARRE BLANC EXPANSION seront examinées.
Aux termes de l’article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle, « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée ».
En l’espèce, au regard des actes litigieux, il sera fait interdiction aux sociétés AMAZON de faire usage du signe « CARRE BLANC » dans la vie des affaires dans des conditions susceptibles de créer un risque de confusion dans l’esprit du public quant à la provenance des produits vendus ou la réalité de leur commercialisation sur le site amazon.fr.
N’ont été retenus comme contrefaisants que des actes opérés dans le cadre du référencement, naturel sur Google.fr, et payant par achat de mots-clés sur Bing.fr et Yahoo.com, stratégie de référencement mise en œuvre par la société AMAZON CORE EUROPE en tant que titulaire du nom de domaine. S’il est établi que le site litigieux est exploité par la société AMAZON EU et qu’il ne peut qu’être considéré que cette dernière bénéficie nécessairement du détournement de trafic induit par les campagnes de référencement contrefaisantes, aucun fait répréhensible ne peut pour autant être imputé directement à cette dernière société qui justifierait sa condamnation solidaire avec la société AMAZON CORE EUROPE.
Par ailleurs, si les sociétés CARRE BLANC formulent des demandes indemnitaires précises dans le dispositif de leurs écritures, celles-ci ne sont cependant étayées par aucune démonstration spécifique relative tant à la justification qu’au quantum des mesures réparatrices sollicitées, les demanderesses se contentant de rappeler leur position de leader et le chiffre d’affaires réalisé, et de soutenir que « La notoriété et la renommée de la marque ont un effet direct et certain sur l’attractivité du nom de domaine éponyme » et « La durée des actes de contrefaçon et l’absence de volonté de règlement amiable malgré des efforts pédagogiques importants doivent être prises en compte ».
Or, l’alternative offerte au titulaire de la marque contrefaite de solliciter une indemnité forfaitaire correspondant à une licence majorée ne dispense pas le demandeur lésé de son obligation de justifier un minimum du quantum de ladite indemnité, en indiquant notamment le taux de licence qu’il estime normalement applicable et l’assiette de redevance. Faute d’éléments mettant le tribunal en mesure de déterminer un éventuel préjudice économique, il ne sera alloué aucune indemnité sur ce chef de préjudice.
La contrefaçon de la marque « CARRE BLANC » a toutefois nécessairement causé un préjudice moral d’atteinte à cette marque, exposée à une certaine dilution aux yeux du consommateur, préjudice qui sera justement réparé par l’allocation d’une indemnité de 15 000 euros, outre une mesure de publication judiciaire, justifiée par la persistance de la société AMAZON EUROPE CORE à adopter une stratégie de référencement délictuelle, selon modalités au dispositif.
En revanche, la demande de communication d’informations relatives au taux de clic et au trafic suscité par les campagnes de référencement litigieuses, alors que l’indemnité forfaitaire sollicitée n’a pas de caractère provisionnel, n’apparaît ni utile en l’absence de réévaluation à venir du préjudice réel, ni justifiée. En tout état de cause, cette prétention n’est pas développée dans les motifs des conclusions des demanderesses, au titre des mesures sollicitées, de sorte que le tribunal n’en est pas saisi, conformément aux dispositions de l’article 768 alinéa 2 in fine du code de procédure civile selon lequel « Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ».
*
La société AMAZON EUROPE CORE, qui succombe au principal, supportera la charge des dépens et ses propres frais.
Les dépens ne comprenant que les seuls débours relatifs à des actes ou procédures judiciaires, les frais relatifs aux constats d’huissier non autorisés judiciairement ne peuvent être indemnisés à ce titre.
La société AMAZON EUROPE CORE sera par ailleurs condamnée à verser à la seule société CARRE BLANC EXPANSION, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qu’il est équitable de fixer à la somme de 15 000 (quinze mille) euros, en ce inclus les frais de constats d’huissier.
La société CARRE BLANC DISTRIBUTION, dont les demandes n’ont pas été accueillies, conservera en revanche la charge de ses propres frais irrépétibles.
L’équité commande par ailleurs que la société AMAZON EU SARL supporte également la charge de ses propres frais.
L’exécution provisoire étant justifiée au cas d’espèce et compatible avec la nature du litige, elle sera par ailleurs ordonnée.
DECISION
Le tribunal, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
REJETTE la demande de mise hors de cause des sociétés AMAZON EUROPE CORE SARL et AMAZON EU SARL ;
DÉBOUTE les sociétés AMAZON EUROPE CORE SARL et AMAZON EU SARL de leur demande en annulation de la marque française « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 dont la société CARRE BLANC EXPANSION est titulaire ;
DIT n’y avoir lieu à écarter des débats les procès-verbaux de constat versés à la présente procédure par les demanderesses ;
DIT qu’en reproduisant dans le titre et l’adresse URL de pages du site internet accessible via le nom de domaine dont elle est titulaire le signe « CARRE BLANC » d’une manière susceptible d’induire en erreur l’internaute sur la disponibilité de produits de linge de maison authentiques dans les pages concernées de la boutique hébergée par ce site, la société AMAZON EUROPE CORE SARL a commis des actes de contrefaçon de la marque « CARRE BLANC » n° 07 3 534 168 dont la société CARRE BLANC EXPANSION est titulaire ;
en conséquence,
FAIT INTERDICTION à la société AMAZON EUROPE CORE SARL de poursuivre de tels agissements, sous astreinte de 5 000 (cinq mille) euros par jour de retard à compter du 31e jour suivant signification de la présente décision, l’astreinte courant sur 3 mois ;
CONDAMNE la société AMAZON EUROPE CORE SARL à payer à la société CARRE BLANC EXPANSION la somme de 15 000 (quinze mille) euros en réparation de l’atteinte à sa marque ;
ORDONNE à titre de mesure complémentaire la publication, aux frais de la société AMAZON EUROPE CORE SARL, sur la page d’accueil du site internet , dans un bandeau de la largeur de la page positionné en haut de la page en lettres blanches sur fond noir de caractère Verdana taille 12 du texte suivant :
« Par jugement du 10 juin 2022, le tribunal judiciaire de Paris a jugé les pratiques de référencement de la société AMAZON EUROPE CORE SARL contrefaisantes de la marque « CARRE BLANC » n° 7 3 534 168 dont est titulaire la société CARRE BLANC EXPANSION. », pendant une durée ininterrompue de cinq jours, sous astreinte de 5 000 (cinq mille) euros par jour de retard à compter du 15e jour de la signification du présent jugement, l’astreinte courant sur 3 mois ;
SE RÉSERVE la liquidation des astreintes précitées ;
DIT ne pas être régulièrement saisi de la demande de communication d’informations ;
DÉBOUTE la société CARRE BLANC EXPANSION de ses autres demandes au titre de la contrefaçon de marque ;
DÉBOUTE la société CARRE BLANC DISTRIBUTION de sa demande au titre de la concurrence déloyale ;
DÉBOUTE les sociétés CARRE BLANC EXPANSION et CARRE BLANC DISTRIBUTION de leurs autres demandes indemnitaires ;
CONDAMNE la société AMAZON EUROPE CORE SARL à verser à la société CARRE BLANC EXPANSION la somme de 15 000 (quinze mille) euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en ce inclus les frais de procès-verbaux de constat ;
CONDAMNE la société AMAZON EUROPE CORE SARL aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Julien LACKER, avocat associé de l’AARPI GOMIS & LACKER AVOCATS, pour ceux dont il aura fait l’avance sans en avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
ORDONNE l’exécution provisoire, sauf en ce qui concerne la mesure de publication en ligne