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N° RG 22/01014 – N° Portalis DBVX-V-B7G-ODJR
Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond
du 18 janvier 2022
RG : 2022jc0262
S.C.I. DES ALIZES
C/
LA PROCUREURE GENERALE
S.A.R.L. COMPAGNIE FINANCIERE DE PARTICIPATION
S.E.L.A.R.L. [S] [N]
S.A.S. CIREME
BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONEALPES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 09 Mars 2023
APPELANTE :
S.C.I. DES ALIZES représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 16]
[Localité 7]
Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et plaidant par Me Jérôme HABOZIT, avocat au barreau de LYON, toque / 487
INTIMEES :
Mme LA PROCUREURE GENERALE
[Adresse 1]
[Localité 9]
S.A.R.L. COMPAGNIE FINANCIERE DE PARTICIPATION domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 13]
[Localité 10]
défaillante
S.E.L.A.R.L. [S] [N] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société COMPAGNIE FINANCIERE DE PARTICIPATION, désignée à ces fonctions par jugement du Tribunal de Commerce de Lyon du 31 décembre 2018,
[Adresse 6]
[Adresse 14]
[Localité 8]
Représentée et plaidant par Me Charles CROZE de la SELARL CARNOT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 757
S.A.S. CIREME prise en la personne de son représentant légal domicilié encette qualité au siège social
[Adresse 12]
[Localité 11]
non représentée
BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONEALPES représentée par ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 8]
non représentée
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 14 Février 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Janvier 2023
Date de mise à disposition : 09 Mars 2023
Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Aurore JULLIEN, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Patricia GONZALEZ, présidente
– Marianne LA-MESTA, conseillère
– Aurore JULLIEN, conseillère
Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
Par jugement du 13 septembre 2016, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Compagnie Financière de Participation (ci-après la société Cofipar) exerçant une activité de marchand de biens, Me [G], a initialement été désigné en qualité de liquidateur ayant été remplacé par la SELARL [S] [N] représentée par Me [N] suivant jugement du 31 décembre 2018.
Par ordonnance du 16 mai 2019, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Lyon a autorisé la vente à la SCI des Alizés de 18 lots appartenant à la société Cofipar dans un immeuble en copropriété dénommé La Dordogne, sis à [Localité 15] (63), au prix de 40.000 euros et sous les deux conditions suspensives suivantes:
– acquisition des autres lots de l’ensemble immobilier en copropriété dénommé La Dordogne,
– acquisition de l’immeuble sis à [Localité 15] (Puy-de-Dôme) – [Adresse 2] cadastré section AC numéro [Cadastre 4].
Le 24 juin 2021, la société Cofipar et la SCI des Alizés ont signé un compromis de vente sous conditions suspensives devant être réalisées au plus tard le 31 octobre 2021, dont notamment l’acquisition, par la SCI des Alizés, des 28 autres lots de l’ensemble immobilier à l’euro symbolique et sous réserve de l’accord des créanciers inscrits.
La réitération par acte authentique devait quant à elle intervenir au plus tard le 30 novembre 2021 avec une possibilité de prorogation au 31 décembre 2021.
Par courrier recommandé du 22 novembre 2021, la SELARL [S] [N], ès-qualité de liquidateur, a demandé à la SCI des Alizés de justifier sous huit jours de la réalisation des conditions suspensives.
Suivant courrier recommandé du 30 novembre 2021, le notaire, Me [I], répondait à Me [N] que les conditions suspensives étaient levées, précisant dans un courriel ultérieur du 16 décembre 2021, que la vente des autres lots avait été régularisée à l’exception de quelques-uns dont la vente interviendrait avant le 28 décembre 2021.
Par courriel en réponse du 20 décembre 2021, la SELARL [S] [N], ès-qualités, a fait savoir que les conditions suspensives n’étant pas levées au 30 novembre 2021, le compromis de vente était caduc et qu’il n’y avait pas lieu à réitération de la vente.
Le 23 décembre 2021, la SCI des Alizés a fait délivrer au liquidateur de la société Cofipar, une sommation d’avoir à comparaître en l’étude de Me [I] le 28 décembre 2021 à 9h pour la signature de l’acte authentique de vente.
Aux termes d’un courrier recommandé du 24 décembre 2021, la SELARL [S] [N] a de nouveau indiqué à la SCI des Alizés et à Me [I], par l’intermédiaire de son conseil, que les conditions suspensives n’ayant pas été réalisées dans les délais, le compromis de vente était caduc et qu’il n’y avait pas lieu à régularisation d’un acte authentique le 28 décembre 2021.
Par requête du 5 janvier 2022, Me [N], ès-qualité de liquidateur de la société Cofipar, a sollicité du juge-commissaire qu’il constate la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019 ayant autorisé la vente.
Par ordonnance du 18 janvier 2022, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Lyon a :
– constaté que les conditions suspensives énumérées dans l’ordonnance du 16 mai 2019 n’ont pas été régularisées dans les délais prévus au compromis du 24 juin 2021,
– constaté la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019,
– dit qu’il y a lieu de notifier le dépôt de la présente ordonnance à :
– M. [M]
– Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes
– Cireme
– SCI des Alizés
– dit que les dépens de la présente décision seront tirés en frais privilégiés de la procédure collective,
– ordonné le dépôt au greffe de l’ordonnance.
La SCI des Alizés a interjeté appel par actes des 3 et 4 février 2022, respectivement enregistrés sous les RG n°22/01014 et n°22/01045, lesquels ont fait l’objet d’une jonction sous le RG n°22/01014 par ordonnance du 17 février 2022.
Elle a parallèlement formé un recours le 3 février 2022 devant le tribunal de commerce de Lyon en application des dispositions de l’article R.621-21 du code de commerce, procédure dans le cadre de laquelle le tribunal a prononcé à sa demande, par jugement du 19 avril 2022, un sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 2 décembre 2022, fondées sur les articles L.642-18, L. 642-19-1 et R. 642-37-1 du code de commerce, 90, 561 et 562 du code de procédure civile, ainsi que sur les articles 1103 et 1304-4 du code civil, la SCI des Alizés demande à la cour :
– de déclarer régulier et recevable son recours à l’encontre de l’ordonnance déférée,
– d’annuler, sinon infirmer et à tout le moins réformer l’ordonnance déférée en ce que le juge-commissaire a constaté que les conditions suspensives énumérées dans l’ordonnance du 16 mai 2019 n’ont pas été régularisées dans les délais prévus au compromis du 24 juin 2021 et constaté la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019,
statuant à nouveau et y ajoutant,
– de rejeter la requête formée le 5 janvier 2022 par la SELARL [S] [N], représentée par Me [N], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar,
– de juger que le compromis de vente du 24 juin 2021 n’est pas caduc,
– d’enjoindre la SELARL [S] [N] représentée par Me [N], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, d’avoir à signer l’acte réitératif dudit compromis de vente en l’étude notariale de Me [I] située [Adresse 3] dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– de condamner la SELARL [S] [N] représentée par Me [N], ès-qualités, à lui payer une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner la SELARL [S] [N] représentée par Me [N], ès-qualités, aux entiers dépens de première instance et d’appel, qui seront liquidés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de la société Cofipar.
Sur la recevabilité, la SCI des Alizés observe :
– que l’ordonnance du juge commissaire en date du 18 janvier 2022 a été rendue au visa de l’article L.642-18 du code de commerce, puisqu’elle constate la caducité d’une ordonnance elle-même prise en application de ces dispositions,
– que conformément à l’article R.642-37-1 du code de commerce, la cour d’appel est dès lors compétente pour statuer sur son recours,
– que même si elle n’avait pas la qualité de partie à l’instance ayant donné lieu à l’ordonnance au sens de l’article 546 du code de procédure civile, la contestation est également ouverte aux personnes dont les droits et obligations ont été affectés par cette décision,
– qu’il est indéniable qu’en jugeant implicitement que le compromis de vente du 24 juin 2021 est caduc en raison de la non réalisation des conditions suspensives dans les délais impartis, l’ordonnance du 18 janvier 2022 a porté une atteinte effective à ses droits, ce qui caractérise son intérêt à agir.
Sur le fond, la SCI des Alizés fait valoir :
– que lorsqu’il est saisi par voie de requête, par le débiteur ou par le liquidateur judiciaire, d’une demande de nature contentieuse tendant à ce qu’il soit constaté la caducité d’une convention, le juge commissaire ne peut pas statuer sans avoir entendu ou dûment appelé le cocontractant,
– qu’il appartenait donc au juge commissaire de la convoquer avant de prendre sa décision, ce qui n’a pas été le cas,
– que contrairement à ce que prétend la liquidateur, la présentation des faits opérée par ses soins ne permettait pas au juge commissaire d’apprécier la situation, la requête ne faisant pas état des échanges de courriers et de mails postérieurs à la mise en demeure du 22 novembre 2021, ni de la sommation délivrée le 23 décembre 2021,
– qu’en outre, si l’article L.642-19 du code de commerce prévoit l’intervention du juge commissaire pour ordonner ou autoriser une vente de gré à gré de biens, aucun texte ne prévoit en revanche que le juge commissaire puisse constater la caducité de son autorisation au motif que l’acte réitératif n’a pas été signé,
– que de même, cette ordonnance du 18 janvier 2022 ne pouvait être rendue sur le même fondement que celle prise le 16 mai 2019, puiqu’elle n’a pas autorisé une quelconque vente,
– que le juge commissaire ne pouvait par conséquent pas constater la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019 au visa de l’article L.642-18 du code de commerce,
– qu’en raison de l’effet dévolutif de l’appel, la cour doit statuer sur la question de droit et de fait dont dépend la solution du litige, à savoir celle de la caducité ou non du compromis de vente autorisé par le juge commissaire, peu importe que celui-ci n’ait pas le pouvoir juridictionnel de statuer sur ce point,
– que dans le cas présent, le compromis de vente du 24 juin 2021 n’est pas caduc, dès lors qu’elle entend renoncer à se prévaloir des conditions suspensives stipulées dans son seul intérêt,
– qu’il convient de rappeler que les conditions suspensives énumérées dans le compromis de vente ont toutes été réalisées dans le délai indiqué, soit avant le 31 octobre 2021, à l’exception de la dernière, à savoir l’acquisition des autres lots de l’ensemble immobilier à l’euro symbolique et sous réserve de l’accord des créanciers inscrits,
– que cette condition suspensive avait pour seul objectif de lui permettre de devenir propriétaire de l’ensemble des lots du bien immobilier dans le cadre d’une opération globale de réhabilitation du bâtiment par la réalisation d’importants travaux et la prise en charge des préjudices supportés par l’immeuble voisin suite à la dégradation de l’ensemble immobilier depuis l’incendie de 2008 et l’interruption des travaux en 2013,
– que conformément aux dispositions de l’article 1304-4 du code civil, elle est donc libre de renoncer à cette condition suspensive, stipulée dans son intérêt exclusif, tant que celle-ci n’est pas accomplie ou n’a pas défailli,
– que les deux paragraphes figurant en page 12 du compromis sur le sort de l’avant-contrat en cas de non-réalisation des conditions suspensives ne font que reprendre les dispositions de l’article 1304-4 du code civil, sans y déroger, se bornant à préciser qu’il est impossible de renoncer à une condition qui a défailli,
– qu’en l’occurrence, au 31 octobre 2021, la condition suspensive n’était pas accomplie, mais n’avait pas pour autant défailli,
– qu’en effet, à cette date, les ventes des autres lots à son profit étaient en cours de réalisation, étant souligné que dès le jour de la signature du compromis de vente du 24 juin 2021, les 25 copropriétaires avaient d’ores et déjà donné leur accord écrit pour la vente de leur lot à l’euro symbolique à son profit,
– qu’eu égard au temps nécessaire pour obtenir la mainlevée des inscriptions hypothécaires, il n’a pas été matériellement possible de signer les 25 actes de vente avant le 31 octobre 2021,
– qu’elle a poursuivi ses diligences postérieurement au 31 octobre 2021, ce qui a permis l’acquisition de 12 lots au 15 décembre 2021, de 12 autres au 25 janvier 2022 et d’un 25ème au 7 février 2022,
– qu’elle procèdera à l’acquisition des 3 derniers lots dès la levée des inscriptions hypothécaires,
– qu’en l’absence de défaillance de la condition suspensive stipulée dans son intérêt exclusif, elle pouvait donc valablement y renoncer,
– que cette renonciation a d’ailleurs été rappelée par son notaire aux termes du courrier du 30 novembre 2021 informant le liquidateur qu’un rendez-vous de signature de l’ensemble des actes de vente était fixé au 28 décembre 2021,
– que la sommation, faite le 23 décembre 2021 à la SELARL [S] [N], d’avoir à comparaître à l’étude notariale de Me [I] le 28 décembre 2021 afin de procéder à la signature de l’acte de vente vaut en tout état de cause renonciation implicite de sa part à invoquer le bénéfice des conditions suspensives,
– que cette renonciation, formulée dès le 30 novembre 2021, est antérieure à la date fixée pour la réitération du compromis de vente,
– qu’au demeurant, le compromis prévoyait expressément la possibilité de repousser la date de signature de l’acte réitératif jusqu’au 31 décembre 2021, dans l’hypothèse où le notaire rédacteur n’aurait pas reçu toutes les pièces nécessaires à la rédaction de l’acte réitératif,
– que tel était le cas, puisque le notaire n’a reçu l’état hypothécaire établi par le service de publicité foncière de Clermont-Ferrand que le 4 décembre 2021, le certificat d’urbanisme dressé par le maire de [Localité 15] que le 7 décembre 2021, l’extrait de casier judiciaire de M.[R] [Y], gérant de la SCI des Alizés, que le 10 décembre 2021 et l’état des risques et pollution (ERP) que le 17 décembre 2021, soit postérieurement au 30 novembre 2021,
– qu’il s’ensuit que la durée du compromis a été prorogée de 15 jours à compter de la réception du dernier document nécesssaire,
– que la non-réitération de la vente par acte authentique avant le 31 décembre 2021 est donc exclusivement imputable au liquidateur judiciaire de la société Cofipar, de sorte que sa demande tendant à ce que soit constatée la caducité du compromis de vente ne pouvait être accueillie par le juge commissaire,
– que s’il est retenu que le compromis de vente n’est pas caduc, il y a lieu de condamner la SELARL [S] [N] à régulariser l’acte autenthique de vente dans un délai d’1 mois suivant la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, car celle-ci ne pouvait se prévaloir de la non-réalisation d’une condition suspensive stipulée au seul profit de l’acquéreur,
– que ce refus injustifié du liquidateur coïncide avec la réception, le 22 novembre 2021, d’un courrier d’une société Ott héritage en date du 19 novembre 2021, comportant une ‘offre de reprise des actifs immobiliers de la société Cofipar’, qui porte sur les mêmes lots que ceux ayant fait l’objet du compromis de vente du 24 juin 2021, moyennant un prix de 80.000 euros net vendeur ‘sans aucune condition suspensive’,
– que la société Ott Héritage précisait également qu’elle s’engageait à acquérir les autres lots de la copropriété dans la perspective d’une opération de reconstruction de l’ensemble immobilier,
– qu’elle ne pouvait toutefois réaliser ce projet si la SCI des Alizés parvenait à acheter les autres lots, d’où sa demande au liquidateur judiciaire de prendre rapidement position sur cette offre et d’obtenir l’autorisation du juge commissaire au plus tard le 10 décembre 2021, ‘date au-delà de laquelle elle sera caduque et privée de tout effet’,
– que cette offre de la société Ott Héritage permet de mieux comprendre les raisons pour lesquelles le liquidateur a soudainement refusé de signer l’acte de vente et sollicité que soit constatée la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019,
– qu’en tout état de cause, la société Ott Héritage ne pourra réaliser l’opération immobilière prévue, dès lors qu’à ce jour, la SCI des Alizés est propriétaire de tous les autres lots de l’ensemble immobilier, à l’exception de 3,
– qu’elle a également engagé des frais importants pour réaliser chacune de ces ventes par acte notarié, outre ceux engagés pour l’étude de la réhabilitation et l’évaluation des préjudices causés aux immeubles voisins à la suite du sisnitre survenu en 2008,
– qu’il est également urgent qu’elle puisse commencer les travaux, compte tenu de l’état de ruine dans lequel se trouve l’immeuble et des risques d’aggravation de cet état qui perdure depuis de nombreuses années.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 15 avril 2022, fondées sur les articles L. 642-18 et R. 642-37-1 du code de commerce, ainsi que sur l’article 1304-4 du code civil, la SELARL [S] [N] ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, demande à la cour :
– de juger recevables et fondées ses demandes,
– de juger recevable le recours de la SCI des Alizés devant la cour d’appel de Lyon,
– de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a constaté la caducité de l’ordonnance du juge-commissaire du 16 mai 2019 et du compromis du 24 juin 2021,
– de débouter, en conséquence, la SCI des Alizés de l’intégralité de ses demandes,
– de condamner la SCI des Alizés au paiement d’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance,
– subsidiairement, en cas de réformation, de débouter la SCI des Alizés de sa demande tendant à la voir condamner sous astreinte à régulariser l’acte authentique et réitératif de vente.
Sur la recevabilité, La SELARL [S] [N] expose :
– que l’ordonnance du 18 janvier 2022, intervenue au visa de l’article L.642-18 du code de commerce est le prolongement et la suite de l’ordonnance du 16 mai 2019 ayant autorisé la réalisation d’actifs en liquidation judiciaire, sous conditions suspensives, sur le fondement du même article du code de commerce,
– qu’en application de l’article R.642-17 du code de commerce, le recours contre cette ordonnance relative à la réalisation d’actifs en liquidation judiciaire s’effectue dans les 10 jours de la notification par le greffe, de sorte que l’appel formé par la SCI des Alizés est recevable,
Sur le fond, la SELARL [S] [N] soutient :
– qu’en vertu des articles L.642-18 et L.642-19 du code de commerce, le juge commissaire est investi du pouvoir juridictionnel, en liquidation judiciaire, d’autoriser les cessions d’actifs immobiliers,
– que l’ordonnance rendue le 16 mai 2019 par le juge commissaire a autorisé la cession des biens immobiliers détenus par la société Cofipar sous différentes conditions suspensives fixées par la SCI des Alizés,
– que le compromis notarié régularisé le 24 juin 2021 entre elle-même et la SCI des Alizés reprend ces conditions suspensives, à savoir l’acquisition, d’une part des autres lots de l’ensemble immobilier, d’autre part de l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 15],
– que ce compromis précisait qu’en cas de non-réalisation des conditions suspensives, l’acquéreur ne pouvait y renoncer unilatéralement et le compromis serait automatiquement anéanti,
– qu’il stipulait également qu’à défaut de réalisation des conditions suspensives avant le 31 octobre 2021, le compromis serait caduc à cette date,
– que les conditions suspensives ne s’étant pas réalisées au 31 octobre 2021, elle s’est vu contrainte de saisir le juge commissaire aux fins qu’il prononce la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019,
– que le juge commissaire a statué dans les limites de son pouvoir juridictionnel, dès lors que cette ordonnance constitue le prolongement de la décision rendue le 16 mai 2019 sur le fondement de l’article L.642-18 du code de commerce,
– que si par extraordinaire, la cour venait à considérer que le juge commissaire n’avait pas le pouvoir juridictionnel de constater la caducité de l’ordonnance du 16 mai 2019, elle annulera l’ordonnance du 18 janvier 2022, laissant ainsi les parties en l’état de l’ordonnance initiale du 16 mai 2019,
– qu’en effet, s’il est retenu que le juge commissaire n’avait pas le pouvoir pour statuer sur les suites de l’autorisation précédemment donnée, il n’a pas davantage celui de statuer sur la validité éventuelle du compromis ou sur l’exécution forcée de la vente,
– qu’en tant que juridiction d’appel du juge commissaire, la cour ne peut en effet avoir plus de pouvoirs juridictionnels que ce dernier, de sorte qu’en cas d’annulation de l’ordonnance, elle ne pourra que débouter la SCI des Alizés de toutes ses autres demandes, celle-ci devant être renvoyée à saisir la juridiction compétente pour statuer sur sa demande d’exécution forcée de la vente,
– que dans le cadre de la requête en caducité, elle a porté à la connaissance du juge commissaire la mise en demeure aux fins d’obtention des justificatifs relatifs à la réalisation des conditions suspensives avant la date fixée par l’ordonnance du 16 mai 2019 permettant ainsi à ce dernier d’apprécier la situation,
– que contrairement à ce qu’elle prétend, la SCI des Alizés ne pouvait renoncer au bénéfice des conditions suspensives prévues au compromis de vente et devant être réalisées au plus tard le 31 octobre 2021,
– qu’en effet, le compromis précise bien qu’en cas de non-réalisation des conditions suspensives avant le 31 octobre 2021, l’acquéreur ne peut y renoncer unilatéralement et que le compromis est alors automatiquement anéanti,
– que si par extraordinaire, la cour estimait que la SCI des Alizés pouvait renoncer au bénéfice des conditions suspensives, cette dernière ne produit aucune pièce par laquelle elle précise y renoncer, sachant que la sommation du 23 décembre 2021 ne peut s’analyser en une renonciation implicite au bénéfice des conditions suspensives, dans la mesure où elle n’y fait aucune référence et n’est accompagnée d’aucun projet d’acte réitératif faisant état de cette renonciation,
– qu’au contraire, la sommation s’inscrit dans la suite d’échanges au cours desquels la SCI des Alizés et Me [I] affirmaient, contre l’évidence, que les conditions suspensives étaient réalisées, nonobstant le fait que certaines ventes seraient conclues ultérieurement,
– qu’en tout état de cause, cette sommation, à supposer qu’elle vale renonciation au bénéfice des conditions suspensives, est privée d’effet, puisqu’elle a été signifiée le 23 décembre 2021, soit postérieurement au 30 novembre 2021, date butoir fixée pour la réitération,
– qu’il n’existe aucune raison de retenir le 31 décembre 2021 comme date butoir de réitération, la SCI des Alizés ne justifiant d’aucune manière qu’au 30 novembre 2021, il manquait une pièce au notaire pour passer les actes, ce qui justifierait l’application de la clause relative au report de la date butoir,
– que l’état des risques et pollution, commandé le 17 décembre 2021 et obtenu le jour-même, ne constitue donc pas une pièce demandée avant le 30 novembre 2021 et reçue postérieurement.
La société Cofipar, à laquelle la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 24 février 2022 (article 659 du code de procédure civile), n’a pas constitué avocat.
La société Cireme, à laquelle la déclaration d’appel et les dernières conclusions de l’appelante ont été signifiées à personne habilitée par actes des 24 février 2022 et 6 décembre 2022, n’a pas constitué avocat.
La société Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes, à laquelle la déclaration d’appel et les dernières conclusions de l’appelante ont été signifiées à personne habilitée par actes des 22 février 2022 et 6 décembre 2022, n’a pas constitué avocat.
Le Ministère Public, intimé, n’a pas déposé d’observations.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 15 décembre 2022, les débats étant fixés au 5 janvier 2023.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l’appel
En vertu de l’article L.642-18 alinéa 3 du code de commerce, le juge-commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu’il détermine.
Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article R.642-37-1 du même code que le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l’article L.642-18, qui est formé devant la cour d’appel, est ouvert aux parties et aux personnes, dont les droits et obligations sont affectés par ces décisions dans les dix jours de leur communication ou notification.
En l’espèce, l’ordonnance rendue le 18 janvier 2022 par le juge-commissaire statue sur les suites d’une précédente décision du 16 mai 2019 ayant autorisé la cession de gré à gré, sur le fondement de l’article L.642-18 précité, d’un immeuble dont la société Cofipar est propriétaire, de sorte qu’il y a lieu de considérer qu’elle a également été prise en application de ce texte.
Conformément à la position commune des parties sur ce point, il s’ensuit que l’appel de la SCI des Alizés à l’encontre de cette ordonnance du 18 janvier 2022 formé dans les 10 jours ayant suivi sa notification, doit être déclaré recevable, étant souligné que celle-ci a nécessairement un intérêt à agir, puisqu’elle est personnellement partie aux opérations de réalisation de l’actif immobilier, objet de la décision.
Sur le fond
Il est au préalable rappelé que la cour n’est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes. Il lui appartient d’examiner en premier lieu les prétentions des parties dont l’accueil est de nature à influer sur la solution du litige, sans s’arrêter à l’ordre dans lequel elles sont présentées, dès lors qu’elles tendent toutes à la même fin. A ce titre, la cour examinera d’abord la demande de d’annulation de l’ordonnance du 18 janvier 2022 fondée sur l’excès de pouvoir commis par le juge-commissaire.
A cet égard, il convient d’observer que si l’article L 642-18 alinéa 3 du code de commerce énonce que le juge-commissaire autorise, aux prix et conditions qu’il détermine, la vente de gré à gré des biens immobiliers du débiteur si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, aucun texte ne prévoit en revanche que ce même juge puisse connaître des difficultés d’exécution de sa décison d’autorisation et statue sur la caducité du compromis de vente régularisé sur le fondement de cette autorisation.
Il appartient en effet au seul juge du tribunal judiciaire d’apprécier si les conditions suspensives d’un compromis de vente sont ou non réalisées et d’en tirer les conséquences juridiques, à savoir caducité ou exécution forcée.
En l’occurrence, force est de constater qu’en retenant que les conditions suspensives énumérées dans l’ordonnance du 16 mai 2019 n’ont pas été régularisées dans les délais prévus au compromis du 24 juin 2021, le juge-commissaire a excédé les limites de son pouvoir juridictionnel et statué hors les limites de ses attributions, ce qui doit conduire à l’annulation de l’ordonnance déférée.
Si par l’effet dévolutif de l’appel la cour est saisie au fond de la requête du liquidateur ayant saisi le juge-commissaire, il n’en demeure pas moins que cet effet dévolutif ne saurait avoir pour conséquence de conférer à la cour plus de pouvoirs que ceux reconnus au juge-commissaire.
C’est pourquoi, il y a lieu de rejeter la requête de Me [N], ès-qualité de liquidateur judiciaire, aux fins de voir constater la caducité du compromis de vente du 24 juin 2021 et de l’ordonnance du 16 mai 2019.
De même, convient-il de rejeter la demande de la SCI des Alizés tendant à enjoindre la SELARL [S] [N], représentée par Me [N] ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, d’avoir à signer l’acte réitératif dudit compromis de vente en l’étude notariale de Me [I] située [Adresse 3] dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective. L’équité commande par ailleurs de ne pas faire droit aux demandes d’indemnisation respectivement formulées par la SCI des Alizés et la SELARL [S] [N] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Annule l’ordonnance rendue par le juge commissaire le 18 janvier 2022,
Statuant en vertu de l’effet dévolutif,
Rejette la requête formée le 5 janvier 2022 par la SELARL [S] [N], représentée par Me [N], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, aux fins de voir constater la caducité de l’ordonnance rendue le 16 mai 2019 par le juge-commissaire,
Rejette la demande de la SCI des Alizés tendant à enjoindre la SELARL [S] [N], représentée par Me [N] ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, d’avoir à signer l’acte réitératif dudit compromis de vente en l’étude notariale de Me [I] située [Adresse 3] dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
Dit que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective,
Déboute la SCI des Alizés et la SELARL [S] [N], représentée par Me [N], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Cofipar, de leurs demandes sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE