Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 02 FEVRIER 2023
N° RG 19/03206 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LCF7
SARL PROMOBAT
c/
Syndicat des copropriétaires DE LA RESIDENCE MAISON COLONIALE
SARL ADVENTO
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 04 juin 2019 (R.G. 11/11814) par la 7ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 07 juin 2019
APPELANTE :
La SARL PROMOBAT société à responsabilité limitée unipersonnelle, inscrite au RCS sous le numéro 410.048.755, ayant son siège social [Adresse 1], agissant poursuite et diligences par l’intermédiaire de son représentant légal
Représentée par Me MOUSSEAU substtiuant Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
Syndicat des copropriétaires DE LA RESIDENCE MAISON COLONIALE sise [Adresse 4] par son syndic la société AAGS [Adresse 3]) prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentée par Me Laurent SUSSAT de la SCP HARFANG AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
SARL ADVENTO, société à responsabilité limitée immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 433 281 235, dont le siège social est [Adresse 2]
Représentée par Me Philippe LIEF de l’AARPI GRAVELLIER – LIEF – DE LAGAUSIE – RODRIGUES, avocat au barreau de BORDEAUX
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS, société d’assurance mutuelle à cotisations variables dont le siège social est à [Adresse 5], prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Alexendra DECLERCQ de la SELARL AEQUO, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de Me Marc FLINIAUX, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 05 décembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Paule POIREL, Président,
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,
Madame Christine DEFOY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié du 15 novembre 2000, la société à responsabilité Promobat a acquis à Lège Cap-Ferret (3) un important immeuble situé [Adresse 4].
Des travaux ont été exécutés directement par la société Promobat mais également confiés à des entreprises extérieures dont la société ETPR, aujourd’hui dénommée la société CMR au titre du réseau d’eaux pluviales et d’une station de relevage et la société Aquitaine Air au titre du lot VMC, sous maîtrise d”uvre de la société Cap Architecture, désormais dénommée la société Advento, assurée auprès de la Mutuelle des Architectes Français (la MAF).
La société Promobat a fait établir le 9 octobre 2001 un règlement de copropriété contenant état descriptif de division de cet immeuble.
Au cours des années 2001 et 2002, la société Promobat a revendu en lots à différents acquéreurs les12 appartements aménagés dans cet immeuble, ainsi que des locaux annexes.
Invoquant des malfaçons et dysfonctionnements, le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble ‘La Maison Coloniale’ a obtenu, par ordonnance de référé du 13 juillet 2009, la désignation de M. [C] en qualité d’expert dont les opérations ont été étendues aux sociétés Cap Architecture, ETPR et Aquitaine Air par ordonnance de référé du 14 décembre 2009.
Alors que l’expertise était en cours, par une nouvelle ordonnance du 11 janvier 2010, le juge des référés a débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation sous astreinte de la société Promobat à produire différents documents tels que plans, compte rendus de réunion de chantier, procès-verbaux de réception et contrats d’entreprises susceptibles d’être intervenues dans le cadre d’une rénovation ou réfection de cet immeuble.
L’expert, M. [C], a déposé le 5 juillet 2010, son rapport ‘en l’état’, à défaut par le Syndicat des copropriétaires d’avoir versé une consignation complémentaire de 12 000 euros pour réaliser des sondages que cet expert considérait comme indispensables.
Par acte du 3 novembre 2011, le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble ‘La Maison Coloniale’ a saisi le tribunal de grande instance de Bordeaux de différentes demandes indemnitaires dirigées contre la société Promobat, mais également la société Cap Architecture, la société Aquitaine Air, outre une demande de désignation de M. [C] pour un contrôle de bonne fin des travaux de réfection.
Par acte du 28 novembre 2011, le Syndicat des copropriétaires a également fait assigner à des fins indemnitaires la société CMR au titre de son marché concernant le réseau d’eaux pluviales et la station de relevage.
Les deux instances ont fait l’objet d’une décision de jonction par le juge de la mise en état du 16 novembre 2012.
Saisi d’une demande de nouvelle expertise et de condamnation provisionnelle d’un montant de 47 840 euros TTC afin que soient réalisés les travaux de sondages tels que préconisés antérieurement par M. [C], le juge de la mise en état a, par ordonnance du 26 avril 2013, à nouveau désigné M. [C] en qualité d’expert avec notamment mission de reprendre son rapport du 5 juillet 2010, déposé en l’état, de poursuivre ses opérations par la réalisation des sondages nécessaires et de reprendre les réponses aux différents chefs de sa mission initiale en y apportant tous éléments complémentaires résultant de ses nouvelles opérations et toutes précisions utiles.
Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble ‘La Maison Coloniale’ était invité à consigner au greffe la somme de 20 000 euros avant le 14 juin 2013, et la société Promobat condamnée à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de provision, outre 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 19 juin 2015, le juge de la mise en état a ordonné à la société Promobat de payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble ‘La Maison Coloniale’ une nouvelle somme provisionnelle de 6 000 euros, rejeté les demandes plus amples et contraires des parties, dit que l’affaire serait rappelée à l’audience de mise en état du 27 novembre 2015, dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et condamné la société Promobat aux dépens de l’incident.
L’expert a déposé son rapport le 15 juin 2016.
Par acte du 19 avril 2017, la société Promobat a appelé en intervention forcée aux fins de garantie, la MAF.
Cette procédure a fait l’objet d’une jonction le 5 mai 2017.
Par jugement rendu le 4 juin 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
– déclaré irrecevables les pièces n° 41 communiquées par le syndicat copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ visée par le bordereau du 9 avril 2019,
-rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir du syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’,
– constaté la réception tacite et sans réserve de l’ouvrage à la date du 28 septembre 2001,
-condamné la société Promobat à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ les sommes de 57 456,25 euros en réparation du dommage décennal affectant le réseau EU/EV et de 947 705,74 euros au titre du dommage décennal consécutif à l’humidité en rez de jardin, indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et le prononcé du présent jugement,
– condamné la société Promobat in solidum avec la société CMR à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 17 028,00 euros au titre du dommage décennal affectant le réseau EP, indexée sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et le prononcé du jugement et dit que dans leurs rapports entre elles la société CMR garantira la société Promobat de l’intégralité de cette condamnation,
– condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 21 129,02 euros au titre d’une assurance dommages ouvrage,
– condamné la société ‘CMR in solidum avec la société CMR’ à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 425,70 euros au titre d’une assurance dommages ouvrage et dit que dans leurs rapports entre elles la société CMR garantira la société Promobat de l’intégralité de cette condamnation,
-condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de souscription des assurances de garantie obligatoires,
– dit que les provisions de 30 000 euros et 6 000 euros déjà perçues par le syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ viendront en déduction des condamnations prononcées par le présent jugement,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires, y compris au titre des recours en garantie,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement,
-condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ une indemnité de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
– débouté les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
– condamné la société Promobat aux dépens, en ce compris les frais de référé et d’expertises,
– dit que les dépens seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration électronique en date du 7 juin 2019, enregistrée sous le n° RG 19-03206, la société Promobat a relevé appel de cette décision limité aux dispositions ayant :
– rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir du Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’,
– condamné la société Promobat à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ les sommes de 57 456,25 euros en réparation du dommage décennal affectant le réseau EU/EV et de 947 705,74 euros au titre du dommage décennal consécutif à l’humidité en rez de jardin, indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et le prononcé du présent jugement,
– condamné la société Promobat à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 21 129,02 euros au titre d’une assurance Dommages ouvrage,
– condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de souscription des assurances de garantie obligatoires,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires, y compris au titre des recours en garantie,
– condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ une indemnité de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
– débouté les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
– condamné la société Promobat aux dépens, en ce compris les frais de référé et d’expertises.
Elle y a intimé le syndicat des copropriétaires de la résidence maison coloniale prise en la personne de son syndic la Sarl AAGS, la Sarl Advento et la Mutuelle des Architectes Français.
La société Promobat, dans ses dernières conclusions d’appelante en date du 16 novembre 2022, demande à la cour, de :
Réformer le jugement en ce qu’il :
– rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir du syndicat des copropriétaires de la résidence “La Maison Coloniale”,
– condamne la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence “La Maison Coloniale” les sommes de 57.456,25 euros en réparation du dommage décennal affectant le réseau EU/EV et de 947.705,74 euros au titre du dommage décennal consécutif à l’humidité en rez de jardin, indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et le prononcé du présent jugement,
– condamne la Société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence “La Maison Coloniale” la somme de 21 129,02 euros au titre d’une assurance Dommages ouvrage,
– condamne la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence “La Maison Coloniale” la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de souscription des assurances de garantie obligatoire,
– déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires, y compris au titre des recours en garantie,
– condamne la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence “La Maison Coloniale” une indemnité de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
– déboute les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
– condamne la société Promobat aux dépens, en ce compris les frais de référé et d’expertises,
Confirmer le jugement pour le surplus.
Statuant à nouveau,
A titre principal,
– débouter le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble dénommé Résidence « La Maison Coloniale » et toute partie concluant contre la société Promobat de l’intégralité de leurs demandes.
– ordonner le remboursement des sommes versées, à titre de provisions, par la société Promobat au syndicat des copropriétaires de l’immeuble dénommé Résidence « La Maison Coloniale», en exécution des ordonnances du juge de la mise en état des 26 avril 2013 et 19 juin 2015.
– condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble dénommé Résidence « La Maison Coloniale » à payer à la société Promobat une indemnité de 6 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
A titre subsidiaire,
– désigner tel nouvel expert qu’il plaira, aux frais de la société Promobat, avec mission de donner un avis sur les propositions de reprise proposées par les parties pour remédier définitivement aux désordres.
– surseoir à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise.
– condamner la société Advento et son assureur, la MAF à relever intégralement indemne la société Promobat des éventuelles condamnations prononcées contre elle.
– statuer ce que de droit sur les dépens.
La société Advento, dans ses dernières conclusions d’intimée en date du 17 novembre 2022, demande à la cour, au visa des articles 1147, 1382 (anciens) et 1792 du code civil, ainsi que de l’article L.113-17 du code des assurances, de :
Réformer le jugement rendu le 4 juin 2019 par la 7 ème chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir du Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘ La Maison Coloniale’;
Réformer le jugement rendu le 4 juin 2019 par la 7 ème chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu’il a retenu la responsabilité décennale de la SARL Promobat et fait droit aux demandes formulées par le syndicat des copropriétaires ;
Confirmer, en tout état de cause, le jugement rendu le 4 juin 2019 par la 7ème chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu’il a estimé que la responsabilité de la société Advento anciennement dénommée Cap Architecture ne pouvait être engagée, et débouté les parties de leurs recours en garantie ;
A titre subsidiaire, si le jugement entrepris devait être réformé et la responsabilité décennale de la SARL Advento retenue,
– condamner la MAF à la garantir de toutes condamnations qui pourrait être prononcées à son encontre et débouter la MAF de son refus de garantie ;
– condamner toute partie succombante à verser à la société Advento anciennement dénommée Cap Architecture une indemnité de 4 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens, en ce compris ceux de référé, les honoraires de l’expert judiciaire et ceux de la présente procédure avec distraction au profit de la Maître Philippe Lief, avocat associé de la AARPI Gravellier Lief de Lagausie Rodrigues conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La société MAF, assureur de la société Advento, dans ses dernières conclusions d’intimée en date du 18 novembre 2022, demande à la cour, de :
– juger l’appel de la SARL Promobat mal fondé ;
Par voie de conséquence,
Confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
– débouter la SARL Promobat, le Syndicat des copropriétaires de la Résidence ‘ La Maison Coloniale’ ainsi que toute autre partie au procès de toute demande dirigée à l’encontre de la Mutuelle des Architectes Français dès lors que les dommages ne sont pas imputables à la Société Advento et qu’en tout état de cause aucune faute au titre de son devoir de conseil ne peut être lui être reprochée ;
Subsidiairement,
– juger que la Mutuelle des Architectes Français est fondée à opposer une non garantie à la Société Advento en raison d’un exercice anormal de la profession d’architecte ayant généré un risque non couvert par la police d’assurance,
– débouter par voie de conséquence la société Advento de sa demande en condamnation à garantie à l’encontre de la Mutuelle des Architectes Français,
– débouter la société CMR de sa demande en condamnation à garantie dirigée à l’encontre de la Mutuelle des Architectes Français,
Plus subsidiairement encore,
– condamner la société Promobat à relever et garantir la Mutuelle des Architectes Français de toute condamnation prononcée à son encontre au visa de l’article 1382 ancien du code civil et 1240 du code civil,
– condamner la société CMR venant aux droits de la société ETPR à relever et garantir la Mutuelle des Architectes Français de toute condamnation prononcée à son encontre au visa de l’article 1382 ancien du code civil et 1240 du code civil pour les désordres relevant du lot VRD,
En tout état de cause,
– juger que la garantie de la Mutuelle des Architectes Français s’appliquera dans les limites et conditions de la police qui contient notamment une franchise opposable aux tiers lésés pour toute demande relevant des garanties facultatives,
– condamner la Société Promobat à 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens que le Cabinet AEQUO pourra recouvrer directement conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence Maison Coloniale, dans ses dernières conclusions d’intimé en date du 26 octobre 2022, demande à la cour, de :
Confirmer le jugement du 4 juin 2019 en ce qu’il a :
– déclaré le syndicat des copropriétaires recevable,
– constaté la réception tacite et sans réserve de l’ouvrage à la date du 28 septembre 2001, condamné Promobat à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 57 456,25 euros au titre des dommages affectant le réseau EU/EV et 947 705,74 euros au titre des dommages consécutifs à l’humidité en rez-de-jardin, sommes indexées sur l’indice BT01 de la construction,
– condamné in solidum Promobat et CMR à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 17 028,00 euros au titre du dommage affectant le réseau EP, somme indexée sur l’indice BT01 de la construction,
– condamné Promobat à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 21 129,02 euros au titre de l’assurance dommages ouvrage,
– condamné CMR à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 425,70 euros au titre de l’assurance dommages ouvrage,
– dit que les provisions allouées au syndicat des copropriétaires par les ordonnances des 26 avril 2013 et 19 juin 2015 viendront en déduction des sommes allouées,
– condamné Promobat à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10 000,00 euros au titre des frais irrépétibles,
– condamné Promobat aux dépens en ce compris les frais de référé et d’expertise.
Confirmer le jugement entrepris en tout ce qui n’est pas contraire aux présentes écritures,
Infirmant le jugement et statuant à nouveau :
Vu les articles 1792 et suivants du code civil,
– déclarer les sociétés Promobat et Advento responsables des dommages subis par le Syndicat des copropriétaires de la résidence La Maison Coloniale,
– condamner in solidum Promobat, Advento et la MAF au paiement des sommes suivantes:
‘ 4.516,47 euros au titre du défaut d’étanchéité de la terrasse extérieure,
– dire et juger que cette somme sera augmentée de l’intérêt légal à compter de l’assignation du 3 novembre 2011,
– condamner in solidum Advento et la MAF aux côtés de Promobat au paiement des sommes suivantes :
‘ 57 456,25 euros au titre du défaut de fonctionnement du réseau d’eaux vannes,
‘ 947 705,74 euros au titre de l’humidité du rez de jardin,
– condamner in solidum en deniers ou quittances Advento et la MAF aux côtés de Promobat et CMR au paiement de la sommes de :
‘ 17 028,00 euros au titre du défaut de fonctionnement du réseau d’eaux pluviales,
– dire et juger que les 3 postes qui précèdent seront actualisés sur la base de l’indice BT01 de la construction entre le dépôt du rapport d’expertise judiciaire et l’arrêt à intervenir,
– condamner in solidum Promobat, Advento et la MAF au paiement des sommes suivantes :
‘ 10 000,00 euros au titre du trouble de jouissance,
‘ une somme équivalente à 5 % du montant cumulé des travaux de réparation au titre du coût de l’assurance dommages-ouvrage,
– condamner Promobat au paiement d’une somme de 20 000,00 euros en indemnisation du préjudice ressenti du fait de l’absence de souscription d’assurance dommages ouvrage et d’assurance décennale, l’une et l’autre obligatoires,
Ajoutant à la décision entreprise :
– condamner in solidum Promobat, Advento et la MAF au paiement d’une somme supplémentaire de 10 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– les condamner aux entiers dépens en ce compris le coût des procès-verbaux de constat d’huissier des 8 novembre 2008 et 19 décembre 2019.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 novembre 2022.
Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I – Sur la recevabilité des demandes du Syndicat
Le tribunal a reconnu la qualité à agir du Syndicat des copropriétaires en considérant que les diverses demandes de ce dernier concernent soit des parties privatives qui sont affectées par des désordres qui trouvent leur origine dans les parties communes, à savoir l’humidité du rez de jardin qui se répercute dans tous les celliers et les cinq appartements qui y sont situés ainsi que le défaut d’étanchéité de la terrasse d’un appartement qui implique bien les parties communes et dont le coût a été pris en charge par la collectivité des copropriétaires mais aussi les remontées d’humidité depuis les parties communes, soit exclusivement les parties communes s’agissant notamment de la reprise des réseaux d’évacuation des eaux vannes, usées et pluviales.
La société Promobat et la société Advento font notamment valoir que le Syndicat des copropriétaires n’a pas qualité pour solliciter l’allocation de sommes relatives à la remise en état de parties privatives car la jurisprudence qui reconnaît à un syndicat des copropriétaires qualité pour agir en réparation des dommages trouvant leur origine dans les parties communes et affectant ensuite les parties privatives est limitée aux cas dans lesquels les désordres sont généralisés et causent les mêmes troubles à l’ensemble des copropriétaires, alors qu’en l’espèce, seuls quelques copropriétaires sont concernés par les désordres allégués par le syndicat des copropriétaires, alors que les devis retenus par l’expert (Sorreba) prévoit s’agissant de la reprise de l’humidité en sous sol des travaux de reprise des appartements concernés et le devis SIREC la reprise d’une terrasse privative.
Cependant, alors que sous l’empire de la loi du 21 juin 1938, le syndicat des copropriétaires n’était admis à agir que dans les limites de son objet, la jouissance et l’administration des parties communes, il est aujourd’hui plus largement qualifié, par l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, « notamment » pour « agir conjointement ou non avec un ou plusieurs (copropriétaires) en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble ». Le syndicat a donc qualité pour invoquer, dans l’intérêt collectif, « les droits afférents à l’immeuble », alors même que ces droits sont ceux des copropriétaires, comme dans le cas d’une atteinte aux parties communes ; dans ce cas il partage le droit d’agir avec les copropriétaires qui sont, en principe, eux-mêmes intéressés. Quand le préjudice est exclusivement individuel, l’action du syndicat est, au contraire exclue.
L’action individuelle est en effet exclusive et le syndicat ne peut agir lorsqu’il s’agit d’obtenir réparation d’une atteinte aux seules parties privatives. Mais, d’une manière générale, le syndicat a qualité pour agir en réparation des dommages trouvant leur origine dans les parties communes et affectant les parties privatives d’un ou plusieurs lots et en cas d’atteinte aux parties communes, l’intérêt personnel peut exister en même temps que l’intérêt collectif. Les deux actions sont alors concurrentes.
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges, ayant relevé que le Syndicat ne sollicitait pas réparation de dommages affectant strictement les parties privatives, mais de désordres trouvant leur origine dans les parties communes, notamment une humidité en rez-de-jardin se répercutant dans tous les celliers et les cinq appartements situés à ce niveau, ainsi que le défaut d’étanchéité de la terrasse d’un appartement qui constitue bien une partie commune, et dont la collectivité des copropriétaires a pris en charge le coût, mais également que les importants travaux pour remédier aux désordres résultant de l’humidité en rez-de-jardin en ce qu’ils impliquent des opérations de démontage, enlèvement dépose et repose concernant les parties communes vont impliquer la remise en état de certains appartements, sans que pourtant ces interventions visent à remédier à un préjudice strictement personnel des copropriétaires, que de même la reprise des réseaux d’évacuation eaux vannes, usées et pluviales, concerne des parties communes, en a déduit que l’action du Syndicat des copropriétaires en indemnisation de ces désordres était recevable, ce en quoi, en l’absence de plus utile critique, le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité du Syndicat à agir.
II – Sur l’intervention de la société Promobat :
La question centrale posée à la cour est celle de déterminer si en vendant les 12 appartements de la résidence située à [Adresse 4], au cours des années 2001 et 2002, la société Promobat a fait une simple opération de marchand de biens ou si au contraire, en raison de la nature et de l’importance des travaux qu’elle y a effectués avant la revente, elle a revêtu la qualité de constructeur de l’ouvrage au sens des dispositions de l’article 1792-1 du code civil selon lequel, est réputé constructeur de l’ouvrage, notamment, toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire, en sorte que la société Promobat pourrait voir sa responsabilité recherchée sur le fondement des dispositions de l’article 1792 du fait des travaux accomplis.
Le tribunal a considéré qu’en l’espèce, les travaux litigieux pouvaient être qualifiés d’ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil au regard de leur ampleur, après avoir analysé les différentes pièces versées au débat ainsi que le rapport d’expertise.
Le Syndicat des copropriétaires soutient en effet que l’immeuble qui a été acquis par Promobat le 15 novembre 2000 était constitué de trois niveaux dont un rez de jardin semi enterré qui servait de garages et de hangars à bateaux, un rez de chaussée et un premier étage où se trouvaient des chambres annexes d’un hôtel, que la société Promobat a entrepris une véritable transformation de l’immeuble en y créant 12 logements indépendants, dont deux situés intégralement en rez de jardin de même que les chambres de trois autres appartement, alors que les premiers niveaux n’étaient pas habités en sorte qu’elle y a nécessairement accompli des transformations importantes pouvant être qualifiée de rénovation lourde.
Au contraire, la société Promobat qui conteste qu’il y ait eu changement de destination de l’immeuble et que le rez de jardin n’abritait que des garages ou hangars au moment de son acquisition, observant que les photographies produites par le syndicat des copropriétaires témoignent de ce que les ouvertures correspondant à des logements existaient déjà avant son acquisition, soutient n’avoir jamais eu la qualité de constructeur, ni de promoteur, et qu’ainsi elle n’a effectué aucune rénovation lourde s’étant contentée de réaliser de menus travaux de rafraîchissement et de cloisonnement intérieurs ayant donné lieu à une déclaration de travaux déposée le 5 janvier 2001, n’étant intervenue qu’en qualité de revendeur et non de promoteur (constructeur), qu’elle n’a pas davantage revendu les appartements en l’état futur d’achèvement et qu’elle n’a fait appel que de manière très ponctuelle à des entreprises extérieures pour les lots spécialisés, que les travaux qu’elle a fait réaliser étaient de faible ampleur n’ayant pas nécessité la dépose d’un dossier de permis de construire, ni ne relevaient de l’obligation d’assurance dommages-ouvrage.
Ainsi que le relevait déjà le premier juge, la société Promobat critique fortement le rapport de l’expert mais n’en sollicite pas davantage devant la cour la nullité, se contentant de solliciter à titre subsidiaire la désignation d’un nouvel expert ayant pour mission uniquement de reprendre les chiffrages s’agissant des travaux de reprise dont elle juge le montant excessif.
Il appartiendra à la cour, ainsi que l’avait rappelé le premier juge, de statuer sur les demandes qui lui sont présentées au regard notamment du rapport d’expertise par lequel elle n’est pas liée.
Il appartient par ailleurs au Syndicat des copropriétaires qui entend voir jouer la garantie décennale des constructeurs de rapporter la preuve que la société Promobat n’a pas simplement réalisé une opération de marchand de biens en revendant les appartements de la résidence après quelques travaux de réaménagement mais a au contraire réalisé une opération de promotion immobilière impliquant une restauration lourde de l’immeuble.
Il convient d’observer que la notion d’ouvrage ne correspond pas nécessairement à la notion de bâtiment et qu’en dehors de la construction d’un immeuble, des travaux peuvent constituer un ouvrage et notamment d’importants travaux de rénovation ou de réhabilitation d’un ensemble immobilier, le tribunal ayant justement observé qu’est assimilée à la construction au sens des dispositions de l’article L 262 du code de la construction et de l’urbanisme la rénovation lourde et d’ampleur d’un bâtiment déjà existant, en sorte que des travaux réalisés sur l’existant peuvent pareillement engager la responsabilité décennale des constructeurs.
Il en va notamment ainsi lorsque des travaux impliquent un apport de matière sur les existants, ou en présence d’une rénovation d’envergure impliquant une modification de la structure de l’immeuble.
En l’espèce, il est constant que la société Promobat qui a réalisé ou fait réaliser des travaux dans l’immeuble n’a déposé pour ce faire aucun dossier de permis de construire mais a effectué une simple déclaration de travaux en date du 2 janvier 2001 laquelle mentionnait ‘modification de l’aspect extérieur d’une construction existante’ et au titre de la description des travaux projetés ‘bardage bois, peintures, pose de nouveaux garde-corps’.
De même les actes de vente des 12 appartements ne contiennent aucune déclaration du vendeur concernant des travaux qu’il y aurait effectués ou fait exécuter, ni aucune attestation de ce qu’il n’aurait pas effectué de tels travaux dans les dix dernières années.
Ces éléments, en ce qu’ils émanent du maître de l’ouvrage lui même, ne constituent qu’un indice de la nature des travaux accomplis, susceptibles de tomber sous la preuve contraire.
Or, en l’espèce, alors que la société Promobat indique avoir fait appel très ponctuellement à des entreprises, d’ailleurs pour des travaux distincts de terrassement (ETPR) et de VMC (Aquitaine Air) , elle convient à tout le moins avoir eu recours à un maître d’oeuvre et si elle soutient avec lui que sa mission était restreinte, sans produire aux débats le contrat de maîtrise d’oeuvre, elle convient également que lui avait été notamment confiée une mission OPC comprenant la coordination et le pilotage, supposant nécessairement l’intervention de plusieurs entreprises, ce qui n’apparaissait d’ailleurs pas nécessaire au vu de la seule intervention des entreprises ETPR et Aquitaine Air qui n’intervenaient pas dans la même sphère et dont les travaux (pose d’une VMC et terrassement) n’avaient pas à être coordonnés.
Et le tribunal a justement relevé que l’ordre de service concernant ETPR sur lequel la société Promobat apparaissait sous la qualité de maître de l’ouvrage, portait le n° 11 tandis que celui d’Aquitaine Air portait le n° 5, ce dont il s’évinçait que 9 autres entreprises s’étaient vues confié un ordre de service pour le même chantier. Cependant, ces neuf autres ordres de service ne sont pas davantage produits alors que la société Promobat ne s’explique pas sur la numérotation de ces ordres de mission.
Il résulte d’ailleurs de l’ordre de mission ETPR , devenue CMR, que celle-ci s’était vue confiés, selon devis en date du 11 avril 2001, des travaux de terrassement, avec réglage du fond de forme, mise en place d’un réseau d’évacuation des eaux pluviales et des fondations, qui ne constituent pas uniquement des travaux de second-oeuvre et la société Advento atteste à tout le moins que la société Promobat a revu les cloisonnement et embellissements intérieurs, refait l’installation sanitaire électrique et téléphonique, isolé les combles, mis en oeuvre une VMC et aménagé les extérieurs, ce qui ne correspond pas uniquement à des travaux de rafraîchissement et de recloisonnement intérieurs.
Si les photographies produites aux débats par le Syndicat des copropriétaires, dont le tribunal a relevé qu’elles mettaient en évidence la création de fenêtres et la fermeture de certaines ouvertures impliquant des travaux ayant touché à la structure de l’immeuble et dont il indiquait que l’authenticité et la réalité n’étaient pas contestées, ne sont effectivement pas datées, elles s’inscrivent cependant à l’ évidence dans un contexte de rénovation d’un immeuble qui apparaît par ailleurs inoccupé ou peu entretenu sur lequel des ouvertures récentes ont été pratiquées laissant entrevoir des impacts sur le pourtour des ouvertures et la présence de fenêtres neuves, notamment en rez de jardin, tandis que d’autres apparaissent avoir été rebouchées. Par ailleurs, les photographies 38-1 et 38-8 (pièce n°6 de la société Promobat) montrent un immeuble en chantier sur lequel des linteaux sont posés en vue de la réalisation du bardage objet de la déclaration de travaux de la société Promobat, avec la présence d’une grille portant un panonceau interdisant l’accès au public pour cause de chantier permettant d’affirmer que ces photographies sont concomitantes des travaux en litige entrepris par la société Promobat.
Ainsi, alors que la société Promobat ne produit pas l’ensemble des documents contractuels permettant d’appréhender l’importance et la nature des travaux accomplis sur l’immeuble, les éléments sus relevés dont il résulte avec certitude que de nombreuses autres entreprises ont été missionnées permettent de retenir une véritable réticence de sa part et d’inscrire les travaux réalisés par la société Promobat dans un’programme immobilier’ ou une ‘réalisation’ ainsi que le mentionnaient les plaquettes publicitaires de vente des appartements de la Résidence et dont le tribunal a justement évincé que l’opération à laquelle s’était livrée la société Promobat n’était pas qu’une simple intervention en qualité de marchand de biens après avoir effectué de menus travaux de rafraîchissement ou de recloisonnement intérieur.
Il ressort en définitive de l’ensemble que la société Promobat a entrepris une rénovation lourde de l’immeuble ayant impliqué des modifications de la structure (ouvertures) mais également des travaux extérieurs de gros oeuvre (fondations, terrassement), qu’elle y a fait intervenir 11 entreprises sous le pilotage et la coordination de la société Advento. Elle aurait dû se faisant déposer un dossier de permis de construire et, en sa qualité de maître de l’ouvrage, souscrire une garantie dommages-ouvrage, en sorte qu’elle ne peut tirer argument de ce qu’elle ne l’a pas fait pour tenter de convaincre la cour de la moindre envergure des travaux réalisés.
Dans ce contexte, elle ne peut davantage invoquer l’absence de CCTP, de dossier de consultation des entreprises ou de compte rendus de chantiers, alors qu’au regard notamment des deux ordres de mission produits et de la mission de coordination et de pilotage confiée à la société Advento, soit ces documents ont existé et ne sont volontairement pas produits, soit ils auraient dû exister.
Enfin, le fait que des ouvriers de Promobat aient pu travailler sur le chantier sans autre précision, ce qui ne ressortirait que de trois feuillets mobiles versés aux débats par la société Promobat, parfaitement inexploitables, alors qu’aucune indication de la fréquence de leur intervention, de son ampleur, de la nature des travaux confiés ou de leur lieux n’y est mentionnée, n’est pas de nature à écarter la notion de rénovation lourde confiée à des entreprises extérieures sous la maîtrise d’oeuvre complète de la société Advento.
Il s’ensuit également que du fait de ces travaux sur les existants, la société Promobat est susceptible d’engager sa responsabilité décennale pour tout désordre de cette nature, et il convient en conséquence d’examiner chacun des désordres, le jugement entrepris n’étant par ailleurs pas critiqué en ce qu’il a retenu une réception tacite de l’ouvrage à la date du 28 septembre 2001, à laquelle la société Promobat a pris possession des lieux puis les a intégralement revendus en lots, sans rester redevable de sommes d’argent ‘dans des conditions dépourvues d’équivoque’.
III – Sur les responsabilités et dommages :
Le premier juge a justement relevé que si l’expert avait pu manifester plus ou moins ouvertement son scepticisme quant à l’absence de plans, de comptes rendus de chantier produits par Advento, il ne l’a fait qu’en regard de constatations techniques précises qui ne sauraient être remises en cause, n’étant pas techniquement prises en défaut, dont il ressortait que les désordres étaient les suivants :
– non conformité et dysfonctionnement du réseau d’évacuation des eaux pluviales, des eaux vannes et des eaux usées,
– humidité excessive, insalubrité des appartements situés au rez-de-chaussée,
-dysfonctionnement de la VMC, lequel a été spontanément réparé en cours d’expertise par la société Ervent Aquitaine venant aux droits d’Aquitaine Air,
-défaut d’étanchéité de la terrasse extérieure.
Il convient de rechercher les responsabilités en concours pour chacun des différents désordres.
1) le dysfonctionnement du système d’eau pluviales :
Le tribunal a retenu la responsabilité décennale de la société Promobat et de CMR de ce chef mais exclu celle de la société Advento qui n’était en charge que d’une mission OPC sans lien avec les travaux défectueux.
La société Promobat ne remet pas en cause le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée de ce chef, in solidum avec la société CMR, à payer au Syndicat des copropriétaires la somme de 17 028 euros mais, sollicitant ensuite la garantie de la société Advento, elle estime que la société Advento a manqué à son devoir de conseil en n’alertant pas le maître de l’ouvrage sur la nécessité de travaux complémentaires, tout en soutenant cependant que la société Advento n’avait qu’une mission limitée de maîtrise d’oeuvre à l’établissement d’un diagnostic technique puis d’un dossier de déclaration de travaux auprès de la mairie et enfin une mission de pilotage de quelques entreprises.
Le syndicat des copropriétaires sollicite également la condamnation de la société Advento et de son assureur la MAF in solidum avec Promobat et CMR de ce chef, l’expert ayant retenu la responsabilité de ces trois entreprises.
La société Advento comme la MAF demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu que celle ci n’avait qu’une simple mission d’ Ordonnancement, de Pilotage et de Coordination des sociétés ETPR (CMR) et Aquitaine Air, ce qu’en l’absence de documents contractuels établissant une mission plus étendue la cour ne pourrait que confirmer, ce d’autant que la société Promobat elle même confirme cette mission restrictive.
Cependant, il appartient à l’architecte de rapporter la preuve de l’étendue de sa mission lorsque celui-ci conteste être investi d’une mission totale de maîtrise d’oeuvre et la seule attestation de la société Promobat de ce chef, partie au litige, ne saurait être jugée probante s’agissant d’opposer au Syndicat des copropriétaires un refus de prise en charge, alors même que la société Promobat a intérêt à une telle position qui vient au soutien de son affirmation de la faible ampleur des travaux accomplis avant la revente des appartements, ce d’autant que tant la société Advento que la société Promobat étaient en mesure de communiquer le contrat de maîtrise d’oeuvre de la société Advento, ce dont elles se sont pourtant abstenues.
En l’état de sa carence probatoire, il sera retenu que la société Advento était investie d’une mission de maîtrise d’oeuvre complète, ce en quoi le jugement entrepris est infirmé.
Au regard de sa mission complète, la cour ne peut que retenir que celle ci est en conséquence également impliquée en qualité de maître d’oeuvre dans les travaux à l’origine de ce désordre dont la nature décennale n’est pas contestée, ni le montant des travaux y afférents, en sorte qu’elle sera condamnée in solidum avec la société CMR et la société Promobat au paiement de la somme de 17 028 euros au titre des désordres affectant le réseau EP.
Le jugement entrepris est en conséquence infirmé en ce qu’il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de ce chef envers la société Advento.
2 ) le désordre affectant le fonctionnement des eaux vannes :
Le tribunal a retenu la responsabilité de la société Promobat de ce chef pour des difficultés récurrentes d’écoulement des eaux usées intervenues depuis la réception et générant une impropriété de l’immeuble à sa destination.
La société Promobat, qui conteste être intervenue sur ce réseau, conteste pareillement sa responsabilité.
Le Syndicat des copropriétaires sollicite également la condamnation in solidum du maître d’oeuvre et de la MAF de ce chef.
Il est admis que la responsabilité décennale du constructeur peut être recherchée dans l’hypothèse de travaux neufs réalisés sur l’existant, notamment lorsque les travaux sont indissociables de l’existant ou lorsqu’il n’est plus possible de distinguer si les dommages sont occasionnés par l’existant ou par les travaux qui lui ont été adjoints, mais également dans le cadre de travaux de rénovation du fait de l’absence de contrôle des existants intégrés dans les travaux neufs caractérisant une erreur de conception des travaux neufs, quand bien même les désordres causés ne sont pas la conséquence directe de l’exécution des travaux neufs mais résultent des propres défauts des existants conservés en l’état.
Ainsi, le constructeur qui entreprend une opération de réhabilitation de l’ensemble d’un immeuble à usage de logements, constitutif d’un ouvrage, comme il a été retenu à l’encontre de la société Promobat, engage sa responsabilité pour n’avoir pas vérifié si l’état de l’existant était en mesure de recevoir les dits travaux sans causer de dommage à l’ouvrage.
Or, les photographies sus analysées, dans le contexte sus décrit, permettent de retenir que la société Promobat qui a créé des ouvertures en rez de jardin y a également créé des appartements qui n’existaient pas alors, mais qu’elle n’a pas cru devoir vérifier l’état du réseau EV dont l’écoulement s’avère affecté de graves désordres à l’origine de refoulements importants, les retenues étant accentuées par une pente inadaptée, phénomène rendant les logements impropres à leur destination, selon l’expert.
De surcroît, la société Promobat a fait réaliser des travaux sur l’existant impliquant modification de la structure et notamment les travaux sur le réseau d’eau pluviales et de terrassement extérieur qui ont pu modifier les pentes existantes et qui sont en lien avec les désordres de nature décennale affectant le réseau d’eaux vannes lesquels ont rendu l’immeuble impropre à sa destination.
Le tribunal est donc approuvé d’avoir retenu la responsabilité de plein droit de Promobat sur ce fondement mais, ainsi qu’il a été précédemment retenu, le jugement sera infirmé en ce qu’il a écarté la responsabilité du maître d’oeuvre au motif erroné que celui-ci n’était investi que d’une mission partielle de maîtrise d’oeuvre, son intervention dans le cadre d’une mission complète étant également en lien avec le dommage.
Le montant des travaux réparatoires n’apparaît pas en soi contesté, ainsi qu’il a été arrêté par l’expert, en sorte que le jugement est infirmé en ce qu’il a condamnée seule la société Promobat et seront au contraires condamnées in solidum, la société Promobat et la société Advento à payer au Syndicat des copropriétaires la somme de 57 456,25 euros.
3 ) Sur le défaut d’étanchéité de la terrasse :
Le tribunal a écarté toute condamnation de ce chef au motif qu’il n’était pas établi que les désordres ayant affecté la terrasse pour un montant de 4 516,47 euros et auquel il a été remédié par le propriétaire portaient atteinte à la destination de l’ouvrage, ‘seules des traces en plafond ayant été observées’.
Le Syndicat des copropriétaires sollicite la réformation de ce chef et la condamnation in solidum de la société Promobat avec la société Advento et la MAF à l’indemniser des travaux qu’elle a engagés, alors que la présence d’infiltrations à l’intérieur des appartements témoigne d’un défaut d’étanchéité extérieure, permettant de retenir une atteinte à la destination de l’ouvrage.
Cependant, ces seules traces ne permettant pas d’établir l’importance des infiltrations, résultant de ce défaut d’étanchéité et notamment si elles se sont accompagnées de la présence d’eau dans les appartements ou n’ont fait que laisser de simples traces en plafond, le jugement sera confirmé de ce chef.
4) l’humidité en rez de jardin :
Le tribunal a retenu que ce phénomène, caractérisé par une remontée d’eau par capillarité au dessus des dallages et dans les murs des appartements, celliers et chambres situés en rez de jardin du fait de la présence d’une nappe phréatique dont le niveau est souvent élevé et d’une absence d’étanchéité des murs et du dallage, apparu après réception en 2004, soit dans le délai d’épreuve, à la suite d’importantes intempéries, relevait de la responsabilité décennale de la société Promobat, rendant l’ouvrage impropre à sa destination.
Il a en effet justement retenu que les appartements ‘aménagés’ par Promobat étant dépourvus d’isolation verticale et horizontale étaient affectés d’une humidité constante et observé que selon l’expert, la remise en fonctionnement de la VMC n’y avait rien changé.
Contrairement à ce que soutient la société Promobat, cette humidité était pérenne dès lors que s’étant manifestée en 2004, l’expert [C] en a encore constaté la présence active lors de ses opérations d’expertise qui se sont déroulées en 2010, puis entre 2013 et 2016.
En effet en 2010 (page 30/104), l’expert avait constaté un fort taux d’humidité dans les appartements. Lors de sa première visite de sa seconde mission, en 2013( page 28/104), l’expert a noté notamment dans les appartements ‘l’humidité dans les pièces en sous sol existe réellement. Des déshumidificateurs fonctionnent en permanence. Des photos sont prises. Les pompiers sont intervenus à plusieurs reprises’ les murs des pièces concernées ‘s’effritent’ et ‘présentent des boursouflures’.
Lors d’une autre visite en octobre 2013, le problème était réglé dans l’appartement de M. [F] suite à l’intervention de Promobat ayant appliqué un revêtement étanche (page 36/104). Cependant, chez Mme [S], un déshumidificateur fonctionnait en permanence et l’humidité ‘n’est pas jugée excessive’ et en tous les cas ‘moindre que lors des précédentes visites de 2013′ (page 39/104), ce qui ne permet pas de considérer le problème résolu .
La présence d’humidité était encore active dans les caves situées au même niveau.
Par ailleurs, à la suite de sondage, l’expert a retenu (page 48/104) que lors de l’aménagement d’appartements dans d’anciens hangars à bateaux, aucune reconnaissance du dallage n’a été faite, ce qui ne correspond à aucune norme, que l’eau a été découverte à une profondeur très proche de la surface du dallage permettant de confirmer la proximité de la nappe phréatique. L’expert parle d’un sol saturé d’eau, d’une faible résistance dynamique et d’une situation pouvant fluctuer en sorte que la cause du phénomène était toujours présente. Il conclut à une humidité variable selon les saisons et à un phénomène ne pouvant s’arranger avec le temps.
Dès lors, ces désordres qui se manifestent par des remontées d’humidité dans les appartements ou celliers en rez de jardins, variables selon les saisons, portent atteinte à la destination de l’ouvrage et sont en lien avec l’intervention de la société Promobat ayant consisté à créer des appartements ou chambres en rez de jardin sur un sol gorgé d’eau.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il a, en présence d’un désordre rendant l’ouvrage impropre à sa destination, intervenu dans le délai d’épreuve, retenu la responsabilité décennale de la société Promobat, étant au contraire infirmé en ce qu’il a écarté la responsabilité décennale de plein droit de la société Advento, dont l’intervention dans le cadre d’une mission complète de maîtrise d’oeuvre est en lien avec le désordre.
VI – Sur le montant des travaux réparatoires afférents à l’humidité en rez de jardin:
Après avoir relevé tout le sérieux du rapport d’expertise qui retenait la nécessité de poser un cuvelage sous les appartements situés en rez de jardin ce qui impliquait notamment la reprise de désordres dans les appartements concernés, tels que chiffrés par l’expert à la somme de 947 705,74 euros TTC, lequel avait pris le soin d’analyser et de répondre aux dires de la société Promobat et notamment d’étudier le devis moindre de l’entreprise Lechelle, a fait droit en conséquence aux demandes indemnitaires du Syndicat des copropriétaires.
La société Promobat critique cette décision et demande subsidiairement l’organisation d’une expertise pour chiffrer le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres.
Elle fait valoir que si l’expert a communiqué à son sapiteur M [R] l’examen des deux devis des sociétés Etandex et Sorreba, il ne lui a pas communiqué pour examen celui de la société Lechelle dont se prévalait la société Promobat, qui présentait une proposition de traitement du sous sol au lieu de la mise en place d’un cuvelage pour un coût bien moindre que celui résultant des devis des deux autres entreprises, alors même que dans un premier temps l’expert avait envisagé dans son pré-rapport de faire venir cette entreprise (Lechelle) sur site pour obtenir ses explications sur les travaux envisagés.
Pour autant, l’expert a finalement rejeté la proposition Lechelle en répondant aux nombreux dires de Promobat (son rapport page 93 à 99/104) retenant que seule la réalisation d’un cuvelage étanche, par nature plus onéreuse, devait être retenue au regard de la présence d’une nappe phréatique entraînant toujours des pressions et d’une dalle basse de 8cm d’épaisseur et très peu armée, laquelle laissera passer les eaux de la nappe en fonction des variations atmosphériques, le pompage par station de relevage tel que proposé par la société Promobat n’étant pas suffisant, ce que l’expert explique techniquement dans son rapport (page 95/104). L’expert a d’ailleurs observé que la proposition de la société Lechelle ne mentionne nullement la présence d’une nappe phréatique et a jugé en conséquence qu’il n’avait pas de raison technique de soumettre ce devis à son sapiteur, par ailleurs économiste de la construction. Après avoir cependant finalement accepté de soumettre le devis de cette société à son sapiteur, il a finalement répondu que seule une protection extérieure des murs par un revêtement de type Delta MS était prévue par l’entreprise Lechelle, que la partie gros oeuvre du devis n’était pas conforme et que les réparations dans les appartements n’y étaient pas prévues.
Enfin, il résulte de son rapport que des délais ont été accordés à chaque fois pour répondre, que l’expert a répondu techniquement à l’ensemble des dires et que le devis Lechelle ne tient aucun compte de la nécessité de reprendre les appartements mais surtout qu’il ne peut constituer une solution fiable alors qu’il n’en résulte pas que la présence de la nappe phréatique, cause principale des désordres, y a été prise en compte.
De même, si tous ces appartements, chambres ou celliers situés en rez de jardin ne sont pas affectés pareillement par ces désordres, qui a laissé des traces sur les sols et murs, la pose d’un cuvelage entraîne la nécessité de reprendre l’ensemble des appartements ou chambre situés en rez de jardin, et impose une longue période pendant laquelle les logements devront être immobilisés.
Le tribunal est donc approuvé d’avoir retenu que seule la solution d’un cuvelage, même beaucoup plus coûteuse, était de nature à assurer une parfaite étanchéité des logements et celliers situés en rez de jardin et devait être retenue, sans qu’il soit en conséquence nécessaire d’ordonner un complément d’expertise.
Le jugement sera cependant, pour les mêmes motifs que précédemment, infirmé en ce qu’il a mis à la seule charge de la société Promobat le paiement de la somme de 947 705,74 euros TTC au paiement de laquelle elle sera tenue in solidum avec la société Advento.
Enfin, le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a assorti les différentes condamnations au paiement des travaux réparatoires de l’indice BT 01 depuis le 15 juin 2016 jusqu’à la date du jugement, ces sommes produisant intérêts au taux légal à compter du jugement.
V – Sur les recours en garantie :
1 ) Sur la garantie de la MAF :
Ayant écarté la responsabilité de l’architecte les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la demande du Syndicat des copropriétaires de condamnation in solidum de la MAF avec son assurée, la société Advento.
Le Syndicat des copropriétaires poursuit également ses demandes de condamnation in solidum à l’encontre de la MAF, assureur de la société Advento.
La MAF oppose une exception de non garantie tenant aux relations entre la société Promobat et la société Advento, la société Cap Architecture, désormais Advento ayant pour associé détenteur de 245 parts sur 500 M. [P] [I], lui même associé majoritaire détenteur de 499 parts de la société Promobat, le groupe [I] exerçant une activité de promotion immobilière intégrée par l’intermédiaire de ses différentes filiales, dont la société Advento et la société Promobat, en sorte que les intérêts croisés de ces deux sociétés remettent en cause l’indépendance de l’architecte dans l’exercice de sa mission, ayant généré un risque non couvert par la police.
Elle observe que l’article 1-1 de la police souscrite par Advento a pour objet la garantie des conséquences pécuniaires des responsabilités spécifiques découlant de sa profession d’architecte, telle que définie par la législation et la réglementation en vigueur et notamment par le décret du 20 mars 1980 qui impose que l’architecte exerce sa profession en toute indépendance sans confusion ni ambiguïté et évite toute situation où les intérêts privés sont tels que des choix pourraient être opérés au détriment de son client ou que son jugement ou sa loyauté envers celui-ci peut en être altérée et que de même, l’architecte est tenu de signaler au conseil de l’ordre tout lien avec une personne physique ou moral dont l’objet serait de tirer profit de la construction.
Elle en déduit que cette situation d’intérêts imbriqués est à l’origine d’une situation de confusion au détriment de l’assureur qui est en difficulté pour identifier précisément les missions confiées à l’architecte et se heurte à une certaine connivence entre Promobat et Advento qui a notamment pour conséquence une absence de pièces contractuelles.
Les sociétés Advento et Promobat estiment au contraire que la participation de M.[I] dans chacune des deux sociétés n’a pas fait perdre à chacune d’elles sa parfaite indépendance ainsi qu’il a été jugé notamment par la cour d’appel de Bordeaux alors que la MAF qui avait inscrit un pourvoi contre l’un de ces arrêts s’en est ensuite désistée, que la MAF n’établit pas que la société Advento aurait commis des actes dont il résulterait une perte d’indépendance de sa part vis à vis de la société Promobat ou qu’elle se serait comportée comme porteur de parts dans une société de construction, que M. [I] n’est qu’associé minoritaire dans la société Advento et que la MAF qui connaissait les spécificités structurelles du groupe [I] n’ignorait pas cette situation.
Or, s’agissant de l’indépendance dans laquelle la société Advento doit pouvoir exercer son activité, si elle n’est pas en soi nécessairement remise en cause par une participation minoritaire de M. [I], gérant du groupe [I], dans la société Cap Architecture devenue Advento (245 part sur 500) alors que M. [P] [I] détient 499 des 500 parts de la société Promobat, la société Advento comme la société Promobat ayant conservé leur personnalité morale, il apparaît qu’en réalité la société Advento, au regard de l’ampleur des travaux réalisés par la société Promobat et de la mission de maîtrise d’oeuvre complète dont elle était investie, se devait à tout le moins d’exiger du maître de l’ouvrage qu’il souscrive une assurance dommages-ouvrage et au regard des travaux de gros oeuvre, qu’il dépose un dossier de demande de permis de construire et de mener à bien l’ensemble de ses missions (APS, APD, CCTP, DCE… jusqu’à la réception). De même, au regard de l’ampleur des travaux de rénovation, il se devait de s’inquiéter de l’existant et notamment du fait de l’importance de la nappe phréatique, de l’efficacité des différents réseaux d’évacuation ainsi que de l’orientation des pentes extérieures. Or, il ne peut qu’être constaté qu’elle a sur ces points été totalement défaillante dans des circonstances permettant de caractériser une collusion avec le maître d’oeuvre, ce que confirme la position procédurale de ces deux sociétés et notamment leur refus conjoint de verser aux débats les documents contractuels, leurs conclusions convergentes pour retenir une mission de maîtrise d’oeuvre restreinte, malgré des intérêts apparemment contraires, dès lors que la société Promobat demandait à être relevée et garantie par la société Advento.
Il s’en évince que dans la recherche commune d’un intérêt financier immédiat, les liens unissant les deux sociétés n’ont pas permis à la société Advento d’exercer sa mission dans des circonstances normales, avec une indépendance suffisante vis à vis de sa cliente, ce qui ne lui a pas permis de la conseiller ainsi qu’elle le devait, ce au mépris des dispositions de l’article1-1 des conditions générales de sa police et des dispositions du décret du 20 mars 1980 régissant la profession d’architecte, et dans des circonstances ayant incontestablement aggravé le risque pour l’assureur.
Si la MAF connaissait l’implication de M.[I] dans la société Cap Architecture, rien n’indique qu’en 2001/2002, elle connaissait les liens de la société Promobat qui n’était pas son assurée avec ce même groupe.
Par ailleurs, cette clause ne crée pas un cas d’exclusion de garantie tenant aux circonstances particulières de réalisation du risque mais un cas de non garantie, le risque n’entrant pas dans les contours de la garantie, en sorte qu’il n’y a pas lieu de s’interroger sur son caractère formel et limité.
La société MAF est donc fondée à opposer au Syndicat des copropriétaires cette clause de non garantie et le syndicat des copropriétaires ne saurait prospérer en sa demande de condamnation in solidum de la MAF avec la société Advento, tout comme les sociétés Advento et Promobat succomberont en leur recours en garantie contre la MAF.
Il sera ajouté en ce sens au jugement entrepris.
2) sur le recours en garantie contre la société Advento :
Au regard de ce qui précède, la volonté conjointe et délibérée des sociétés Promobat et Advento de ne pas respecter les règles élémentaires de la construction, conduit au rejet de la demande de la société Promobat d’être relevée et garantie par la société Advento pour un manquement de cette dernière à son devoir de conseil.
VI – Sur les autres demandes d’indemnisation :
1) sur la demande au titre du trouble de jouissance :
C’est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande d’indemnisation d’un trouble de jouissance au motif qu’il n’est pas justifié d’un trouble de jouissance qui aurait été subi par l’ensemble des copropriétaires, ce en quoi le jugement est confirmé.
2) Sur le défaut d’ assurance dommages ouvrage :
Le tribunal a condamné la société Promobat à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 21 129,02 euros au titre de l’assurance dommages-ouvrage, soit 2,5 % du montant des travaux réparatoires sur les désordres afférents aux réseaux EU et EV et au titre de l’humidité en rez de jardin et a condamné in solidum Promobat et CMR au paiement d’une somme de 425,70 euros à ce titre pour le surplus, ayant rejeté la demande du Syndicat des copropriétaires à défaut de produire un devis.
Le Syndicat des copropriétaires demande dans le dispositif de ses conclusions de chiffrer le montant de l’assurance dommages-ouvrage à la somme de 5% des travaux réparatoires mais ne développe aucun moyen à l’appui de sa demande de réformation de ce chef ni n’en justifie par le moindre élément alors que le tribunal pointait déjà l’absence de production d’un devis.
Le jugement est donc confirmé de ce chef mais en revanche les sociétés Promobat et Advento seront condamnée in solidum au paiement de la somme de 21 129,02 euros, le jugement étant infirmé en ce qu’il a seule condamnée la société Promobat.
3) pour le préjudice ressenti du fait de l’absence d’assurance (DO et décennale):
Il s’agit d’un préjudice assimilable à un préjudice moral et il n’est pas établi que le Syndicat personne morale ait ressenti un préjudice du fait d’une absence d’assurance, ni que l’ensemble des copropriétaires ait ressenti un tel préjudice, qui plus est de la même manière.
Il convient en conséquence de débouter le Syndicat des copropriétaires de sa demande de ce chef.
Enfin le jugement est confirmé en ce qu’il a dit que les provisions allouées au Syndicat des copropriétaires par les ordonnances du 26 avril 2013 et du 19 juin 2015 sont à déduire des sommes allouées, soit 3 000 et 6 000 euros.
Au vu de l’issue du présent recours, le jugement entrepris est également infirmé en ce qu’il a seule condamnée la société Promobat aux dépens de première instance dont les frais de référés et d’expertise ainsi que les frais irrépétibles de première instance qui seront supportés in solidum par la société Promobat et la société Advento, ainsi que ceux du présent recours, les mêmes étant condamnées à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence la Maison Coloniale une somme de 6 000 et la société Promobat sera condamnée à payer à la MAF une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour
Infirme partiellement le jugement entrepris.
Statuant à nouveau des chefs réformés :
Condamne in solidum la Sarl Promobat et la Sarl Advento à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ les sommes de:
– 57 456,25 euros en réparation du dommage décennal affectant le réseau EV indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et la date du jugement,
– 57 456,25 euros au titre du défaut de fonctionnement du réseau d’eaux vannes,
– 947 705,74 euros au titre de l’humidité du rez de jardin,
sommes indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et la date du jugement,
– 21 129,02 euros au titre de l’assurance dommages-ouvrage sur les travaux de reprise.
Condamne in solidum la Sarl Advento avec la Sarl Promobat et la société CMR à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 17 028,00 euros au titre du défaut de fonctionnement du réseau d’eaux pluviales, indexées sur l’indice BT 01 de la construction entre le 15 juin 2016 et la date du jugement,
Condamne in solidum la Sarl Promobat et la Sarl Advento à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.
Confirme le jugement entrepris pour le surplus et y ajoutant:
Dit que la Mutuelle des Architecte Français est fondée à opposer à la Sarl Advento une clause de non garantie.
Déboute en conséquence les parties de toutes leurs demandes ou recours à son encontre.
Déboute la société Promobat de son recours envers la Sarl Adevento.
Rejette le surplus des demandes.
Condamne in solidum la Sarl Advento avec la Sarl Promobat à payer au Syndicat des copropriétaires de la résidence ‘La Maison Coloniale’ la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamne la Sarl Promobat à payer à la Mutuelle des Architectes Français la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamne in solidum la Sarl Advento avec la Sarl Promobat aux entiers dépens de première instance, comprenant les frais de référé et d’expertise, et d’appel avec distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.
La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE