Mannequin / Mannequinat : 30 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/03042

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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 39H

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 30 MARS 2023

N° RG 21/03042 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UP4Q

AFFAIRE :

Société DOBER IMPORT EXPORT

C/

S.A.R.L. C2J

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Février 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 1

N° RG : 2017F00133

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Dan ZERHAT

Me Franck LAFON

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société DOBER IMPORT EXPORT

[Adresse 5]

[Adresse 2]

BARCELONE (ESPAGNE)

Représentée par Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731et Me Jean-Claude BOUHENIC, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0861

APPELANTE

****************

S.A.R.L. C2J

RCS Nanterre n° 451 020 549

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 et Me Caroline GEORGES substituant à l’audience Me Chantal TEBOUL ASTRUC, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0235

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 28 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSE DU LITIGE

La société Dober Import Export, ci-après dénommée la société Dober, est une société de droit espagnol qui a été créée le 17 février 1997. Elle a pour activité la fabrication, la vente, la distribution en détail et en gros, et l’exportation de produits de cosmétique. Elle commercialise notamment la marque Byphasse sur le territoire français.

La SARL C2J Evoluderm, est une société de droit français. Elle a commencé son activité le 1er décembre 2003 et elle développe, elle aussi, en France et à l’export, sous la marque Evoluderm, une activité de fabrication, vente, distribution de produits de cosmétologie.

Estimant que depuis de nombreuses années, la société C2J imite de manière systématique ses catalogues, ses campagnes de publicité, les emballages de ses produits, ses stands de présentation mis en place dans les salons professionnels, sa communication sur les supports Facebook et Instagram, la société Dober a fait établir cinq constats d’huissier les 8 janvier, 8 mars, 31 mai, 9 juin et 16 septembre 2016 et a adressé le 20 octobre 2016 à la société C2J une mise en demeure d’avoir à cesser les actes de concurrence déloyale et de parasitisme.

Par acte du 30 décembre 2016, la société Dober a fait assigner la société C2J devant le tribunal de commerce de Nanterre.

Par jugement du 3 février 2021, le tribunal de commerce de Nanterre a :

– Dit recevable mais mal fondée l’exception d’incompétence soulevée par la société C2J Evoluderm exerçant sous l’enseigne « Evoluderm » et s’est déclaré compétent ;
– Débouté la société C2J Evoluderm exerçant sous l’enseigne « Evoluderm » de sa fin de non-recevoir ;

– Débouté la société Dober Import Export de ses demandes ;

– Débouté la société C2J Evoluderm exerçant sous l’enseigne « Evoluderm » de sa demande de dommages et intérêts ;

– Condamné la société Dober Import Export à payer à la société C2J Evoluderm exerçant sous l’enseigne « Evoluderm » la somme de 10.000 € à titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– Condamné la société Dober Import Export aux dépens.

Par déclaration du 11 mai 2021, la société Dober a interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 19 octobre 2022, la société Dober demande à la cour de:

– Confirmer la décision en ce qu’elle a jugé mal fondée l’exception d’incompétence soulevée par la société C2J Evoluderm et en ce qu’elle a débouté la société C2J Evoluderm de sa demande de fin de non-recevoir quant à la prescription qui serait acquise ;

– Infirmer la décision en ce qu’elle a débouté la société Dober Import Export de ses demandes et en ce qu’elle l’a condamnée au paiement de la somme de 10.000 € au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens et par conséquent,

– Constater les actes de concurrence déloyale et de parasitisme commis à l’encontre de la société Dober Import Export par la société C2J Evoluderm ;

– Condamner à titre principal, la société C2J Evoluderm à régler à la société Dober Import Export en réparation du préjudice financier et moral subi, les sommes suivantes :

– Au titre de la perte de valeur de la marque Dober Import Export, à hauteur de 1.870.000€,

– Au titre du sur-investissement marketing engagé par la société Dober Import Export pour maintenir sa marque à hauteur de 1.015.000 €,

– Au titre du sur-investissement pour trouver de nouveaux fournisseurs appropriés à hauteur de 16.171 €,

– Au titre du sur-investissement pour trouver un nouveau distributeur à hauteur de 26.627€,

– Au titre des frais de surveillance à hauteur de 43.510 €,

– Au titre du préjudice moral subi à hauteur de 200.000 € ;

– Ordonner à titre subsidiaire une expertise judiciaire pour l’évaluation du préjudice subi par la société Dober Import Export ;

– Ordonner la cessation de tout procédé constitutif d’acte de concurrence déloyale et d’acte de parasitisme à compter de la signification du jugement (sic) à venir, ce sous astreinte de 5.000 € par jour de retard ;

– Ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois journaux professionnels du choix de la société Dober Import Export dans un délai d’un mois à compter de la signification à compter de la décision sous astreinte de 1.000 € par jour de retard, ce aux frais de la société C2J Evoluderm;

– Ordonner la publication d’un communiqué la première internet (sic) de la société C2J Evoluderm https://www.C2J.fr/ faisant état des actes de concurrence déloyale et de parasitisme commis et des mesures décidées par la cour pour les sanctionner, le tout sous contrôle de la société Dober Import Export quant à l’énoncé du communiqué ;

– Condamner la société C2J Evoluderm à la somme de 40.000 € au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société C2J Evoluderm aux entiers dépens ;

– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par dernières conclusions notifiées le 4 novembre 2021, la société C2J demande à la cour de:

Recevant la société C2J Evoluderm en ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

Déboutant en tout état de cause la société Dober de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires,

1) Confirmer le jugement rendu le 3 février 2021 par le tribunal de commerce de Nanterre en ce qu’il a débouté la société Dober Import Export de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et l’a condamnée à payer à la société C2J une somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

2) Infirmer le jugement rendu le 3 février 2021 par le tribunal de commerce de Nanterre en ce qu’il a débouté la société C2J de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Et, statuant à nouveau :

– Condamner la société Dober à payer à la société C2J la somme de 50.000 € au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

3) En tout état de cause,

– Débouter la société Dober de l’ensemble de ses prétentions, fins et conclusions ;

– Condamner la société Dober à payer à la société C2J au titre de l’article 700 du code de procédure civile la somme de 20.000 € ;

– Condamner la société Dober aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Lafon, Avocat aux offres de droit, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 décembre 2022.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour relève que la compétence du tribunal de commerce n’est plus contestée par la société C2J.

Sur la concurrence déloyale et les actes de parasitisme

La société Dober fait valoir que depuis plusieurs années, la société C2J copie et imite sa publicité et d’une façon générale, toute sa communication, ce de façon systématique. Elle précise que la copie et l’imitation concernent notamment ses pages des comptes Facebook et Instagram, son site internet, ses catalogues, ses documents de présentation commerciale, ses objets promotionnels servant de publicité, ses stands dans les salons de beauté et les visuels en boutique.

L’appelante expose qu’un rapport concurrentiel n’est plus nécessaire pour qu’un agissement soit susceptible d’être qualifié d’acte de concurrence et que la victime de l’agissement déloyal n’est pas tenue de démontrer l’intention de nuire ou la mauvaise foi de l’auteur du dommage. Elle rappelle qu’un rapport de concurrence n’est pas davantage requis en matière de parasitisme. Elle soutient néanmoins qu’elle partage avec la société C2J le même marché, s’agissant de deux sociétés d’envergure internationale qui opèrent sur le même marché du low cost des cosmétiques et des produits de beauté. Elle précise qu’elles ont les mêmes points de vente, visent la même clientèle, pratiquent des prix comparables, leurs produits étant exposés sur les mêmes étagères de leurs distributeurs communs.

La société C2J conteste toute concurrence déloyale ou parasitisme, expliquant que les éléments de communication invoqués par la société Dober sont très communs et largement utilisés par toutes les marques de cosmétique.

*****

La cour rappelle qu’en vertu des dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu’il a causé non seulement de son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de liberté du commerce qui implique qu’un signe qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et moral du commerce.

Le fait de créer, fût-ce par imprudence ou négligence, une confusion ou un risque de confusion avec l’entreprise d’un concurrent ou avec ses produits ou services constitue un acte de concurrence déloyale.

L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté de l’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.

Par ailleurs, le parasitisme consiste à profiter, de manière volontaire et déloyale, sans rien dépenser, des investissements, d’un savoir-faire, de la notoriété ou du travail intellectuel d’autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel.

En l’espèce, il ressort des éléments de la procédure, notamment de la pièce n°88 produite par l’appelante, que les sociétés Dober et C2J sont en situation de concurrence sur le marché de la fabrication, la vente en France et à l’étranger de produits cosmétiques. En effet, la pièce précitée établit que les parties vendent le même type de produits d’hygiène et de beauté, dans les mêmes magasins discount, à des prix similaires et donc à une même clientèle.

Sur l’imitation des stands lors de salon professionnels

La société Dober se prévaut de l’imitation par la société C2J de son stand à la foire Tradexpo de [Localité 7] en 2012, ainsi qu’à la foire Cosmeeting de [Localité 7] la même année, précisant que Mme [F], de la société Dédicace avec laquelle elle travaille depuis plusieurs années pour la création de son stand, a confirmé avoir été approchée par la société CJ2 en vue de la création d’un stand similaire. Elle invoque également l’imitation par la société C2J lors de la foire Cosmoprof de [Localité 6] de 2010 à 2012 et en 2016 du stand qu’elle avait mis en place, notamment par la reprise de l’affichage d’une image de mannequin en luminescence et en surbrillance. La société Dober considère que l’imitation flagrante de ses stands au travers de ces illustrations est constitutive non seulement d’actes de concurrence déloyale mais également de parasitisme et précisément de suivisme indépendamment du risque de confusion. L’appelante souligne que le parasitisme doit être examiné au regard des relations d’affaire ayant existé entre les parties.

La société Dober reproche à la société C2J :

– Sur le stand Tradexpo de [Localité 7] en 2012 :

– le recours à des coloris identiques : la moquette est de couleur rose et les étagères sont blanches,

– la mise en place d’un écriteau rappelant le sien, c’est-à-dire, portant la marque, suspendu, de forme rectangulaire et dont les mentions sont écrites en couleur grise et soulignées de la même façon,

– l’exposition identique des produits, c’est-à-dire en masse, simulant un linéaire de supermarché,

– le recours à des visages féminins.

– Sur le stand Cosmeeting de [Localité 7] en 2012 :

– la suspension de l’écriteau,

– le positionnement au centre du stand,

– la forme cubique de l’écriteau,

– le coloris : l’écriture des marques respectives en couleur gris sur fond blanc,

– la luminosité de l’écriteau,

– l’affichage de photos de mannequins au niveau des étagères,

– la luminescence des photos sur fond blanc,

– les grandes photographies de visages de mannequins.

– Sur les stands Cosmoprof de [Localité 6] de 2016 :

– le recours à une poutre de couleur blanche surplombant l’entrée du stand et portant la mention ” MARKET “,

– l’utilisation de la couleur blanche,

– l’affichage d’une image de mannequin en luminescence et en surbrillance.

La société C2J conteste toute imitation. Elle répond que toutes les marques de cosmétiques utilisent des photographies de mannequins pour leurs publicités, qu’il ne saurait être attribué à l’une d’entre elles un monopole sur une couleur et que la comparaison des stands ne laisse place à aucune confusion : la typographie de la marque est différente, la couleur du surlignage de la marque est différente, la taille et l’épaisseur du panneau sont différentes, les visages féminins sont différents, le mobilier est différent. Elle souligne que les photographies et croquis communiqués par l’appelante sont dénués de date certaine. Elle indique que la créatrice de son stand lors du salon Cosmeeting de [Localité 7] a confirmé avoir travaillé sur le projet Evoluderm bien en amont de celui de la société Dober. Elle ajoute que les stands sont différents, que l’appelante ne démontre pas avoir eu avant elle l’idée du panneau lumineux portant la marque de chaque société et qu’en tout état de cause, les panneaux sont différents. Concernant la foire Cosmoprof de [Localité 6], elle soutient que l’allégation d’imitation n’est pas démontrée car la photographie du stand de la société C2J qui est versée aux débats concerne son stand 2012 à la foire Cosmeeting de [Localité 7]. Concernant le stand du salon 2016 de [Localité 6], elle répond que l’imitation n’est pas démontrée puisqu’elle avait déjà utilisé le même stand en 2015. Elle ajoute qu’en tout état de cause, les stands sont très différents.

*****

Au soutien des griefs, la société Dober communique en pièces n°6, 7, 8 et 43 des photographies de stands de la marque Byphasse. Cependant, comme le souligne pertinemment la société C2J, ces clichés ne comportent aucune date certaine ; elles ne permettent donc pas de confirmer l’antériorité revendiquée par l’appelante concernant la création des stands.

En outre, même s’il devait être considéré que les dates sont exactes, concernant le salon Tradexpo de 2012, la société Dober soutient que le stand de C2J ressemble aux stands qu’elle a mis en ‘uvre en 2007 et 2010. Cependant, l’examen des photographies communiquées en pièce n°6 permet de constater que le sol du stand de la société Dober en 2007 et 2010 est de couleur grise métallisée, la moquette rose n’apparaissant qu’au pourtour du stand. L’utilisation par la société C2J en 2012 de la couleur rose au sol de son stand n’apparaît pas suffisamment distinctive dans le domaine des cosmétiques pour caractériser l’imitation. D’ailleurs, la société C2J produit en pièce n°7 la photographie du stand d’une autre marque de produits cosmétiques qui a recours à cette couleur de la même manière que la société Dober. Il en va de même de l’usage de la couleur blanche, notamment pour les étagères, et du recours à des photographies de visages féminins qui sont usuellement utilisés dans le domaine des cosmétiques. Les écriteaux portant le nom des marques ne présentent aucune originalité, s’agissant de panneaux rectangulaires blancs/gris accrochés au-dessus des stands et la cour constate que les typographies des marques ne se ressemblent pas puisque la marque Byphasse est écrite en majuscules, alors que la marque Evoluderm l’est en minuscules. Le soulignement des marques est également très différent. Si l’appelante soutient qu’auparavant (sic), la société C2J exposait un seul produit pour chaque référence alors qu’en 2012, elle a agencé ses produits en masse en simulant, comme elle, un linéaire de supermarché, cette affirmation n’est corroborée par aucun élément probant. Etant observé que la société Dober invoque indistinctement la concurrence déloyale et le parasitisme, la cour constate qu’aucun risque de confusion pour un public d’attention moyenne ne ressort de l’examen des photographies versées aux débats par l’appelante. Il doit être souligné que ce type de salon s’adresse à des professionnels qui connaissent bien les marques en question. Il ne peut être tiré aucune conclusion du fait que la société C2J n’a pas déféré à la sommation de communiquer toutes les pièces justificatives du design et du style des stands qu’elle avait mis en place aux salons professionnels Tradexpo de 2008 à 2012, dès lors que la charge probatoire pèse exclusivement sur la société Dober.

S’agissant du salon Cosmeeting de 2012, il est indéniable que les écriteaux sur lesquels sont écrits les noms des marques sont très ressemblants. Cependant, il ressort des éléments de la procédure que la société Dober et la société C2J se sont adressées au même concepteur de stand, la société Dedicace, dont le gérant a indiqué par courrier du 24 octobre 2012 que le stand de la société C2J a été dessiné ” bien en amont du stand Dober “. Le fait de recourir à la même société de conception de stand ne revêt pas un caractère fautif et aucune conclusion ne peut être tirée du défaut de réponse de l’intimée à la sommation faite par la société Dober de justifier de l’antériorité de la conception de son stand, dès lors que la charge de la preuve incombe exclusivement à l’appelante. Par ailleurs, le recours à des photographies de mannequins en luminescence n’apparaît pas original alors que la société Dober les a placées au-dessus de ses étagères, tandis que la société C2J les a utilisées comme des totems.

Enfin, concernant le salon Cosmoprof de [Localité 6] de 2016, la cour constate à nouveau que les photographies de stands communiquées par l’appelante en pièce n°48 ne comportent aucune date certaine. L’antériorité revendiquée par cette dernière n’est par conséquent pas démontrée. Il n’est au surplus pas établi que la société Dober avait déjà eu recours à l’installation d’une poutre, étant observé que l’examen des photographies jointes au procès-verbal de constat d’huissier du 16 septembre 2016 révèle un agencement très différent de ces poutres sur le stand de chacune des parties. Contrairement à ce que soutient l’appelante, la poutre mise en ‘uvre sur le stand de la société C2J ne porte pas la mention ” MARKET “, mais le nom de la marque Evoluderm. Par ailleurs, comme indiqué précédemment, le recours à la couleur blanche, ainsi qu’à des photographies de mannequins en luminescence et surbrillance ne présente aucune originalité dans le domaine considéré. Il ne ressort des photographies produites aucune ressemblance significative, ni aucun risque de confusion pour un public d’attention moyenne dans le cadre d’un salon professionnel.

Sur l’imitation des ‘valeurs publicitaires’ où figurent des personnes

La société Dober se prévaut tout d’abord de l’imitation et de la copie de ses valeurs publicitaires où figurent des personnes, par la reprise des mêmes photographies de mannequin ou par l’utilisation d’images, de mises en scènes et de couleurs ressemblantes voire identiques à celles qu’elle avait choisies pour ses supports publicitaires. Elle invoque six exemples de campagnes publicitaires qui selon elle caractérisent l’imitation invoquée. Elle considère qu’il importe peu que d’autres marques ou enseignes aient usé de photos de ces mêmes mannequins, la faute de la société C2J résidant dans l’imitation systématique sur de nombreuses années, de sa communication et de sa publicité.

Concernant l’imitation des créations publicitaires où figurent des personnes, la société C2J explique que toutes les entreprises ont recours, pour leur publicité, à des images de modèles libres de droit en vente sur des sites dédiés à cet effet et qu’il n’est donc pas rare de retrouver les mêmes visuels sur des supports publicitaires d’entreprises concurrentes. La société C2J souligne que la société Dober n’invoque qu’une seule photographie de mannequin, libre de droits, qu’elle a utilisée deux ans après l’appelante, comme l’ont fait d’autres marques pour leurs produits capillaires. S’agissant des photos mettant en scène les mêmes mannequins dans une posture différente et des mannequins différents dans une mise en scène similaire, la société C2J répond que les photos sont différentes ou alors qu’elles ont été acquises longtemps auparavant par la société Dober. L’intimée ajoute qu’il n’est pas évident que le consommateur constate qu’il s’agit du même mannequin, lequel a d’ailleurs été utilisé par différentes marques de cosmétologie. Elle rappelle que ces photos sont libres de droit. Elle souligne que le blanc est souvent utilisé par les marques de cosmétologie puisqu’il symbolise la pureté et l’hygiène et que la société Dober ne démontre pas sa légitimité à revendiquer l’antériorité de la mise en scène, alors que les différentes positions évoquées sont utilisées de façon récurrente par les marques de cosmétologie. Elle rappelle qu’il est d’usage, le 1er avril, d’accrocher un poisson de papier dans le dos des personnes dont on veut se moquer.

Au soutien de ses dires, la société Dober communique en pièce n°37 un procès-verbal de constat d’huissier du 9 juin 2016 dont il ressort que la société C2J a choisi, pour promouvoir des produits capillaires, la même photographie que celle utilisée par l’appelante pour faire la publicité du même type de produits. L’intimée reconnaît avoir exploité en 2011 la même photographie de mannequin que celle utilisée par la société Dober en 2009. Toutefois, il ressort des pièces produites que la société Dober avait toujours recours à cette photographie en 2011. Le fait pour la société C2J de recourir à la même photographie que son concurrent pour faire la publicité de la même gamme de produits pour les cheveux revêt un caractère fautif au regard du risque de confusion ainsi généré pour un consommateur d’attention moyenne. Si la société C2J prétend que ” d’autres marques ont également eu recours à la même image pour leurs produits capillaires “, la cour constate qu’elle ne justifie que d’un seul exemple, non daté. L’acte de concurrence déloyale caractérisé par l’utilisation de la même photographie du même manequin pour faire à la même période la promotion de produits concurrents est ainsi caractérisé.

La société Dober justifie également en pièce n°37 de l’utilisation par la société C2J en 2011 de photographies d’un mannequin, dont elle a elle aussi exploité les photographies en 2010 pour le même type de produits, les déodorants. La cour constate que le mannequin adopte la même posture sur les clichés et que la jeune femme est parfaitement reconnaissable. Si le temps qui sépare l’usage de ces photographies écarte tout risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, le parasitisme est néanmoins caractérisé dès lors que la société C2J, placée dans une situation de concurrence vis-à-vis de la société Dober, a tiré profit du travail de marketing accompli par cette dernière, en faisant par cette reprise l’économie d’un travail de recherche et de création.

En revanche, comme le souligne la société C2J, aucune ressemblance ne ressort de l’examen des photographies communiquées au soutien de l’exemple n°1 en pièce n°37. Les compositions ne présentent pas de similitudes suffisantes (couleurs, montage des photographies, produits) et il n’apparaît pas que le consommateur d’attention moyenne puisse s’apercevoir, à un an d’intervalle (2010/2011), qu’il s’agit du même mannequin.

S’agissant de l’exemple n°3, la société C2J conteste qu’il s’agisse du même mannequin et l’examen de la planche photographique produite en pièce n°37 ne permet effectivement pas de confirmer avec certitude que c’est le même modèle qui a posé sur les quatre clichés. Si les positions adoptées par les mannequins sont comparables, il doit être relevé qu’elles ne révèlent aucune originalité dans le domaine des cosmétiques. La société C2J justifie d’ailleurs en pièce n°10 de plusieurs clichés publicitaires d’autres marques en cosmétologie montrant des mannequins dans des tenues et positions similaires. Enfin, au delà de la couleur blanche qui domine et qui est très banale dans le secteur considéré, les autres couleurs employées ne sont pas identiques (rose, bleu, gris) et la société C2J a eu recours à une fleur qui n’apparaît pas sur les photographies de la société Dober.

Concernant l’utilisation de photographies d’un modèle féminin, les cheveux en chignon, figurant en pièce n°37, la cour constate que le recours à ce type de coiffure est très usuel dans le domaine de la publicité pour les produits cosmétiques. Au surplus, les mannequins sont différents, sont installés dans des postures distinctes et ne portent pas les mêmes tenues. Les produits dont la promotion est assurée ne sont pas les mêmes. Si la couleur blanche domine, certains modèles sont enveloppés dans une serviette, tandis que d’autres portent un peignoir et que celle figurant sur la publicité du produit Evoluderm porte un débardeur à bretelles et un pantalon. Le recours aux vêtements blancs ne revêt aucun caractère distinctif comme le confirment les copies d’écrans publicitaires produites par la société C2J en pièces n°10 et 11. Les photographies litigieuses ne révèlent aucun risque de confusion, ni parasitisme.

Il en va de même des planches photographiques figurant en pièce n°4 et 37 de l’appelante représentant deux femmes de profil en serviette blanche, assises, jambes repliées, mains apposées sur les jambes, des bébés enveloppés dans des serviettes de bain blanches, des deux femmes brunes tenant à leur droite une petite fille blonde. Ces mises en scène ne présentent aucune originalité et sont très usuellement utilisées dans le cadre de publicités consacrées aux produits présentés. La société C2J communique d’ailleurs plusieurs photographies publicitaires reproduisant les mêmes codes pour des produits similaires.

La concurrence déloyale et le parasitisme n’apparaissent pas plus caractérisés par les photographies de mannequins dont la tête est entourée d’une serviette (pièce n°67 de l’appelante). En effet, la cour constate que les positions des modèles sont différentes et que celui de la société Dober porte un peignoir, tandis que celui de la société C2J est enveloppé dans un drap de bain. En outre, plusieurs produits de toilette et de soin sont présentés devant le mannequin de la société Dober, ce qui n’est pas le cas sur la photographie de la société C2J, ce qui participe aussi à écarter tout risque de confusion. Enfin, cette mise en scène ne présente aucune originalité pour la présentation de produits de toilette et de soin pour le visage.

En revanche, concernant, les photographies de poissons d’avril, comme le soutient la société C2J, il est effectivement de tradition, au 1er avril, de coller des dessins de poisson dans le dos des personnes à leur insu. Néanmoins, l’examen des photographies communiquées en pièce n°4 par l’appelante permet de constater, au-delà du seul recours à cette tradition, que les mises en scène sont strictement identiques. Ainsi, il s’agit de deux femmes brunes, dont les cheveux longs sont dégagés au niveau du dos, portant un pull/teeshirt de couleur noire sur lequel est scotché un poisson d’avril. Ces personnes sont toutes deux assises face à leur poste de travail, lequel est très ressemblant, et le cliché est pris dans les mêmes dispositions, de trois quarts arrière. Si l’intimée produit plusieurs photographies de personnes portant, dans le dos, un poisson d’avril, la cour constate que leurs vêtements ou postures sont différentes, alors qu’en l’espèce, il est patent que la société C2J a reproduit, à un an d’intervalle, la mise en scène publiée par la société Dober sur le thème du 1er avril, profitant ainsi, sans rien dépenser, du travail de cette dernière sur le plan de la communication. Le parasitisme est ainsi caractérisé.

Sur l’imitation des ‘valeurs publicitaires’ où figurent des objets

La société Dober se prévaut encore de l’imitation des ‘valeurs publicitaires’ sur lesquelles figurent des objets, par la reproduction des mêmes coloris sur ses supports, du même graphisme ou du même design, par l’imitation des signes ou dessins, par la mise en scène semblable des objets, des produits de beauté ou des objets tiers. Elle invoque vingt-cinq exemples. Elle reconnaît que d’autres sociétés concurrentes recourent aux mêmes codes et caractères dans leurs publications, mais reproche à la société C2J l’imitation systématique, en même temps ou dans un délai rapproché, par des publications de photos montrant des objets ou types d’objets identiques, positionnés de la même manière, suivant la même mise en scène, photographiés sous le même angle, pour illustrer le même sujet ou commercialiser le même type de produits. La société Dober rappelle que les publications de la société C2J sont toujours postérieures aux siennes, que les deux sociétés concurrentes se connaissent depuis 2009, le dirigeant de la société C2J nourrissant un sentiment d’animosité à son égard. Elle considère que l’ensemble de ces éléments permet de caractériser le suivisme qu’elle attribue à la société C2J depuis plusieurs années.

La société C2J répond que les procédés de communication utilisés, comme le jeu d’ombres, les thèmes du fitness, du petit déjeuner, de la rentrée scolaire, d’Halloween, la disposition des produits en forme de cercle ou de pyramide, l’utilisation du c’ur pour la [Localité 8] ou la fête des mères, du thème du froid pour promouvoir les crèmes pour les mains, le recours au jeu concours, aux tote bags, aux tee shirts, aux photographies découpées en séquence, aux clichés de photomaton, l’utilisation de fleurs, de bâtons de rouge à lèvres, du c’ur, de certains slogans, le sont très fréquemment par les marques de cosmétiques, bien avant la société Dober. S’agissant de la campagne publicitaire relative à des packs de Noël pour moins de 10 €, la société C2J précise qu’elle a été réalisée à la demande d’un client et que la société Dober ne peut revendiquer aucun droit acquis sur la couleur rose qui a toujours été attribuée aux filles. S’agissant du partenariat avec le magazine Public, elle précise avoir été contactée par le magazine avant que la société Dober ne rende son partenariat public. Elle ajoute que ce magazine lui a indiqué avoir déjà fait ce type d’opération avec de nombreuses marques. La société C2J relève que certaines publicités, soit, n’ont pas date certaine, soit, sont antérieures aux siennes d’une, voire de plusieurs années, soit, sont postérieures aux siennes ou alors n’ont rien à voir avec celles de la société Dober. Elle indique que les époux [B], dirigeants de la société C2J, subissent des pressions et des menaces de la part du dirigeant de la société Dober, les ayant amenés à déposer une main courante.

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L’examen des multiples photographies versées aux débats par la société Dober permet d’établir que le parasitisme est caractérisé dans les cas suivants :

– L’utilisation du jeu d’ombre : il ressort des photographies communiquées en pièce n°4 que le 10 février 2015, la société Dober a proposé un jeu d’ombres afin de présenter de nouveaux produits. Or, le 18 février suivant, la société C2J a recouru à la même mise en scène pour assurer la promotion d’une nouvelle gamme de soins pour le corps. Si d’autres marques de cosmétiques utilisent le même procédé publicitaire, il n’en demeure pas moins que la reprise par la société C2J de l’idée, dans un laps de temps très court, caractérise une situation de parasitisme.

– La campagne publicitaire de Noël 2014 : les photographies produites en pièce n°4 établissent que le 28 novembre 2014, la société Dober a publié sur son profil Facebook une image de plusieurs produits accompagnée des messages suivants ” Kit So Girly ” et ” Pour 10 € prix recommandé, offrez-lui “. La couleur rose est dominante. Or, le 16 décembre suivant, la société C2J a publié sur son profil Facebook, une photographie présentant plusieurs produits. La couleur dominante est le rose et les messages accompagnant la photo sont les suivants : ” idée cadeau à moins de 10 € pour Noël ” et ” Noël in pink so Girly “. Si la couleur rose et le recours au kit ne revêtent pas de caractère distinctif dans le domaine des cosmétiques, il n’en demeure pas moins que la reprise, à très proche date, de ces mêmes éléments conjugués au même thème ” Girly ” pour promouvoir l’idée de cadeau pour Noël d’un kit à petit prix portant sur les mêmes produits (des lingettes démaquillantes, une lotion tonique et une crème pour le visage) caractérise une situation de parasitisme.

– La promotion d’une eau micellaire mettant en scène un bâton de rouge à lèvres et une trace de rouge à lèvres : il résulte des copies d’écran produites par l’appelante en pièce n°36 que les parties ont toutes deux publié sur leur compte Instagram une photographie d’un flacon d’eau micellaire, à droite duquel sont positionnés un ou deux bâtons de rouge à lèvres ouverts et des traces de lèvres maquillées, soit sur des cotons démaquillants, soit sur une feuille de papier. La société C2J ne conteste pas que la photo de la société Dober a été publiée le 9 mai 2016 et que la sienne a été diffusée postérieurement, le 23 mai 2016. Si l’intimée établit avoir déjà eu recours à la mise en scène, couramment utilisée par les marques de cosmétiques, d’un flacon d’eau micellaire accompagné d’un bâton de rouge à lèvres ouvert le 21 février 2016, la cour constate d’une part, qu’elle n’avait pas exploité l’idée de la trace de lèvres maquillées auparavant et d’autre part, que la mise en scène apparaissant sur la photo de la société C2J du 23 mai 2016 est exactement la même que celle figurant sur la photo de la société Dober à seulement deux semaines d’intervalle : sur un support blanc, le flacon est posé à plat à gauche de l’image, trois disques démaquillants sont positionnés à droite du flacon vers le bas et plus haut se trouvent un ou deux bâtons de rouge à lèvres de mêmes couleurs (rouge pour le produit et noir pour le contenant). Par ailleurs, on retrouve à droite de chaque flacon, des traces de lèvres maquillées de la même couleur. Le parasitisme dont est l’auteur la société C2J est ainsi établi.

En revanche, aucune contrefaçon, ni parasitisme n’est établi s’agissant :

– des campagnes de communication relatives aux produits minceur, dès lors que 18 mois (exemple n°4), voire presque 5 ans (exemple n°25) séparent les deux publications et que le recours au thème du fitness et en particulier au poids (haltère ou kettlebel) dans le cadre de la promotion de produits raffermissants ne revêt aucune originalité et est utilisée par de nombreuses marques de produits cosmétiques, comme le démontre la société C2J par les exemples communiqués en sa pièce n°16. La cour observe que dans le cadre du 25ème exemple, la société Dober fait la promotion de produits raffermissants alors que la société C2J, cinq années plus tard, met en scène un déodorant.

– de l’exploitation du thème du petit déjeuner : en effet, la société C2J établit par sa pièce n°17 que ce thème est couramment utilisé par les marques de cosmétiques. Au surplus, la photographie publiée sur le compte Instagram de la société C2J n’est pas datée, ce qui ne permet pas de démontrer l’antériorité revendiquée par la société Dober. Enfin, comme le souligne la société C2J, la photographie postée sur son compte Instagram ne présente pas de similitudes avec celles publiées par la société Dober sur son profil Facebook les 8 et 14 juin 2015. Les photographies invoquées par la société Dober en pièce n°36 ne sont pas davantage datées, l’appelante ne pouvant dès lors se prévaloir d’une antériorité.

– de l’utilisation d’une ardoise sur laquelle un slogan est écrit à la craie blanche : la société C2J produit en pièces n°18 des copies d’écran de comptes Facebook d’autres marques de Cosmétiques démontrant que l’ardoise est fréquemment utilisée en période de rentrée scolaire. Au surplus, comme le relève la société C2J, sa publication n’assure la promotion d’aucun produit à la différence de celle de la société Dober.

– le recours au kit promotionnel pour homme pour moins de 10 € pour Noël 2014 : en effet, s’il apparaît que les publications, très rapprochées, sont toutes deux bleues et portent sur une idée de cadeau pour moins de 10 €, la couleur bleue ne présente aucun caractère distinctif dans le cadre de la promotion de produits de toilette destinés aux hommes, la vente en kit moyennant un prix plancher est très commune et les produits proposés par la société Dober (eau de cologne et déodorant) ne sont pas les mêmes que ceux composant le kit de la société C2J (brosse à dents, gel pour les cheveux, gel douche et déodorant).

– de la publication de photographies de plusieurs produits, prises de haut, agencés en cercle ou en forme de c’ur, ces agencements, couramment utilisés par les autres marques de cosmétiques (cf notamment pièce n°19 de l’intimée), notamment la forme du c’ur à l’occasion de la [Localité 8], ne présentant aucun caractère distinctif et ne générant aucun risque de confusion, ce d’autant que de nombreux mois séparent les publications litigieuses.

– des campagnes de communication sur les thèmes du carnaval et d’Halloween : les publications portent certes toutes sur des lingettes démaquillantes, cependant, l’exploitation de ces thèmes pour promouvoir ce type de produit ne présente aucune originalité. En outre, les couleurs noire et orange sont couramment associées au thème d’Halloween et sont très couramment utilisées pour les publicités à cette période. Enfin, l’examen de la planche photographique permet de constater qu’aucune date n’est mentionnée sur la copie d’écran du profil Facebook de la société C2J, de sorte que l’antériorité invoquée par la société Dober n’est pas établie.

– de la campagne promotionnelle en collaboration avec le magazine Public : il ressort de la pièce n°5 communiquée par la société Dober que le 14 août 2015, elle a publié sur son compte Facebook une photographie montrant un exemplaire du magazine Public sous plastique accompagné d’une crème de la marque Byphasse, avec le message suivant : ” Summer promo ! Votre crème raffermissante Q10 est au prix exceptionnel de 1,45 € avec votre magazine Public ! ” et que le 9 novembre suivant, la société C2J a diffusé sur son compte Facebook une photographie montrant également un exemplaire du magazine Public sous plastique accompagné d’un flacon de la marque Evoluderm avec le message suivant : ” Un bon petit déjeuner, accompagné du dernier @public ! Profitez du bon plan : pour 2,45 € en plus du magazine choisissez entre l’huile à l’Argan, à l’Amande douce ou Macadamia ! “. Toutefois, la société C2J justifie par sa pièce n°21 avoir été démarchée par le magazine Public en vue de ce partenariat par mail du 29 juillet 2015, soit antérieurement à la publication par la société Dober de son partenariat avec le même magazine. En outre, il ressort de la lecture de ce mail de la directrice marketing déléguée du magazine Public que ce type d’association avec des fabricants de cosmétique est très courant puisqu’elle indique : ” Nous avons déjà fait ce type d’opération avec les marques Gemey Maybelline, Hipanema, Studio Make Up et Bourgeois ‘ “.

– de l’exploitation du thème de la montagne en hiver pour promouvoir une crème d’hydratation pour les mains : ce thème est très banal pour communiquer à cette saison sur l’hydratation des mains agressées par le froid. La société C2J communique en pièce n°23 le justificatif de l’utilisation de ce thème par une autre marque de produits cosmétiques, dans la même mise en scène. Enfin, il doit être souligné que plus d’un an sépare les publications.

– des photographies de cartons pour communiquer sur l’organisation d’un jeu concours : les photographies litigieuses communiquées en pièce n°17 par l’appelante ne comportent aucune date certaine, de sorte que l’antériorité revendiquée par la société Dober n’est pas démontrée. En outre, la société C2J établit par sa pièce n°24 que le recours à cette mise en scène est très banale. Enfin, la cour constate que les photographies en cause sont très différentes.

– des photographies relatives à l’Australie : les photographies litigieuses communiquées en pièce n°37 par l’appelante ne comportent aucune date certaine, de sorte que l’antériorité revendiquée par la société Dober n’est pas démontrée.

– de l’utilisation de cloches en verre : en effet, si la société Dober a publié sur son compte Facebook une photographie de huit flacons de gel douche placés individuellement sous une cloche de verre, la photographie diffusée par la société C2J ne montre qu’une seule cloche de verre sous laquelle sont placés des cotons démaquillants, à côté de produits démaquillants et hydratants. Les photographies litigieuses ne sont donc pas similaires, ni même proches. En outre, elles ont été publiées à plus d’un an d’intervalle.

– de l’utilisation de sacs en tissu (Tote Bag) en tant qu’outil promotionnel : le recours à ce type de sacs à titre promotionnel ne revêt aucune originalité. Au surplus, l’intérêt de ces sacs est précisément d’y faire figurer un dessin et/ou un message. Il est très couramment utilisé dans le domaine des cosmétiques comme le confirme la pièce n°25 de l’intimée. En outre, la cour constate à l’examen des clichés photographiques communiqués en pièce n°22 par la société Dober que son Tote bag, sur lequel le message écrit (” La beauté est un secret son prix aussi. Byphasse “) occupe la quasi-totalité de la face du sac, est très différent de celui de la société C2J, sur lequel figure un c’ur plein au travers duquel est inscrit ” #Evoluderm.com with Love “. Enfin, les publications par les parties de leur Tote bag sur leur profil Instagram sont éloignées de dix mois.

– de la mise en scène de photographies découpées en séquences : l’examen de la planche photographique communiquée en pièce n°36 par la société Dober permet de constater une mise en scène par chacune des parties de ses produits sur une page découpée en plusieurs séquences. Toutefois, cette mise en scène ne révèle aucun caractère distinctif. En outre, les photographies sont très différentes de par le nombre de séquences, l’objet de chacune d’elles et les couleurs dominantes. Elles ont été publiées à 20 mois d’intervalle (3 septembre 2014 / 28 avril 2016). Enfin, la société C2J démontre par sa pièce n°26 qu’elle avait déjà recouru à ce type de mise en scène de ses produits en 2011. Aucune imitation ou risque de confusion n’est par conséquent établi. Il n’est pas davantage démontré que la société C2J a tiré profit des efforts engagés par la société Dober.

– de la publication de photos mettant en scène, en boutique, des produits organisés sur un support pyramidal et circulaire : ces photographies figurant en pièce n°36 de l’appelante ne mettent en évidence aucune originalité et comme le souligne l’intimée, les clichés ont été diffusés à 9 mois d’intervalle. Elles ne caractérisent aucune imitation, ni risque de confusion, ni profit tiré par la société C2J d’investissements de la société Dober.

– de la publication de photographies dont la couleur dominante est le rose pâle, mettant en scène deux produits dont l’emballage est de couleur rose et un bouquet de roses de couleur rose : l’examen de la planche photographique produite par l’appelante en pièce n°36 permet de constater que certes la couleur rose est dominante sur les deux photographies, que les flacons des produits sont roses et que chaque partie a mis en scène un bouquet de roses de couleur rose pâle. Toutefois, la cour constate que les produits ne sont pas les mêmes, que la mise en scène n’est pas identique et que l’utilisation de la couleur rose et de cette fleur est très banale dans le domaine des cosmétiques, ce que confirme la pièce n°30 communiquée par l’intimée. Enfin, la société C2J produit en pièce n°29 le justificatif de ce qu’elle avait déjà recours en juillet 2015 à la même mise en scène : un flacon de lotion tonique rose au milieu de roses de couleur rose pâle, le rose étant la couleur dominante.

– de la publication de photographies de produits démaquillants pour les yeux : la copie d’écran des publications produite en pièce n°67 permet de constater l’absence de similitude des photographies, hormis la couleur dominante blanche du fond qui est très couramment utilisée dans le domaine des produits cosmétiques et le flacon bleu. Or, ce point ne présente aucun caractère particulier, les produits démaquillants pour les yeux contenant très fréquemment de l’eau de bleuet, colorée en bleu, comme le démontrent les copies d’écran communiquées par l’intimée en pièce n°43. Contrairement à ce que soutient l’appelante, certaines mises en scène d’autres agents du marché du cosmétique sont identiques à la sienne, à savoir un fond blanc et un flacon bleu : ainsi, celle de la société Avril, ou encore celle de Lancôme. Enfin, il doit être souligné que plus de 18 mois séparent les deux publications (23 novembre 2016 / 6 août 2108) excluant tout risque de confusion. De même le profit indû tiré par la société C2J des efforts de la société Dober n’est pas établi.

– de l’exploitation du thème de la salle de bain : la société Dober communique en pièce n°69 des copies d’écran des comptes Instagram des parties montrant des publications de photographies de salles de bain. Cependant, le thème de la salle de bain ne présente aucune originalité dans le domaine des cosmétiques comme le démontre la pièce n°43 produite par l’intimée. Au surplus, les mises en scène utilisées par la société C2J ne présentent aucun point de similitude avec celles exploitées par la société Dober, qu’il s’agisse des couleurs dominantes ou du mobilier (blanc / blanc-bois, douche-vasque / baignoire-portant à serviettes). Les photographies sont ainsi clairement distinctes. Enfin, il doit être souligné que les deux premières photographies invoquées par l’appelante ont été publiées à plus de trois ans d’intervalle, tandis que les deux autres publications ne comportent aucune date.

– de la mise en scène de produits dans un panier en métal suspendu aux parois d’une baignoire sur un fond de couleur dominante blanche : si la pièce n°70 de l’appelante établit que la société C2J a eu recours à cette mise en scène à laquelle la société Dober avait également recouru, il apparait pas que la présentation de produits de toilette dans un panier métallique suspendu aux parois d’une baignoire est banal dans le domaine des cosmétiques. Les copies d’écran de publications d’autres marques de cosmétiques produites par l’intimée en pièce n°43 le confirment. Si le blanc apparaît comme la couleur dominante de chaque photographie, ce point ne présente pas non plus le moindre caractère distinctif dans le domaine considéré et la cour constate que les produits exposés ne présentent aucune similitude quant à leur nature, la forme et la couleur des contenants. Enfin, de nombreux mois séparent les publications invoquées.

– de la campagne de soin des ongles : l’appelante produit en pièce n°70 des publications de mises en scènes de produits pour les ongles et d’accessoires de pédicure et manucure. Sur les photographies des parties on retrouve, sur un fond blanc, un flacon de dissolvant de couleur rose posé à plat, un flacon de vernis et des accessoires. Cependant, ce type d’agencement est extrêmement fréquent et le recours à la couleur rose pour un flacon de dissolvant l’est tout autant. Les publications dont se prévaut la société Dober ne présentent aucune originalité et à nouveau, plusieurs mois les séparent de la mise en ligne par la société C2J de sa photographie (1er mai 2017 / 20 août 2016).

Sur le choix des mêmes signes et dessins

La société Dober dénonce également le choix par la société C2J des mêmes signes et dessins que les siens sur ses supports publicitaires, notamment le c’ur rose, le recours à un chiffre pour mettre en lumière un nombre de produits précis, les lettres VS, les signes astrologiques incurvés. L’appelante souligne qu’aucun nom de société tierce ne revient de façon régulière dans les contre-exemples donnés par la société C2J pour démontrer que les sociétés dans le domaine des cosmétiques et des produits de beauté utilisent de manière courante les mêmes codes, caractères, couleur ou dessins.

L’appelante communique en pièce n°4, au soutien des exemples n°1 et 2, des publications de chacune des parties qui représentent un c’ur rose. Cependant, comme le souligne pertinemment la société C2J, le c’ur rose ne présente aucun caractère distinctif dans le domaine des cosmétiques, surtout dans le cadre de la [Localité 8] ou de la fête des mères. La société Dober ne saurait dès lors se l’approprier. Par ailleurs, contrairement à ce que prétend la société Dober, le c’ur exploité par l’intimée dans le cadre de la publication du 20 novembre 2014, n’est pas identique au sien. En effet, il est plein à la différence de celui de la société Dober qui en utilise l’intérieur pour positionner une photographie ou du texte. Enfin, plusieurs mois séparent les publications invoquées au soutien de l’exemple n°1, tandis que les mises en scène ne présentent pas de points de similitude dans le cadre des publications se rapportant à la fête des mères 2015 (exemple 2 : pour la société Dober, un c’ur dans lequel sont présentés 3 produits et pour la société C2J, un c’ur dans lequel sont insérés une photographie de femme et un texte ; un paquet cadeau empiète sur le coeur), excluant ainsi tout risque de confusion. Au vu de ce qui précède, le parasitisme n’apparait pas davantage établi.

Le zigzag rose utilisé par la société Dober dans le cadre de sa publication du 17 novembre 2014 (pièce n°36 de l’appelante) pour représenter un sapin de Noël n’a rien de commun, hormis la seule couleur, avec le message relatif au jeu concours figurant sur la copie d’écran du compte Instagram de la société C2J, dont la date n’est au demeurant pas précisée. Il ne ressemble absolument pas à un sapin de Noël, étant précisé que cette publication ne fait pas la moindre référence aux fêtes de Noël.

Enfin, s’agissant du recours à la même forme de signes astrologiques incurvés, la société C2J démontre, tout d’abord, par sa pièce n°43 que l’utilisation du thème de l’astrologie et l’association d’un produit à un signe sont très fréquents dans le domaine des cosmétiques. Par ailleurs, la cour relève que le graphisme des signes astrologiques auquel la société C2J a eu recours ne présente pas de caractère original et que son utilisation par l’intimée est distante de près de 3 ans par rapport à celle de la société Dober (9 janvier 2016 / 12 novembre 2018).

En conséquence, une telle utilisation par la société C2J n’apparait ni déloyale, ni parasitaire.

En revanche, il apparaît que le parasitisme est établi concernant le 3ème exemple se rapportant à la mise en scène des produits préférés de l’année écoulée. En effet, la société Dober démontre par sa pièce n°4 que le 22 janvier 2015, elle a publié sur son profil Facebook une image de cinq produits accompagnée du message : ” TOP 5 2014 “. Or, le 28 janvier suivant, la société C2J a diffusé sur son compte Facebook une image sur le même thème figurant 3 produits avec le message : ” Vos 3 Chouchous 2014 “. Si la société C2J soutient qu’il est d’usage pour les différentes marques de recenser chaque année les produits que leurs clients ont le plus appréciés sous la forme d’un top 10, 5, 3 ou autre, la cour constate qu’elle n’en rapporte pas la preuve. La reprise quasi immédiate par la société C2J de la communication de la société Dober caractérise un acte de parasitisme.

De même, si le signe VS ne revêt aucun caractère distinctif pour être utilisé couramment par les marques de cosmétiques, son utilisation par la société C2J à l’occasion d’une publication sur son profil Facebook le 28 février 2016, alors que la société Dober l’avait utilisé le 18 février précédent et que l’intimée ne démontre pas y avoir eu recours précédemment caractérise un acte de parasitisme, par la reprise de l’idée développée par la société Dober.

Sur la reprise des mêmes textes, l’imitation des catalogues, des emballages et des accessoires publicitaires

La société Dober Import Export reproche encore à la société C2J :

– l’apposition des mêmes textes ou de textes ressemblants sur les supports publicitaires et invoque 6 exemples au soutien du grief ;

– l’imitation pour son catalogue 2012, des catalogues de présentation 2010 et 2011 à destination des clients, qu’il s’agisse des dimensions du catalogue et de son design, ou de sa présentation intérieure ;

– l’imitation de l’emballage des produits, par l’adoption de ses codes visuels et couleur, générant un risque de confusion dans les rayons des magasins ;

– l’imitation des accessoires publicitaires ; elle invoque 3 exemples au soutien du grief.

La société C2J répond que son catalogue 2012 est très différent du catalogue 2011 de l’appelante. Elle conteste toute imitation des flacons et des emballages de lingettes démaquillantes de l’appelante, soulignant que l’utilisation de certains emballages par les parties est distante de plusieurs années. De manière générale, la société C2J considère que les prétendues imitations dont la société Dober se prévaut s’inscrivent en réalité dans une mode largement usitée par les marques de cosmétiques qui ne saurait être monopolisée par un seul acteur de ce segment de marché. Elle ajoute que l’appelante reprend également à son compte ses idées de communication s’agissant notamment de la commercialisation d’un masque pour le visage à l’argile dénommé ” Detox “, de l’emploi de termes ou d’images identiques pour sa communication et ses publications.

La société Dober justifie en pièce n°36 des publications suivantes :

– la société Dober le 14 novembre 2014 ” Ne vous bousculez pas, il y en aura pour tout le monde ” / la société C2J le 23 mars 2015 : ” pas de bousculade ! Il y en aura pour tout le monde ” ;

– la société Dober : ” Avis aux Barcelonais ! Dober Import export est présent dans les parfumeries Primor ” / la société C2J : ” Avis à toutes les parisiennes : Un large choix de nos produits Evoluderm est disponible à la parapharmacie au [Adresse 1] ! “.

Les publications relatives aux ” Avis à ‘ ” ne comportent pas de date certaine, de sorte que la société Dober ne démontre pas l’antériorité alléguée. En revanche, il apparaît que la reprise par la société C2J de l’expression, peu courante dans le domaine des cosmétiques, relative à la bousculade des acheteurs dans des termes extrêmement proches (” bousculez “, ” bousculade “, ” Il y en aura pour tout le monde “), à 4 mois d’intervalle, caractérise un acte de parasitisme.

Concernant les communications des parties portant sur les formats XXL, les textes dont se prévaut la société Dober sont très différents de celui de la société C2J. En effet, la société Dober publie le message suivant : ” Petit rappel de nos nouveautés en 2015 !’, “Coup de coeur ! Maxi douche, miniprix “, “La bonne affaire : un lait de douche XXL à prix mini “, “Gel douche XXL à Prix Xs. Rapport qualité/prix on n’a pas trouvé mieux”, “Une caresse de lait au format XXL”, tandis que la société C2J diffuse le texte suivant : ” Retrouvez le délicieux parfum de notre huile Précieuse dans la nouvelle gamme capillaire # Huile Précieuse : un shampooing et un masque cheveux spécialement développés pour les cheveux secs’ Les huiles d’Argan, Bourrache & Camélia nourrissent, subliment et révèlent la brillance de votre chevelure, le tout dans des formats XXL de… 1000 ml. Avez-vous envie de les tester ‘ “. Par ailleurs, la pièce n°40 communiquée par la société Dober ne permet pas de vérifier la date de ces publications, si bien que l’antériorité dont se prévaut l’appelante n’est pas démontrée. Enfin, le fait de communiquer sur un format XXL de produit ne revêt aucun caractère particulier, étant très couramment utilisé.

Les textes des publications sur le thème du positivisme, tels qu’ils ressortent de la pièce n°79 communiquée par la société Dober sont eux aussi très différents, alors que la société C2J établit par sa pièce n°43 que ce thème est très largement utilisé par les marques dans le domaine des cosmétiques. Au surplus, la cour constate à nouveau que les publications invoquées par la société Dober ne comportent pas de date certaine et que dès lors leur antériorité prétendue n’est pas établie.

La cour ne constate aucun rapport entre la publication par la société Dober du texte suivant pour la fête des mères : ” Pensez juste à elle ” écrit à la main et celle de la société C2J pour la fête des pères : ” I have a hero, I call him Dad “, le texte étant écrit à l’ordinateur dans deux polices différentes.

La société Dober produit en pièce n°81 deux publications portant sur une liste de qualités attribuées aux femmes. Ces textes sont toutefois très différents, dès lors que les mots ne sont pas les mêmes, que la société Dober communique en anglais, tandis que la société C2J a conservé le français. En outre, les polices utilisées sont distinctes, étant observé que la société Dober écrit en majuscules et la société C2J en minuscules. En outre, le texte de l’intimée est décliné en différentes couleurs, alors que celui de l’appelante est présenté en noir et blanc. Enfin, au-delà du fait qu’aucune date certaine ne figure sur ces publications, la société Dober précise qu’elles sont séparées de 2 ans et demi.

Concernant les catalogues, l’examen des catalogues 2010, 2011 de la société Dober et du catalogue 2012 de la société C2J permet de constater que la similitude de composition se limite à leur format et à certains éléments de la couverture qui est de la même couleur et qui comporte sur la partie gauche un visage de femme et sur la partie droite, la marque en couleur grise sous laquelle figure une phrase d’accroche écrite en rose s’achevant par trois points de suspension. La cour relève que ces éléments de similitude sont insuffisants, qu’ils sont, au surplus, extrêmement communs et que l’élément fort et distinctif du catalogue de la société C2J est la photographie en couleur du mannequin, alors que ceux de la société Dober sont en noir et blanc. Par ailleurs, la photographie d’une mèche de cheveux sur les pages consacrées aux produits capillaires et la présence d’une partie consacrée aux notes en fin de catalogue, particulièrement communes, ne revêtent pas davantage d’originalité. Enfin, l’intimée souligne pertinemment qu’une année sépare la publication de ces catalogues. Ainsi, aucun risque de confusion ni captation des investissements de la société Dober n’est démontré.

S’agissant des emballages, la cour constate que leurs formes et leurs couleurs ne présentent aucun caractère distinctif. Il ressort de la pièce n°30 que les flacons de gel douche des deux marques sont tantôt de couleur avec un bouchon blanc, tantôt blancs avec un bouchon de couleur. Les couleurs utilisées ne présentent aucune originalité. Les sachets de lingettes démaquillantes (pièce n°31) de la société C2J, blancs avec un liseré de couleur à chaque extrémité et des inscriptions de la même couleur, sont très différents de ceux de la société Dober qui sont entièrement colorés avec des inscriptions de couleur plus foncée et un opercule en plastique rigide blanc. Pour prétendre que la société C2J a commercialisé en 2015 une gamme de produits dont l’emballage adoptait les mêmes tons en transparence que celui qu’elle avait créé en édition limitée en 2012, la société Dober produit en pièce n°37 des photographies de flacons de dissolvant ne comportant aucune date certaine. Comme le relève pertinemment la société C2J, il n’est pas démontré que ce produit, qui ne comporte pas de mention relative à une édition limitée, a été commercialisé. Enfin, le recours à un pot de crème à couvercle gris, dans des couleurs dominantes de gris et de rose, ne revêt aucun caractère distinctif, l’usage de ces couleurs étant extrêmement répandu dans le domaine des cosmétiques. En outre, la publication de la photographie du pot de crème Evoluderm de couleur rose et grise dont se prévaut la société Dober en pièce n°68 ne comporte aucune date.

Enfin, concernant les accessoires publicitaires, le recours aux sacs, totes bags, tee-shirt et aux photographies de photomaton ne présente aucune originalité puisqu’il est très répandu dans le secteur de la vente, comme le confirment les pièces n°25 et 41 de l’intimée. Au surplus, les pièces n°37, 34 et 82 dont se prévaut l’appelante ne permettent pas d’attribuer une date certaine aux publications de la société C2J. Enfin, même en retenant les dates invoquées par la société Dober, la cour constate que les publications de l’appelante et celles de l’intimées sont espacées d’au moins une année et que les sacs, teeshirts et photographies de la société C2J sont très différents de ceux de la société Dober.

La société Dober Import Export explique que depuis le jugement rendu par le tribunal de commerce, la société C2J, animée d’un sentiment d’impunité, a, en 2022, repris :

– une partie de slogan sur le thème de l’amour qu’elle avait fait concevoir pour le salon Cosmoprof de [Localité 6],

– la référence à la taille des vêtements pour parler des produits de cosmétique et de leur prix,

– l’apposition d’un écrit ou du logo figurant en grand sur chaque photo publiée sur les réseaux sociaux.

Cependant, la cour constate que les publications communiquées par la société Dober au soutien de ces griefs ne comportent pas de date certaine. Concernant en particulier les captures d’écran relatives au thème de l’amour, la société Dober affirme que, datées du même jour (10 mai 2022), sa publication est antérieure à celle de la société C2J. Toutefois, aucun élément probant ne permet de corroborer cet élément. En outre, la société Dober ne justifie pas ses dires suivants lesquels elle avait exploité ce thème de l’amour pour le salon Cosmoprof de [Localité 6]. Au surplus, il apparaît que les publications de chacune des parties ne présentent aucune similitude dans la mise en scène (couleurs, présence de produits, message, police de caractères), que le thème de l’amour, la référence aux tailles (XS et XXL) pour désigner la contenance ou le prix d’un produit, l’apposition d’un écrit sur une photographie sont largement exploités dans le domaine de la vente de produits cosmétiques. Enfin, au regard des dates invoquées par la société Dober, environ deux années séparent les publications de chaque partie faisant référence aux tailles ou faisant apparaître un écrit sur une photographie.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments, que la concurrence déloyale et le parasitisme ne sont établis qu’à l’égard des faits suivants :

– le recours à la même photographie de mannequin pour promouvoir des produits capillaires,

– le recours au même mannequin, dans la même posture pour la promotion du même type de produit, le déodorant,

– l’utilisation du jeu d’ombres,

– la mise en scène du poisson d’avril,

– la promotion d’un kit ” Girly “,

– la promotion d’une eau micellaire mettant en scène un bâton de rouge à lèvres et une trace de rouge à lèvres,

– la mise en scène des produits préférés de l’année écoulée,

– la mise en scène de produits par l’utilisation du signe ” VS ”

– les communications sur le thème de la bousculade des acheteurs.

S’agissant des autres faits, bien que pris dans leur globalité, l’imitation systématique alléguée par la société Dober n’est nullement caractérisée. Les mises en scène invoquées, qu’il s’agisse notamment des produits, des accessoires, des couleurs ou des prises de vue photographiques apparaissent banales et sont largement utilisées par l’ensemble des acteurs du secteur des cosmétiques. Les premiers juges ont ainsi à juste titre considéré que ” la plupart des imitations alléguées concernent des images, des slogans, des expressions, des objets [sont] fréquemment utilisés par de nombreuses autres marques de cosmétiques et (…) correspondent aux codes publicitaires habituels de la profession “. Au surplus, de nombreuses publications sont espacées de nombreux mois, voire années, excluant ainsi tout risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, mais également d’appropriation par la société intimée des efforts de l’appelante. En effet, la société Dober ne saurait, sous prétexte de l’exploitation préalable de codes extrêmement banals dans le domaine de la vente de produits cosmétiques et même de la vente en général, en interdire définitivement l’accès à son concurrent. Le fait que les sociétés se connaissent professionnellement est à cet égard indifférent, étant observé que cette circonstance ne présente aucune singularité dans un milieu professionnel donné.

Sur l’indemnisation des préjudices

La société Dober invoque les préjudice suivants :

– une perte de la valeur de la marque d’un montant de 1,87 millions d’€ ;

– un surinvestissement marketing pour échapper à la confusion et à la dilution de sa marque d’un montant de 1.015.000 € ;

– un surinvestissement d’un montant de 16.171 € à l’égard des fournisseurs afin de renouveler les fournisseurs avec lesquels C2J s’est mise à travailler et de retrouver un réseau de distribution pour [Localité 7] ;

– un surinvestissement de 26.627 € afin de trouver un nouveau distributeur à Paris depuis la perte de La Manufacture Parisienne de Cosmétique récupérée par la société C2J ;

– le préjudice de 43.509 € issu du coût de surveillance et de veille concurrentielle correspondant au coût d’un salarié à plein temps ;

– un préjudice moral de 200.000 € consécutif à la démotivation et la démoralisation permanente de son département marketing / publicité, de l’atteinte à son image, de la confusion entre sa marque Byphasse et la marque Evoluderm à laquelle lui renvoient ses partenaires et sa clientèle.

Au soutien de sa demande indemnitaire, la société Dober se prévaut d’un rapport d’expertise réalisé, à sa demande, par M. [E] le 20 septembre 2016.

Subsidiairement, la société Dober sollicite une mesure d’expertise.

La société C2J considère que l’appelante ne rapporte pas la preuve de son préjudice par la production d’un rapport d’expertise réalisé à sa demande de manière non contradictoire et non corroboré par des pièces comptables. Elle relève le caractère contradictoire des demandes de la société Dober dès lors qu’elle sollicite tout à la fois l’indemnisation de la perte de ses investissements, mais également l’indemnisation des investissements qu’elle doit mettre en place pour reconquérir son marché prétendument perdu.

Elle s’oppose à la demande d’expertise, soutenant qu’elle ne repose sur aucun motif légitime et qu’elle est infondée.

*****

En matière de responsabilité pour concurrence déloyale et parasitisme, il s’infère nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral, de toute pratique consistant, pour son auteur à s’affranchir d’une règlementation impérative dont le respect a nécessairement un coût, ce qui, dès lors, lui donne un avantage concurrentiel indû. Pour autant, au stade de l’indemnisation, il appartient à la victime de prouver l’étendue de son préjudice et de le chiffrer. La présomption couvre l’existence du préjudice et non son étendue. Pour établir l’étendue du préjudice, le demandeur doit identifier les différents postes de préjudice et en rapporter les preuves qui permettront aux juges du fond d’apprécier le montant des dommages et intérêts à lui allouer.

Pour justifier de ses préjudices, la société Dober produit exclusivement un rapport d’expertise réalisé de manière non contradictoire le 20 septembre 2016 à sa demande et qui n’est corroboré par aucune autre pièce probante.

La cour constate, à la lecture de ce rapport, que l’expert amiable évoque différents éléments comptables ou financiers comme base d’appréciation des dommages retenus, sans toutefois préciser la source de ces données. Aucune pièce justificative de ces éléments n’est annexée au rapport et comme le souligne la société C2J, l’appelante ne communique pas ses bilans comptables se rapportant à la période considérée dans le cadre de l’instance. Elle ne produit pas davantage d’élément probant relatif à ses investissements dans le domaine publicitaire, à son budget communication, au surinvestissement marketing invoqué ou encore à l’embauche et au coût du salarié à plein temps qui aurait été affecté, comme elle le prétend, à la surveillance et à la veille concurrentielle de la société C2J.

Les demandes indemnitaires relatives à la perte de la valeur de la marque, au surinvestissement marketing, au surinvestissement à l’égard des fournisseurs, à la recherche d’un nouveau distributeur à [Localité 7] et au coût de surveillance et de veille concurrentielle ne peuvent par conséquent prospérer.

Si la société Dober sollicite à titre subsidiaire une mesure d’expertise, il doit être rappelé que l’article 145 du code de procédure civile dispose qu’une mesure d’instruction ne peut être ordonnée que lorsqu’est démontrée l’existence d’un motif légitime et que l’article 146 du même code interdit de recourir à une mesure d’expertise pour suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.

Or, en l’espèce, le seul rapport d’expertise amiable établi dans les conditions précitées, en l’absence de toute pièce comptable et de tout autre élément justificatif des préjudices invoqués, ne suffit pas à caractériser le motif légitime exigé par l’article 145 susvisé. Il n’y a par conséquent pas lieu à ordonner une mesure d’expertise.

Le préjudice moral subi par la société Dober est néanmoins incontestable, au regard du désagrément lié à la reprise et à l’imitation par son concurrent de ses communications, justifiant, par infirmation du jugement, la condamnation de la société C2J au paiement de la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société C2J considère que la société Dober n’a diligenté son action que dans un esprit de lucre et par une volonté non dissimulée de lui nuire ; ce comportement confine selon elle au dol, justifiant sa condamnation à lui verser une somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

Le droit d’agir en justice ne dégénère en abus qu’en cas de faute équipollente au dol qui n’est pas caractérisé en l’espèce à l’égard de la société Dober, ce d’autant que des actes de concurrence déloyale et de parasitisme sont caractérisés et justifient l’indemnisation de l’appelante. En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a débouté la société C2J de sa demande indemnitaire au titre de la procédure abusive.

Sur les autres demandes

La société Dober demande qu’il soit ordonné la cessation des actes de concurrence déloyale et de parasitisme dans le mois de la signification de l’arrêt et sous astreinte de 1.000 € par jour de retard.

Le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a débouté l’appelante de cette demande, dès lors qu’il n’est nullement démontré que les actes de concurrence déloyale et de parasitisme perdurent, ni que la société C2J envisage de persister dans ce comportement.

La société Dober sera également déboutée de sa demande de publication de la décision qui se révèle excessive au regard du préjudice subi par l’appelante. Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté la société Dober de sa demande.

La demande relative à l’exécution provisoire est sans objet, dès lors que le présent arrêt n’est pas susceptible de recours suspensif d’exécution.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la solution du litige, le jugement déféré sera infirmé s’agissant des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.

La société C2J qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel et sera condamnée à payer à la société Dober la somme de 15.000 € au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré sauf en celles de ses dispositions relatives aux préjudices économiques, à la demande d’expertise, à la cessation des actes de concurrence déloyale et de parasitisme sous astreinte et à la demande de publication de la décision ;

Condamne la société C2J à payer à la société Dober Import Export la somme de 50.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral consécutif aux actes de concurrence déloyale et de parasitisme ;

Déclare sans objet la demande relative à l’exécution provisoire ;

Condamne la société C2J à payer à la société Dober Import Export la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société C2J aux dépens de première instance et d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,