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CIV. 2
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 mai 2021
Rejet non spécialement motivé
M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10258 F
Pourvoi n° X 19-24.798
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 MAI 2021
M. [M] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 19-24.798 contre l’arrêt rendu le 26 septembre 2019 par la cour d’appel d’Angers (chambre sociale), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société TNT Serge Blanco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Maine-et-Loire, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [Adresse 4],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. [N], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat des sociétés TNT Serge Blanco et Axa France IARD, et l’avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l’audience publique du 24 mars 2021 où étaient présents M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, Mme Coutou, conseiller, et Mme Aubagna, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [N] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. [N].
Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. [N] de son action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur la SAS TNT Serge Blanco ;
Aux motifs propres qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, et le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ; la preuve de la faute inexcusable incombe à la victime ou à ses ayants droit ; qu’il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident mais il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage ; qu’il appartient à M. [N] de démontrer que la survenue de l’accident est en lien avec le manquement qu’il a imputé à l’employeur consistant selon lui en un défaut d’aménagement ou en une insuffisance de l’espace de stockage des vêtements ; qu’or, s’il résulte de la déclaration d’accident du travail que l’accident s’est produit lorsque M. [N] soulevait un colis, aucune indication supplémentaire n’est apportée à propos des circonstances exactes dans lesquelles il a été amené à effectuer cette manutention ; qu’il n’est notamment pas établi que M. [N] ait été contraint de déplacer le colis litigieux en raison d’un manque de place pour le stockage puisque l’on ignore où se trouvait précisément le colis au moment de l’accident ; que M. [N] se borne à affirmer que la cause de l’accident résulte du fait qu’il était obligé de se contorsionner pour atteindre les marchandises mais il n’est pas fait état de cette circonstance dans la déclaration d’accident du travail ; qu’il n’est pas non plus démontré que les deux accidents du travail ayant précédé celui du 5 décembre 2013 étaient en lien avec un problème d’aménagement des locaux auquel l’employeur aurait omis de remédier ; que la déclaration d’accident du travail du 15 février 2011 indique qu’ « En soulevant un mannequin afin de préparer la silhouette le salarié a ressenti une vive douleur au bas du dos » ; que la déclaration d’accident du travail du 1er octobre 2013 indique que lorsque M. [N] a voulu attraper un sac cartonné sur une étagère très haute sans utiliser un marchepied, le sac a glissé et lui est tombé sur le visage en faisant tomber sa paire de lunettes et en lui blessant l’oeil gauche ; que dès lors qu’il n’est pas démontré que l’accident du 5 décembre 2013 est en lien avec une carence de l’employeur dans l’aménagement des locaux, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la cause de l’accident était en rapport avec le port de charges lourdes ; que le document unique d’évaluation des risques professionnels avait bien été établi pour le magasin en application des articles R. 4121-1 et suivants du code du travail, même s’il est daté du 1er janvier 2011 et ne semble pas avoir été modifié jusqu’au 5 décembre 2013 ; que ce document unique identifie un danger lié au « port de charges (livraison une fois par semaine et collection) », pour des cartons pesant entre 5 et 15 kilos, avec un « risque de lombalgie en manipulant de lourdes charges » ; qu’à titre de préconisation, il est indiqué que les cartons doivent être déposés à proximité de la réserve pour limiter les déplacements lors du déconditionnement ; que le document unique identifie également un risque de chute d’objet pour lequel il est préconisé de « ranger les charges les plus lourdes en bas des étagères et éviter le stockage en hauteur excessive » ; que si l’employeur avait conscience du danger lié au port de charges, il avait toutefois pris des mesures adéquates pour en préserver les salariés qui travaillaient dans le magasin, étant observé que selon le document unique d’évaluation des risques professionnels, l’effectif moyen de l’établissement était de deux salariés ; qu’en tout état de cause, dès lors que l’existence d’un lien entre la prétendue absence d’espace de stockage et l’accident n’est pas démontrée, aucune faute inexcusable ne peut être établie à l’encontre de l’employeur pour avoir omis de prendre des mesures nécessaires pour préserver les salariés des risques liés au stockage des vêtements ; qu’il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement ayant débouté M. [N] de ses demandes ;
Aux motifs adoptés que M. [N] ne verse au débat aucun élément permettant d’affirmer que son accident est imputable à l’absence d’espace de stockage ; qu’il se contente d’affirmer que les conditions de stockage au sein du magasin sont inappropriées, sans démontrer qu’il existe un lien entre ces conditions et son accident du travail ; qu’or il résulte de la déclaration d’accident du travail que le salarié a ressenti une douleur au bas du dos en soulevant un colis, de sorte que la cause de l’accident concerne le port de charges lourdes ; qu’il appartient ainsi à M. [N] d’apporter la preuve que l’employeur avait conscience du danger auquel il était exposé, à savoir le port de charges lourdes, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ce qu’il ne fait pas en l’espèce ; qu’en conséquence, il convient de débouter M. [N] de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable ;
Alors 1°) qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié et les accidents du travail dont il est victime ; le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ; qu’en l’espèce, il est constant que le 5 décembre 2013, M. [N] a été victime d’un accident du travail et qu’« En soulevant un colis, le salarié a ressenti une vive douleur au bas du dos et au mollet » ; qu’après avoir constaté que l’employeur avait conscience du danger lié au port de charges (p. 5), la cour d’appel, qui a affirmé qu’ « il avait toutefois pris des mesures adéquates pour en préserver les salariés qui travaillaient dans le magasin », sans indiquer quelles mesures concrètes auraient été prises ni caractériser en quoi elles auraient préservé le salarié du danger, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Alors 2°) que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que la cour d’appel a retenu qu’il n’était pas établi que M. [N] avait été contraint de déplacer le colis litigieux en raison d’un manque de place pour le stockage (p. 5, 1er §), qu’il n’était pas démontré que l’accident était en lien avec une carence de l’employeur dans l’aménagement des locaux (p. 5, 4ème §), qu’un lien entre la prétendue absence d’espace de stockage et l’accident du travail n’était pas démontré, de sorte qu’aucune faute inexcusable n’était établie à l’encontre de l’employeur pour avoir omis de prendre des mesures nécessaires pour préserver les salariés des risques liés au stockage des vêtements (p. 5) ; qu’en statuant sans avoir analysé les attestations des collègues de M. [N], dont celle de Mme [L] du 12 décembre 2015 (pièce n° 35, citée conclusions de M. [N] p. 11 et 12), indiquant « J’ai pu constater des difficultés rencontrées dans la zone de stockage (?). La configuration des lieux était inappropriée à une zone de stockage. D’autre part, le classement par tailles dans les rayonnages (étagères très hautes) à l’arrière de la boutique rendait la manutention difficile également. Nous devions monter sur une échelle pour attraper les produits demandés par les clients. Cela s’avérait une prouesse d’équilibriste?je trouvais cela dangereux », celle de M. [R] du 6 janvier 2016 indiquant que « la zone allouée n’était pas suffisamment grande pour entreposer les cartons » (pièce n° 34 citée p. 12), celle de M. [K] confirmant avoir demandé une réhabilitation de la zone de stockage « la demande formulée par Monsieur [N] et moi-même était légitime. Cette manutention répétée me provoquait souvent des douleurs au niveau du dos » (pièce n° 33 citée p. 12), de nature à établir que l’accident était en lien avec une carence de l’employeur dans l’aménagement des locaux et qu’il avait commis une faute inexcusable en n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour préserver les salariés des risques liés au stockage, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Alors 3°) que commet une faute inexcusable l’employeur qui n’évalue pas les risques dans l’entreprise et qui, après avoir établi un document unique d’évaluation des risques professionnels, attend la survenue de trois accidents du travail pour le mettre à jour ; qu’en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le document unique d’évaluation des risques professionnels établi pour le magasin le 1er janvier 2011 n’avait pas été modifié jusqu’au 5 décembre 2013 (p. 5), l’employeur ayant ainsi sans réagir la survenue de trois accidents du travail les 15 février 2011, 1er octobre 2013, 5 décembre 2013, la cour d’appel a violé l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 4121-1, L. 4121-2, L. 4121-3, R. 4121-1 et R. 4121-2 du code du travail ;
Alors 4°) et en tout état de cause, que le document unique d’évaluation des risques professionnels doit être mis à jour au moins une fois par an ou lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque est recueillie ; qu’en n’ayant pas recherché, ainsi qu’elle y était invitée par M. [N], qui rappelait que le document unique, « n’a jamais été mis à jour » (p. 14) que « l’absence de production d’un document unique mise à jour ou de mesure de prévention a provoqué la réalisation du risque professionnel » (p. 14, avant-dernier §), si l’employeur n’avait pas commis une faute inexcusable en ne procédant pas à la mise à jour de ce document, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 452-3 du code de la sécurité sociale, L. 4121-1, L. 4121-2, L. 4121-3, R. 4121-1 et R. 4121-2 du code du travail.