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Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le :Au nom du peuple français
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 5
ORDONNANCE DU 12 AOUT 2022
(n° , 2022 )
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/11868 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGA2A
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2022 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 18/06080
Nature de la décision :
NOUS, Raoul CARBONARO, Président de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Dorothée RABITA, Greffière.
Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDEUR
Madame [H] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée à l’audience par Me Vandrille SPIRE de l’AARPI 186 Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0538
à
DEFENDEUR
S.D.C. DE L’IMMEUBLE SIS [Adresse 1] ET [Adresse 3] représenté par son syndic la SAS Cabinet LOISELET ET DAIGREMONT
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Tiphaine EOCHE DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1383
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 10 Août 2022 :
Par jugement du 12 mai 2022, le tribunal judiciaire de Paris a, dans le litige opposant le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] à Mme [H] [E] :
– condamné Mme [H] [E], sous astreinte de 200 euros passé un délai de trois mois suivant la signification du présent jugement, à :
– supprimer les travaux réalisés irrégulièrement sans autorisation de l’assemblée, outrepassant l’autorisation donnée par l’assemblée générale du 21 mai 2014, à savoir :
– remettre les quatre baies vitrées (six vantaux au total) au niveau du salon dans le mur de façade de l’immeuble séparant l’appartement de la véranda,
– rabaisser la hauteur de la véranda de façon à ce que celle-ci ne dépasse plus au-dessus de l’acrotère sur la toiture de l’immeuble,
– supprimer les fenêtres à droite (cuisine) de la véranda et les remplacer par des fenêtres conformes au modèle validé lors de l’assemblée générale du 22 juin 2011 (pièce n° 19, résolution n° 25) en respectant le rythme existant des vantaux et l’harmonie générale de l’immeuble (pièce n° 18),
– supprimer les fenêtres à gauche (chambre) de la véranda et les remplacer par des fenêtres conformes au modèle validé lors de l’assemblée générale du 22 juin 2011 (pièce n° 19, résolution n° 25) en respectant le rythme existant des vantaux et l’harmonie générale de l’immeuble (pièce n° 18),
– supprimer les coffres des volets roulants pour la cuisine et la chambre placés en extérieur sur la façade de l’immeuble,
– supprimer les radiateurs AVOCA installés dans son appartement et raccordés à l’installation collective de chauffage ;
– dit que l’ensemble de ces travaux de suppression et de remise en état antérieur seront réalisés aux frais exclusifs de Mme [H] [E] et sous le contrôle de l’architecte désigné par la copropriété, dont les honoraires seront pris en charge par Mme [H] [E] ;
– dit que l’astreinte précitée courra pendant quatre mois et sera, le cas échéant, liquidée par le juge de l’exécution, conformément aux dispositions de l’article L. 131-3 du Code des procédures civiles d’exécution ;
– débouté le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] de sa demande de condamnation de Mme [H] [E] à remplacer les radiateurs ACOVA installés dans son appartement par le modèle agréé par le chauffagiste de l’immeuble avec un raccordement effectué dans les règles de l’art et sous le contrôle de ce dernier ;
– débouté le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] de sa demande de condamnation de Mme [H] [E] à faire calculer par le chauffagiste de l’immeuble et/ou un géomètre-expert de son choix la nouvelle quote-part des charges de chauffage de son appartement et à soumettre à l’assemblée générale l’approbation de la nouvelle grille de charges de chauffage correspondante ;
– débouté le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] de sa demande de condamnation de Mme [H] [E] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour « préjudice distinct de la procédure » ;
– condamné Mme [H] [E] aux entiers dépens, comprenant les honoraires de Maître Florence Houtard, désignée par ordonnance sur requête du 25 novembre 2016, mais à l’exclusion des honoraires de l’architecte de l’immeuble ;
– condamné Mme [H] [E] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– ordonné l’exécution provisoire du jugement ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles, ainsi que de leurs autres demandes.
Le jugement a été signifié le 20 juin 2022 à Mme [H] [E] qui en a interjeté appel par acte du 17 juin 2022.
Par acte d’huissier en date du 13 juillet 2022, Mme [H] [E] a assigné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] devant le premier président de la cour d’appel de Paris sur le fondement des dispositions de l’article 524 ancien du code de procédure civile aux fins suivantes :
– prononcer la recevabilité de l’intégralité des moyens et prétentions qu’elle soulève ;
– ordonner à titre principal l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement numéro RG 18/06080 du 12 mai 2022 du tribunal judiciaire de Paris ;
– à titre subsidiaire, ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement en ce qu’il a sorti la condamnation à réaliser les travaux d’une astreinte commençant à courir trois mois après la signification du jugement ;
– en tout état de cause, condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, Mme [H] [E] a maintenu ses demandes.
Elle expose que, suite à sa volonté d’agrandir son logement pour créer une chambre d’enfant, elle avait obtenu de l’assemblée générale du 21 mai 2014 l’autorisation de créer une véranda sur sa terrasse. Elle contractait alors avec un maître d”uvre et formulait une demande d’autorisation de travaux à la mairie. Un litige se nouait sur l’étendue des travaux autorisés et trois points litigieux étaient repris. Elle expose qu’il n’a jamais été question de garder des huisseries entre la véranda et l’immeuble et que les modifications apportées à la réalisation de la véranda ont été nécessaires pour assurer l’étanchéité.
Elle indique que pour se conformer au jugement, les frais nécessaires pour la mise en conformité de la véranda s’élèvent à 50’000 euros sous réserve de la faisabilité du projet, nécessitant un délai de six mois pour la réalisation, de telle sorte que l’astreinte a commencé à courir sans qu’elle soit en possibilité de commencer les travaux. Elle a de même souhaité mettre en ‘uvre les préconisations relativement au radiateur et il lui a été répondu qu’aucun diagnostic ne pouvait être effectué durant l’été, alors même que le problème ne résulterait pas de ses propres travaux mais de ceux effectués en chaufferie en 2016. Elle ne dispose pas de la somme de 70’000 euros pour la réalisation des travaux et le paiement de l’astreinte. Elle ajoute qu’il n’y a aucune urgence à exécuter rapidement des travaux en l’absence de tout désordre sur l’immeuble et la création de la véranda n’étant pas visible de l’extérieur. Elle ajoute enfin que la démolition présenterait un caractère manifestement excessif du fait de son caractère disproportionné.
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] demande à la cour de :
– débouter Mme [H] [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre ;
– condamner Mme [H] [E] à lui payer la somme de 3500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [H] [E] aux dépens.
Il expose que Mme [H] [E] est propriétaire du lot numéro 260 de la copropriété. Le règlement de copropriété énumère les aménagements communs et définit les règles applicables notamment en ce qui concerne l’harmonie de l’immeuble et la surface statique de chauffe. Il reconnaît que Mme [H] [E] a sollicité le 15 mai 2013 la création d’une véranda et que l’autorisation n’a été délivrée que par l’assemblée générale du 21 mai 2014, conditionnée au strict respect des plans annexés et sous certaines conditions d’usage. Il soutient que les travaux prévoyaient le maintien des baies vitrées d’origine clôturant la pièce du séjour en façade, permettant ainsi de conserver la séparation avec l’extérieur. Or, il affirme que Mme [H] [E] a exécuté les travaux sans respecter les plans annexés à sa demande d’autorisation. Il ajoute que dès le 8 septembre 2016, le syndic la mettait en garde et qu’elle répondait le 9 septembre 2016 en indiquant se conformer strictement aux autorisations. Plusieurs mises en demeure successives ont été adressées qui n’ont pas été suivies d’effet. Malgré plusieurs tentatives de rapprochement, les travaux entrepris ne sont pas conformes, ce qui a été reconnu devant le premier juge. S’agissant du chauffage, il précise que le changement des radiateurs ne pouvait s’opérer sans son autorisation qui n’a jamais été demandée. S’agissant des conséquences manifestement excessives, il conteste qu’elles puissent exister dès lors que Mme [H] [E] est avisée depuis près de six ans de la non-conformité des travaux et de la nécessité de se conformer aux autorisations délivrées, qu’elle a été en capacité de payer la réalisation de l’ensemble des travaux sans aucune difficulté, dont elle ne justifie pas le montant, et qu’elle ne démontre pas l’impossibilité dans laquelle elle se trouve de payer les travaux de mise en conformité. Il rappelle que Mme [H] [E] exerce la profession de mannequin et qu’elle ne donne aucune information sur ses revenus. Il ajoute, s’agissant des condamnations pécuniaires, que Mme [H] [E] n’établit pas qu’elle se trouve dans l’impossibilité de les payer au regard de son train de vie.
SUR CE
Il résulte de l’article 524 premier alinéa 2° du code de procédure civile, dans sa version applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré avant le 1er janvier 2020, que, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, le premier président statuant en référé peut l’arrêter si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
Dans le cadre des obligations de faire ou de ne pas faire, la notion de conséquences manifestement excessives s’analyse à l’aune des gênes occasionnées par l’exécution immédiate, voire au caractère irréversible de celle-ci. L’appréciation doit porter sur le caractère irréparable qu’occasionnerait l’exécution de l’obligation, qui serait alors pris en compte pour l’arrêt d’exécution provisoire.
Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.
Les conséquences manifestement excessives s’apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.
Il sera précisé, en tant que de besoin, que la présente juridiction n’est pas juge d’appel de la décision rendue en première instance et n’a donc aucunement à apprécier si la décision frappée d’appel comporte des erreurs de droit ou de fait ni à apprécier les chances de réformation dans le cadre de l’appel interjeté, les observations sur le fond du litige important donc peu.
En l’espèce, il sera donc d’abord rappelé que le délégataire du premier président, statuant sur les dispositions de l’ancien article 524 du code de procédure civile, n’a pas à apprécier les moyens sérieux de réformation de la décision entreprise, de sorte que les développements des parties sur le fond du litige ou les moyens présentés en appel importent peu et sont inopérants.
En la présente espèce, Mme [H] [E] indique que la mise en conformité exigée par le jugement créerait en elle-même des conséquences manifestement excessives de par le coût induit et du fait du caractère irréversible de la dépose de la véranda.
Pour justifier de ses allégations, Mme [H] [E] dépose un courriel émanant du constructeur de la véranda selon lequel il est impossible de baisser la toiture au niveau de l’acrotère car cela annulerait la pente nécessaire. La société indique qu’il est donc obligatoire de refaire quasiment toute la structure. Cette attestation est confirmée par le devis de la société Stefan du 6 juin 2022 ou celui de la société Leininger qui, quelle que soit l’option retenue, précise la nécessité de modifier les structures latérales.
Toutefois, le seul coût des travaux de remise en état en cas d’infirmation ne suffit pas à établir les conséquences manifestement excessives, étant rappelé que l’exécution provisoire est toujours poursuivie aux risques et périls de la personne qui en bénéficie, à charge pour elle de répondre des conséquences dommageables de l’exécution de la décision. La poursuite de l’exécution provisoire ne privera pas Mme [H] [E] de la jouissance de son bien, dès lors qu’il s’agit d’une mise en conformité et non d’une demande de suppression de la véranda créée. Il n’est pas démontré que les autres travaux dont l’exécution est demandée présentent de même un caractère d’irréversibilité. Il n’est pas non plus démontré l’impossibilité matérielle, en cas d’infirmation, de procéder à nouveau à des travaux pour revenir à l’état antérieur.
Mme [H] [E] ne dépose en outre aucun état patrimonial actuel démontrant son impossibilité de réaliser les travaux, la simple production partielle de ses avis d’imposition en démontrant pas la réalité de son patrimoine.
Dès lors, la demande principale sera rejetée.
S’agissant de l’astreinte, celle-ci doit être liquidée par le juge de l’exécution, de telle sorte que, l’argumentation relative au délai nécessaire pour réaliser les travaux et l’impossibilité d’y déférer, sera débattue devant lui dans le cadre de la procédure devant lui. Mme [H] [E] ne démontre en outre pas son impécuniosité.
La demande d’arrêt de l’exécution provisoire relativement à l’astreinte sera en conséquence rejetée.
Mme [H] [E], qui succombe, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Déboutons Mme [H] [E] de l’intégralité de ses demandes ;
Condamnons Mme [H] [E] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et [Adresse 3] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Mme [H] [E] aux dépens.
ORDONNANCE rendue par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,