COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 08 JUIN 2023
N° 2023/ 120
Rôle N° RG 19/17139 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFEDK
Société XEROX FINANCIAL SERVICES
C/
Société CHATEAU DE BEAUPRE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Romain CHERFILS
Me Etienne DE VILLEPIN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d’AIX-EN-PROVENCE en date du 28 Octobre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/01325.
APPELANTE
SAS XEROX FINANCIAL SERVICES prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège est [Adresse 2]
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Rozenn GUILLOUZO de la SELARL DBC, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
EARL CHATEAU DE BEAUPRE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée et assistée de Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Françoise PETEL, Conseiller
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE :
Le 27 février 2014, l’exploitation agricole à responsabilité Limitée (EARL) [Adresse 1] a signé avec la SARL Copy management, devenue la SAS INPS Groupe, un bon de commande concernant un photocopieur ‘multifonction Develop Ineo 3350, une imprimante fax PC Fax’, le document contractuel mentionne ‘participation au solde d’un montant de 7 780euros HT de notre part avec émission facture client’ moyennant des mensualités de 399euros pendant 20 trimestres et a souscrit le même jour un contrat de garantie et de maintenance pour une durée de 60 mois.
Le matériel a été livré le 19 mars 2014 ainsi qu’en atteste le bon de livraison signé par la EARL [Adresse 1].
Selon contrat contresigné le 12 septembre 2014 par la société XFS, cette dernière a donné en location un matériel Develop Ineo 3350 à la EARL [Adresse 1] moyennant un loyer trimestriel HT de 1 197euros pendant 60 mois.
Par acte du 23 février 2018, la société XFS a assigné l’EARL [Adresse 1] en demandant la résiliation du contrat en raison des échéances restées impayées depuis le mois de décembre 2016, sa condamnation à lui payer la somme de 7 390,30 euros à ce titre, 200euros au titre des frais de recouvrement, 4 788euros au titre des dédits du contrat, 478euros au titre de la clause pénale, 300euros au titre de frais de dossier et 200euros au titre des frais d’enlèvement et 3 000euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 28 octobre 2019, le tribunal de grande instance d’Aix en Provence a dit que le contrat liant la société XFS et l’EARL [Adresse 1] était caduc depuis le 28 octobre 2015, a débouté la SAS Xerox Financial Service de ses demandes, a déclaré sans objet l’appel en garantie de la SAS INPS Groupe, condamné la SAS Xerox Financial Service à payer à l’EARL [Adresse 1] la somme de 5 912,24euros au titre du trop perçu de loyers et 2 500euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La juridiction a retenu qu’un nouveau contrat a été conclu le 28 octobre 2015 entre la société INPS Groupe et la EARL [Adresse 1] pour du matériel financé par la SA Locam et la société INPS Groupe s’est engagé à prendre en charge l’intégralité du solde du contrat du 27 février 2014, que le matériel financé par la société XFS a été repris ainsi qu’en atteste un bon en ce sens, et que l’EARL [Adresse 1] a pu légitimement croire que la société INPS Groupe bénéficiait d’un mandat de la part de la SA XFS Groupe.
Le 7 novembre 2019, la SAS Xerox Financial Groupe a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées et notifiées le 4 avril 2023, la SAS Xerox Financial Service demande à la cour de :
Dire et juger que l’EARL [Adresse 1] a manqué à son obligation contractuelle de paiement,
Dire et juger que la société INPS Groupe n’a pas agi en qualité de mandataire de la société XFS
Dire et juger que la société INPS Groupe ne s’est jamais engagée à résilier le contrat conclu avec XFS mais au contraire à verser une participation permettant à l’EARL [Adresse 1] de solder le contrat,
Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance d’Aix en Provence,
Statuer à nouveau :
Condamner l’EARL [Adresse 1] à payer à XFS la somme de 13 302,54euros TTC correspondant aux factures impayées augmentée des intérêts de retard prévus au contrat et fixé à 3fois le taux d’intérêt légal, la somme de 360euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour les frais de recouvrement, 200euros au titre des frais d’enlèvement et 300euros au titre des frais de dossier,
Débouter l’EARL [Adresse 1] de ses demandes,
Condamner l’EARL [Adresse 1] à lui payer la somme de 5 000euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Par conclusions du 15 mars 2023, l’EARL [Adresse 1] demande à la cour de :
Constater que le contrat liant l’EARL [Adresse 1] à la société INPS Groupe s’est trouvé résilié amiablement et à titre subsidiaire en raison de son inexécution à compter du 28 octobre 2015,
Constater la reprise du matériel dont il est réclamé la restitution, suite à la signature d’un nouveau contrat portant sur un autre équipement en date du 28 octobre 2015,
Confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré caduc le contrat de location,
Confirmer le jugement sur les autres chefs critiqués et débouter la société XFS de ses demandes,
Confirmer la condamnation de la société XFS à lui restituer la somme de 5 912,24euros correspondant aux loyers réglés à torts à compter du 28 octobre 2015,
A titre infiniment subsidiairement :
Réformer le jugement querellé en ce qu’il a débouté la société [Adresse 1] de sa demande de dommages et intérêts chiffrée à la somme de 5 000euros pour procédure abusive et 7 000euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 avril 2023.
Motifs
Le 27 février 2014 la société [Adresse 1] a signé un bon de commande auprès de la société Copy Management, devenue INPS Groupe, pour un photocopieur Develop Ineo 3350 qui lui a été livré le 19 mars 2014. Des le 27 février 2014, la société Copy Management s’est engagée à ‘ renouveler l’opération à compter du 20ième mois, comprenant une nouvelle participation d’un montant de 7 780euros… le solde du dossier en cours par nous même sans pénalités par le client.’
Les parties sont en l’état d’un contrat de location conclu le 12 septembre 2014 pour financer ce matériel, moyennant le paiement d’un loyer trimestriel HT de 1 197euros pendant 60 mois.
Ces contrats successifs et concomitants ont été souscrits dans le cadre d’une opération tripartie dont la société Copy Management est le fournisseur et la société XFS est le bailleur, s’agissant d’une même et seule opération financière incluant une location.
La société [Adresse 1] a cessé de régler les loyers à la société XFS en décembre 2016.
Le 28 octobre 2015, un nouveau bon de commande a été conclu entre la société INPS Groupe et la société [Adresse 1] portant sur un photocopieur ‘Triumph Adler 261″ ainsi qu’un contrat de garantie et de maintenance, appareil financé par la société Locam.
Un avenant signé par la société INPS Groupe a précisé ‘ A cette période, le contrat du 27 février 2014 de Copy Management sera pris en charge en intégralité par nous même sans pénalité pour le client ‘.
Un bon de reprise a été émis par la société INPS Groupe portant sur le matériel ‘copieur Develop Ineo 3350 ‘ et sur lequel le représentant de la société [Adresse 1] a apposé sa signature. Ce document, non daté, porte le n° A4Y4121000014 qui correspond au numéro porté sur le bon de livraison du 19 mars 2014.
Il est acquis et non contesté que le matériel, objet du contrat du 27 février 2014 et financé par la société XFS, a été repris le 28 octobre 2015 par la société INPS Groupe et que la locataire n’en possédait plus la jouissance à compter de cette date mais qu’il n’existe aucun mandat écrit entre les deux sociétés XFS et INPS Groupe concernant la reprise du matériel.
En l’absence d’écrit , l’existence d’un mandat apparent peut être retenue lorsqu’il résulte des circonstances que le tiers a pu légitimement croire que le mandataire agissait en vertu d’un mandat et dans les limites de ce mandat.
Or en l’espèce l’employé de la société INPS Groupe a été le seul interlocuteur de la société [Adresse 1] qu’il a démarché en lui proposant le financement du matériel commandé par un contrat de location dont les conditions avaient été au préalable fixées dans le bon de commande dont il était le rédacteur. Le contrat de location, qui ne fait que reprendre les conditions exprimées dans le bon de commande, et le contrat de maintenance ont été signés par la société [Adresse 1] simultanément et par l’intermédiaire de la société INPS Groupe, seule présente devant le client.
La livraison du matériel, objet de la location et propriété de la société XFS, a été effectuée par la société INPS Groupe ainsi qu’en atteste le bon de commande.
La société XFS reconnaît elle-même que la société INPS Groupe est son revendeur sur le département des Bouches du Rhône.
Dés lors, les circonstances en l’espèce ont autorisé la société [Adresse 1] a ne pas vérifier la réalité des pouvoirs de la société INPS Groupe et notamment les limites exactes de sa mission et a pu légitimement croire à l’existence d’un mandat apparent tant au stade de la conclusion du contrat qu’au moment son intervention pour une reprise, tant il apparaît crédible que le mandataire bénéficiant d’un pouvoir de livraison et d’installation bénéficie d’un mandat similaire pour la reprise du dit matériel.
Dés lors, le contrat de location financière dépourvu de cause à compter du 28 octobre 2016 est devenu caduque à cette date. Il convient de confirmer la décision de première instance.
Sur les dommages et intérêts :
Le droit d’agir en justice est ouvert à tout plaideur qui s’estime lésé dans ses droits, son exercice ne dégénérant en abus qu’autant que les moyens qui ont été invoqués à l’appui de la demande sont d’une évidence telle qu’un plaideur, même profane, ne pourra pas ignorer le caractère abusif de sa démarche ou qu’il n’a exercé son action qu’à dessein de nuire en faisant un usage préjudiciable à autrui. En l’espèce, l’appréciation inexacte de ses droits par la société XFS n’est pas constitutive d’une faute. S’estimant lésée dans son droit, elle a pu, sans abus, demander à ce qu’il soit statué sur sa demande.
La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive doit être rejetée.
Par ces motifs la cour statuant par arrêt contradictoire :
Confirme le jugement rendu le 28 octobre 2019 par le tribunal de grande instance d’Aix en Provence,
Y ajoutant :
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Xerox Financial Services aux entiers dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT