République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 4
ARRÊT DU 06/04/2023
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N° de MINUTE : 23/354
N° RG 22/01202 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UE5L
Jugement (N° 11-21-536) rendu le 01 Février 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Roubaix
APPELANT
Monsieur [M] [T]
né le [Date naissance 2] 1998 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Hélène Vatinel, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉ
Monsieur [Y] [D]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 7]
Défaillant à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 5 MAI 2022 à l’étude
DÉBATS à l’audience publique du 31 janvier 2023 tenue par Véronique Dellelis magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique Dellelis, président de chambre
Emmanuelle Boutié, conseiller
Catherine Menegaire, conseiller
ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 avril 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 janvier 2023
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Par acte sous seing privé en date du 1er juin 2017, M. [N] [K] a donné à bail à M. [Y] [D] un appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 5] moyennant un loyer mensuel de 420 euros et une provision sur charges de 70 euros.
Suivant acte notarié en date du 26 avril 2019, M. [M] [T] a acquis l’immeuble auprès de M. [N] [K] et vient donc aux droits de bailleur de ce dernier.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 26 décembre 2020, M. [Y] [D] a indiqué à M. [M] [T] qu’il quitterait le logement à la date du 31 janvier 2021.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 15 janvier 2021, envoyé au conseil de M. [Y] [D], M. [M] [T] a pris acte de son départ au 31 janvier 2021 et fixé rendez-vous à M. [Y] [D] le 1er février 2021 pour l’état des lieux de sortie.
M. [Y] [D] ne s’est pas présenté pour effectuer l’état des lieux de sortie et remettre les clés du logement.
M. [M] [T] a fait assigner M. [Y] [D] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Roubaix aux fins d’entendre constater la régularité du congé délivré par le locataire avec effet au 31 janvier 2021, ordonner en conséquence l’expulsion de ce dernier ainsi que celle de tout occupant de son chef avec le cas échéant le concours de la force publique et d’un serrurier, condamner M. [Y] [D] à restituer les clés du logement sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l’assignation, ainsi que la somme de 420 euros au titre de l’indemnité d’occupation à compter du 1er février 2021 et jusqu’à complète libération du bien et remise des clés, outre la somme de 1200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en ce compris l’intégralité des frais d’huissier exposés par le requérant.
Suivant jugement réputé contradictoire en date du 1er février 2022, auquel il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé de la procédure antérieure au jugement et du dernier état des demandes et prétentions des parties, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Roubaix a :
– constaté la validité du congé délivré par M. [Y] [D] à M. [M] [T] mettant un terme au bail conclu le 1er juin 2017 entre M. [N] [K] et M. [Y] [D] concernant l’appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 5]) à la date du 31 janvier 2021,
– condamné M. [Y] [D] à restituer les clés dès la signification du présent jugement à M. [M] [T] ou à défaut de restitution possible, à s’acquitter du paiement du coût de la fabrication de nouvelles clés ou du changement de serrure sur présentation d’une facture par le bailleur,
– débouté M. [M] [T] de sa demande d’astreinte,
– débouté M. [M] [T] de sa demande d’expulsion en l’absence de preuve du maintien dans les lieux de M. [Y] [D],
– débouté M. [M] [T] de sa demande au titre de l’indemnité d’occupation,
– condamné M. [Y] [D] à verser à M. [M] [T] une somme de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [Y] [D] aux dépens en ce compris les frais de constat d’huissier du 29 mars 2021,
– rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision.
M. [M] [T] a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 10 mars 2022, déclaration d’appel critiquant les dispositions du jugement querellé qui ont :
-débouté l’appelant de sa demande d’expulsion en l’absence de preuves du maintien dans les lieux de l’ex-locataire ;
-débouté l’appelant de sa demande d’indemnité d’occupation ;
-condamné M. [Y] [D] au paiement de la somme de 400 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par acte d’huissier du 5 mai 2022 délivré à l’étude, M. [T] a fait signifier à M. [D] [Y] sa déclaration d’appel et ses conclusions d’appel.
M. [D] n’a pas constitué avocat.
Par ses conclusions en date du 9 mai 2022, M. [T] demande la cour de :
– infirmer le jugement du juge des contentieux de la protection en date du 1er février 2022 en ce qu’il a débouté M. [M] [T] de sa demande d’expulsion en l’absence de preuves du maintien dans les lieux de M. [Y] [D], débouté M. [M] [T] de sa demande au titre de l’indemnité d’occupation, condamné M. [Y] [D] à verser à M. [M] [T] une somme de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau:
– ordonner l’expulsion de M. [Y] [D], ainsi que tous les occupants de son chef, le cas échéant avec le concours de la force publique et d’un serrurier,
– condamner M. [D] à payer la somme de 420 euros mensuels au titre de l’indemnité d’occupation à compter du 1er février 2021 et jusqu’au 14 mars 2022, soit la somme de 5 222 euros,
– condamner M. [D] à payer la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,
– condamner M. [D] à payer la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d’appel,
– condamner M. [D] aux entiers dépens, en ce compris l’intégralité des frais d’huissier exposés par le concluant.
Il est renvoyé aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé des demandes et des moyens des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS :
Le jugement entrepris n’est critiqué qu’en ce qu’il a débouté M. [T] de sa demande tendant à voir ordonner l’expulsion de M. [D] au motif qu’il n’était pas justifié de ce que M. [T] était encore dans les lieux et débouté M. [T] de sa demande tendant à voir condamner l’intimé au paiement d’une indemnité d’occupation.
Pour refuser de prononcer l’expulsion et pour rejeter la demande de condamnation de M. [D] au paiement d’une indemnité d’occupation, le jugement entrepris s’est fondé sur les motifs suivants :
Il résulte du procès-verbal de constat en date du 29 mars 2021 que M. [D] ne s’est pas présenté au rendez-vous donné par l’huissier pour procédér à l’état des lieux de sortie en date du 29 mars 2021 auquel il a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception signée le 18 mars 2021 (étant précisé que l’adresse de convocation est illisible sur la photocopie produite). Néanmoins l’huissier de justice relevait également à la date de son constat que l’appartement semblait inoccupé
Dès lors, M. [M] [T] ne justifie pas du maintien dans les lieux de M. [Y] [D] à l’issue de la délivrance de son congé, affirmant même que ce dernier a repris la gérance d’un café à [Localité 7] qui dispose d’un logement dans lequel M. [Y] [D] se serait établi.
M. [M] [T] ne peut invoquer la seule absence de restitution des clés pour déduire l’occupation sans droit ni titre du logement et réclamer le paiement d’une indemnité d’occupation.
Un logement ne peut, cependant, être considéré comme juridiquement libre d’occupation qu’à la date de remise des clés.
La restitution des clefs doit se faire, étant précisé que les clefs sont portables et non quérables entre les mains de son propriétaire ou de son mandataire.
Dans ce dernier cas, la restitution des clés entre les mains du mandataire du bailleur n’est libératoire par principe que si le mandataire a été dûment habilité par le bailleur, sauf à prouver l’existence d’un mandat apparent
Aucun élément ne milite en l’espèce en faveur d’une remise des clefs par M. [Y] [D] à M. [M] [T] et surtout d’une remise qui serait intervenue antérieurement à la date du 14 mars 2022, date à laquelle le propriétaire a fait procéder à la reprise des lieux sur la base de l’autorisation donnée par le jugement entrepris de procéder au changement des clefs.
Tout au plus figure-t-il au dossier un échange de SMS entre bailleur et locataire aux termes duquel M. [Y] [D] apparaissait indiquer qu’il avait remis les clefs du logement au plombier, message auquel M. [M] [T] répliquait que le plombier n’avait reçu aucune clef.
Il convient de préciser que lors du constat du 29 mars 2021, ni le propriétaire du logement ni l’huissier instrumentaire ne sont entrés dans les lieux en l’absence de M. [Y] [D] et en l’absence de remise des clefs, l’huissier s’étant borné à effectuer quelques constatations faites à partir de la rue.
Par ailleurs, il restait des effets de M. [Y] [D] dans les lieux à la date du 14 mars 2022, au vu du constat d’huissier établi à cette date .
Dès lors, il ne peut être que constaté qu’à la date de la décision entreprise, le premier juge se devait de prononcer l’expulsion de M. [Y] [D], le logement donné à bail n’ayant pas été libéré.
Il convient cependant de constater par ailleurs que les locaux donnés à bail ont effectivement été repris à la date du 14 mars 2022.
Il y a lieu par ailleurs de dire que M. [Y] [D] est redevable d’une indemnité d’occupation jusqu’à la date du 14 mars 2022, ladite indemnité d’occupation ayant pour objet de compenser le préjudice subi par le bailleur du fait du défaut de restitution du logement en temps utile.
Ladite indemnité d’occupation sera fixée, par référence au loyer contractuel et en l’absence d’autres éléments, à la somme de 420 euros par mois soit la somme totale de 5222 euros réclamée pour la période du 1er février 2021 au 14 mars 2022.
Sur les dépens et sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :
Le sort des dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance ont été exactement réglés par le premier juge. Il convient de confirmer le jugement entrepris de ces chefs.
M. [Y] [D] sera condamné aux dépens d’appel.
Il sera fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel comme indiqué au présent dispositif, le montant de l’indemnité allouée tenant compte des frais de constat du 14 mars 2022.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de l’appel, qui ne porte que sur le rejet de la demande d’expulsion, le rejet de la demande de condamnation de M. [D] au paiement d’une indemnité d’occupation, et le quantum de l’indemnité allouée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance,
Réforme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le quantum de la condamnation prononcée contre M. [Y] [D] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la disposition du jugement entrepris de ce chef étant confirmée,
Statuant à nouveau,
Dit que l’expulsion de M. [Y] [D] du logement donné à bail devait être prononcée mais constate toutefois que le logement a été repris à la date du 14 mars 2022 ;
Condamne M. [Y] [D] à payer à M. [M] [T] la somme de 5 222 euros à titre d’indemnité d’occupation pour la période allant du 1er février 2021 au 14 mars 2022 ;
Condamne M. [Y] [D] aux dépens d’appel ;
Le condamne à payer à M. [M] [T] une indemnité de 1000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.
Le Greffier
Fabienne Dufossé
Le Président
Véronique Dellelis