Mandat apparent : 22 juin 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/06045

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Mandat apparent : 22 juin 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/06045

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 22 JUIN 2022

N° RG 19/06045 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LKD3

SAS CHANTIERS D’AQUITAINE

c/

SAS CGE DISTRIBUTION

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 octobre 2019 (R.G. 2019F00017) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 15 novembre 2019

APPELANTE :

SAS CHANTIERS D’AQUITAINE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2]

représentée par Maître Mounia BELHAIMER de la SELASU QUADRILEGE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS CGE DISTRIBUTION, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1] / FRANCE

représentée par Maître Pauline RAYMOND, substituant Maître Frédéric BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 11 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie PIGNON, Présidente,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

La société CGE Distribution est spécialisée dans le commerce de gros de matériel électrique.

Elle avait pour cliente la société Chantiers d’Aquitaine qui passait régulièrement auprès d’elle des commandes que ses employés venaient retirer au comptoir de son magasin, après établissement d’un bon de livraison.

Par acte de cession du 30 juin 2017, la société Chantiers d’Aquitaine a cédé une partie de son activité, à savoir un fonds de commerce d’électricité en bâtiment, à la société Cenov sécurité avec effet au 1er juillet 2017, ce dont elle a averti la société CGE Distribution.

Par courrier recommandé du 24 janvier 2018, la société Cge distribution a mis en demeure la société Chantiers d’Aquitaine d’avoir à lui régler des factures impayées portant sur des commandes passées avant le 30 juin 2017.

La société Chantiers d’Aquitaine a refusé de régler les sommes sollicités soutenant qu’elle n’avait pas retiré auprès du fournisseur les produits dont il lui était demandé le paiement.

Par acte du 1er décembre 2018, la société Cge distribution a fait assigner la société Chantiers d’Aquitaine devant le tribunal de commerce de Bordeaux en paiement de la somme de 53 953,70 euros au principal.

Par jugement contradictoire du 21 octobre 2019, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

– condamné la société Chantiers d’Aquitaine à payer à la société Cge distribution la somme principale de 53 953,70 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2018,

– ordonné la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 24 janvier 2018 jusqu’à parfait paiement,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné la société Chantiers d’Aquitaine à verser à la société Cge distribution une indemnité de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Chantiers d’Aquitaine aux dépens.

Par déclaration du 15 novembre 2019, la société Chantiers d’Aquitaine a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société Cge distribution.

Le 24 décembre 2019, une mesure de médiation judiciaire a été proposée aux parties, qui ne se sont pas accordées sur le principe d’une acceptation.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 23 juin 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Chantiers d’Aquitaine demande à la cour de :

– réformer totalement le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en toutes ses dispositions,

– et statuant à nouveau,

– débouter la société Cge distribution l’ensemble de ses demandes et prétention formulées à l’encontre de la société Chantiers d’Aquitaine,

– condamner la société Cge distribution au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société Chantiers d’Aquitaine soutient que la société Cge distribution a , à tort, livré les produits commandés à la société Cenov sécurité à qui elle n’avait pas donné mandat de retirer le matériel pour son compte; que la société Cge Distribution n’a pas procédé aux vérifications requises; que les bons de commande ont été signés par un de ses anciens salariés qui n’avait pas qualité pour le faire; que le premier juge a fait à tort application de la théorie du mandat apparent.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 26 mars 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Cge distribution demande à la cour de :

– débouter la société Chantiers d’Aquitaine de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer dans l’intégralité de ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 21 octobre 2019,

– y ajoutant,

– condamner la société Chantiers d’Aquitaine à une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens.

La société Cge distribution fait notamment valoir qu’elle produit les quatre bons de commande et les quatre bons de livraisons correspondant aux quatre factures dont elle sollicite le paiement; que l’appelante est tenue par les commandes qu’elle a passées; que la cession de fonds de commerce intervenue entre les sociétés Chantiers d’Aquitaine et Cenov’sécurité ne saurait remettre en cause l’engagement de la société Chantiers d’Aquitaine à son égard ; que la vente d’un fonds de commerce n’emporte pas de plein droit cession à la charge de l’acheteur du passif des obligations dont le vendeur pourra être tenu en raison des engagements initialement souscrits par lui ; que la preuve des livraisons est rapportée par la production des bons de livraisons signés par le client.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 20 avril 2022 et le dossier a été fixé à l’audience du 11 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

MOTIFS

La société appelante ne conteste pas qu’elle a bien passé les commandes dont il est sollicité le paiement avant la cession de son fonds de commerce.

Si elle a effectivement averti sa cocontractante qu’elle cédait son fonds de commerce à la société Cenov sécurité par mail du 11 juillet 2017, elle n’a pas sollicité de celle-ci l’annulation desdites commandes indiquant au contraire à celle-ci que les ‘livraisons et facturations de matériel faites à partir du 1er juillet devront être libellées au nom du nouveau propriétaire, y compris pour des commandes passées avant cette date par la société Chantiers d’aquitaine-Cenov’.

Or, il n’est pas établi, ni même argué d’ailleurs, qu’elle ait reçu l’accord de la société Cenov pour que celle-ci prenne à sa charge le paiement desdites commandes.

Dès lors, même si la société Chantiers d’Aquitaine a réitéré par mail du 12 juillet 2017 sa volonté de voir facturer le matériel qu’elle avait commandé à la société Cenov, la société CGE Distribution ne pouvait faire ainsi à défaut d’accord de celle-ci.

La société CGE Distribution a ainsi mis à disposition de sa cliente le matériel commandé qui a été retiré par M. [O], salarié de la société Chantiers d’Aquitaine jusqu’à la date de cession de son fonds de commerce à la société Cenov Sécurité.

Comme indiqué par le premier juge, rien n’établit que la société CGE Distribution était informée du fait que M. [O] n’était plus salarié de la société Chantiers d’Aquitaine et qu’il prenait possession des marchandises de manière indue pour son nouvel employeur.

Contrairement à ce qui est soutenu, les bons de livraison ne comportent pas d’anomalie apparente.

Dans la mesure en outre où M.[O] était venu régulièrement retirer des marchandises au comptoir de la société CGE Distribution , qu’il a apposé sur certains bons de livraison la mention’matériel pris et posé par nos soins pour le compte de la société Exedra Chantier d’Aquitaine’ et que les parties entretenaient des relations commerciales de confiance, la société CGE Distribution a pu légitimement croire que M. [O] avait le pouvoir de retirer les marchandises commandées par la société Chantiers d’Aquitaine selon la théorie du mandat apparent.

Il ne peut dès lors lui être reproché de ne pas avoir vérifié l’étendue des pouvoirs de M. [O].

La décision de première instance sera ainsi confirmée en ce qu’elle n’a pas retenu de faute à l’encontre de la société CGE Distribution et a débouté la société Chantiers d’Aquitaine de ses demandes.

La société Chantiers d’Aquitaine sera condamnée à verser la somme de 2000 euros à la société CGE Distribution au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort

Confirme la décision rendue le 21 octobre 2019 par le tribunal de commerce de Bordeaux,

y ajoutant

Condamne la société Chantiers d’Aquitaine à verser la somme de 2000 euros à la société CGE Distribution au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Chantiers d’Aquitaine aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidente, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 


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