ARRET N°
du 19 septembre 2023
N° RG 23/00371 – N° Portalis DBVQ-V-B7H-FJS5
S.A.M.C.V. SMABTP
c/
S.E.L.A.S. SELAS PHARMACIE DU PREMIER MAI
S.A.S. SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES
S.A. MMA IARD
S.A. GAN ASSURANCES IARD
Formule exécutoire le :
à :
la SCP BADRE HYONNE SENS-SALIS DENIS ROGER DAILLENCOURT
la SCP SCRIBE-BAILLEUL-SOTTAS
la SCP HERMINE AVOCATS
la SELARL RAFFIN ASSOCIES
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2023
APPELANTE :
d’une ordonannce rendue le 15 avril 2022 par le Juge de la mise en état de [Localité 1]
S.A.M.C.V. SMABTP
[Adresse 9]
[Localité 7]
Représentée par Me Colette HYONNE de la SCP BADRE HYONNE SENS-SALIS DENIS ROGER DAILLENCOURT, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant, et Maître Jean-Louis CAPELLE, avocat au barreau de BETHUNE, avocat plaidant
INTIMEES :
S.E.L.A.S. SELAS PHARMACIE DU PREMIER MAI
[Adresse 11]
[Localité 1]
Représentée par Me Angelique BAILLEUL de la SCP SCRIBE-BAILLEUL-SOTTAS, avocat au barreau de L’AUBE
S.A.S. HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Angelique BAILLEUL de la SCP SCRIBE-BAILLEUL-SOTTAS, avocat au barreau de L’AUBE
S.A. MMA IARD
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS
S.A. GAN ASSURANCES IARD Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 542 063 797, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit audit siège
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représentée par Me Damien JOCHUM de la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre
Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère
Madame Florence MATHIEU, conseillère
GREFFIER :
Madame Frédérique ROULLET, greffière lors des débats
Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors de la mise à disposition
DEBATS :
A l’audience publique du 03 juillet 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 septembre 2023
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Par actes d’huissier en date des 11 et 20 août 2020, la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI a fait assigner la SMABTP, la SA GAN ASSURANCES IARD et la MMA IARD devant le tribunal judiciaire de [Localité 1], sur le fondement des articles 1147 du code civil et 124-3 du code des assurances, aux fins d’obtenir, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, la condamnation de’:
-la SMABTP, assureur de la SARL BEGARD PHILIPPE à lui payer la somme de 13.143,15 euros ht au titre des travaux de reprise et de 30.750 euros au titre du préjudice d’exploitation,
-la SMABTP, assureur de la SARL AROME à lui payer la somme de 13.143,15 euros ht au titre des travaux de reprise et de 30.750 euros au titre du préjudice d’exploitation,
-la compagnie d’assurance MMA, assureur de la SARL CAR SOL, à lui payer la somme de 30.667,35 euros ht au titre des travaux de reprise et de 71.750 euros au titre du préjudice d’exploitation,
-la compagnie d’assurance GAN ASSURANCES, assureur de la SARL AB DECO, à lui payer la somme de 30.667,35 euros ht au titre des travaux de reprise et de 71.750 euros au titre du préjudice d’exploitation,
-toutes les compagnies d’assurances in solidum à lui payer la somme de 5.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.
La SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES est intervenue volontairement à l’instance.
Dans l’assignation, la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI a exposé avoir confié le 4 mai 2013 à la SARL PHILIPPE BEGARD le réagencement d’une pharmacie située au [Adresse 11] à [Localité 1] et concluait à cette fin un marché de maîtrise d »uvre.
La SARL AROME a été choisie en qualité d’entreprise générale de travaux, le gros ‘uvre était confié à la SARL CARSOL, assurée auprès de la SA MMA, et le lot peinture était attribué à la SARL AB DECO, assurée auprès de la société GAN ASSURANCES, le coût total de l’opération était évalué à la somme de 378 461,35 euros.
Les travaux ont nécessité la réalisation d’une nouvelle chape pour le sol de la pharmacie et ont fait l’objet d’une réception le 9 octobre 2013 avec réserves notamment quant à des fissures dans la chape.
Une expertise judiciaire a été ordonnée suivant décision du juge des référés, en date du 27 juin 2017, du président du tribunal de grande instance de [Localité 1]. L’expert Monsieur [E] [C] a déposé son rapport le 5 septembre 2019.
Saisi initialement par la SMABTP, le juge de la mise en état a’:
-déclaré la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI recevable en son action dirigée à l’encontre de la SMABTP, la SA GAN ASSURANCES IARD et la SA MMA IARD,
-déclaré la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES recevables en leur action dirigée à l’encontre de la SMABTP, la SA GAN ASSURANCES IARD et la SA MMA IARD, comme n’étant pas prescrite,
-débouté la SA MMA IARD de sa demande d’injonction de communiquer les pièces suivantes’:
-le ou les marchés la liant à la société CARSOL’,
-l’ensemble des devis et factures émanant de la société CARSOL,
-la justification comptable des paiements effectués au profit de la société CARSOL,
-le CCTP relatif au lot éventuellement confié à la société CARSOL,
-les comptes-rendus de chantier relatifs à l’exécution des travaux imputés à l’entreprise,
-dit que les dépens et les frais suivront le sort de l’instance principale.
Par un acte en date du 23 février 2023, la SMABTP a interjeté appel de cette ordonnance.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 16 juin 2023, la SMABTP (assureur de la SARL BEGARD) conclut à l’infirmation de l’ordonnance déférée et demande à la cour de’:
-déclarer la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI irrecevable en son action pour défaut de qualité à agir et subsidiairement pour cause de prescription,
-déclarer la SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES (ci-après HPI) irrecevable en son action pour cause de prescription,
-condamner les deux sociétés à lui payer la somme de 4.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.
Elle expose que le contrat de maîtrise d’oeuvre a été signé par la SAS HPI avec la SARL PHILIPPE BEGARD et que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI n’a aucune qualité à agir contre elle sur le fondement contractuel.
Elle soutient que le fait que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI soit destinataire du chantier critiqué, l’entité qui a payé le chantier ou encore jouisse des travaux réalisés ne permettent pas de caractériser l’intérêt à agir de cette dernière au titre d’un contrat conclu entre la SARL BEGARD et la société HPI.
Subsidiairement, elle invoque la prescription de l’action dans la mesure où l’assignation en référé délivrée le 7 juin 2017 n’a pas précisé la qualité de la concluante. Elle précise que l’effet interruptif de prescription n’a cours que relativement aux contrats d’assurance, de sorte qu’il est nécessaire que la police soit visée, ou à tout le moins la qualité concernée. Elle ajoute que le délai pour agir recommençait ensuite à agir à compter du prononcé de l’ordonnance de référé du 27 juin 2017 et non du dépôt du rapport d’expertise.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 19 juin 2023, la SA GAN ASSURANCES IARD (assureur de la société AB DECO) conclut à l’infirmation de l’ordonnance entreprise et demande à la cour de déclarer la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS TOTUM PHARMACIENS, venant aux droit de HPI, irrecevables en leurs demandes pour défaut de qualité et de droit à agir. Elle sollicite en outre la condamnation de la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS TOTUM PHARMACIENS, venant aux droit de HPI, à lui payer la somme de 4.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.
Elle expose que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI est uniquement locataire et donc titulaire d’un simple droit de jouissance sur l’ouvrage et n’a pas qualité à agir en l’absence de titre de propriété et de contrats de marché signés par ses soins.
Elle précise que le contrat d’assurance décennale ne couvre que les chantiers objets d’une déclaration d’ouverture entre le 1er janvier et le 31 décembre 2016 et que les travaux critiqués ont été réceptionnés le 9 octobre 2023.
Elle soutient que la SAS TOTUM PHARMACIENS est intervenue volontairement en cours de procédure, de sorte qu’elle est recevable à former des demandes à l’encontre de cette dernière.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 17 avril 2023, la SA MMA IARD, assureur de la société CARSOL, conclut à l’infirmation de l’ordonnance entreprise et demande à la cour de déclarer la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS TOTUM PHARMACIENS, venant aux droit de HPI, irrecevables en leur action pour défaut de qualité à agir et cause de prescription. Elle sollicite en outre le paiement de la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.
Elle fait valoir que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI n’a jamais produit le moindre contrat d’entreprise la liant à la société CARSOL et qu’il en est de même pour la société HPI.
Subsidiairement, elle invoque la prescription de l’action, faute de précision de la qualité de la SA MMA IARD dans l’assignation devant le juge des référés. Elle estime, au surplus, que le délai biennal aurait recommencé à courir à compter de la décision ayant ordonné la mesure d’expertise, soit le 27 juin 2017.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 19 juin 2023, la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS TOTUM PHARMACIENS, venant aux droit de HPI, concluent à la confirmation de l’ordonnance déférée et demande à la cour de rectifier ladite ordonnance en remplaçant l’identité de la SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES par la dénomination sociale TOTUM PHARMACIENS et de déclarer irrecevable comme nouvelle la demande formée par la SA GAN ASSURANCES IARD à l’égard de la SAS TOTUM PHARMACIENS.
Elles sollicitent en outre la condamnation de la SMABTP à leur verser à chacune la somme de 5.000 euros pour appel dilatoire et abusif et à toutes les compagnies d’assurance solidairement à leur payer à chacune la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.
Elles exposent que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI, en sa qualité de preneur a un intérêt à agir car les stipulations du contrat de bail notarié du 11 septembre 1997 mettent à sa charge l’intégralité des réparations pendant la durée de la location.
Elles indiquent que le preneur qui a reçu mandat du bailleur de satisfaire à l’obligation d’entretien et de conservation des lieux a, dans cette situation, qualité pour agir en garantie décennale.
Elles expliquent qu’à l’origine c’est HPI qui était maître de l’ouvrage et qu’ensuite c’est la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI qui l’est devenue, Monsieur [K] [N], président de la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI étant présent sur tous les documents contractuels et mentionnés sur les comptes-rendus de chantier. Elle invoquent le mandat apparent.
Elles font valoir que dès la première expertise amiable en août 2015, la SMABTP a agi en qualité d’assureur de la SARL AROME et de la SARL BEGARD, puis en février 2016, janvier 2017, février 2017.
Elles soutiennent que le délai de prescription court à compter du rapport d’expertise.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 juin 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
*Sur la qualité à agir de la SELAS PHARMACIE DU IER MAI à l’encontre de la SMABTP et de MMA IARD
La SELAS PHARMACIE DU 1er MAI, dont le président est Monsieur [K] [N], exploite une pharmacie située à [Adresse 11]. Cette société est locataire des locaux suivant bail commercial en date du 11 septembre 1997, cédé le 1er octobre 2010 et renouvelé par acte authentique reçu le 6 novembre 2014.
Le litige dont s’agit, porte sur des travaux réalisés en 2013 en vue du réaménagement des locaux de la pharmacie. S’il est constant que le contrat de marché de maîtrise d’oeuvre en date du 5 avril 2013, s’agissant des travaux projetés a été convenu entre le GROUPEMENT HPI dont le siège social est situé à [Adresse 10] et la SARL Philippe Bégard et que ce même contrat désigne en qualité de maître d’ouvrage le GROUPEMENT HPI, aux termes de l’acte d’engagement du même jour, toutefois, dans un laps de temps contemporain, la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI démontre qu’une novation s’est opérée à son profit.
Ainsi, la cour par une appréciation souveraine, de nombreux éléments constituant un faisceau d’indices, estime que la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI s’est substituée en qualité de maître d’ouvrage au GROUPEMENT HPI, et que cette situation a été acceptée par le maître d’oeuvre et de facto toutes les sociétés participant à la réalisation des travaux.
En effet, il ressort’:
– du «’règlement particulier appel d’offre’» ainsi que le «cahier des clauses administratives particulières’» en date du 21 mai 2013, qu’est désignée en qualité de maître d’ouvrage la «’PHARMACIE DU 1er MAI-Monsieur [K] [N] – [Adresse 4]’»,
– de divers comptes-rendus de chantier, le premier datant du 10 juin 2023, que le maître d’ouvrage désigné est «PHARMACIE DU 1er MAI» et qu’au surplus dans les coordonnées des intervenants, il est stipulé «’Maître d’ouvrage’: M. [K] [N]’»,
– des procès-verbaux de réception des travaux des 9 octobre 2013 et 10 décembre 2013 que le maître d’ouvrage est désigné comme étant la «’ PHARMACIE DU IER MAI’»,
– de plusieurs factures émises à compter du 30 avril 2013, par la SARL Philippe Bégard et la SARL AROME à l’attention de la «’ PHARMACIE DU IER MA1’» que le maître d’ouvrage est identifié comme étant la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI, cette dernière justifiant au demeurant par la production de ses comptes courants professionnels détenus auprès de la Caisse d’Epargne et du Crédit Mutuel avoir réalisé les paiements au profit de la SARL Bégard (maître d’oeuvre) et de la SARL AROME.
Il résulte de ces éléments que la cession du contrat datée du 5 avril 2013 a été acceptée dès le 21 mai 2013 puisque l’effectivité de ce contrat s’est matérialisée à compter du cahier des clauses administratives particulières et du règlement particulier d’appel d’offre qui ont désigné la «’ SELAS PHARMACIE DU 1er MAI- Monsieur [K] [N], [Adresse 11] à [Localité 1]’» en qualité de maître d’ouvrage, l’intervention de cette dernière ayant été continue à compter de cette même date.
Par ailleurs, la cour comme le premier juge, relève que le bail commercial initial en date du 11septembre 1997, renouvelé suivant acte authentique du 6 novembre 2014, stipule que le bailleur des locaux situés à [Localité 1] (10) [Adresse 11] ne doit que le clos et le couvert, tous les aménagements étant à la charge du locataire, la SELAS PHARMACIE DU IER MAI ayant donc eu la charge de faire réaliser les travaux litigieux.
En outre, la SA MMA IARD soutient que la SARL CARSOL ne serait intervenue qu’en qualité de sous-traitant et que la SELAS PHARMACIE DU IER MAI n’aurait donc pas qualité à agir à son encontre. Ce moyen est inopérant, en l’espèce, puisqu’il porte sur le fond du litige et ne constitue pas un défaut de qualité a agir qui concerne la seule SELAS PHARMACIE DU IER MAI.
Enfin l’intervention volontaire de la SAS HDI, aux droits de laquelle intervient désormais TOTUM PHARMACIENS est sans incidence sur la qualité à agir de la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI, dans la mesure où il s’agit de la holding de la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI et que cette intervention a été une réponse à l’argumentaire articulé par les compagnies d’assurances défenderesses.
Dans ces conditions, il convient de constater que la SELAS PHARMACIE DU 1er MAI est le maître de l’ouvrage s’agissant des travaux critiqués d’aménagement de la pharmacie et a donc qualité à agir à l’encontre des compagnies d’assurances SMABTP et MMA IARD.
Par conséquent, il convient de confirmer l’ordonnance entreprise de ce chef.
*Sur la qualité à agir de la SELAS PHARMACIE DU IER MAI à l’encontre de la SA GAN ASSURANCES
Dans le jugement déféré, la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI a été déclarée recevable à agir à l’encontre de la SA GAN ASSURANCES. Aussi, en vertu de l’article 564 du code de procédure civile, la SA GAN ASSURANCES est recevable à invoquer l’absence du droit d’agir de la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI, laquelle a pour but de faire échec à la demande de condamnation de cette dernière à son encontre sur le fondement de l’action directe.
Devant la cour, la SA GAN ASSURANCES assignée en qualité d’assureur de la SARL AB DECO qui est intervenue sur le chantier litigieux soutient que l’attestation d’assurance produite aux débats par la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI ne démontre pas qu’elle garantissait les travaux réalisés par la SARL AB DECO (désormais en liquidation judiciaire) sur la période visée.
Il y a lieu de relever que l’attestation d’assurance produite par la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI couvre les chantiers «’objets d’une déclaration d’ouverture de chantier entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2016’».Or, les travaux critiqués ont été réceptionnés le 9 octobre 2013, de sorte que la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI, ni même sa holding, la société TOTUM PHARMACIENS ne démontre l’existence d’un contrat d’assurance souscrit auprès de la SA GAN ASSURANCES couvrant les garanties invoquées au jour de l’ouverture du chantier.
Dans ces conditions, il convient de déclarer la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI, et la société TOTUM PHARMACIENS irrecevables en leur action à l’encontre de la SA GAN ASSURANCES.
Par conséquent, il convient d’infirmer le jugement déféré de ce chef.
*Sur la prescription de l’action engagée par la SELAS PAHARMACIE DU 1er MAI
L’article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
L’article 2241 alinéa 1 du même code énonce que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion, l’article 2239 énonce que la prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction avant tout procès et l’article 2242 prévoit que l’interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance.
Enfin, l’article L 114-2 alinéa 1er du code des assurances dispose que la prescription est interrompue par une des causes ordinaires d’interruption de la prescription et par la désignation d’experts à la suite d’un sinistre.
Il est constant qu’en matière d’action directe contre l’assureur, le point de départ de la prescription biennale se situe à la date de l’assignation en référé délivrée à l’assuré.
Comme devant le premier juge, la SMABTP oppose à la SELAS PHARMACIE DU IER MAI et à la SAS HDI, devenue TOTUM PHARMACIENS, que la prescription biennale prévue en matière d’action directe à l’égard de l`assureur n’a pas été interrompue, ni la prescription quinquennale s’agissant de la responsabilité contractuelle, dès lors qu’elle n’a pas été assignée spécifiquement en qualité d`assureur des SARL AROME et CARSOL.
En l’espèce, le dernier procès-verbal de réception des travaux avec réserves est intervenu le 10 décembre 2013. Par acte d’huissier en date du 7 juin 2017, la SELAS PHARMACIE DU IER MAI a fait assigner la SMABTP en référé, aux fins d’obtenir l’organisation d’une mesure d’expertise dans lecadre des désordres relatifs au réagencement de la pharmacie du 1er mai située à [Localité 1]. Par décision du 27 juin 2017, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et l’expert a déposé son rapport le 5 septembre 2019.
L’assignation dans le cadre de la présente procédure a été délivrée à la SMABTP le 11 août 2020 et la SAS HDI est intervenue volontairement par conclusions d’incident du 19 janvier 2021.
La cour, comme le premier juge, souligne que la SMABTP a été valablement assignée dans le cadre de l’instance en référé, le demandeur n’ayant pas l’obligation de développer tous les fondements juridiques envisagés pour l’audience au fond, ni de lister les griefs formulés à son égard, s’agissant d’une seule demande de mesure d’instruction. De plus, il y a lieu de relever que la SMABTP n’a pas interjeté appel de l’ordonnance du 27 juin 2017 et a participé aux opérations d’expertise.
S’agissant de la prescription quinquennale, il y a lieu de constater que le délai a été interrompu par l’assignation en référé délivrée le 7 juin 2017, puis a commencé à recourir pour une nouvelle durée de 5 ans à compter du dépôt du rapport d’expertise, en date du 5 septembre 2019, de sorte que la prescription n’est pas acquise.
S’agissant de la prescription biennale, l’interruption alléguée produisant ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance, le dépôt du rapport étant le 5 septembre 2019 et l’assignation au fond du 11 août 2020, aucune prescription n’est acquise.
Ce même raisonnement s’applique également à la société MMA IARD, contre laquelle l’assignation au fond a été délivrée le 20 août 2020.
Dans ces conditions, il convient de déclarer la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la société TOTUM PHARMACIENS recevables en leur action formée à l’encontre de la SMABTP et de MMA IARD et de confirmer l’ordonnance entreprise de ce chef.
*Sur les autres demandes
Ester en justice, tout comme former appel étant un droit, en l’absence de caractérisation d’une faute dans l’exercice du droit d’appel de la SMAPTB, il convient de débouter la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la société TOTUM PHARMACIENS de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts.
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la SMABTP et MMA IARD succombant, elles seront tenues in solidum aux dépens d’appel.
Les circonstances de l’espèce commandent de condamner in solidum la SMABTP et MMA IARD à payer à la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et à la société TOTUM PHARMACIENS, à chacune, la somme de 2.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles et de débouter toutes les autres parties de leurs demandes respectives sur ce même fondement.
PAR CESMOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Constate que la société TOTUM PHARMACIENS intervient désormais aux droits de la SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES.
Infirme l’ordonnance rendue le 15 avril 2022, par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de [Localité 1], en ce qu’elle a déclaré recevables les actions formées par la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et la SAS HOLDING DE PHARMACIES INDEPENDANTES à l’encontre de la SA GAN ASSURANCES IARD.
Et statuant à nouveau,
Déclare irrecevables les actions formées par a SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et à la société TOTUM PHARMACIENS à l’encontre de la SA GAN ASSURANCES IARD.
La confirme pour le surplus,
Y ajoutant,
Condamne in solidum les sociétés SMABTP et MMA IARD à payer à la SELAS PHARMACIE DU 1ER MAI et à la société TOTUM PHARMACIEN, à chacune, la somme de 2.000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.
Déboute toutes les autres parties de leurs demandes respectives en paiement sur ce même fondement.
Condamne in solidum les sociétés SMABTP et MMA IARD aux dépens d’appel.
Le greffier La présidente