Maintien d’une mesure d’hospitalisation complète

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Maintien d’une mesure d’hospitalisation complète
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L’affaire concerne M. [I] [B], admis en soins psychiatriques sans consentement suite à des agressions avec un couteau. Après une ordonnance d’irresponsabilité pénale, il a été maintenu en hospitalisation complète sous contrainte. Suite à un appel pour abus de pouvoir et surmédicamentation, il demande un changement d’établissement de soins. Malgré des améliorations de son état, les avis médicaux et du ministère public recommandent le maintien de son hospitalisation en UMD. Le préfet du Tarn n’a pas comparu à l’audience. L’affaire a été mise en délibéré pour le 18 janvier 2024.

La solution juridique apportée à cette affaire est la confirmation de l’ordonnance entreprise, qui ordonne la poursuite de la prise en charge de M. [B] en Unité pour Malades Difficiles (UMD) en raison de la persistance d’un risque pour la sûreté des personnes et d’une atteinte grave à l’ordre public. Malgré une bi-thérapie neuroleptique permettant de contenir ses symptômes psychotiques, M. [B] maintient une attitude contestataire et opportuniste vis-à-vis des soins, nécessitant une hospitalisation complète en UMD. Le transfert vers un autre établissement ne relève pas de son choix.

1. Il est important de respecter les décisions prises par le représentant de l’Etat en matière de santé publique, notamment en ce qui concerne la prise en charge des patients présentant un risque pour la sûreté des personnes ou une atteinte grave à l’ordre public.

2. Il est essentiel de suivre les recommandations des professionnels de santé concernant le traitement et la prise en charge des patients, même en cas de contestation de la part du patient. La bi-thérapie neuroleptique actuelle, par exemple, est jugée indispensable cliniquement malgré les réticences du patient.

3. Les soins et l’hospitalisation complète en Unité pour Malades Difficiles (UMD) doivent être poursuivis tant que le patient présente un comportement violent, une opposition aux soins et un manque d’autonomie psychique et dans les actes de la vie quotidienne. Il est important de maintenir une alliance thérapeutique solide pour favoriser l’amélioration de l’état psychique du patient.

Contexte de l’affaire

Dans cette affaire, il est question de la prise en charge d’un patient souffrant de troubles psychiatriques et placé en unité pour malades difficiles (UMD). Le patient présente des comportements violents et une opposition aux soins, ce qui justifie son hospitalisation.

Argumentation des psychiatres

Les certificats médicaux et les avis des soignants mettent en avant le fait que le patient présente un état psychique fluctuant, avec des périodes de calme mais aussi des épisodes de violence et de refus de soins. Malgré une bi-thérapie neuroleptique efficace, le patient reste contestataire et peu impliqué dans sa prise en charge. Les soignants estiment donc que la poursuite des soins en UMD est nécessaire.

Décision du juge

Le juge confirme l’ordonnance initiale qui prévoit le maintien du patient en UMD. Il considère que le risque pour la sûreté des personnes et l’ordre public persiste, et que le patient ne peut pas décider de son transfert vers un autre établissement. La décision est donc confirmée et le patient reste hospitalisé en UMD.

Réglementation applicable

– Article L3213-1 du code de la santé publique

Avocats et magistrats intervenants

– Me Pierre DELIVRET, avocat au barreau de TOULOUSE

Mots-clefs

– Motivation
– Article L3213-1 du code de la santé publique
– Certificats médicaux
– Avis du collège des soignants
– Etat psychique fluctuant
– Alliance thérapeutique
– Violences
– Bi-thérapie neuroleptique
– Symptômes psychotiques
– Agissements violents
– Manque d’autonomie
– Projet thérapeutique
– Sortie thérapeutique
– Poursuite des soins en UMD
– Attitude contestataire
– Démarches procédurières
– Implication dans les soins
– Activités occupationnelles
– Ateliers psycho éducatifs
– Risque pour la sûreté des personnes
– Atteinte grave à l’ordre public
– Sur-médicamentation
– Transfert du malade

Définitions juridiques

– Motivation: ensemble des facteurs internes et externes qui poussent un individu à agir dans un certain sens
– Article L3213-1 du code de la santé publique: texte de loi français qui définit les conditions de soins psychiatriques sans consentement
– Certificats médicaux: documents émis par un médecin attestant de l’état de santé d’un patient
– Avis du collège des soignants: opinion collective des professionnels de santé impliqués dans la prise en charge d’un patient
– Etat psychique fluctuant: état mental qui varie dans le temps
– Alliance thérapeutique: relation de confiance et de collaboration entre un patient et son thérapeute
– Violences: actes agressifs ou dommageables envers autrui
– Bi-thérapie neuroleptique: traitement médicamenteux combinant deux neuroleptiques
– Symptômes psychotiques: manifestations cliniques associées à des troubles psychotiques tels que les hallucinations ou les délires
– Agissements violents: comportements agressifs ou hostiles
– Manque d’autonomie: incapacité à prendre des décisions ou à agir de manière indépendante
– Projet thérapeutique: plan d’intervention personnalisé visant à améliorer la santé et le bien-être d’un patient
– Sortie thérapeutique: autorisation de quitter temporairement un établissement de soins pour des raisons thérapeutiques
– Poursuite des soins en UMD: maintien des soins psychiatriques en unité pour malades difficiles
– Attitude contestataire: opposition ou refus de se conformer à des règles ou des recommandations
– Démarches procédurières: ensemble des démarches administratives ou juridiques à suivre dans un processus donné
– Implication dans les soins: participation active du patient dans sa prise en charge thérapeutique
– Activités occupationnelles: activités visant à occuper le patient et à favoriser son bien-être
– Ateliers psycho éducatifs: ateliers visant à informer et éduquer le patient sur sa santé mentale
– Risque pour la sûreté des personnes: danger potentiel pour la sécurité d’autrui
– Atteinte grave à l’ordre public: acte ou comportement mettant en péril la sécurité publique
– Sur-médicamentation: prescription excessive de médicaments
– Transfert du malade: déplacement d’un patient d’un établissement de soins à un autre

Montants / Préjudice

– Les dépens sont laissés à la charge du Trésor public

Parties impliquées

– PREFECTURE DU TARN
– CENTRE SPECIALISE [5]
– E.P.A.S DE APAJH DU TARN

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ‘ A P P E L D E T O U L O U S E

DU 18 Janvier 2024

ORDONNANCE

N° 2024/09

N° RG 24/00008 – N° Portalis DBVI-V-B7I-P53N

Décision déférée du 08 Janvier 2024

– Juge des libertés et de la détention d’ALBI – 23/708

APPELANT

Monsieur [I] [B]

Actuellement hospitalisé à l’UMD [3]

[3] d'[Localité 2]

assisté de Me Pierre DELIVRET, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

PREFECTURE DU TARN

Régulièrement convoquée, non comparant

INTERVENANT

CENTRE SPECIALISE [5]

[Adresse 1]

[Localité 2]

régulièrement avisé, non comparant

AUTRE

E.P.A.S DE APAJH DU TARN

régulièrement avisée, non comparante

DÉBATS : A l’audience publique du 17 Janvier 2024 devant A. DUBOIS, assisté de K.MOKHTARI

MINISTERE PUBLIC:

Auquel l’affaire a été communiquée , a fait connaître son avis écrit le 16/01/2024, qui a été joint au dossier.

Nous, A.DUBOIS, président de chambre délégué par ordonnance de la première présidente en date du 20 décembre 2023, en présence de notre greffier et après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications :

– avons mis l’affaire en délibéré au 18 Janvier 2024

– avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, l’ordonnance suivante :

Le 17 mai 2018, M. [I] [B] a été admis en soins psychiatriques sans consentement sur décision du représentant de l’Etat en suite de plusieurs agressions sur la voie publique avec un couteau. Il a été placé en UMD le 26 juillet 2021.

Le juge d’instruction du tribunal judiciaire de Montpellier a rendu une ordonnance d’irresponsabilité pénale à son égard le 30 janvier 2023 et le préfet du Tarn a donc pris un arrêté modificatif le 2 février 2023.

Par ordonnance du 17 juillet 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d’Albi a maintenu le patient sous le régime de l’hospitalisation complète sous contrainte.

Saisi par requête préfectorale du 20 décembre 2023, il a ordonné le maintien de l’intéressé sous le régime de l’hospitalisation complète par ordonnance du 8 janvier 2024.

M. [I] [B] en a relevé appel par déclaration du 10 janvier 2024 reçue au greffe le 11 janvier 2024 pour abus des pouvoir et surmédicamentation.

L’association pour adultes et jeunes handicapés du Tarn, désignée tuteur du malade a écrit à la cour pour indiquer qu’elle s’en remettait à l’avis du corps médical.

Par conclusions du 16 janvier 2024 et par le biais de son conseil , soutenues oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer en application de l’article 455 du code de procédure, le conseil de l’appelant demande au délégataire du premier président de :

– déclarer recevable son appel,

– confirmer l’ordonnance déférée,

– statuant à nouveau,

– ordonner le changement d’établissement de soins afin qu’il puisse être hospitalisé dans un autre établissement de soins.

A l’audience, M. [B] a précisé que les psychiatres lui avaient dit qu’il serait remis en liberté en juin s’il acceptait une deuxième injection mais qu’ils n’ont pas tenu parole, qu’il a donc arrêté son traitement, ce qui a entrainé une décompensation et trois semaines d’isolement mais que depuis juillet 2023, il n’a pas commis d’acte de violence. Il a souligné qu’il ne se droguait plus, qu’il ne mentait plus qu’il avait payé sa dette et qu’il ne comprenait pas pourquoi des meurtriers étaient remis en liberté et pas lui. Il voudrait être transféré à l’UMD de [Localité 4].

Le préfet du Tarn, régulièrement convoqué, n’a pas comparu.

Selon l’avis du collège du 15 janvier 2024, les soins psychiatriques sans consentement sur décision du représentant de l’Etat doivent se poursuivre en hospitalisation complète en UMD.

Par avis écrit du 16 janvier 2024 mis à disposition des parties, le ministère public a conclu à la confirmation de la décision entreprise.

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MOTIVATION :

La régularité de la procédure n’est pas critiquée.

Selon l’article L3213-1 du code de la santé publique, en cas de décision prise par le représentant de l’Etat, le juge doit s’assurer, au moment où il statue, qu’il existe toujours un risque pour la sûreté des personnes ou une atteinte grave à l’ordre public.

En l’espèce, les derniers certificats médicaux relevés par le premier juge et l’avis du collège des soignants du 20 décembre 2023 décrivent un état psychique fluctuant chez le patient alternant des périodes de calme comportemental et de bonne perception et d’autres, lors desquels il se montre hostile, intolérant à la frustration et refusant totalement les soins, ce qui provoque des rechutes rapides avec d’importantes conduites violentes envers les autres patients et les soignants. Il en ressort que son alliance thérapeutique ne relève que d’une démarche opportuniste nourrie de la volonté de voir diminuer son traitement dans le dessein de rapidement quitter l’UMD. La persistance de cet état d’opposition et de contestation des soins conjuguée à l’intensité des violences ayant justifié son admission à l’UMD justifie encore selon les psychiatres la poursuite de sa prise en charge actuelle.

Le certificat mensuel du 12 janvier 2024 confirme que M. [B] reste fidèle au registre clinique qui est souvent le sien en termes de contestations et de revendications, parfois futiles ou contradictoires avec une difficulté persistante à s’impliquer de manière véritable et authentique dans les soins. Actuellement les symptômes psychotiques, délirants et hallucinatoires sont au second plan du fait de la présence d’une bi-thérapie neuroleptique, souvent dénoncée par le patient bien qu’indispensable cliniquement et tolérée de manière tout à fait satisfaisante. Les agissements violents, souvent contemporains des rechutes psychotiques sur rupture médicamenteuse, ne sont plus à l’oeuvre actuellement dans le cadre contenant de l’UMD mais n’en demeurent pas moins banalisés et minimisés dans une attitude de déresponsabilisation permanente. Au fil des mois, l’état psychique du patient tend à se stabiliser sur un mode contestataire, souffrant d’un manque d’autonomie tant psychique que pour les actes de la vie quotidienne. Malgré des capacités d’insight existantes, il a encore tendance à mettre en échec les ateliers psycho éducatifs visant à le mobiliser et à modifier son fonctionnement psychique. Une sortie thérapeutique accompagnée en fin d’année s’est bien déroulée. Le projet thérapeutique est de l’accompagner régulièrement à la piscine de la fondation tant pour évaluer son état clinique dans un milieu moins contenant que pour tenter d’infléchir ce fonctionnement psychique délétère afin d’améliorer l’alliance thérapeutique. Les soins sont encore à poursuivre en UMD.

L’avis du collège de soignants du 15 janvier 2024 reprend ces éléments en soulignant qu’au quotidien le malade affiche une attitude très contestataire, mobilisant son énergie dans des démarches procédurières souvent vaines, peu cohérentes et bien éloignées de l’investissement dans le soin pourtant indispensable au vu de sa situation clinique ; qu’il participe aux activités proposées à visée occupationnelle mais qu’il peut mettre en échec facilement les ateliers psycho éducatifs relevant d’une implication active de sa part et ayant attrait à la connaissance de sa maladie ; il se vit très régulièrement sur un mode victimaire estimant l’hospitalisation actuelle totalement injuste, faisant peu de cas des actes dangereux qu’il a pu commettre et du risque persistant en cas d’inobservance du traitement.

Il en conclut que du fait d’une alliance thérapeutique encore trop souvent superficielle et opportuniste, les soins sont à poursuivre à l’UMD sous forme d’une hospitalisation complète.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments, d’une part, qu’il existe toujours un risque pour la sûreté des personnes ou une atteinte grave à l’ordre public de sorte que le moyen tiré d’un abus de pouvoir est inopérant et, d’autre part, que le grief tiré d’une sur- médicamentation doit être écarté, la bi-thérapie actuelle permettant à l’appelant de contenir ses symptômes psychotiques.

Enfin, le transfert du malade de l’UMP d'[Localité 2] vers celui de [Localité 4] ne relève pas du choix de M. [B] malgré ce qu’il souhaite.

L’ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée.

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PAR CES MOTIFS

Confirmons l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d’Albi du 8 janvier 2024,

Disons que la présente décision sera notifiée selon les formes légales, et qu’avis en sera donné au ministère public,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

K.MOKHTARI A. DUBOIS

 


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