Luxottica, Logo, LVMH et Channel ont écopé d’une amende totale de près de 126 millions d’euros pour atteinte à la liberté de fixation des prix par leurs opticiens détaillants et interdiction (illicite) à ces derniers de vendre ligne leurs produits. L’interdiction n’était pas contractuelle mais en pratique un système de « police des prix » avait été mis en place.
Sont concernés tous les produits de l’optique sous les marques TAG Heuer, Chanel, Ray‑Ban, Oakley, Prada, Burberry, Bulgari, Dolce & Gabanna, Armani, Armani, Michael Kors, Miu Miu, Ralph Lauren etc.
Sommaire
Rapport d’enquête de la DGCCRF
À la suite d’opérations de visite et saisie et d’un rapport d’enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) l’Autorité de la concurrence sanctionne plusieurs sociétés actives dans le secteur des lunettes de soleil et des montures de lunettes de vue pour avoir limité la liberté tarifaire des opticiens et/ou interdit la vente en ligne de leurs produits.
Jurisprudence Pierre Fabre
Pour rappel depuis l’arrêt Pierre Fabre du 13 octobre 2011 de la Cour de justice de l’Union européenne, l’interdiction de vendre sur Internet opposée à un distributeur constitue une restriction de concurrence par objet.
Clauses figurant dans les contrats de licence
S’agissant de LVMH et Logo, les clauses figurant dans les contrats de licence de LMVH pour la marque TAG Heuer et dans les contrats de distribution sélective de Logo pour cette marque prévoyaient un encadrement des prix et des promotions pratiquées par les opticiens. Logo a, par ailleurs, communiqué des prix conseillés, mis en place une surveillance des prix appliqués par les opticiens et est intervenue auprès de ceux qui pratiquaient des remises. Ces pratiques ont concerné les périodes de septembre 1999 à 2015 pour LVMH et de 2002 à 2015 pour Logo.
Interdiction des remises et promotions
Concernant Luxottica, l’Autorité a relevé, qu’entre 2005 et 2014, elle avait diffusé à ses distributeurs des prix dits « conseillés » et les avait incités à maintenir un certain niveau de prix de vente au détail de ses produits. En particulier, Luxottica a élaboré des listes de « prix conseillés » et conclu, avec ses distributeurs, des contrats de distribution sélective interprétés comme interdisant notamment les remises et les promotions lors de la vente au détail.
En outre, Luxottica a imposé à ses distributeurs certaines restrictions quant à la publicité qu’ils réalisaient sur leurs prix et a organisé la surveillance de ces prix, en sollicitant l’aide de certains de ses distributeurs pour « lutter contre les dérives observées ». Selon la gérante d’une boutique d’optique, cette surveillance par les concurrents s’assimilait à une véritable « police des prix ».
Mesures de rétorsion
Enfin, les opticiens persistant à ignorer les messages de Luxottica se sont vu appliquer des mesures de rétorsion : retard ou suspension des livraisons de leurs magasins, retrait de l’agrément nécessaire à la distribution de certaines de ses marques ou encore blocage des comptes pour les empêcher de passer commande.
Interdiction de ventes en ligne
Les clauses des contrats de licence conclus entre Chanel et Luxottica (de 1999 à 2014) et entre LVMH et Logo (de 2004 à 2015), de même que celles des chartes de détaillant agréé signées par Luxottica et ses distributeurs agréés (de 2002 à 2013) pour les marques Chanel, Prada, Dolce & Gabbana et Bulgari, interdisaient la vente en ligne des lunettes de soleil et des montures de lunettes de vue par les opticiens.
Ces pratiques présentent un certain degré de gravité, dans la mesure où elles ont eu pour conséquence de priver les opticiens et les consommateurs finals d’un canal de vente généralement caractérisé par des prix compétitifs. Leur gravité doit toutefois être atténuée, au regard, notamment, de l’incertitude quant à leur licéité qui existait jusqu’à l’arrêt Pierre Fabre du 13 octobre 2011 de la CJUE.