L’originalité : plus qu’un choix arbitraire d’ordre esthétique
L’originalité : plus qu’un choix arbitraire d’ordre esthétique
Ce point juridique est utile ?

L’originalité ne découle pas, sauf à s’étendre à la quasi-totalité des créations humaines et à vider de sens l’idée d’une protection monopolistique conciliant protection de l’auteur et possibilité de la création, de la seule constatation d’un choix arbitraire d’ordre esthétique : il est nécessaire que le créateur explique en quoi le choix relevé exprime sa personnalité et ne s’inscrit pas dans une variation irréfléchie et sans portée propre réelle.

Conformément à l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.

Si la protection d’une oeuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable, il appartient à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue.

En effet, seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole.


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4



ARRET DU 08 NOVEMBRE 2023



(n° , 1 pages)



Numéro d’inscription au répertoire général : 21/04116 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGVK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Janvier 2021 – Tribunal judiciaire de Paris, 5ème chambre, 2ème section – RG n° 17/14745



APPELANTS



Monsieur [M] [P]

[Adresse 2]

[Localité 1]



S.E.L.A.F.A. MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES ‘MJA’, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société WIW 17EEN

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]



représentés par Me Frédéric Ingold de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de Paris, toque : B1055

assistés de Me Julie Rodrigue, avocate au barreau de Paris



INTIMEE



S.A.S. SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 572 031 649

[Adresse 4]

[Localité 5]



représentée par Me Emilie Tadeo, avocat au barreau de PARIS, toque : C752

assistée de Me Krystelle Biondi, avocate au barreau de PARIS



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure Dallery, présidente de la chambre 5.4, chargée du rapport, et Monsieur Julien Richaud, conseiller.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Madame Marie-Laure Dallery, présidente de la chambre 5.4,

Madame Brigitte Brun-Lallemand, première présidente de chambre,

Monsieur Julien Richaud, conseiller,



qui en ont délibéré.



Greffier, lors des débats : Monsieur Damien Govindaretty

ARRÊT :



– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.



– signé par Madame Marie-Laure Dallery, présidente de la chambre 5.4 et parMadame Yulia Trefilova, greffier, auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige




FAITS ET PROCÉDURE



La société WIW 17EEN (When I Was Seventeen), spécialisée en création et fabrication d’objets de maroquinerie de luxe, dont le gérant est M. [M] [P], a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire ouverte par jugement du 30 septembre 2020 du tribunal de commerce de Paris.



La SELAFA “MJA” prise en la personne de Maître [X] [L] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.



En janvier 2016, la société WIW 17EEN était en négociation avec la Société Nouvelle de Produits Alimentaires (SNPA) dont le nom commercial est “La maison du Whisky” pour la conception d’un étui en cuir pour des bouteilles de whisky de la marque Nikka vendues par La Maison du Whisky.



Le 27 avril 2016, cette dernière a commandé à la société WIW 17EEN, 60 étuis du modèle “luxe” pour un montant de 39.000 euros, devant être livrés avant le 31 octobre 2016.



Le 16 septembre 2016, seuls 25 sur 60 étuis lui ont été livrés. Le reste de la commande n’a pas été livré.



Par acte d’huissier du 19 octobre 2017, la SNPA a assigné la société WIW 17EEN devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d’obtenir la résolution partielle du contrat, la restitution du prix payé pour les 35 étuis non livrés, et la réparation de son préjudice.



WIW 17EEN a formulé des demandes reconventionnelles à l’effet de voir engager la responsabilité de la SNPA au titre du préjudice subi du fait de la rupture brutale des pourparlers et à ce que la résolution du contrat soit prononcée aux torts exclusifs de la Maison du Whisky.

Moyens




Par conclusions du 30 janvier 2018, Monsieur [M] [P] est intervenu volontairement à l’instance aux cotés de la société WIW 17EEN et a demandé que l’atteinte à ses droits d’auteur soit réparée.



Par jugement du 21 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

– Prononcé la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

– Fixé à la somme de 22 750 euros HT la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

– Débouté la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES de sa demande au titre des vices cachés ;

– Débouté la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES de sa demande de dommages et intérêts au titre de l’inexécution partielle de la délivrance ;

– Débouté la société WIW17EEN de l’ensemble de ses demandes ;

– Débouté Monsieur [M] [P] de l’ensemble de ses demandes ;

– Condamné la société WIW17 EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] aux dépens ;

– Dit que les dépens seront recouvrés par Maître BIONDI conformément à l’article 699 du Code de Procédure Civile ;

– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

– Débouté les parties du surplus de leurs demandes, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;



Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 2 mars 2021, la SELAFA MJA prise en la personne de Maître [X] [L] agissant en tant que liquidateur de la société WIW 17EEN et M. [M] [P] ont interjeté appel de ce jugement.



Suite à l’avis de désignation du CME, les parties ont accepté d’entrer en médiation, constatée par la Cour à l’audience du 21 octobre 2021. Aucun accord n’a pu être trouvé.



Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 16 mai 2023, la SELAFA Mandataires judiciaires Associés MJA prise en la personne de Me [X] [L] agissant en qualité de liquidateur de la société WIW 17EEN et M. [M] [P] demandent à la Cour de :

Vu les dispositions de l’article 1382 devenu 1240 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article L 442-6 du Code de Commerce 29

Vu les dispositions de l’article L 111-1 du Code de la Propriété Intellectuelle,

Vu les dispositions de l’article L 131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,

Vu les dispositions de l’article L 331-1-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,

Vu la déclaration d’appel,



– Recevoir la SELAFA MJA en sa qualité de liquidateur de la société WIW 17EEN, la juger recevable et bien -fondée.



– Rejeter la fin de non-recevoir visant à restreindre le périmètre de l’appel aux seules demandes de Monsieur [P], au vu de la déclaration d’appel qui sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il :

Prononce la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

Fixe à la somme de 22 750 euros HT la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

Déboute la société WIW 17EEN de l’ensemble de ses demandes ;

Déboute Monsieur [M] [P] de l’ensemble de ses demandes ; Condamne la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] aux dépens ;



Les demandes de la SELAFA Mandataires Judiciaires Associés – MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] agissant en qualité de liquidateur de la société WIW 17EEN, et de Monsieur [M] [P] devant le Tribunal tendant notamment à voir dire et juger que La Maison du Whisky a commis une faute délictuelle en rompant brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public,

dire et juger que la faute commise par La Maison du Whisky a entraîné des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser,

dire que la commande des 60 étuis de luxe est résolue par la faute de La Maison du Whisky aux torts exclusifs de La Maison du Whisky à la date du 12 janvier 2017,

dire et juger que La Maison du Whisky exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur en violation des dispositions de l’article L 131-3 du CPI.

En conséquence, débouter La Maison du Whisky de l’intégralité de ses demandes, fins et moyens,

condamner La Maison du Whisky à verser à la société WIW 17EEN la somme de 160.000 € à titre de dommages et intérêts,

condamner La Maison du Whisky à verser à Monsieur [M] [P] la somme de 20.000 € au titre de ses droits d’auteur et la somme de 50.000 € à titre de dommages-interdits pour ne pas avoir disposé de ses prototypes et Echantillons retenus par l’Atelier Martial et La Maison du Whisky, condamner La Maison du Whisky à faire insérer sur son site internet https://www.whisky.fr , sur la page https://www.whisky.fr/nikka-from-the-barrel-etui-cuir-[P] la mention suivante, en langue française et anglaise :

“Par jugement rendu le xxxxx par le Tribunal de Grande Instance de Paris La Maison du Whisky a été condamné pour rupture abusive de pourparlers et pour la violation des droits d’auteur au profit de [M] [P] et de la société WIW 17EEN dans le cadre de l’édition de son étui en cuir”



dire et juger que l’insertion devra intervenir dans le mois suivant la signification du jugement à intervenir, pendant un délai de 3 mois, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard, pendant un délai de 90 jours, ordonner l’exécution provisoire nonobstant appel et sans garantie,

condamner La Maison du Whisky à verser à chaque défendeur la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 CPC ainsi qu’aux entiers dépens ;



– Rejeter la fin de non-recevoir visant à restreindre le périmètre de l’appel aux seules demandes de Monsieur [P], au vu des demandes suivantes :



– Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas résolu la vente de 60 étuis aux torts de la Maison du Whisky.



– Infirmer le jugement en ce qu’il a fixé à la somme de 22.750 €HT la créance de la Maison du Whisky au passif de la société WIW17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;



– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société WIW17EEN de ses demandes.



– Infirmer le jugement en ce qu’il a mis à la charge de la société WIW17EEN les dépens.



– Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas reconnu que la Maison du Whisky, société Nouvelle de Produits Alimentaires, a commis une faute délictuelle en rompant, brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public.



– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [P] de sa demande de dommages-intérêts sur le fondement de ses droits d’auteur.



En conséquence, statuant à nouveau des chefs critiqués,

– Constater la faute commise par la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky ayant entrainé des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser.



– Juger que la commande des 60 étuis de luxe est résolue par la faute de la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky, aux torts exclusifs de la Maison du Whisky à la date du 12 janvier 2017,



– Constater que la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur, en violation des dispositions de l’article L 131-3 du CPI.



En conséquence,

– Condamner la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky à verser à la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA :

* 180.354 € à titre de dommages-intérêts



– Condamner la société Nouvelle de Produits Alimentaires- Maison du Whisky à verser à Monsieur [M] [P]

* 20.000 € au titre de ses droits d’auteur

* 50.000 € à titre de dommages-intérêts pour son préjudice moral pour ne pas avoir disposé de ses prototypes et échantillons retenus par l’Atelier MARTIAL et la Maison du Whisky



– Condamner la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky à faire insérer sur son site internet https://www.whisky.fr, sur la page https://www.whisky.fr/nikka-from-the-barrel-etui-cuir-[P], la mention suivante, en langue française et anglaise: “Par arrêt rendu le XXXXX par la Cour d’Appel de Paris, La Maison du Whisky a été condamnée pour rupture abusive de pourparlers et pour la violation des droits d’auteur au profit de [M] [P] et de la société WIW 17EEN dans le cadre de l’édition de son étui en cuir.”



– Juger que l’insertion devra intervenir dans le mois suivant la signification de l’arrêt à intervenir, pendant un délai de 3 mois, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard, pendant un délai de 90 jours.



– Débouter la société Nouvelle de Produits Alimentaires- Maison du Whisky de l’intégralité de ses demandes, fins et moyens.



– Condamner la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky à verser à chaque défendeur la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700.



– Condamner la société Nouvelle de Produits Alimentaires – Maison du Whisky aux entiers dépens.



Aux termes de ses dernières conclusions signifiées et notifiées le 19 juin 2023, la SNPA (Maison du Whisky) demande à la Cour de :

Vu les articles 202, 542, 562 et 954 du code de procédure civile,

Vu les articles 1112, 1217 al. 1er, 1353, 1582 al. 1er, 1610, 1611, 1641 et 1648 du code civil,



– Déclarer la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) recevable en son appel incident et bien-fondée en ses demandes, fins et prétentions ;

A titre principal,

– Juger qu’elle n’est pas saisie des demandes suivantes :

* L’infirmation de la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de la fixation à la somme de 22.750 euros HT la création de LA MAISON DU WHISKY au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

* L’infirmation du débouté de l’ensemble des demandes de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de sa condamnation aux dépens.

– Juger que les demandes afférentes à l’infirmation de la résolution partielle de la vente et de la fixation de la créance au passif de l’appelante, de la demande indemnitaire de 160.000 Euros sont dès lors irrecevables et le jugement définitif de ces chefs ;

– Juger qu’elle n’est pas saisie des demandes suivantes formulées par les appelants dans leur dispositif :

“- Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas reconnu que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES a commis une faute délictuelle en rompant, brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public ;

– Constater la faute commise par la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES ayant entraîné des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser ;

– Constater que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur, en violation des dispositions de l’article L. 131-3 du CPI.”

A titre subsidiaire,

– Confirmer le jugement en ce qu’il a écarté toute faute commise par La SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) ;

– Confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

– Confirmer le jugement en ce qu’il a fixé au passif de la société WIW 17EEN la somme de 22.750 Euros HT ;

– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société WIW 17EEN et M. [M] [P] de l’ensemble de leurs demandes ;

En tout état de cause,

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) de sa demande au titre des vices cachés ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) de sa demande de dommages et intérêts au titre de l’inexécution partielle de la délivrance ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SOCIETE NOUVELLES DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) de sa demande au titre de la déduction de la facture des frais de recherches et développement de la facture relative à la commande des étuis dans leur version luxe ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) de sa demande fondée sur l’article 700 CPC ;

Et statuant à nouveau,

– Débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes ;

– Juger que l’étui versé aux débats est affecté d’un vice caché ;

– Condamner la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur, à verser à la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) la somme de 54.180 euros au titre de son préjudice résultant de l’inexécution partielle de son obligation de délivrance ;

– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de 54.180 Euros HT au titre de son préjudice résultant de l’inexécution partielle de son obligation de délivrance à inscrire au greffe du Tribunal de commerce de Paris ;

– Condamner la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur, à verser à la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) la somme de 650 euros HT au titre de la garantie des vices cachés et 1.548 euros au titre des dommages et intérêts résultant de l’application de cette garantie ;

– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, aux sommes de 650 Euros HT au titre de la garantie des vices cachés et 1.548 Euros au titre des dommages et intérêts résultant de l’application de cette garantie à inscrire au greffe du Tribunal de commerce de Paris ;

– Condamner la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur, à rembourser à la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) la somme de 5.000 euros au titre de la déduction de la facture des frais de recherche et développement de la facture relative à la commande des étuis dans leur version luxe ;

– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de 5.000 Euros au titre de la déduction de la facture des frais de recherche et développement de la facture relative à la commande des étuis dans leur version luxe, à inscrire au greffe du Tribunal de commerce de Paris ;

– Condamner la société WIW 17EEN, représentée par son liquidateur, à verser la somme de 10.000 Euros au titre de l’article 700 du CPC pour la procédure de première instance ;

– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de 10.000 Euros au titre de l’article 700 du CPC pour la procédure de première instance, à inscrire au greffe du Tribunal de commerce de Paris ;

– Condamner la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à verser à la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Emilie TADEO, conformément à l’article 699 du même code ;

– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de 15.000 Euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Emilie TADEO, conformément à l’article 699 du même code, à inscrire au greffe du Tribunal de commerce de Paris.



L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juillet 2023.

Motivation




MOTIVATION



Sur le périmètre de l’appel



La SNPA soutient que la Cour n’est pas saisie des demandes suivantes :

* L’infirmation de la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de la fixation à la somme de 22.750 euros HT la création de LA MAISON DU WHISKY au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

* L’infirmation du débouté de l’ensemble des demandes de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de sa condamnation aux dépens.



Elle en déduit que les demandes afférentes à l’infirmation de la résolution partielle de la vente et de la fixation de la créance au passif de l’appelante, de la demande indemnitaire de 160.000 Euros sont irrecevables et le jugement définitif de ces chefs.



De même, elle soutient que la Cour n’est pas saisie des demandes suivantes :

“- Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas reconnu que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES a commis une faute délictuelle en rompant, brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public ;

– Constater la faute commise par la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES ayant entraîné des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser ;

– Constater que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur, en violation des dispositions de l’article L. 131-3 du CPI.”



Elle fait valoir que les appelants ont limité dans leurs conclusions l’objet de leur appel en vertu des articles 542, 562 et 954 du Code de procédure civile en ce que :

– certains chefs de jugements invoqués dans la déclaration d’appel n’étaient pas critiqués dans les premières conclusions d’appelant, ce dont elle déduit qu’ils avaient acquis une force exécutoire définitive ;

– il existe une contradiction entre le dispositif et les moyens exposés dans la discussion ;

– les demandes des appelants sont irrecevables car visant à remettre en cause un moyen du juge de 1ère instance et non un chef de jugement exposé dans le dispositif ;

– deux des demandes des appelants portent sur le fait de “constater”, ce qui n’est pas une prétention susceptible de saisir valablement la Cour d’appel.



La société WIW 17EEN par son liquidateur et M. [P] rétorquent que la Cour d’appel est saisie par la déclaration d’appel et les chefs de jugement qui y sont exposés, ajoutant que les dernières conclusions comportent les mentions manquantes, de sorte que le moyen est inopérant.



Réponse de la Cour



Conformément à l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Et, il résulte des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile que l’appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu’il demande l’infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l’anéantissement ou l’annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue à l’article 914 du code de procédure civile de relever d’office la caducité de l’appel. Néanmoins, l’appelant qui sollicite, dans le dispositif de ses conclusions, la réformation de la décision entreprise et formule plusieurs prétentions, n’est pas tenu de reprendre, dans celui-ci, les chefs de dispositif du jugement dont il sollicite l’infirmation (en ce sens, 2ème Civ., 3 mars 2022, n° 20-20.017).



En l’espèce, la déclaration d’appel reprend les chefs du jugement dont les appelants demandent l’annulation ou l’infirmation, à savoir :

– Prononce la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

– Fixe à la somme de 22 750 euros HT la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

– Débouté la société WIW17EEN de l’ensemble de ses demandes ;

– Débouté Monsieur [M] [P] de l’ensemble de ses demandes ;

– Condamné la société WIW17 EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] aux dépens.



Le dispositif des premières conclusions des appelants déposées et notifiées le 28 mai 2021 est ainsi rédigé :

“Il est demandé à la Cour d’Appel de Paris de :

Vu les dispositions de l’article 1382 devenu 1240 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article L 442-6 du Code de Commerce,

Vu les dispositions de l’article L 111-1 du Code de la Propriété Intellectuelle,

Vu les dispositions de l’article L 131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,

– Recevoir la SELAFA MJA en sa qualité de liquidateur de la société WIW 17EEN, et Monsieur [M] [P] en leur appel, les dire recevables et bien -fondés.

– Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas reconnu que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES a commis une faute délictuelle en rompant, brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public.

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [P] de sa demande de dommages-intérêts sur le fondement de ses droits d’auteur.

En conséquence, statuant à nouveau des chefs critiqués,

– Constater la faute commise par la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES ayant entrainé des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser.

– Juger que la commande des 60 étuis de luxe est résolue par la faute de la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES, aux torts exclusifs de la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES à la date du 12 janvier 2017,

– Constater que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur, en violation des dispositions de l’article L 131-3 du CPI.



En conséquence,

– Condamner la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES à verser à la SELAFA MJA prise en la personne de Maître [X] [L] es qualité de liquidateur judiciaire de la société WIW 17EEN :

* 160.000 € à titre de dommages-intérêts

– Condamner la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES à verser à Monsieur [M] [P] :

* 20.000 € au titre de ses droits d’auteur

* 50.000 € à titre de dommages-intérêts pour ne pas avoir disposé de ses prototypes et échantillons retenus par l’Atelier MARTIAL et la Maison du Whisky

– Condamner la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES à faire insérer sur son site internet https://www.whisky.fr, sur la page https://www.whisky.fr/nikka-fromthe-barrel-etui-cuir-[P], la mention suivante, en langue française et anglaise: “Par arrêt rendu le XXXXX par la Cour d’Appel de Paris, La Maison du Whisky a été condamnée pour rupture abusive de pourparlers et pour la violation des droits d’auteur au profit de [M] [P] et de la société WIW 17EEN dans le cadre de l’édition de son étui en cuir. Juger que l’insertion devra intervenir dans le mois suivant la signification de l’arrêt à intervenir, pendant un délai de 3 mois, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard, pendant un délai de 90 jours. – Débouter la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES de l’intégralité de ses demandes, fins et moyens.

– Condamner la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES à verser à chaque défendeur la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700.

– Condamner la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES aux entiers dépens”



Il se déduit de ces éléments que la Cour se trouve saisie de l’infirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN et par voie de conséquence en ce qu’il a fixé à la somme de 22 750 euros HT la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix et en ce qu’il a débouté la société WIW17EEN de l’ensemble de ses demandes ainsi que M [M] [P] de ses demandes et en ce qu’il a condamné la société WIW17 EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] aux dépens.



Par conséquent, aucune limitation de la portée de l’appel ne résulte des écritures des appelants et le moyen pris de la rédaction du dispositif des conclusions est infondé. A cet égard, la circonstance que les demandes viseraient à remettre en cause un moyen du juge de première instance et non un chef de jugement exposé dans le dispositif et que les demandes portant sur le fait de “constater”, qui ne serait pas une prétention susceptible de saisir valablement la Cour, est inopérante. Il en est de même de l’existence d’une contradiction entre le dispositif et les motifs en ce que les chefs du jugement critiqués figureraient dans la discussion.



Sur la rupture brutale des pourparlers



WIW 17EEN par son liquidateur et M [P] soutiennent que la SNPA a commis une faute en rompant brutalement les pourparlers et que ce comportement est prohibé non seulement au titre de la faute civile mais aussi en vertu des dispositions de l’article L 442-6, I ancien du code de commerce en raison du déséquilibre contractuel dans l’approche économique du “projet” qu’elle a opportunément scindé en deux après avoir obtenu des avantages excessifs , notamment en achetant à un prix très modeste les écrins luxe, négocié au regard de la production des deux versions.



Ils invoquent :

– l’engagement de la SNPA d’une commande d’étuis du modèle grand public, faisant état de l’interdépendance des commandes d’étuis du modèle “grand public” et du modèle “luxe” et expliquant ainsi la réduction des coûts de R&D (recherche et développement) ainsi que la renonciation de M [P] à la cession des droits d’auteur pour un montant de 43 000 € avec l’assurance de gérer la production des deux versions ;

– des négociations de 5 mois qui ont débutées à la mi-novembre 2015 ;

– le choix par la SNPA d’un modèle grand public encore en réflexion s’agissant des quantités, d’où l’absence de prix unitaire fixe ;

– la terminologie “Le projet” employée par la SNPA incluant la version luxe et grand public. (Pièce7) ;

– le fait que la société WIW 17EEN se soit engagée dans des dépenses financières hors de proportion avec un engagement sur la seule version luxe.



La SNPA (Maison du Whisky) dénie toute faute délictuelle dans la conduite des négociations, faisant valoir que :

– le projet comprenait initialement deux axes potentiels (grand public et luxe), objet de négociations différentes, que ni la couleur, ni les matériaux, ni la quantité d’étuis “grand public” n’avait été décidé, de sorte que le prix unitaire était encore inconnu à ce stade des négociations qui auraient duré 3 mois et demi, du mois de janvier au 4 mai 2016, et que des réserves avaient été exprimées s’agissant du coût ;

– la réduction du “ticket d’entrée” (de 43.000€ à 5.000€) avait pour contrepartie la production des étuis par WIW 17EEN directement, contrairement à son process habituel, ce qui assurait à l’intéressée une meilleure marge ;

– le caractère brutal de la rupture des pourparlers ne peut être établi au regard de l’avancée des négociations et de ses réserves manifestées sur le projet mass market tant sur le coût que sur la qualité du prototype ce qui constitue un motif légitime de rupture.



Réponse de la Cour,



C’est par des motifs justes et pertinents que la cour adopte que le tribunal a retenu que la preuve du caractère abusif de la rupture n’était pas rapportée, en ce que le caractère lié des deux commandes “luxe” et “grand public” n’était pas démontré, qu’aucun accord n’était intervenu au titre d’un engagement sur la version mass market, et qu’au moment de la commande de la version “luxe”, la version “grand public” était toujours à l’état de projet.



Il sera seulement ajouté que :

– les pourparlers ont commencé le 13 janvier 2016 (pièce 1 des appelants) pour finir le 4 mai suivant (pièce 18) par un mail de M. [H] [R] de la Maison du Whisky répondant négativement à la demande de M [P] pour WIW 17EEN d’un budget de développement pour proposer une autre version mass market (pièce 17) et disant :

“Je pense que le mieux est d’abandonner le projet mass market qui ne nous a pas convaincu et de ne pas reproduire de proto” ;

– si des devis avaient été présentés pour la version “grand public” (pièces 11 du 1er mars 2016 et 13 du 15 avril 2016) aucun accord n’avait été trouvé, des discussions se poursuivant (pièce 14 du 26 avril 2016 notamment) jusqu’au 4 mai 2016 tandis que le bon de commande pour la version “luxe” était adressé le 27 avril 2016, peu important que la société WIW 17EEN ait continué vainement d’améliorer la version mass market (mail du 10 juin 2016- pièce 19 bis) et de la soumettre à la SNPA (la Maison du Whisky) laquelle a le 10 juin suivant indiqué : “Même si pour ma part, je reconnais que la finition a bien progressé, [S] et moi sommes sceptiques sur le succès commercial au vu de la valeur perçue” (même pièce) ;



– dès le 25 janvier 2016, M. [H] [R] indiquait : “‘et s’il est possible d’avoir un prix très compétitif sur une version mass market, nous serions prêt(s) à produire jusqu’à 20 000 exemplaires. Avant d’aller trop loin dans le détail des coûts à prévoir, pourriez-vous nous donner un ordre de prix unitaire typique pour ce type de projet ‘” (Pièce 3), et dès le 28 janvier 2016 (pièce 6), il répondait à M [P] que sa proposition d’un montant de 43 000 € pour la partie recherche et développement ainsi que la fourniture des prototypes en trois exemplaires (1 orienté mass market 2 orientés haut de gamme), incluant la cession totale des droits de ce concept, était un coût “complètement hors de [sa] portée” ajoutant : “désolé de vous avoir fait perdre votre temps. Vous m’auriez dit que cela se chiffrait dans les dizaines de milliers d’euros, je vous aurais tout de suite prévenu que c’était impossible”, par conséquent le prix était un critère prépondérant de l’accord ;

– l’utilisation de l’article “le” suivi du nom “projet” par M. [H] [R] dans son mail du 29 janvier en ces termes :

“Nous partons a priori sur 60 ex. modèle luxe 20 000 ex modèle grand ” publique “

1 ex de chaque pour proto afin d’affiner le modèle ensemble.

A voir comment on peut éviter un ticket d’entrée trop élevé pour arriver aux protos, ce qui bloquerait le projet” ne saurait suffire à en déduire que les deux versions “luxe” et “grand public” étaient liées :

– En outre, si une facture au titre “Recherche et développement : réalisations dessins techniques, création prototypes pour l’étui Nikka” a été établie le 11 février 2016 (pièce 10) et que M [R] a indiqué le 22 février suivant :

“Je souhaite reconfirmer que cette facture était une avance sur la recherche et le développement des deux versions de l’étui qui seront soustraits de la facture finale des produits finaux, comme convenu au téléphone”, il ne peut davantage s’en déduire que les deux versions “luxe” et “grand public” étaient liées, de sorte que la société SNPA (La maison du Whisky) qui avait passé commande de la version “luxe” n’aurait plus eu la liberté de rompre les pourparlers s’agissant de la version “grand public” ;



– enfin, si le prix initial des frais de recherche et développement des protos des deux projets sont passés de 43 000€ à 5 000€, la circonstance qu’il ait été convenu que WIW 17EEN se chargerait de la production contrairement au process habituel de la Maison du Whisky, est de nature à expliquer le fruit de la négociation obtenue.



En conséquence, les appelants ne démontrent pas, ainsi qu’il leur incombe, que les deux versions projetées étaient liées.



Il convient de constater qu’aucun accord n’a été trouvé concernant la version “grand public” et qu’aucune faute délictuelle ne peut être retenue à l’encontre de la société SNPA dans son droit de rompre les pourparlers, aucun abus n’étant établi.



De même, s’agissant des dispositions de l’article L 442-6 I invoquées par les appelants, il ne peut qu’être constaté qu’aucun avantage sans contrepartie n’est établi, ni aucun déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.



Il s’ensuit que la société WIW 17EEN est déboutée de sa demande en réparation des préjudices qu’elle invoque et le jugement confirmé de ce chef.



Sur la demande de résolution du contrat et les dommages intérêts



WIW 17EEN par son liquidateur soutient que la dépendance économique des deux commandes d’écrins justifie la “résiliation” du contrat de commande de la version luxe aux torts exclusifs de la Maison du Whisky, à la date du 12 janvier 2017, date à laquelle cette dernière considèrerait avec malice qu’elle n’a signé aucun bon de commande.



Elle ajoute que l’inexécution résultant du retard d’une partie de la livraison n’est pas le fait du vendeur mais d’un défaut de trésorerie imputable à La Maison du Whisky, faisant valoir à cet égard que le renoncement au paiement des frais R&D sans compensation serait à l’origine d’un manque de trésorerie qui l’aurait empêché de payer l’atelier de fabrication des étuis (Atelier Martial), et de la retenue des 35 étuis, puis de l’assignation en redressement judiciaire dont elle a fait l’objet par ce prestataire.



Elle en conclut que la Maison du Whisky n’est pas fondée à solliciter le remboursement du prix.



La société SNPA (La Maison du Whisky) rétorque que WIW 17EEN reconnait le principe d’une inexécution partielle de son obligation, que le défaut de trésorerie ne lui est pas imputable, et que l’inexécution est bien le fait du vendeur.



En conséquence, elle estime que le prix payé pour les étuis non délivrés doit lui être remboursé.



Réponse de la Cour



Dès lors qu’il a été retenu que les deux versions projetées n’étaient pas liées, aucune résolution du contrat de commande de la version “luxe” des écrins ne peut être prononcée et la responsabilité de la société SNPA dans la procédure collective ouverte à l’encontre de la société WIW 17EEN n’est pas établie.



En conséquence, la SELAFA MJA prise en la personne de Me [X] [L] agissant en qualité de liquidateur de la société WIW 17EEN est déboutée de ses demandes au titre des frais de R&D que cette dernière aurait avancés, de la réparation du préjudice allégué au titre de la conclusion d’une commande à des conditions désavantageuses. De même, elle est déboutée de ses demandes en réparation de la perte de crédibilité et image ainsi qu’en réparation de son préjudice moral né de la faillite de la société WIW 17EEN.



Le sens de l’arrêt conduit à rejeter la demande de publication judiciaire sur le site de la société SNPA (la Maison du Whisky).



En revanche, le jugement est confirmé en ce qu’il a prononcé la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN, la commande passée des écrins “Luxe” n’ayant été que partiellement honorée bien que réglée dans son intégralité, et en ce qu’il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de cette société, la somme de 22 750 € correspondant au 35 étuis non livrés d’un coût unitaire de 650€.



Sur l’appel incident



– Sur l’indemnisation du préjudice né du manquement à l’obligation de délivrance de 35 étuis



La Maison du Whisky invoque sur le fondement de l’article 1611 du code civil, un préjudice né de la privation du bénéfice espéré de la revente des 35 étuis non livrés, calculé comme suit :

Prix unitaire d’une bouteille sans étui = 42 €

Prix de l’édition spéciale du whisky avec étui = 1.590 €

(1590 – 42) 1548 x 35 = 54.180 €



WIW 17EEN soutient que ce préjudice relève de la perte de chance.



Réponse de la Cour



En raison de l’aléa pesant sur la vente de la totalité des étuis “luxe”, la société WIW 17EEN soutient justement que le préjudice invoqué par la Maison du Whisky du fait de la privation du bénéfice espéré de la revente des 35 étuis non livrés, est une perte de chance.



La réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle était réalisée. L’indemnité ne saurait donc être égale à la totalité du gain espéré.



En l’espèce, si la société SNPA a déclaré sa créance pour le montant sollicité, elle ne fournit aucun élément sur la vente des étuis de l’édition spéciale dont elle disposait.

Il convient dès lors d’évaluer à 20% la chance perdue et de fixer ainsi à la somme de 10 836 €, la perte de chance née du manquement de la société WIW 17EEN à son obligation de délivrance, somme qu’il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de cette société.



Le jugement est infirmé de ce chef.



– Sur la garantie des vices cachés



La SNPA (la Maison du Whisky) invoque le fait qu’un étui n’a pas pu être vendu en raison d’un vice caché, ce qui n’a pu être constaté qu’après manipulation de l’étui.



WIW 17EEN par son liquidateur oppose que La Maison du Whisky ne lui a jamais indiqué mettre en ‘uvre la garantie des vices cachés et ne prouve pas que le vice était antérieur à la vente.



Réponse de la Cour



La SNPA est recevable à agir sur le fondement de l’article 1648 du code civil, en garantie des vices cachés de la chose vendue, à savoir l’un des 25 étuis livrés par la société WIW 17EEN, étant observé qu’elle a agi dans le délai imparti de 2 ans et qu’elle a déclaré sa créance à ce titre.



Elle est également fondée en sa demande s’agissant d’un vice qui affecte la chose et la rend impropre à la vente, étant spécialisée dans la commercialisation de spiritueux et ne pouvant dès lors être présumé connaître le vice affectant un étui en cuir.



Il est justifié que cet étui souffre de défauts de conception (pièce 8) : jointures de l’étui mal alignées rendant difficile la fermeture de celui-ci, jointures mal finies dans les coins, qualité défectueuse du clou, ce que la Cour a pu constater lors de la remise de cet étui.



Par conséquent, la somme de 650 € HT, prix d’achat de l’étui, lui sera allouée à ce titre, somme qu’il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société WIW 17EEN.



Il sera ajouté des dommages et intérêts de 309 € (20%) au titre de la perte de chance de vendre cet étui au prix de 1 548 €.



Le jugement est infirmé de ce chef.



– Sur le trop-versé issu de la facture de 5000 €



La Maison du Whisky estime que la facture de 5000€ au titre des frais de R&D était une avance qui devait être déduite de la commande finale de 39.000€, et affirme que les parties avaient convenu de cette déduction.



WIW 17EEN soutient que cette déduction s’appliquerait sur la facture finale pour la commande des deux modèles.



Réponse de la Cour



Ainsi qu’il a été relevé, M [R] pour la Maison du Whisky a indiqué le 22 février 2016 :

“Je souhaite reconfirmer que cette facture était une avance sur la recherche et le développement des deux versions de l’étui qui seront soustraits de la facture finale des produits finaux, comme convenu au téléphone”.



Le principe de la déduction de la somme de 5 000 € étant acquis entre les parties, il convient de faire droit à la demande de déduction de cette somme de la facture réglée. A cet égard, il sera relevé que si une facturation commune à l’issue d’une négociation globale des tarifs a pu être envisagée, il n’en demeure pas moins que les deux projets étaient distincts de sorte que le fait qu’une seule version ait abouti ne peut justifier la non-déduction de cette somme.



Le jugement est infirmé de ce chef.



Sur les demandes indemnitaires de M. [M] [P]



M. [P] qui se prévaut des articles L 111-1, L 131-3 et L 331-1-3 du Code de la Propriété Intellectuelle, soutient :

– qu’il n’y a eu aucun accord sur la cession de ses droits d’auteurs, cession pourtant nécessaire pour que La Maison du Whisky puisse diffuser le design ;

– qu’il prouve sa titularité de l”uvre par la présomption qu’emporte l’intitulé de l’étui tel que vendu sur le site de La Maison du Whisky, qui inclus son nom, et affirme l’originalité du design :

– que son préjudice s’évalue à la somme de 20.000€, en tant que fraction de la facture initiale de 43.000€ qui incluait la cession des droits d’auteurs, les couts de R&D et la fabrication des prototypes ;

– qu’il souffre aussi d’un préjudice moral à hauteur de 50 000 € issu de la détention par La Maison du Whisky des prototypes de ses créations qu’il ne peut pas faire valoir auprès de tiers.



La Maison du Whisky rétorque notamment que :



– M.[P] n’a jamais élevé une quelconque prétention à ce sujet, précisant que la mention en une ligne de la prétendue originalité de l’étui, accompagnée de dessins corroborés par aucune pièce, ne saurait suffire à pallier cette absence ;

– l’acquisition des droits d’auteur sur l’étui n’était pas en discussion lors des pourparlers ;

– il avait été convenu que WIW 17EEN puisse continuer à exploiter ce concept, la Maison du Whisky renonçant à reproduire ce modèle ainsi qu’à le réutiliser en dehors du cadre de cette opération :

– le préjudice réclamé par M.[P] n’est pas fondé sur la réparation d’une contrefaçon de ses droits d’auteur et n’a donc aucun fondement ;

– le versement d’une somme quelconque reviendrait à identifier un contrat de cession de droits dans le cadre duquel la contrepartie financière n’aurait pas été payée alors qu’aucune cession de droits n’était nécessaire pour commercialiser les étuis,

– cette demande indemnitaire fondée sur de prétendus droits d’auteur n’a aucun fondement, ni aucune cause,

– sa demande indemnitaire fondée sur l’atteinte à son droit moral du fait de la prétendue absence de possibilité de faire valoir ses créations en raison de la prétendue rétention de son ‘uvre opérée par l’Atelier Martial devra être rejetée .



Réponse de la Cour



Conformément à l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une ‘uvre de l’esprit jouit sur cette ‘uvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.



Si la protection d’une ‘uvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable, il appartient à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue. En effet, seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole.



L’originalité ne découle pas, sauf à s’étendre à la quasi-totalité des créations humaines et à vider de sens l’idée d’une protection monopolistique conciliant protection de l’auteur et possibilité de la création, de la seule constatation d’un choix arbitraire d’ordre esthétique : il est nécessaire que le créateur explique en quoi le choix relevé exprime sa personnalité et ne s’inscrit pas dans une variation irréfléchie et sans portée propre réelle.



En l’espèce, M.[P] fait valoir qu’il a dessiné l’étui, choisi chacun des matériaux, donné des instructions pour les prototypes ; que l’originalité est caractérisée par l’ouverture de l’écrin en origami, le choix des différentes matières qui l’habillent et la structure de l’étui.



Ces explications exclusivement techniques témoignant d’un savoir-faire et non d’un parti pris esthétique, ce qui les prive de pertinence.



L’intéressé ne dit rien, à raison de son degré de généralité, des choix effectivement réalisés dont le processus de sélection n’est pas décrit.



En cet état, la Cour ne peut que constater l’absence d’originalité de l”uvre, et partant celle de la qualité d’auteur et du droit d’auteur de M.[P].



En conséquence, les demandes présentées par ce dernier sont rejetées.



Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile



La société WIW 17EEN par son liquidateur qui succombe pour l’essentiel est condamnés aux dépens de première instance et d’appel.



Elle est déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles et une somme de de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile est mise à sa charge au titre des frais en première instance ainsi que la somme de 5 0000 € en cause d’appel ;


Dispositif

PAR CES MOTIFS



La Cour



– Déboute la Société Nouvelle de Produits alimentaires (La Maison du Whisky) en ses demandes tendant à voir juger :

– qu’elle n’est pas saisie des demandes suivantes :

* L’infirmation de la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de la fixation à la somme de 22.750 euros HT la création de LA MAISON DU WHISKY au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

* L’infirmation du débouté de l’ensemble des demandes de la société WIW 17EEN ;

* L’infirmation de sa condamnation aux dépens.

– que les demandes afférentes à l’infirmation de la résolution partielle de la vente et de la fixation de la créance au passif de l’appelante, de la demande indemnitaire de 160.000 Euros sont dès lors irrecevables et le jugement définitif de ces chef ;

– qu’elle n’est pas saisie des demandes suivantes formulées par les appelants dans leur dispositif :

” – Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas reconnu que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES a commis une faute délictuelle en rompant, brutalement et sans motif des pourparlers relatifs à la commande d’une version grand public ;

– Constater la faute commise par la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES ayant entraîné des préjudices directs qu’elle doit être condamnée à indemniser ;

– Constater que la Société NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES exploite un produit conçu par Monsieur [M] [P] qui en est l’auteur sans avoir régularisé les conditions de cession de ses droits d’auteur, en violation des dispositions de l’article L. 131-3 du CPI.”



Infirme le jugement en ses dispositions qui lui sont soumises, sauf en ce qu’il

– Prononce la résolution partielle de la vente de 60 étuis aux torts de la société WIW 17EEN ;

– Fixe à la somme de 22 750 euros HT la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES au passif de la société WIW 17EEN au titre du remboursement d’une partie du prix ;

– Déboute la société WIW17EEN de l’ensemble de ses demandes ;

– Déboute M [M] [P] de ses demandes ;

– Condamne la société WIW17 EEN, représentée par son liquidateur la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [X] [L] aux dépens ;



Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,



– Fixe la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de10 836 €, au titre de la perte de chance née du manquement partiel de la société WIW 17EEN à son obligation de délivrance,



– Fixer la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, aux sommes de 650 Euros HT au titre de la garantie des vices cachés et de 309 € au titre de la perte de chance de vendre cet étui ;



– Fixe la créance de la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) au passif de la liquidation de la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à la somme de 5 000€ au titre de la déduction de la facture des frais de recherche et développement de la facture relative à la commande des étuis dans leur version luxe ;



– Condamner la société WIW 17EEN représentée par son liquidateur, à verser à la SOCIETE NOUVELLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES (LA MAISON DU WHISKY) la somme totale de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel ainsi qu’aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de Maître Emilie TADEO, conformément à l’article 699 du même code ;



– Rejette toute autre demande.







LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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