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Mercredi 20 novembre 2024, la commission des affaires économiques du Sénat a adopté les conclusions du rapport du groupe de suivi des lois Egalim, dont Anne‑Catherine Loisier et Daniel Gremillet sont rapporteurs.
Créé dans la foulée de l’adoption de la première loi Egalim de 2018 (Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), le groupe de suivi mène chaque année un travail d’évaluation de l’application des lois Egalim de 2018, 2021 et 2023,
Les marques agricoles françaises perdent de leur compétitivité face à des pratiques commerciales abusives et un manque de régulation efficace.
Bien que généralisée par la loi Égalim 2, la contractualisation écrite reste marginale dans de nombreuses filières agricoles. Certaines productions sont exemptées, notamment :
Les centrales d’achat basées à l’étranger contournent les lois Égalim, favorisant des pratiques commerciales abusives :
Problème Identifié | Recommandations |
---|---|
Manque de contrôle sur les contrats | Renforcer les contrôles de la DGCCRF sur l’économie des contrats au-delà de leur simple formalisme. Publier un bilan annuel des contrôles effectués. |
Exemptions trop larges | Réexaminer la liste des filières exemptées de contractualisation écrite et revoir les seuils de chiffre d’affaires d’exemption. |
Transparence insuffisante sur les MDD | Créer un observatoire des produits vendus sous marque de distributeur (MDD) pour suivre leurs prix et leur origine. |
Contournement des lois par des centrales | Imposer des sanctions systématiques aux centrales d’achat étrangères contrevenantes. Transmettre chaque année au Parlement les données relatives aux négociations effectuées sous droit étranger. |
Faible adoption des indicateurs de référence | Enjoindre les interprofessions à publier des indicateurs de coûts de production. Exiger leur inclusion dans les conditions générales de vente et les contrats. |
Durée des négociations trop longue | Ramener la durée des négociations post-2025 à deux mois, avec une clôture fixée au 1er février. |
Clauses de révision inadaptées | Intégrer les clauses de révision automatique des prix dans les conditions générales de vente pour les soumettre au principe de non-discrimination. Remplacer la clause de renégociation automatique par une clause basée sur les coûts. |
Certaines filières, exemptées de la contractualisation écrite, doivent être réintégrées pour éviter les abus. Les filières concernées incluent les céréales, les fruits et légumes, et certains vins.
Pour les cycles post-2025, réduire la durée de négociation de trois à deux mois afin d’alléger la pression sur les producteurs et distributeurs.
Depuis leur introduction en 2018, les lois Égalim (1, 2 et 3) ont marqué un tournant décisif dans la structuration des relations entre agriculteurs, industriels et distributeurs. Leur ambition est triple : garantir une rémunération juste pour les producteurs, promouvoir une alimentation saine et durable, et protéger l’environnement. Cependant, leur application reste inégale, nécessitant des ajustements pour atteindre pleinement leurs objectifs.
Les lois Égalim ont jeté les bases d’une agriculture durable et équitable, mais leur mise en œuvre nécessite des ajustements urgents. Avec des mesures concrètes telles que le renforcement des contrôles, l’intégration des coûts de production dans les négociations et une meilleure régulation des centrales d’achat, ces lois peuvent véritablement transformer les filières agricoles françaises.
Une agriculture plus résiliente et compétitive est à portée de main, à condition que tous les acteurs, du producteur au distributeur, respectent les règles et œuvrent pour l’intérêt commun.
Parmi les succès récents des lois Égalim, plusieurs mesures se démarquent. L’encadrement des pénalités logistiques a permis de mieux protéger les agriculteurs des pratiques abusives de la grande distribution. De même, l’extension de l’encadrement des promotions à l’ensemble des produits de grande consommation constitue une avancée significative pour stabiliser les marges des producteurs. Ces dispositifs reflètent la volonté de rééquilibrer les rapports de force au sein des filières agroalimentaires.
Malgré ces progrès, le rapport souligne des lacunes notables. La contractualisation écrite, pierre angulaire des relations commerciales justes, reste encore trop peu appliquée. Par ailleurs, certaines mesures clés, comme le relèvement du seuil de revente à perte (SRP +10 %), manquent encore d’une évaluation approfondie. Ces insuffisances limitent l’efficacité globale des lois Égalim.
Adoptée en 2018, la première loi Égalim a posé les bases d’un modèle agricole plus juste et durable. Elle visait principalement à améliorer les relations commerciales, à promouvoir une alimentation de qualité et à lutter contre le gaspillage alimentaire.
Parmi les mesures phares figurent l’intégration des coûts de production dans la détermination des prix, la fixation d’un seuil de revente à perte pour protéger les producteurs, et l’obligation d’introduire au moins 50 % de produits durables dans les cantines scolaires, dont 20 % issus de l’agriculture biologique. Si ces initiatives ont permis de stabiliser certaines filières, leur impact reste limité par une mise en œuvre inégale et des résistances dans les négociations commerciales.
En 2021, la loi Égalim 2 a consolidé les acquis de la première version tout en introduisant de nouvelles obligations. L’une des avancées majeures est l’obligation de contractualisation écrite entre producteurs et acheteurs. Ces contrats incluent désormais des clauses basées sur les coûts de production, offrant une meilleure sécurité aux agriculteurs face aux fluctuations des prix.
Cette loi a également renforcé les sanctions en cas de non-respect des règles. Bien que ces mesures aient amélioré la transparence et la protection des producteurs, leur mise en œuvre reste inégale, nécessitant un suivi plus rigoureux.
Adoptée en 2023, la loi Égalim 3 s’inscrit dans une démarche de durabilité et d’adaptation au changement climatique. Elle met l’accent sur le soutien aux pratiques agroécologiques, le développement des circuits courts et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Ces mesures, bien que prometteuses, demandent une coordination accrue entre les acteurs des filières pour maximiser leur impact.
Pour répondre aux insuffisances identifiées, le rapport du Sénat propose ses recommandations structurées autour de cinq axes principaux :
La loi Égalim, issue des États généraux de l’alimentation, vise à répondre aux enjeux économiques et environnementaux de la chaîne alimentaire française. Ce texte législatif se concentre sur la construction d’un équilibre entre les agriculteurs, les transformateurs et les distributeurs, tout en intégrant des objectifs de durabilité environnementale.
La fragilité financière des exploitants agricoles découle de :
Le secteur agroalimentaire français est marqué par une « guerre des prix » orchestrée par les grandes surfaces. Ce phénomène est exacerbé par :
Les regroupements internationaux de ces centrales permettent parfois de contourner la législation française, posant un défi majeur pour le législateur.
Les agriculteurs font face à une forte instabilité des prix due à :
Certaines filières, comme le porc, affichent une bonne organisation (93 % de la production couverte par des organisations de producteurs). Cependant, d’autres, comme le secteur bovin, restent très atomisées, avec seulement 2 % de transactions réalisées sous contrat.
La pression exercée par les distributeurs sur les autres maillons de la chaîne entraîne une dévalorisation des produits agricoles. Cela se traduit par des négociations commerciales déséquilibrées et une compétitivité axée sur des prix bas au détriment des producteurs.
D’ici 2025, les restaurants collectifs publics devront inclure :
Cette mesure vise à éduquer les consommateurs, notamment les jeunes, à une alimentation saine et durable tout en valorisant les filières locales.
Le projet de loi durcit les sanctions en cas de mauvais traitements et renforce les droits des associations de défense des animaux à se constituer partie civile.
Le droit européen tend à mieux intégrer les spécificités agricoles dans ses politiques de concurrence. Par exemple, le règlement « Omnibus » renforce les exemptions agricoles aux règles de concurrence.
Les initiatives européennes, comme la directive sur les pratiques commerciales déloyales, complètent les objectifs des lois Égalim en favorisant un meilleur partage de la valeur entre producteurs, transformateurs et distributeurs.
La loi Égalim marque une avancée significative pour rééquilibrer les relations commerciales dans la chaîne alimentaire française tout en répondant aux défis environnementaux. En alliant contractualisation renforcée, lutte contre les pratiques déloyales et promotion d’une agriculture durable, elle trace la voie vers un modèle alimentaire plus juste et résilient. Cependant, son succès repose sur une mise en œuvre efficace et une collaboration étroite avec les partenaires européens.