Logo détourné au nom de la liberté d’expression : légal sous conditions
Logo détourné au nom de la liberté d’expression : légal sous conditions

La caricature et la satire, même délibérément provocantes et grossières, participent de la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions; toutefois, le droit à l’humour connaît des limites, telles que les atteintes au respect de la dignité de la personne humaine, l’intention de nuire et les attaques personnelles.

Pour constituer une injure ou une diffamation, un logo détourné au nom de la liberté d’expression, doit présenter un degré de gravité suffisant.

Affaire HUTCHINSON

A été créée, par une ancienne salariée, une chaîne Youtube intitulée « HUTCHINSON SA » comportant, comme photographie de profil, un logo s’inspirant de celui la société, en y ajoutant une tête de diable et une fourche.  

Détournement ironique et satirique du logo officiel

Si ce visuel constitue, à l’évidence, un détournement ironique et satirique du logo officiel de la société HUTCHINSON, la référence ainsi opérée à la figure du diablotin, sans autre élément venant l’expliciter ou lui conférer une connotation manifestement négative ou outrageante, ne présente pas un degré de gravité suffisant pour être qualifié d’injure publique envers un particulier et dépasser les limites admissibles de la liberté d’expression.

Il en est de même de l’usage du logo altéré « HUETCHIENSHONTE® ».

Critères de l’injure

L’alinéa 2 de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 définit l’injure comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait » une expression outrageante portant atteinte à l’honneur ou à la délicatesse, un terme de mépris cherchant à rabaisser l’intéressé et une invective prenant une forme violente ou grossière.

L’appréciation du caractère injurieux du propos relève du pouvoir du juge. Elle doit être effectuée en fonction du contexte, en tenant compte des éléments intrinsèques comme extrinsèques au message,  de manière objective, sans prendre en considération la perception personnelle de la victime.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
Tribunal judiciaire de Paris
Jugement prononcé le : 11/03/2022
17e chambre correctionnelle
 
N° minute Extrait des minutes du greffe 1 :
 
du tribunal judiciaire de Paris N° parquet 17150000075.
 
Plaidé le 10/12/2021
 
Délibéré le 11/03/2022
 
JUGEMENT CORRECTIONNEL
 
Prononcé à l’audience publique du Tribunal Correctionnel de Paris le ONZE MARS DEUX MILLE VINGT-DEUX
 
Composée de :
 
Président : S-T U vice-présidente
 
Assesseurs : Amicie JULLIAND vice-présidente
 
B C juge
 
Ministère public Séverine VERBEKE substitut
 
Greffier: Viviane RABEYRIN greffière
 
Dans l’affaire plaidée à l’audience publique du Tribunal Correctionnel de
 
Paris le DIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT-ET-UN
 
Composée de :
 
APPEL: Président : Roïa PALTI vice-présidente la partie Civile, le Assesseurs : T COMBES vice-présidente
 
S-T U vice-présidente 21/03/22 Corti
 
Le Prévenu Ministère public Camille VIENNOT substitut
 
Greffier: Virginie REYNAUD greffière
 
a été appelée l’affaire
 
ENTRE:
 
LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, près ce tribunal,
 
PARTIE CIVILE POURSUIVANTE :
 
HUTCHINSON S.A., domiciliée chez Me X DE SOLERE 156 Avenue Victor HUGO 75016
 
PARIS
 
non comparante représentée par Maître Clara X DE SOLERE avocat au barreau de PARIS, laquelle a déposé des conclusions visées par la présidente et le greffier et jointes au dossier.
 
ET
 
PRÉVENUE
 
Nom D E née le […] à EDESSA (GRECE) de E KYRKOS et de E BASILIKI
 
Nationalité : : grecque
 
Situation familiale : célibataire
 
Situation professionnelle : sans Antécédents judiciaires : déjà condamnée Demeurant : […]
 
[…]
 
Situation pénale : libre Citation délivrée le 3 septembre 2019 à l’étude de l’huissier (AR signé le 8/09/2019) pour l’audience de fixation du 8 octobre 2019 puis sur renvoi contradictoire, suivie d’une citation délivrée à l’étude de l’huissier le 28 mai
 
2020 pour l’audience de fixation du 26 juin 2020 suite à l’annulation de
 
l’audience de plaidoiries du 24 avril 2020 (PCA – COVID19), puis sur renvoi contradictoire
 
non comparante représentée par Maître H I avocat au barreau de
 
PARIS, avocat commis d’office à l’audience, lequel a déposé des conclusions visées par la présidente et le greffier et jointes au dossier
 
Prévenue des chefs de :
 
INJURE PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE
 
OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ELECTRONIQUE faits commis le 7 avril 2017 à Fontainebleau et Paris
 
[…](S) PAR PAROLE, ECRIT, […]
 
MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ELECTRONIQUE faits commis le 9 avril 2017 à Fontainebleau et Paris
 
USURPATION DE L’IDENTITE D’UN TIERS OU USAGE DE DONNEES
 
PERMETTANT DE L’IDENTIFIER EN VUE DE TROUBLER SA TRANQUILLITE
 
[…]
 
CONSIDERATION faits commis courant janvier 2017 à Fontainebleau et Paris
 
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17ème Ch.
USURPATION DE L’IDENTITE D’UN TIERS OU USAGE DE DONNEES
 
PERMETTANT DE L’IDENTIFIER EN VUE DE TROUBLER SA TRANQUILLITE
 
[…]
 
CONSIDERATION faits commis courant janvier 2017 à Fontainebleau et Paris
 
INJURE PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE
 
OU MOYEN DE COMMUNICATION AU PUBLIC PAR VOIE ELECTRONIQUE faits commis le 7 avril 2017 à Fontainebleau et Paris
 
DEBATS
 
Selon ordonnance rendue le 27 juin 2019 par l’un des juges d’instruction de ce siège, à la suite des plaintes avec constitution de partie civile déposées les 23 mai et 27 octobre 2017 par la société HUTCHINSON S.A., prise en la personne de son président directeur général F G, D
 
E a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour y répondre :
 
– d’avoir à Fontainebleau et à Paris, le 7 avril 2017, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant la directrice de publication du compte Youtube < HUTCHINSON SA » commis le délit d’injure publique envers un particulier par un moyen de communication électronique au public en l’occurrence en publiant sur ledit site accessible au public un emblème, en l’espèce le logo de la société HUTCHINSON SA avec une tête de diable et une fourche ledit logo comportant une expression outrageante, un terme de mépris ou une invective à l’égard de la société
 
HUTCHINSON SA,
 
faits prévus et réprimés par les articles 23, 29 aliéna 2, 33 alinéa 2, 42, 43, 48-6
 
de la loi du 29 1881 et les articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet
 
1982;
 
– d’avoir à Fontainebleau et à Paris, le 9 avril 2017, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant la directrice de publication du compte Youtube « HUTCHINSON SA » commis le délit de diffamation publique envers un particulier par un moyen de communication électronique au public en l’occurrence en publiant sur ledit site accessible au public une vidéo intitulée « Hutchinson CdR-le savoir violer » accompagné des commentaires introductifs suivants :
 
« En volant on reste stupide.
 
Hueeeeeeeeee Hueeeeeee
 
*
 
Boooooooooo0000
 
et contenant les propos et image suivants :
 
* à Omin7s, les propos tenus par une femme : « En général les entreprises demandent et valorisent l’expérience internationale mais il y a une entreprise qui la dévalorise de façon ridicule alors qu’elle exploite les experts » ;
 
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17ème Ch.
* à Omin!2s, les propos tenus par un homme masqué : « Je suis le patron et si je veux je peux voler » ;
 
* à Omin37s, les propos tenus par un homme masqué : « Je suis le patron et je souhaite obtenir de l’expertise pour devenir directeur. Je suis le patron et j’ai le droit de voler. J’ai plus d’éléments que eux » ;
 
* à Omin41s, les propos tenus par un homme masqué ouvrant avec une clé un dossier « Academic Lectures » : « Chez HUTCHINSON nous avons le savoir faire, le savoir violer… et la société le récompense bien ».;
 
* à 1min46s, les propos tenus par un homme masqué : « J’ai obtenu la connaissance. C’est pour mon évolution professionnelle et le bénéfice de l’entreprise » ;
 
* à 1min51s, les propos tenus par le même homme masqué s’adressant à son patron : « Ma mission de violation est accomplie chef » et les propos tenus en réponse par son patron : « Très bien Tu as un fort potentiel. Je t’aiderai à devenir directeur. Juste donnez-moi les documents académiques que tu as volé de l’experte comme je aussi manque de formation académique » ;
 
* à 2min02s, l’image reproduisant une crotte, un panneau de signalisation contre les vols et la mention HUETCHIENSHONTE ;
 
lesdits commentaires, propos et image contenant des allégations ou des imputations de faits portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la société HUTCHINSON SA,
 
faits prévus et réprimés par les articles 23 alinéa 1, 29 alinéa 1, 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 et les articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet 1982;
 
– d’avoir à Fontainebleau et Paris, courant 2017 et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, usurpé l’identité de la société
 
HUTCHINSON SA ou fait usage d’une ou plusieurs données de toute nature. permettant de l’identifier, en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération en l’occurrence en créant un compte Youtube au nom de HUTCHINSON SA avec le logo de cette
 
.société transformé par l’ajout d’une tête de diable et d’une fourche, compte qu’elle utilisera pour mettre en ligne des vidéos préjudiciables à la société HUTCHINSON SA,
 
faits prévus et réprimés par l’article 226-4-1 du code pénal;
 
– d’avoir à Fontainebleau et à Paris, courant 2017 et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, usurpé l’identité de HUTCHINSON SA ou fait usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de
 
l’identifier, en l’espèce, en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, en l’espèce en amendant des fiches de présentations usurpées des établissements et filiales de la société
 
HUTCHINSON SA accessibles sur Google via la fonctionnalité. « MY
 
BUSINESS », en publiant des messages avec transformation de HUTCHINSON en HUETCHIENSHONTE et du logo de la société par ajout d’une tête de diable et d’une fourche et en renvoyant sur le compte Youtube ouvert
 
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17ème Ch.
….
 
faussement au nom de HUTCHINSON SA où sont publiés des propos préjudiciables à la société HUTCHINSON SA,
 
faits prévus et réprimés par l’article 226-4-1 du code pénal;
 
– d’avoir à Fontainebleau et à Paris, le 7 avril 2017, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, étant la directrice de publication du compte Youtube « HUTCHINSON SA » commis le délit
 
d’injure publique envers un particulier par un moyen de communication. électronique au public en l’occurrence en publiant sur ledit site accessible au public une vidéo intitulée « HUTCHINSON SA Centre de Recherche » accompagnée des commentaires introductifs suivants :
 
< Hue-Q-R
 
On doit la huer bruyamment
 
Hueeeeeeeee Hueeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee »;
 
et contenant les images et propos suivants à savoir :
 
*au tout début une image reproduisant le logo de la société HUTCHINSON avec une tête de diable et une fourche et la mention
 
« HUTCHIENSHONTE » ;
 
* à Omin22s une image montrant des visages d’employés de la société
 
HUTCHINSON SA reproduits sur des postérieurs de Q se tenant devant un bâtiment de la société HUTCHINSON SA placardé de panneaux alarmistes tels « Danger », « Scandal », «Warning » ;
 
* à Omin37s, les propos : « Oh merde ce trou du cul il exagère encore une fois pour briser mes nerfs » ;
 
« J’aimerais le gifler mais la merde éclabousse. Merde » ;
 
* à 2min14s, l’image du patron de la société HUTCHINSON avec une crotte de chien sur la tête, devant des panneaux «P Q R » ou
 
< […] » ;
 
* à 2min28s, les propos: «Mettez vos pouces dans vos culs » « cons »
 
« Avec notre aide crétin » ;
 
* à 2min35s, l’image représentant le nom de la société HUTCHINSON SA avec une crotte de chien;
 
* à 2min45s, l’image imputée à la société HUTCHINSON représentant une CROIX GAMMEE ;
 
* à 3min59s, l’image d’une crotte de chien associée à la mention
 
HUTCHIENSHONTE ;
 
* à 4min14s, l’image d’une salle de torture ;
 
* à 4min29s, l’image de corps torturés ;
 
* à 4min37s, l’image d’une scène de massacre et de mise à mort;
 
* à 4min41s, une image reproduisant le logo de la société HUTCHINSON
 
SA avec une tête de diable et une fourche et la mention
 
«HUTCHIENSHONTE » ;
 
* à 4min55s, une image de recruteurs de l’état islamique associés au slogan
 
< M N O: SIGN UP OR DIE » ;
 
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17ème Ch.
lesdits commentaires, images et propos comportant des expressions. outrageantes, des termes de mépris ou des invectives à l’égard de la société
 
HUTCHINSON SA,
 
faits prévus et réprimés par les articles 23, 29 aliéna 2, 33 alinéa 2, 42, 43, 48-6 de la loi du 29 juillet 1881 et les articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet
 
1982.
 
A l’audience du 8 octobre 2019, le tribunal a établi le calendrier et a renvoyé
 
l’affaire aux audiences des 6 janvier 2019, 27 mars 2020 pour relais et 24 avril 2020, pour plaider.
 
En raison du plan de continuité de l’activité du tribunal suite à la crise sanitaire liée à la COVID19, l’audience du 24 avril 2020 a été annulée. Les parties ont été convoquées à l’audience du 26 juin 2020 pour nouvelle fixation.
 
A cette date, le tribunal a établi un nouveau calendrier et a renvoyé l’affaire aux audiences des 22 septembre 2020, 4 décembre 2020, 3 mars 2021, 3 juin 2021,
 
1er septembre 2021, 12 novembre 2021 pour relais et 10 décembre 2021, pour examen au fond.
 
A cette dernière audience, à l’appel de la cause, le juge rapporteur a constaté que les parties étaient représentées par leur conseil respectif, le tribunal commettant d’office Maître H I pour la prévenue.
 
Le juge rapporteur a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.
 
Les débats se sont tenus en audience publique.
 
Maître H I soulève in limine litis l’autorité de la chose jugée. attachée à un jugement rendu par la 17ème chambre du tribunal judiciaire de Paris le 30 novembre 2018 pour l’infraction d’usurpation d’identité à compte d’avril 2017.
 
Après avoir entendu les explications des parties, les réquisitions du ministère public et le conseil de la prévenue ayant eu la parole en dernier, le tribunal a décidé, après en avoir délibéré, de joindre l’incident au fond.
 
Après le rappel des faits et de la procédure par le juge rapporteur, le tribunal a successivement entendu, dans l’ordre prescrit par la loi : Maître Clara X de SOLERE, conseil de la partie civile, qui a développé ses conclusions écrites,
 
– le représentant du ministère public en ses réquisitions,
 
– Maître H I, conseil de la prévenue, qui a soutenu ses conclusions écrites.
 
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17ème Ch.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré, et les parties ont été informées, en application des dispositions de l’article 462, alinéa 2, du code de procédure pénale, que le jugement serait prononcé le 11 mars 2022.
 
A cette date, la décision suivante a été rendue :
 
Faits
 
La société HUTCHINSON S.A. est une entreprise française spécialisée dans la transformation de caoutchouc, à la tête d’un groupe de filiales comportant 95 établissements répartis dans 75 pays, dont la marque figurative est la suivante
 
(D2) :
 
Le 23 mai 2017, elle déposait plainte avec constitution de partie civile contre X devant le doyen des juges d’instruction de ce tribunal des chefs d’injure publique envers un particulier, sur le fondement des articles 23 alinéa 1, 29 alinéa 2 et 33 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, de diffamation publique envers un particulier, sur le fondement des articles 23 alinéa 1, 29 alinéa 1 et 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 et d’usurpation d’identité numérique sur le fondement de l’article 226-4-1 du code pénal (D2).
 
La société indiquait spécifiquement poursuivre :
 
Sur le fondement de l’usurpation d’identité, la création d’un compte Youtube au nom de la société HUTCHINSON SA, dont le logo avait été altéré, destiné à publier des vidéos au contenu violent;
 
Sur le fondement de l’injure publique envers un particulier :
 
la reproduction détournée de son logo sur cette chaîne Youtube, laissant apparaître un diable avec une fourche, comportant un caractère outrageant notamment à la lumière des vidéos postées sur ce compte ;
 
Une vidéo intitulée « Hutchinson SA centre de recherche » du 7 avril 2017, dont elle jugeait la présentation et 13 passages rappelés ci-dessus injurieux à son encontre ;
 
Sur le fondement de la diffamation publique envers un particulier, une vidéo intitulée « Hutchinson Cdr le savoir violer » du 9 avril 2017 dont elle jugeait la présentation et 8 passages rappelés ci-dessus diffamatoires à son encontre.
 
Elle joignait à sa plainte un constat d’huissier en date du 13 avril 2017 matérialisant les publications et compte litigieux (D7).
 
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17ème Ch.
Si
 
Le 27 octobre 2017, la société HUTCHINSON S.A., à la suite d’un classement sans suite d’une plainte simple, déposait une deuxième plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen des juges d’instruction des chefs d’usurpation d’identité numérique, sur le fondement de l’article 226
 
4-1 du code pénal, et de contrefaçon de marque, sur le fondement de l’article
 
L.716-10 du code de la propriété intellectuelle.
 
Aux termes de cette plainte, elle indiquait que la fiche d’identité « Google my business » de la quasi-totalité de ses établissements et filiales avait été usurpée afin de publier une reproduction contrefaisant et dénigrante de son logo et de sa dénomination sociale (D2a), produisant à l’appui de sa plainte deux constats d’huissier en date des 13 et 23 avril 2017 (D6a-D7a).
 
La société partie civile communiquait au doyen des juges d’instruction l’identification par la société Google Inc, à la suite d’une ordonnance sur
 
· requête délivrée par le Président du tribunal judiciaire de Paris (D22), de trois adresses IP correspondant aux contenus dénoncés sur les fiches Google My
 
Business et une quatrième adresse correspondant à la chaîne Youtube litigieuse (D23), dont le titulaire, après nouvelle ordonnance sur requête du 20 juin 2017
 
(D24), était identifiée comme Y E (D26). Elle indiquait qu’Y E était une ancienne ingénieure ayant travaillé pour elle au centre de recherche de MONTARGIS du 4 octobre 2013 à juin 2015, date à laquelle elle avait fait l’objet d’une mesure de licenciement qu’elle avait contestée devant le Conseil des prud’hommes. Dans un jugement du 23 novembre 2016, antérieur aux faits litigieux, ce dernier avait jugé ce licenciement sans cause réelle et sérieuse mais avait considéré qu’aucune preuve n’était apportée d’un harcèlement moral allégué par Y
 
E (D31).
 
Sur réquisitions du ministère public, une information judiciaire était ouverte. pour chacune des deux plaintes, le 5 septembre 2017 s’agissant de la plainte avec constitution de partie civile déposée des chefs d’usurpation d’identité numérique, injure et diffamation (D38-D39) et le 25 juin 2018 s’agissant de la plainte déposée des chefs d’usurpation d’identité numérique et de contrefaçon de marque (D51 -D52). Les deux procédures faisaient l’objet d’une jonction le 2 octobre 2018, sous le numéro 17/150000075 (D101).
 
La partie civile était entendue le 4 octobre 2017 par le magistrat instructeur et indiquait que la prévenue avait été licenciée « car elle ne cessait de dire qu’elle était victime de harcèlement » (D41). Il ressortait de son audition et des documents qu’elle avait fait parvenir au magistrat instructeur que la plateforme
 
Youtube avait accepté de supprimer la vidéo intitulée « Hutchinson SA centre de recherche » mais non celle intitulée « Hutchinson Cdr – le savoir violer »
 
(D41-D45, 46-D52), ce que confirmaient les investigations diligentées sur commission rogatoire par la brigade de répression de la délinquance contre la personne («BRDP »>, D59).
 
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.17ème Ch.
D E, entendue dans un premier temps par les enquêteurs le 20 mars 2018 sur les faits poursuivis dans la première plainte, reconnaissait être à l’origine de la création du compte Youtube et de la publication des deux vidéos litigieuses (D67). Elle avait, à la suite de cette audition, supprimé la deuxième vidéo poursuivie.
 
Après de multiples convocations, elle était entendue par le magistrat instructeur le 19 novembre 2018 sur les faits objets des deux procédures jointes. Ses déclarations s’agissant de la modification des fiches « Google My Business » des filiales de la partie civile étaient confuses. Si elle reconnaissait avoir créé l’image qui y apparaît et être à l’origine des vidéos Youtube auxquelles cette image renvoie, elle niait être la personne ayant procédé à leur publication. Dans un deuxième temps, elle indiquait que tout utilisateur de Google pouvait proposer la publication d’une photographie ou d’un lien et ajoute avoir téléchargé la photographie litigieuse sur la plateforme mise en place par Google, pensant qu’il y avait un contrôle manuel avant la mise en ligne.
 
Elle précisait que sa démarche était satirique et parodique, le « SA » du compte Youtube « HUTCHINSON SA » ne renvoyant pas S.A. (société anonyme) mais aux deux premières lettres du mot « satirique » et soulignait qu’il était évident pour l’utilisateur de Youtube qu’il ne s’agissait pas d’un compte officiel.
 
À l’issue de son interrogatoire de première comparution, elle était mise en examen des chefs de diffamation publique envers un particulier, injure publique envers un particulier, contrefaçon de marque et usurpation d’identité (D106).
 
Le 15 février 2019, le conseil d’D E contestait la mise en examen de sa cliente au motif que la société partie civile ne disposait pas de la qualité pour agir au nom de ses filiales, et qu’il n’existait aucun indice grave ou concordant rendant vraisemblable sa participation aux faits de contrefaçon de marque et d’usurpation d’identité, en ce que les personnes morales ne peuvent être victimes de ce dernier délit et en ce qu’il n’y avait en l’espèce aucune volonté d’usurper l’identité de la partie civile (D106-D108).
 
Au cours de l’instruction, la partie civile indiquait à plusieurs reprises au magistrat instructeur que de nouvelles publications de même nature étaient mises en ligne sur d’autres supports (D71-D76, D78-D81, D83-D85), ayant donné lieu à deux nouvelles citations directes du 18 décembre 2017 (faits jugés par le tribunal correctionnel de Paris le 30 novembre 2018, D72, pièce n°6 en défense) et du 1er octobre 2018 (pièce non numérotée en défense, affaire jugée conjointement avec la présente procédure).
 
Par réquisitoire définitif en date du 14 mai 2019, le Procureur de la République sollicitait le non-lieu du chef d’usurpation d’identité, dès lors qu’il apparaissait de manière évidente à celui qui regarde la chaîne Youtube et qui lit les fiches
 
Google My business que ces publications ont pour but de critiquer la société
 
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17ème Ch.
mais n’émanent pas d’elle, ainsi que du chef de contrefaçon de marque. Il requérait le renvoi devant le tribunal correctionnel des chefs des infractions de presse (D113).
 
Le conseil de la société partie civile faisait valoir, dans ses observations, que l’usurpation d’identité numérique était bien applicable aux personnes morales et que les infractions d’usurpation d’identité et la contrefaçon de marque étaient parfaitement caractérisées en l’espèce.
 
Le 27 juin 2019, le magistrat instructeur rendait une ordonnance de non-lieu des chefs de contrefaçon de marque et de renvoi devant le tribunal correctionnel du chef des autres infractions, dans les termes déjà rappelés.
 
A l’audience du 10 décembre 2021, la prévenue soulevait, in limine litis, une exception de procédure, faisant valoir que les faits d’usurpation d’identité à raison de la modification des fiches Google My business avaient déjà fait l’objet d’une décision définitive de relaxe par un précédent jugement du tribunal correctionnel de PARIS du 30 novembre 2018 et demandait au tribunal de constater l’autorité de la chose jugée.
 
Le ministère public s’en remettait à l’appréciation par le tribunal des pièces produites par les parties.
 
Le conseil de la partie civile soulignait que les faits ayant fait l’objet de ce jugement précédent étaient différents.
 
L’incident était joint au fond.
 
La partie civile, développant oralement ses conclusions déposées à l’audience, estimait l’ensemble des infractions caractérisées.
 
Elle sollicitait à titre de dommages et intérêts, que la prévenue soit condamnée à lui verser, s’agissant des faits d’injure publique envers un particulier, les sommes de 10.000 euros à raison du détournement de son logo et de 50.000 euros à raison de la vidéo poursuivie, s’agissant des faits de diffamation publique envers un particulier, la somme de 30.000 euros à raison de la vidéo poursuivie, et s’agissant des faits d’usurpation numérique, les sommes de 50.000 euros à raison de la création de la chaine Youtube < Hutchinson SA » et de 50.000 euros à raison du détournement des fiches Google My Business. Elle demandait également le retrait des contenus litigieux, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, le tribunal devant s’en réserver la liquidation, ainsi que l’exécution provisoire des dispositions civiles du jugement.
 
Enfin, elle sollicitait la condamnation de la prévenue à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale, ainsi que sa condamnation aux dépens, qui incluront le coût des constats d’huissier.
 
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17ème Ch.
Le ministère public considérait que seuls les passages de la vidéo du 7 avril 2017 pouvaient être considérés comme injurieux. S’agissant des faits de diffamation publique, il soutenait qu’il n’y avait pas d’imputation d’un fait précis. S’agissant, enfin, des faits d’usurpation d’identité numérique, il indiquait que les personnes morales pouvaient être victimes de cette infraction mais qu’en l’espèce, la création de la chaîne Youtube, avec un logo modifié, ne laissait pas de doute sur le fait qu’il ne s’agissait pas de la partie civile.
 
S’agissant des fiches Google My Business, il relevait que la prévenue s’était fait passer pour la société pour publier le contenu litigieux et qu’il faudrait distinguer, pour caractériser l’infraction, si les entreprises visées étaient ou non filiales de la société HUTCHINSON.
 
Le conseil d’D E sollicitait la relaxe, relevant le caractère satirique des propos jugés injurieux par la partie civile, l’absence de caractère diffamatoire des propos poursuivis au titre de la diffamation et à titre subsidiaire soulevant sa bonne foi, et soutenant, enfin, que l’infraction
d’usurpation d’identité numérique ne pouvait être invoquée par une personne. morale, que la société HUTCHINSON ne pouvait agir au nom de ses filiales et qu’en tout état de cause, il n’était pas démontré la volonté de la prévenue se faire passer pour elle.
 
1. Sur l’action publique
 
Sur l’exception de procédure soulevée par la prévenue.
 
Si le conseil de la prévenue a souhaité soulever, à titre liminaire, l’autorité de la chose jugée s’agissant des faits d’usurpation d’identité numérique, il sera relevé qu’il ne s’agit pas d’une exception de nullité devant être appréciée in limine litis.
 
Cette demande sera dès lors traitée avec le fond.
 
S’agissant des faits d’injure publique envers un particulier
 
La société HUTCHINSON poursuit au titre de l’injure publique envers un particulier, d’une part, la photographie de profil du compte Youtube intitulée
 
< HUTCHINSON SA » et d’autre part plusieurs passages d’une vidéo intitulée
 
< Hutchinson SA centre de recherche » du 7 avril 2017.
 
Elle fait valoir que ces deux publications, par leur caractère grossier, ordurier et outrageant, revêtent un caractère injurieux. Le ministère public considère que la simple modification du logo de la société, prise isolément, n’atteint pas une gravité suffisante pour pouvoir être qualifiée d’injure mais que la vidéo publiée le 7 avril 2017 est effectivement injurieuse, la prévenue, quant à elle, présentant les faits comme relevant du domaine de l’exagération satirique.
 
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17ème Ch. 3
Sur ce, il convient de rappeler que l’alinéa 2 de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 définit l’injure comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait » une expression outrageante portant atteinte à l’honneur ou à la délicatesse, un terme de mépris cherchant à rabaisser l’intéressé et une invective prenant une forme violente ou grossière.
 
L’appréciation du caractère injurieux du propos relève du pouvoir du juge. Elle doit être effectuée en fonction du contexte, en tenant compte des éléments intrinsèques comme extrinsèques au message,  de manière objective, sans prendre en considération la perception personnelle de la victime.
 
La caricature et la satire, même délibérément provocantes et grossières, participent de la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions; toutefois, le droit à l’humour connaît des limites, telles que les atteintes au respect de la dignité de la personne humaine, l’intention de nuire et les attaques personnelles.
 
C’est au regard de l’ensemble de ces principes qu’il convient à présent d’examiner chacune des publications incriminées.
 
Sur la publication du logo détourné de la société HUTCHINON
 
Il ressort du constat d’huissier en date du 13 avril 2017 (D7-1 à D7-13) qu’a été créée une chaîne Youtube intitulée « HUTCHINSON SA » comportant, comme photographie de profil, un logo s’inspirant de celui la société partie civile, en y ajoutant une tête de diable et une fourche :
 
Il convient en l’espèce de relever que cette publication, dont la prévenue ne conteste pas être à l’origine, a été poursuivie de manière isolée et indépendante de tout contexte.
 
Si ce visuel constitue, à l’évidence, un détournement ironique et satirique du logo officiel de la société HUTCHINSON, la référence ainsi opérée à la figure du diablotin, sans autre élément venant l’expliciter ou lui conférer une connotation manifestement négative ou outrageante, ne présente pas un degré de gravité suffisant pour être qualifié d’injure publique envers un particulier et dépasser les limites admissibles de la liberté d’expression.
 
Dans ces conditions, le tribunal entrera en voie de relaxe à l’égard de cette publication.
 
Sur la vidéo intitulée « Hutchinson S.A. centre de recherche »
 
Il ressort du constat d’huissier du 13 avril 2017 que sur la chaîne Youtube < HUTCHINSON SA » a été publiée le 7 avril 2017 une vidéo intitulée «Hutchinson SA centre de recherche » d’une durée de 5’15 minutes, librement accessible au public (D7/12, « vidéo n°1 »).
 
La description de cette vidéo, située sous celle-ci, est la suivante :
 
«Hue-Q-R
 
On doit la huer bruyamment!
 
Hueeeeeeeee !!!!Hueeeeeeeeeeeeeeeeeeee !!!» (publication poursuivie n°2, les propos poursuivis étant grisés comme dans l’ensemble du jugement, pour les besoins de la motivation).
 
La vidéo en elle-même consiste en une suite d’images restant quelques secondes à l’écran, pour l’essentiel constituée de montages, sur fond musical.
 
Les 13 propos et/ou images suivants sont poursuivis :
 
La première image de la vidéo, comprenant le logo altéré de la société partie civile au-dessus d’une dénomination déformée de celle-ci
 
«< HUETCHIENSHONTE® » (publication poursuivie n°2). Cette image, est également poursuivie lorsqu’elle est reproduite à 4’41 (publication poursuivie n°13):
 
HUETCHIENSHONTE*
 
– A 0’22, une image montrant des visages de personnes présentées par la partie civile comme des employés de la société reproduits sur des postérieurs de Q et se tenant devant un bâtiment de la société partie civile où sont placardés des panneaux indiquant « DANGER », < SCANDAL », «< WARNING » (publication poursuivie n°3) :
 
A la minute 0,37, les propos suivants d’une personne hurlant dans un mégaphone, sur laquelle une tête a été accolée par montage, faisant des reproches à un homme qui dit « Oh merde … ce trou du cul il exagère encore une fois pour briser mes nerfs (…) J’aimerais le gifler mais la merde éclabousse. Merde! » (publication poursuivie n°4)
 
– A 2’14, une image montrant deux personnes sur lesquelles deux visages ont été incrustés par montage, l’une d’entre elles ayant une crotte de chien sur la tête, devant des panneaux «< P Q R » ou «[…] »
 
(« on est nul ») (publication poursuivie n°5) :
 
{
 
[…]
 
[…]
 
AND 393 28= 50 STUKJ O, […]
 
[…]
 
TICH FULL OF RFÍ,
 
*AL!.
 
– A 2’28, les propos « Mettez vos pouces dans vos culs, cons » et « Avec notre aide crétin », contenus dans une image située dans le même décor que la précédente, et prononcés par deux personnages, un dans la rue, et l’autre à la fenêtre, avec au bas de l’image le logo et la dénomination sociale détournés de la partie civile avec sa devise (« we make it possible ») et à gauche, une personne dont le visage a été incrusté par un montage, qui se prend la tête avec comme légende « how is it possible to fuck so much », à côté du panneau «
 
-A 2’35, une image représentant le nom de la société partie civile associé à une crotte de chien (publication poursuivie n°7):
 
[…]
 
A 2’45, une image représentant un bâtiment sous forme de croix gammée
 
(publication poursuivie n°8) :
 
– A 3’59, une image représentant la dénomination détournée de la société partie civile au-dessous d’une crotte de chien (publication poursuivie n°9) : .
 
HUETCHIENSHONTEⓇ
 
-A 4’14, l’image d’une salle de torture où pendent des chaînes et des attaches (publication poursuivie n°10):
– A 4’29, l’image de corps torturés (publication poursuivie n°11):
 
– A 4’37, une image.où une personne, pendue par les pieds, se voit passer une scie à travers le corps (publication poursuivie n°12):
 
– A 4’55, une image représentant des recruteurs de l’État l’islamique associés au slogan «M N recruitement: sign up or die » (publication poursuivie n°14):
 
Il sera relevé, à titre liminaire, qu’D E a reconnu avoir publié cette vidéo sur le compte Youtube qu’elle avait créé, sa responsabilité dans la gestion de cette chaîne ayant, en tout état de cause, été établie par le biais de l’analyse de son adresse IP.
 
En l’espèce, les publications poursuivies consistent en une succession de propos et d’images, diffusés pêle-mêle sans explication ni contextualisation, dont il ressort une présentation particulièrement négative et dégradante de la partie civile, nommément citée tant dans le titre de la vidéo que dans le corps de celle-ci.
 
Ainsi, outre que les publications assimilent la société partie civile à un animal par la déformation de sa dénomination sociale («hue chien R », publications n°1, 2, 5, 9 et 13) ou l’apposition du visage de ses membres sur des postérieurs de Q (publication n°4), elles. cherchent à susciter chez le spectateur un sentiment d’opprobre, comme en témoignent, là encore,
 
l’altération de la dénomination sociale (« hue chien R », publications n°2,
 
5, 9 et 13) renforcée par la description de la vidéo, qui annonce l’ensemble du propos (publication n° 1 «hue-Q-R, on doit la huer bruyamment !
 
Hunnunnue !!! huuuinee!!).
 
Cette présentation méprisante de la partie civile est renforcée par les nombreuses références scatologiques accolées soit à sa dénomination, déformée ou non (publications poursuivies n°7 et n°9), soit à ses représentants (publication n°5), et par les propos dévalorisants envers ses dirigeants tenus par les personnages sur les images (« Oh merde … ce trou du cul il exagère encore une fois pour briser mes nerfs (…) J’aimerais le gifler mais la merde éclabousse. Merde!», « mettez vos pouces dans vos culs crétins », publications
 
Enfin, par les images diffusées, la société HUTCHINSON S.A. est assimilée à des régimes totalitaires ou violents, par la référence, soit à l’Allemagne nazie (publication n°8), soit à l’État islamique (publication n°14), soit à des scènes de torture médiévales et à des cachots (publications n°10, 11 et 12), ce qui vient, à l’évidence, faire une présentation particulièrement négative de ses méthodes de travail et vise à la dénigrer.
 
Le nombre des publications outrageantes et leur virulence, diffusées au surplus par D E dans un contexte de conflit avec la partie civile à la suite de son licenciement, démontrent que les propos et images poursuivis. ont dégénéré en une invective personnelle envers la société HUTCHINSON, dépassant par là-même le droit à la satire et les limites de la liberté
 
d’expression.
 
Dans ces conditions, D E sera déclarée coupable des faits d’injure publique envers un particulier à raison des propos et images diffusés dans la vidéo du 7 avril 2017 et dans sa description.
 
S’agissant des faits de diffamation publique envers un particulier
 
La partie civile fait valoir que la vidéo publiée sur la chaîne Youtube
 
< HUTCHINSON SA » le 9 avril 2017, intitulée « Hutchinson CdR – le savoir violer » contient plusieurs extraits lui imputant, à travers ses dirigeants, d’être une société incompétente en matière de recherche et de pallier cette incompétence en mentant, volant ou « violant » les compétences académiques de ses employés, en les dévalorisant et en les abusant par du harcèlement ou de l’intimidation.
 
Le ministère public et la prévenue soulignent quant à eux l’absence
 
d’imputation d’un fait précis de nature à porter atteinte à l’honneur et à la considération.
 
Sur ce, il sera rappelé que l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé »;
 
– la personne ou le corps auquel le fait est imputé doivent être expressément nommés ou à défaut, leur identification doit être rendue possible par les termes employés ou leurs circonstances intrinsèques ou extrinsèques ;
 
– il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure -caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait »- et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée;
 
– l’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises ;
 
– la diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.
 
Par ailleurs, ni les parties, ni les juges ne sont tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’acte initial de poursuite et il appartient aux juges de rechercher si ceux-ci contiennent l’imputation formulée par la partie civile ou celle d’un autre fait contenu dans les propos en question, les juges étant également libres d’examiner les divers passages poursuivis ensemble ou séparément pour apprécier leur caractère diffamatoire.
 
En l’espèce, la société partie civile poursuit la présentation introductive et 8 passages d’une vidéo publiée le 9 avril 2017 sur la chaîne Youtube < HUTCHINSON SA » et intitulée « Hutchinson CdR- le savoir violer ».
 
Il ressort du constat d’huissier du 13 avril 2017 (D7-11, « vidéo n°1 ») que cette vidéo est librement accessible au public et est introduite par les termes suivants (propos n°ᵒ1 poursuivis au titre de la diffamation).
 
« En volant on reste stupide.
 
Hueeeeeeeee!!!!Hueeeeee !!!
 
Boo000000000 !!!! »
 
Cette vidéo consiste en une succession d’images et de montages qui ne restent
 
à l’écran que quelques secondes, sur fond sonore, et dont 8 passages sont spécifiquement poursuivis :
 
– A 0’07, une femme s’adresse à un représentant de la société HUTCHINSON qui lui indique être « son chef chez Hutchinson », et sur lequel a été apposé, par un montage, une photographie. Il lui précise qu’il n’a aucune expérience à l’étranger, étant resté en France, en lui dit: «donnez-moi tes notes académiques de ta formation internationale. Donnez-moi tout ce que tu lis,
 
c’est pour le bénéfice de l’entreprise ». En dessous de la scène, un commentaire indique « En général les entreprises demandent et valorisent
 
l’expérience internationale, mais il y a une entreprise qui la dévalorise de façon ridicule alors qu’elle exploite les experts » (propos n°2 poursuivi au titre de la diffamation) :
 
Host i, je n’ai aucuss expérience à táfranger parca que France m’a donné d’emploi pour ne pas quitter le pays, seon pays m’a payá pour ne pas partir parce que la France avait brenin de soi sa sa m’a pas premis 200 C’est pourquoi je d’ai pas luspárienca internationals comma toi. Kore, toimen ja zuis ton chat chez llickincen
 
[…] da ta formation internationala.
 
Donner un fortes que te lis. ‘act pour la bisilīce de notre entreprise.
 
Il est généralement adats que l’international est en passage oblak dana nis carrière pour valorizar des compliances,
 
Les pays donnent des pourche pour insitue lis jeunes d’audiar à Tatranger afin d’obtenir la cavoir-fairs at apporter de la valeur dans lar paye,
 
Aussi, des professionnels cholsiccant de travaiter à fétranger pour évoluer à leur carriärsi En intral las antreprise demandent el valoricent fexpirience internationais mais il y a une entreprise qui la dávalitica de façon ridineſs alors qu’els exploitatex exprets…
 
– A 0’12, un individu cagoulé sur lequel a été apposé le logo de la société partie civile, et sur lequel ont été incrustés par montage les yeux d’une tierce personne, est vu en train de prendre un dossier intitulé « Academics notes » dans un tiroir et une bulle lui fait dire : « je suis le patron et si je veux, je peux voler » (propos n°3 poursuivis au titre de la diffamation):
 
Jadila prem
 
[…]
 
– A 0’37, le même individu,tenant des « Academics notes » en main, indique
 
« Je suis le patron et je souhaite obtenir de l’expertise pour devenir directeur. Je suis le patron et j’ai le droit de voler. J’ai plus d’éléments que eux» (propos n°4 poursuivis au titre de la diffamation) :
 
A 0’41, le même individu, tenant toujours à la main un document intitulé
 
« Academic lectures », indique : « Chez Huchinson, nous avons le savoir. faire, le savoir violer… et la société le récompense bien» (propos n°5 poursuivis au titre de la diffamation) :
 
[…] Se Kaysi faire,
 
1 … at ta thellësi tärompenza dian,
 
[…]
 
– A 1’46, après la diffusion de plusieurs autres images dans lesquelles un homme fouille avec une torche des tiroirs et des dossiers, et part avec une mallette en regardant derrière lui et en faisant signe de se taire, le même homme habillé en noir, masqué et avec un bonnet, marche avec une clé USB à la main en indiquant : «J’ai obtenu la connaissance. C’est pour mon évolution professionnelle et le bénéfice de l’entreprise» (propos n°6 poursuivis au titre de la diffamation) :
 
Tal citane fa creascvic….
 
C’est pozon dresežkom pretoześmnečis er fenético de tantrapets.
 
– A 1’51, le même homme, sans son masque, dit « Ma mission de violation est accomplie chef» ( propos n°7 poursuivis au titre de la diffamation) à une personne qui lui répond « très bien, tu as un fort potentie!… Je t’aiderai à devenir directeur. Juste donnez-moi les documents académiques que tu as volé de l’experte comme je aussi manque de formation académique » (propos
 
n°8 poursuivis au titre de la diffamation). Au-dessus d’eux se trouve le logo modifié de la société partie civile ainsi que le nom «HUETCHIENSHONTE » :
 
HUETCHIENSHONTE
 
A 2’02, l’image suivante représentant de nouveau la dénomination sociale détournée HUETCHIENSHONTE associée à une crotte de chien et un panneau de signalisation contre les vols :
 
HUETCHIENSHONTEⓇ
 
Il ressort de la description même des propos et images poursuivis que ceux-ci sont particulièrement confus et équivoques, évoquant tantôt le fait de « voler », tantôt de «violer », tantôt d’exploiter, et suggérant de manière évasive une forme d’appropriation de connaissance et d’expertise de la part des dirigeants de la société partie civile, représentés en tenue de voleur ou en costume professionnel, sans qu’il soit possible, dans ces conditions, de déterminer à quel fait précis ils feraient référence.
 
La difficulté à percevoir le sens exact des propos poursuivis est renforcée visionnage de la publication litigieuse, qui consiste en une succession décousue d’images n’apparaissant que quelques secondes à l’écran, de sorte que le spectateur n’est pas toujours en mesure de lire les propos y apparaissant (publication n°2 notamment). La vidéo ne fait en outre aucun lien entre les différentes images qu’elle reproduit et n’explicite à aucun moment les faits qu’elle entend dénoncer.
 
Dès lors, cette publication traduit, tant dans sa forme que dans son fond, le malaise personnel et subjectif de son auteure, mais n’impute aucun fait précis à la société HUTCHINSON S.A. ni à ses dirigeants dont la vérité serait, sans difficulté, susceptible d’être rapportée.
 
Il sera noté, au surplus, que si tant est que la vidéo vienne dénoncer, dans des termes trop généraux pour être qualifiés de diffamatoires, l’appropriation des compétences des salariés par les dirigeants de l’entreprise, il n’est pas contraire à l’honneur et à la considération d’une société d’exploiter les compétences de ses salariés, lesquels ont été recrutés afin d’apporter leur expertise à leur employeur.
 
Dans ces conditions, D E sera renvoyée des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers particulier.
 
S’agissant des faits d’usurpation d’identité numérique
 
Sur l’exception tirée de l’extinction de l’action publique en raison de l’autorité de la chose jugée, à raison de l’altération des fiches « Google My Business »
 
La prévenue demande au tribunal, en application du principe non bis in idem et de l’article 6 du code de procédure pénale, de constater l’extinction publique au motif que le tribunal correctionnel de Paris, par jugement de relaxe en date du 30 novembre 2018, a déjà statué sur les faits d’usurpation des fiches Google My Business des filiales de la partie civile commis sur la même période.
 
Il sera relevé en l’espèce que le tribunal correctionnel de Paris a effectivement été saisi, par citation directe du 18 décembre 2017, de faits d’usurpation numérique commis à raison de la modification de fiches < Google My Business » des filiales de la société HUTCHINSON S.A., et que par jugement 30 novembre 2018, il a renvoyé D E des fins de cette poursuite (pièce n°6 en défense et D72).
 
Il convient dans ces conditions de vérifier si le tribunal, qui est saisi in rem, est amené, aux termes de l’ordonnance de renvoi, à statuer sur les mêmes faits que ceux ayant conduit à la relaxe de la prévenue.
 
Il ressort, d’une part, des termes de la citation directe du 18 décembre 2017 qu’D E était poursuivie pour avoir détourné « des images apparaissant sur la fiche d’identité de la première page GOOGLE des établissements de la société d’HUTCHINSON » en citant nommément les adresses URL des établissements suivants : Montargis, Research and Innovation center Montargis, […], […], […], Newfields, Z, […]). Toutefois, la partie civile n’a pas précisé, dans le dispositif de la citation, la période de prévention qu’elle entendait poursuivre au titre de l’usurpation d’identité numérique, le tribunal correctionnel ayant quant à lui statué sur des faits commis à partir < du 27 octobre 2017 au 12 novembre 2017 » (pièce non numérotée de la partie civile, p. 3). Par ailleurs, le constat joint à la procédure et servant de fondement aux poursuites de la société HUTCHINSON S.A. est daté du 8 décembre 2017 (pièce non numérotée de la partie civile).
 
S’agissant, d’autre part, de la présente procédure, la détermination des faits dont est saisi le tribunal est complexifiée par le fait que ni la plainte avec constitution de partie civile du 27 octobre 2017, ni l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel du 17 juin 2019, ni les conclusions de la partie civile déposées à l’audience ne mentionnent le nom des établissements dont l’altération des fiches «< Google My Business » est poursuivie, les constats d’huissiers produits (D6a, D7a), au surplus, ne permettant pas toujours d’identifier avec précision à quelle fiche se rapportent les captures d’écran reproduites, seule une adresse URL étant mentionnée.
 
Néanmoins, lorsque cette identification est possible, les noms d’établissement apparaissant comme ayant fait l’objet d’une altération dans ces constats ne sont pas identiques à ceux poursuivis dans le cadre de la citation directe datée du 13 décembre 2017, étant précisé, au surplus, que le tribunal est saisi aux termes de l’ordonnance de renvoi du 27 juin 2019, de faits commis « courant 2017 », ce qui est plus large que la période de prévention sur laquelle le tribunal correctionnel de Paris a statué le 30 novembre 2018.
 
Dans ces conditions, les faits poursuivis dans la citation directe datée du 13 décembre 2017 et ceux dont est saisi le tribunal aux termes de l’ordonnance de renvoi du 27 juin 2019 étant distincts, il n’y a pas lieu à constater l’extinction de l’action publique.
 
Sur la recevabilité des demandes formulées par la société partie civile à raison de l’altération des fiches « Google My Business ‘>
 
La prévenue soulève que la société partie civile n’avait pas qualité pour agir des chefs d’usurpation d’identité numérique, dès lors que les fiches dont l’altération est alléguée sont celles de ses filiales, qui sont titulaires d’une personnalité morale distincte.
 
En l’espèce, il sera relevé qu’au terme de l’information judiciaire, D E est renvoyée devant le tribunal correctionnel pour avoir «< usurpé l’identité de la société HUTCHINSON SA ou fait usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier (…) en amendant des fiches de présentations usurpées des établissements et filiales de la société HUTCHINSON SA ».
 
Il ressort ainsi clairement des termes de l’ordonnance de renvoi que la prévenue est poursuivie pour avoir usurpé l’identité de la société partie civile, et non celle de ses filiales, peu important, à ce titre, que l’acte d’usurpation poursuivi ait été commis sur les fiches < Google My Business » de ces dernières, dès lors que l’identité ou les données d’identité qui auraient été détournées sont ici celles de la partie civile.
 
En tout état de cause, et ainsi que l’a relevé le magistrat instructeur, ce dernier, s’agissant d’une infraction de droit commun, été saisi à la suite d’un réquisitoire introductif du ministère public, de sorte que l’absence de qualité pour agir de l’auteur de la plainte avec constitution de partie civile n’aurait pas pour effet d’invalider la poursuite.
 
Dès lors, il n’y a pas lieu de faire droit à l’exception d’irrecevabilité soulevée en défense.
 
Sur l’applicabilité de l’infraction d’usurpation d’identité numérique aux personnes morales
 
La prévenue a fait valoir, tant lors de l’information judiciaire qu’à l’audience, que l’infraction d’usurpation d’identité numérique prévue et réprimée à l’article 226-4-1 du code pénal ne protège que les seules personnes physiques, les personnes morales étant exclues du champ d’application de cet article, en raison de sa localisation au sein du code pénal dans une section relative aux atteintes à la vie privée et des termes des travaux parlementaires.
 
Le ministère public considère que l’identité d’une personne morale peut être usurpée, tout comme la société partie civile, qui relève par ailleurs que plusieurs juridictions ont déjà statué en ce sens et que cette solution ressort à la fois de la lettre de l’article et des travaux parlementaires.
 
Il convient de rappeler que l’article 226-4-1 du code pénal dispose que « Le fait
d’usurper l’identité d’un tiers ou de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende ».
 
Il revient au tribunal de déterminer si, au regard des dispositions ainsi reproduites, lues à la lumière des travaux parlementaires ayant conduit à son adoption, les personnes morales sont ou non exclues du champ de protection du délit d’usurpation d’identité numérique.
 
Il sera relevé que l’article sus-cité ne vise spécifiquement ni les personnes physiques ni les personnes morales, mais a recours à la terminologie générique de « tiers », susceptible de renvoyer à la fois à une personne physique et à une. personne morale et n’excluant, en tout état de cause, pas de manière évidente ces dernières de son champ d’application.
 
La prévenue fait valoir que cette exclusion découlerait de la localisation de l’article 226-4-1 au sein du code pénal et des travaux parlementaires, notamment des rapports de la commission des lois au Sénat et à l’Assemblée Nationale qui évoquent, dans un premier temps, la notion de « données à caractère personnel », notion renvoyant en droit de l’Union aux personnes physiques, et qui évoquent, s’agissant de « l’identité », les « nom », « surnom » et « pseudonyme », termes ne pouvant renvoyer qu’à une personne physique.
 
Une exclusion des personnes morales du champ d’application de l’article 226
 
4-1 du code pénal ne saurait cependant se déduire automatiquement du choix opéré par le législateur d’insérer cet article dans la section 1 du chapitre VI du titre II du livre II du code pénal, intitulée « de l’atteinte à l’intimité de la vie privée ».
 
En effet, outre que ce choix a été motivé, en partie, par la possibilité de réprimer la tentative de cette infraction (D128/27, rapport de la commission des lois du Sénat en première lecture), cette section comporte d’autres infractions dont peuvent se prévaloir les personnes morales. Il en va ainsi de l’infraction de violation de domicile, réprimée à l’article 226-4 du même code, précédant immédiatement l’article 226-4-1 dont l’application est contestée, dans la mesure où la jurisprudence estime qu’une personne morale peut « avoir un domicile » (Cass crim, 23 mai 1995, n°94-81.141).
 
Dès lors, pour apprécier si les personnes morales peuvent se prétendre victimes des infractions listées dans cette section du code pénal, il convient de s’attacher, non son intitulé général, mais à chacun des attributs de la personnalité dont les atteintes y sont réprimées, afin de déterminer si une personne morale peut, ou non, s’en dire titulaire.
 
Ainsi, en l’espèce, la question est celle de savoir si une personne morale dispose d’une identité ou de données permettant de l’identifier, d’une part, et
 
d’une « tranquillité », d’un « honneur » ou d’une « considération », d’autre part, susceptibles d’être protégées par les dispositions de l’article 226-4-1 du même code.
 
Il convient de relever à ce titre que, de la même manière qu’une personne physique dispose d’une identité ou de données permettant de l’identifier, tels ses noms et prénom, son image, son adresse ou son numéro de téléphone, une personne morale dispose, notamment, d’une dénomination sociale susceptible de faire l’objet d’un enregistrement au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS), ainsi que d’une marque ou d’un logo, susceptibles d’être enregistrés à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), d’un numéro d’identification au Système d’identification du répertoire des établissements (SIRET), d’un siège social, d’une ou plusieurs adresses postales et électroniques ou d’un numéro de téléphone.
 
Ces différents éléments sont constitutifs de son identité vis-à-vis des tiers ou permettent de l’identifier. De plus, une personne morale dispose d’un «honneur » ou d’une « considération » susceptible d’être atteints par la commission des agissements prévus à l’article 226-4-1 du code pénal.
 
Ainsi, une personne morale dispose d’une identité propre, susceptible d’être usurpée, d’éléments permettant de l’identifier, dont un tiers peut faire usage, ainsi que d’un honneur ou d’une considération, auxquels il peut être porté atteinte. Ces éléments permettent de conclure à l’applicabilité de l’infraction. d’identité numérique aux personnes morales.
 
Cette analyse n’est, du reste, aucunement remise en question par la lecture des travaux parlementaires.
 
Sur l’applicabilité de l’infraction d’usurpation d’identité numérique aux personnes morales
 
La prévenue a fait valoir, tant lors de l’information judiciaire qu’à l’audience, que l’infraction d’usurpation d’identité numérique prévue et réprimée à l’article 226-4-1 du code pénal ne protège que les seules personnes physiques, les personnes morales étant exclues du champ d’application de cet article, en raison de sa localisation au sein du code pénal dans une section relative aux atteintes à la vie privée et des termes des travaux parlementaires.
 
Le ministère public considère que l’identité d’une personne morale peut être usurpée, tout comme la société partie civile, qui relève par ailleurs que plusieurs juridictions ont déjà statué en ce sens et que cette solution ressort à la fois de la lettre de l’article et des travaux parlementaires.
 
Il convient de rappeler que l’article 226-4-1 du code pénal dispose que « Le fait
d’usurper l’identité d’un tiers ou de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende ».
 
Il revient au tribunal de déterminer si, au regard des dispositions ainsi reproduites, lues à la lumière des travaux parlementaires ayant conduit à son adoption, les personnes morales sont ou non exclues du champ de protection du délit d’usurpation d’identité numérique.
 
Il sera relevé que l’article sus-cité ne vise spécifiquement ni les personnes physiques ni les personnes morales, mais a recours à la terminologie générique de « tiers », susceptible de renvoyer à la fois à une personne physique et à une personne morale et n’excluant, en tout état de cause, pas de manière évidente ces dernières de son champ d’application.
 
La prévenue fait valoir que cette exclusion découlerait de la localisation de
 
l’article 226-4-1 au sein du code pénal et des travaux parlementaires, notamment des rapports de la commission des lois au Sénat et à l’Assemblée
 
Nationale qui évoquent, dans un premier temps, la notion de « données à caractère personnel », notion renvoyant en droit de l’Union aux personnes physiques, et qui évoquent, s’agissant de « l’identité », les « nom », « surnom » et « pseudonyme », termes ne pouvant renvoyer qu’à une personne physique.
 
Une exclusion des personnes morales du champ d’application de l’article 226 4-1 du code pénal ne saurait cependant se déduire automatiquement du choix opéré par le législateur d’insérer cet article dans la section 1 du chapitre VI du titre II du livre II du code pénal, intitulée « de l’atteinte à l’intimité de la vie privée ».
 
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17ème Ch.
C
 
En effet, si les personnes morales n’ont pas été au cœur des travaux préparatoires à la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, qui a créé le délit
 
d’usurpation d’identité numérique, il ressort cependant de leur lecture qu’elles n’en ont jamais été exclues, comme le démontrent les débats pour savoir s’il fallait élargir le texte aux faits de hameçonnage dont sont victimes les entreprises ou si l’infraction d’escroquerie permettait déjà de réprimer ces pratiques (rapport de la commission des lois du Sénat en 2° lecture, D108/33).
 
La volonté du législateur résulte par ailleurs de manière très claire des débats parlementaires autour de la proposition d’un amendement n°142 lors de
 
l’examen du texte en première séance à l’Assemblée Nationale, soutenu par le député J A en ces termes : « Notre amendement 142 vise, sinon à corriger une aberration, au moins à soulever une question : pourquoi la condamnation de l’usurpation d’identité ne vise-t-elle que les personnes physiques et pas les personnes modales ? Après certains discours entendus nuitamment, je pense que l’Assemblée aura le souci de combattre l’usurpation
 
d’identité des personnes morales citant notamment le hameçonnage, « nous souhaiterions donc compléter cet article 2 pour que les personnes morales puissent être poursuivies tout comme les personnes physiques ». Il convient de relever que dans sa réponse, H L, rapporteur du texte, rappelant qu’il n’y a pas lieu de distinguer là loi ne distingue pas, conclut à l’application de
 
l’infraction aux personnes morales : « Monsieur A, dans le silence de la loi, les dispositions que vous évoquez s’appliquent aussi bien aux personnes morales qu’aux personnes physiques. Votre amendement étant satisfait, je vous demande de le retirer » (D116/57).
 
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il est manifeste que le législateur a entendu protéger, par l’incrimination de l’usurpation d’identité numérique, tant les personnes physiques que les personnes morales.
 
Dès lors, le moyen tiré de l’inapplicabilité de l’article 226-4-1 du code pénal aux personnes morales sera rejeté.
 
Sur la caractérisation de l’infraction d’usurpation d’identité numérique
 
L’article 226-4-1 du code pénal incrimine le fait d’usurper l’identité d’un tiers ou de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération.
 
S’agissant des fiches < Google My Business »
 
La partie civile fait valoir que l’altération des fiches « Google My Business » des filiales et établissements de la société HUTCHINSON a pour effet de faire croire, « lors de l’étape décisive du référencement et de la redirection vers les contenus malfaisants qu’il s’agit de publications de la société HUTCHINSON, ce qui permet d’attirer l’attention de l’internaute », lequel, par l’impression visuelle créé par l’altération du logo et du nom de la société, est incité à croire qu’il s’agit d’une publication de la partie civile. Elle soutient que l’utilisation de données de toute nature permettant d’identifier la victime du délit prévu à l’article 226-4-1 du code pénal n’implique pas la démonstration de la volonté de se faire passer pour cette dernière, contrairement à l’usurpation d’identité prévue dans le même article.
 
La prévenue fait valoir que tant l’usurpation d’identité que l’utilisation de données d’identification nécessitent, pour être caractérisées, la volonté de se faire passer pour la victime de l’infraction. Elle souligne que tèl n’est pas le cas en l’espèce, la déformation humoristique de la dénomination sociale et du logo de la partie civile ne laissant pas de doute sur le fait que la société HUTCHINSON S.A. n’était pas l’auteur des propos qui y sont associés.
 
En l’espèce, les constats d’huissiers produits par la société partie civile. montrent qu’apparaissent, dans l’espace réservé à la publication de photographies au sein des fiches «Google My Business » de plusieurs établissements et filiales du groupe HUTCHINSON S.A. situés notamment à Telford, Levallois-Perret, Saint Brieuc, Paris, Hambourg, Reynosa, Renningen, une image où figurent en couleur rouge, au-dessus d’un lien vers une vidéo de la plateforme Youtube, le nom et le logo suivant :
 
HUETCHIENSHONTE*
 
Il sera rappelé que les dispositions de l’article 226-4-1 du code pénal répriment deux comportements de nature différente, l’usurpation de l’identité d’un tiers,
 
d’une part, et l’usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de
 
l’identifier, d’autre part, notion qui regroupe des éléments périphériques à
 
l’identité de la personne mais permettant son identification, tels que « le pseudonyme, le numéro de sécurité sociale, le numéro de compte bancaire, le numéro de téléphone ou l’adresse électronique » (circulaire du 28 juillet 2011 relative à la loi LOPPSI 2).
 
En l’espèce, sont ici reproduits, de manière détournée, la dénomination sociale et le logo de la société HUTCHINSON, éléments au cœur de l’identité de la personne morale qu’est la société partie civile, par lesquels elle est susceptible d’être connue ou reconnue par des tiers et consubstantiels de sa notoriété, et n’entrant dès lors pas dans la catégorie des «données de toute nature permettant » l’identification de la partie civile.
 
La question que doit trancher le tribunal est dès lors celle de savoir si, en insérant dans la page « Google my business » des établissements et filiales de la société HUTCHINSON S.A. une image comportant son logo et sa dénomination détournées, et renvoyant vers une vidéo publiée sur Youtube,
 
D E, à supposer qu’elle soit l’auteur de ces publications, a
 
visuelle créé par l’altération du logo et du nom de la société, est incité à croire qu’il s’agit d’une publication de la partie civile. Elle soutient que l’utilisation de données de toute nature permettant d’identifier la victime du délit prévu à l’article 226-4-1 du code pénal n’implique pas la démonstration de la volonté de se faire passer pour cette dernière, contrairement à l’usurpation d’identité prévue dans le même article.
 
La prévenue fait valoir que tant l’usurpation d’identité que l’utilisation de données d’identification nécessitent, pour être caractérisées, la volonté de se faire passer pour la victime de l’infraction. Elle souligne que tel n’est pas le cas en l’espèce, la déformation humoristique de la dénomination sociale et du logo de la partie civile ne laissant pas de doute sur le fait que la société HUTCHINSON S.A. n’était pas l’auteur des propos qui y sont associés.
 
En l’espèce, les constats d’huissiers produits par la société partie civile montrent qu’apparaissent, dans l’espace réservé à la publication de photographies au sein des fiches «Google My Business » de plusieurs établissements et filiales du groupe HUTCHINSON S.A. situés notamment à
 
Telford, Levallois-Perret, Saint Brieuc, Paris, Hambourg, Reynosa, Renningen, une image où figurent en couleur rouge, au-dessus d’un lien vers une vidéo de la plateforme Youtube, le nom et le logo suivant :
 
HUETCHIENSHONTE*
 
Il sera rappelé que les dispositions de l’article 226-4-1 du code pénal répriment deux comportements de nature différente, l’usurpation de l’identité d’un tiers, d’une part, et l’usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier, d’autre part, notion qui regroupe des éléments périphériques à l’identité de la personne mais permettant son identification, tels que « le pseudonyme, le numéro de sécurité sociale, le numéro de compte bancaire, le numéro de téléphone ou l’adresse électronique » (circulaire du 28 juillet 2011 relative à la loi LOPPSI 2).
 
En l’espèce, sont ici reproduits, de manière détournée, la dénomination sociale et le logo de la société HUTCHINSON, éléments au coeur de l’identité de la personne morale qu’est la société partie civile, par lesquels elle est susceptible
 
d’être connue ou reconnue par des tiers et consubstantiels de sa notoriété, et
 
n’entrant dès lors pas dans la catégorie des données de toute nature permettant » l’identification de la partie civile.
 
La question que doit trancher le tribunal est dès lors celle de savoir si, en insérant dans la page « Google my business » des établissements et filiales de la
 
société HUTCHINSON S.A. une image comportant son logo et sa dénomination détournées, et renvoyant vers une vidéo publiée sur Youtube,
 
D E, à supposer qu’elle soit l’auteur de ces publications, à usurpé l’identité de la société partie civile en se faisant passer pour elle, en vue de porter atteinte à son honneur ou à sa considération.
 
Or, il sera noté que la photographie ainsi publiée sur les pages « Google My Business » ne vient pas remplacer le nom des filiales et établissements de la société HUTCHINSON S.A., mais constitue uniquement l’une des photographies reproduites dans la fiche afin de l’illustrer. La mise en ligne de cette image, qui n’a pas modifié la dénomination sociale des établissements visés, ni leur adresse et coordonnées, n’a donc pas pour effet de créer une confusion chez le lecteur en faisant croire que ces pages seraient en réalité celles de la partie civile.
 
Dès lors, les faits d’usurpation d’identité ne sont pas constitués, étant précisé, au surplus, qu’aucune des pièces de la procédure ne démontre que la prévenue aurait fait usage de données de nature à identifier la société afin de procéder à la publication litigieuse par le truchement du service « Google my business ‘>.
 
Dans ces conditions, D E sera renvoyée des fins de la poursuite de ce chef.
 
S’agissant de la chaîne Youtube « HUTCHINSON SA »
 
La société partie civile fait valoir qu’D E a créé sur
 
Youtube une chaîne reprenant sa dénomination sociale, s’est fait, au moins dans un premier temps, passer pour elle, a attiré les internautes par le jeu du référencement, pour ensuite publier des contenus violents.
 
En l’espèce, il convient de relever que le constat d’huissier en date du 13 avril 2017 (D7-1 à D7-13) a matérialisé la création sur Youtube d’une chaîne intitulée « HUTCHINSON SA » et dont la photographie de profil s’inspire du logo de la partie civile en y ajoutant une tête de diable et une fourche :
 
Dans la catégorie « description », il est indiqué : « on peut calibrer l’échelle de qualité. Hutchinson SA montre ce qui est zéro. Drapeau rouge » (D7-10). ·
 
En créant une chaîne Youtube comprenant la dénomination sociale et le logo détourné de la société HUTCHINSON S.A., D E, qui ne conteste pas en être à l’origine, a reproduit des éléments relevant de son identité propre, et non de simples données permettant de l’identifier.
 
Le tribunal doit donc statuer sur la question de savoir si la prévenue a, ce faisant, usurpé l’identité de la société partie civile en se faisant passer pour elle, dans l’objectif de porter atteinte à son honneur et à sa considération.
 
Force est de constater que, si le nom de la chaîne Youtube litigieuse est identique à la dénomination sociale de la société partie civile, la photographie de profil, consubstantielle à l’identité de la chaîne et immédiatement accessible pour le spectateur dès qu’il voit une vidéo qui y est publiée, ne laisse aucun doute à celui-ci sur le caractère humoristique du compte qu’il est en train de consulter, dès lors qu’il s’agit d’une parodie évidente du logo de la société
HUTCHINSON S.A..
 
Il en va de même de la description du compte, qui insiste sur le fait que la société HUTCHINSON S.A. «montre ce qui est zero », et permet ainsi au lecteur de savoir qu’il ne consulte pas le compte institutionnel de la société partie civile, dédiée à sa communication, mais à l’inverse une chaîne parodique, venant la moquer ou la dénoncer.
 
Par ailleurs le contenu de la chaîne Youtube, à la fois par le titre de certaines vidéos («le savoir violer ») et par leur description (« hu muue »,
 
< boooooo »), permet au spectateur qui se rend sur celles-ci de savoir qu’il ne s’agit pas d’une publication officielle de la société HUTCHINSON S.A.
 
Dans ces conditions, D E sera renvoyée des fins de la poursuite de ce chef.
 
Sur la peine
 
Le casier judiciaire d’D E fait mention d’une condamnation, prononcée à son encontre par jugement du tribunal correctionnel de Paris le 30 novembre 2018 des chefs de diffamation publique envers un particulier.
 
Il convient néanmoins de relever que les faits objets de la présente procédure sont antérieurs à ceux pour lesquels elle a été condamnée le 30 novembre 2018.
 
Dans ces conditions, D E sera condamnée à la peine de 500 euros d’amende avec sursis.
 
2/ Sur l’action civile
 
Afin d’apprécier le préjudice moral de la société partie civile, il convient de prendre en compte la circonstance que les faits d’injure pour lesquels la prévenue est condamnée s’inscrivent dans une série de publications dont elle est à l’origine et dont la visée est, à tout le moins, de dénigrer ou de moquer la société partie civile, faits qui se sont répétés y compris après le dépôt de la plainte avec constitution de partie civile.
 
Au regard de ces éléments, D E sera condamnée à verser à la société HUTCHINSON S.A. la somme de 2.000 euros de dommage et intérêt en réparation de son préjudice moral.
 
La société partie civile sera déboutée de sa demande de suppression de la vidéo «Hutchinson SA centre de recherche », qui est sans objet dès lors qu’il ressort de la procédure (D41) que la plateforme Youtube a déjà procédé à la suppression sollicitée.
 
D E sera condamnée à verser à la société HUTCHINSON
 
SA la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
 
Aucun élément de la procédure ne commande d’ordonner l’exécution provisoire des dispositions civiles du jugement.
 
Enfin, il sera rappelé que les dépens restent, en matière pénale, à la charge de l’État.
 
PAR CES MOTIFS
 
Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement à l’égard d’ D E, prévenue et de la SA HUTCHINSON, partie civile poursuivante :
 
Sur l’action publique :
 
Renvoie D E des fins de la poursuite s’agissant de l’infraction d’injure publique envers un particulier commise à raison de la publication du logo de la société HUTCHINSON SA avec une tête de diable et une fourche ;
 
Déclare D E coupable de l’infraction d’injure publique envers un particulier à raison de la publication de la vidéo intitulée < Hutchinson SA Centre de recherche » le 7 avril 2017 et de ses commentaires introductifs
 
Renvoie D E des fins de la poursuite s’agissant de l’infraction de diffamation publique envers un particulier
 
Renvoie D E des fins de la poursuite s’agissant des infractions d’usurpation d’identité numérique
 
Condamne D E à la peine d’amende délictuelle de cinq. cents euros (500 €)
 
Vu les articles 132-29 à 132-34 du code pénal;
 
Dit qu’il sera sursis totalement à l’exécution de cette peine, dans les conditions prévues par ces articles;
 
L’avertissement prévu à l’article 132-29 du code pénal n’a pu être donné à l’intéressé absent lors du prononcé ;
 
En application de l’article 1018 A du code général des impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 127 euros dont est redevable D E
 
La condamnée est informée qu’en cas de paiement de l’amende et du droit fixe de procédure dans le délai d’un mois à compter de la date où il a eu connaissance du jugement, il bénéficie d’une diminution de 20% sur la totalité de la somme à payer.
 
Sur l’action civile:
 
Reçoit la société HUTCHINSON S.A. en sa constitution de partie civile;
 
Condamne D E à verser à la société HUTCHINSON S.A. la somme de deux mille euros (2.000 €) de dommage et intérêt en réparation de son préjudice moral;
 
Condamne D E à verser à la société HUTCHINSON S.A. la somme de deux mille euros (2.000 €) euros sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;
 
Déboute la partie civile du surplus de ses demandes ;
 
Informe le prévenu par le présent jugement de la possibilité pour la partie civile, non éligible à la CIVI, de saisir le SARVI, s’il ne procède pas au paiement des dommages intérêts auxquels elle a été condamnée dans le délai de 2 mois à compter du jour où la décision est devenue définitive;
 
et le présent jugement ayant été signé par la présidente et le greffier.
 
LE GREFFIER
LA PRESIDENTE
 

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